ESPAGNE (Senado)

1. Les incompatibilités

• Nature et étendue

Les incompatibilités avec le mandat sénatorial concernent aussi bien, en Espagne, les fonctions publiques que les fonctions privées. L'article 157 de la loi organique n° 5 du 19 juin 1985 sur le régime électoral général précise en effet que le mandat sénatorial est exclusif de toute autre activité et qu'il est, de ce fait, incompatible avec l'occupation, directe ou indirecte, de tout poste, profession ou activité, publique ou privé, à compte propre ou étranger, rétribué par appointement, salaire, droits ou honoraires de quelle que forme que ce soit.

Les articles 70 de la constitution, 6 et 154 et 155 de la loi organique n° 5 du 19 juin 1985 disposent, en premier lieu, qu'un certain nombre de motifs d'inéligibilité constituent aussi des motifs d'incompatibilité entre une fonction et le mandat sénatorial.

L'article 70 de la constitution espagnole prévoit que la loi détermine les incompatibilités qui concernent notamment :

- la fonction de membre du Tribunal constitutionnel ;

- les hautes charges de l'administration de l'État ;

- le défenseur du peuple, équivalent du médiateur de la République ;

- les magistrats du siège et ceux du parquet ;

- les militaires professionnels et les membres des forces de sécurité et de police ;

- et les membres des conseils électoraux.

Les articles 6 et 155 de la loi organique n° 5 du 19 juin 1985 ont ajouté aux nombre des personnes dont les fonctions sont incompatibles avec le mandat sénatorial :

- les membres de la famille royale et leurs conjoints ;

- les présidents du Tribunal constitutionnel, du Tribunal suprême, équivalent de la Cour de Cassation, du Conseil d'État et de la Cour des Comptes ;

- les membres du conseil général du pouvoir judiciaire, les membres titulaires du Conseil d'État, les conseillers à la Cour des Comptes et les membres du conseil chargé de coordonner les projets de planification économique en vertu de l'article 131 de la constitution ;

- les adjoints du défenseur du peuple ;

- les sous-secrétaires, secrétaires généraux, directeurs généraux des départements ministériels et leurs équivalents (directeurs de cabinet des ministres et secrétaires d'État...) ;

- les chefs de mission accrédités auprès d'un État étranger et d'un organisme international ;

- les délégués du Gouvernement dans les autonomies, les gouverneurs et leurs équivalents ;

- le directeur général de la radio-télévision espagnole et les directeurs des sociétés de ce groupe public ;

- les présidents, directeurs et assimilés des établissements publics à compétence nationale et les commissaires du gouvernement qui les contrôlent ;

- les présidents et directeurs généraux des organismes de sécurité sociale à compétence nationale ;

- le directeur du bureau chargé de l'établissement des listes électorales ;

- le gouverneur et le sous-gouverneur de la Banque d'Espagne et les présidents et directeurs des institutions de crédit publiques ;

- le président, les conseillers et le secrétaire général du Conseil général de Sécurité nucléaire.

Sont également incompatibles avec les fonctions de sénateur dans une circonscription donnée les fonctions de :

- ministre du gouvernement d'une entité locale dont relève la circonscription ;

- président, directeur et assimilé des établissements publics locaux compétents dans la circonscription ;

- délégués territoriaux de la radio-télévision espagnole et directeurs des sociétés de télévisions qui dépendent des communautés autonomes ;

- présidents et directeurs des organismes décentralisés de sécurité sociale compétents dans la circonscription ;

- secrétaires généraux de l'équivalent des services qui représentent l'État dans les autonomies ;

- et délégués territoriaux du bureau chargé de l'établissement des listes électorales.

En vertu de l'article 154 de la loi organique précitée, constituent en deuxième lieu, des fonctions incompatibles avec le mandat sénatorial sans être un motif d'inéligibilité celles conférées ou rémunérées par un État étranger ainsi que celles de :

- président de l'équivalent de l'Autorité de régulation de la concurrence ;

- membre du conseil d'administration de la radio-télévision espagnole ;

- membre du cabinet du Premier ministre, d'un secrétaire d'État ou d'un ministre ;

- commissaires du gouvernement dans les ports autonomes, les organismes gestionnaires de l'eau et les sociétés concessionnaires des autoroutes à péage ;

- présidents, directeurs généraux, conseillers et administrateurs des entités publiques, monopoles d'État, entreprises à participation publique majoritaire, directe ou indirecte, quelle que soit leur forme et des caisses d'épargne publiques.

En vertu de l'article 156 de la loi organique, les sénateurs ne peuvent faire partie que d'au plus deux conseils d'administration d'entités publiques ou d'entreprises à participation majoritairement publiques si leur désignation relève du Sénat. Ils ne peuvent percevoir que des indemnités qui correspondent à ces fonctions et qui ne dépassent pas celles prévues par la loi pour l'administration. Les montants supérieurs à ces plafonds sont reversés au Trésor public.

La seule exception à cette interdiction générale concerne les professeurs d'université qui peuvent poursuivre leurs recherches et leur enseignement dans l'établissement où ils exercent leur activité, sans que celle-ci puisse concerner la direction ou le contrôle des services de cet établissement. Ils perçoivent à ce titre les indemnités correspondantes à ces activités.

De ce fait, les sénateurs ne peuvent percevoir, conformément à l'article 158 de la même loi, plus d'une rémunération d'origine publique et pas davantage de pension de retraite. Ils retrouvent ce droit au terme de leur mandat.

L'article 159 de la loi organique précitée souligne que, conformément à l'interdiction générale de cumul d'activités privées prévue par l'article 157 du même texte, le mandat sénatorial est incompatible avec :

- les activités de gestion, de défense, direction ou délivrance de consultations pour tout organisme du secteur public d'État, d'une autonomie ou d'une collectivité locale au sujet de faits dont ils ont à connaître, qui ont directement trait au fonctionnement d'un service public, à l'obtention d'une subvention ou à la délivrance d'une garantie publiques, hormis le cas où ces subventions ou garanties sont automatiquement obtenues en vertu des lois en vigueur ;

- les activités d'entrepreneur, maître d'oeuvre, fournisseur de services ou de fournitures et la conclusion de tout contrat dont les prestations sont payées au moyen de fonds émanant d'organismes ou d'entreprises de l'État, des autonomies ou des collectivités locales, ainsi que l'exercice de fonctions de direction, de représentation ou de conseil dans des entreprises qui exercent ces activités ;

- l'exercice de fonctions de direction, représentation, conseil ou prestation de services dans des entreprises qui gèrent un monopole public ;

- la prestation de services de conseil ou de toute autre nature à titre individuel ou de façon partagée, pour des entreprises du secteur public de l'État, des autonomies ou des collectivités locales ;

- l'acquisition en tout ou partie postérieure à l'élection, d'une participation supérieure à 10 %, sauf en cas d'héritage, dans des entreprises qui fournissent des biens ou des services payés au moyen de fonds provenant d'organismes ou d'entreprises du secteur public de l'État, des autonomies ou des collectivités locales ;

- les fonctions de président du conseil d'administration, de conseiller, d'administrateur, de directeur général, de gérant ou toute autre équivalente, dans des établissements de crédit ou d'assurances qui font publiquement appel public à l'épargne ou accordent des crédits ;

- et toute autre activité qui contreviendrait au caractère exclusif du mandat parlementaire.

Ne sont exclus des incompatibilités que :

- l'administration du patrimoine personnel dès lors qu'elle concerne des entreprises précitées dans lesquelles le sénateur et sa famille détiennent moins de 10 % du capital ;

- la production ou la création littéraire, scientifique, artistique ou technique ;

- et les activités qui seront autorisées par la commission compétente du Sénat à la suite d'une demande de l'intéressé, sous réserve qu'elles ne contreviennent pas aux interdictions précitées.

• Contrôle et sanctions

Les incompatibilités entre le mandat sénatorial et les fonctions précitées sont appréciées par la commission des incompatibilités constituée au Sénat. Celle-ci intervient aussi bien au début de la législature qu'en cours de mandat.

Si elle estime qu'un sénateur encourt une incompatibilité, elle émet avis soumis au Sénat qui statue sur l'existence de l'incompatibilité en séance plénière. Le sénateur concerné, qui peut prendre la parole à cette occasion, ne participe pas au vote.

Si le Sénat estime que l'incompatibilité est avérée, le sénateur doit, dans les huit jours suivant la notification de la décision de l'assemblée, opter pour la fonction incompatible ou pour son mandat parlementaire. À défaut, il est présumé renoncer à ce mandat.

2. Les déclarations de patrimoine et déclarations d'intérêts

En vertu de l'article 160 de la même loi organique, les sénateurs sont tenus, lors de leur entrée en fonction et au terme de leur mandat, de déclarer les activités qui peuvent relever d'éventuelles incompatibilités dont ils peuvent tirer des revenus. La déclaration est établie sur la base d'un formulaire approuvé conjointement par les bureaux du Congrès des députés et du Sénat. Les déclarations sont réunies dans un registre des intérêts, établi sous l'autorité du président du Sénat.

Ce registre, rendu public par voie électronique sauf en ce qui concerne les biens patrimoniaux des sénateurs comprend, outre un document de synthèse, les déclarations des sénateurs et leurs mises à jour. À l'issue du mandat parlementaire, il ne peut être consulté qu'après autorisation du bureau du Sénat.

Le contrôle et la sanction du non respect des règles applicables aux déclarations du patrimoine relèvent de la commission des incompatibilités du Sénat puis du Sénat lui-même, dans les mêmes conditions que pour les autres incompatibilités (avis de la commission suivi d'un examen en séance plénière par le Sénat pour savoir si l'incompatibilité est avérée, délai de huit jours ouvert au sénateur pour choisir entre mandat et activité incompatible et, à défaut, déchéance du mandat parlementaire).

3. Les codes de conduite

Il n'existe pas de code de conduite.

PRÉVENTION, CONTRÔLE ET SANCTIONS DU CONFLIT D'INTÉRÊTS

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