II. LA PRINCIPALE MESURE : RENFORCER LE POUVOIR DÉCISIONNEL DES CONSEILS GÉNÉRAUX EN CONTREPARTIE DE CHARGES SUPPLÉMENTAIRES

A. LE CONTRÔLE RENFORCÉ DU CONSEIL GÉNÉRAL SUR LA GESTION DU SDIS

Les députés ont fait le choix de renforcer l'influence du conseil général sur la gestion des établissements publics d'incendie et de secours, considérant à juste titre que l'assemblée départementale constituait l'autorité politique la plus à même de veiller à une gestion rationnelle des établissements publics.

La démarche de l'Assemblée nationale repose sur deux types de mesures :

- le renforcement du poids du conseil général dans le conseil d'administration du SDIS ;

- la demande d'un avis de l'assemblée départementale sur les principales décisions prises par le conseil d'administration.

1. L'avis du conseil général requis pour les décisions les plus importantes (article 43)

L'article 43 prévoit un avis conforme de l'assemblée départementale pour l'élaboration et la révision du schéma départemental d'analyse et de couverture des risques (article L. 1424-7 du code général des collectivités territoriales).

Il prévoit un simple avis s'agissant du plan d'équipement du SDIS (article L. 1424-12 du même code).

Ces deux documents constituent la principale source de dépense dont le SDIS a la maîtrise.

Votre commission vous soumet un amendement portant article additionnel après l'article 43 autorisant par ailleurs les SDIS à passer avec le conseil général toute convention ayant trait à la gestion non opérationnelle du service d'incendie et de secours. Ainsi, l'implication du conseil général dans la gestion du SDIS pourrait également passer par une mise en commun des moyens et des savoir faire.

2. Donner aux conseils généraux la majorité des sièges dans les conseils d'administration des SDIS (article 44)

Le droit actuel

L'article L. 1424-24 du code général des collectivités territoriales définit la composition des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours et précise les modalités d'élection des représentants des différentes catégories de collectivités.

Ainsi, les conseils d'administration des SDIS sont composés de vingt-deux membres, sauf pour les départements de plus de 900.000 habitants comptant au moins une commune et un EPCI dont la contribution au SDIS représente plus de 30 % de ses recettes : dans ce dernier cas, l'effectif du conseil d'administration est porté à trente membres.

Les représentants du département sont élus par le conseil général en son sein, tandis que les représentants des EPCI compétents et des maires des communes qui ne sont pas membres de ces EPCI sont élus au scrutin proportionnel au plus fort reste dans leur collège électoral respectif. Les adjoints au maire peuvent être élus au conseil d'administration du SDIS dans les départements d'outre-mer.

Le dispositif proposé

Le texte proposé par le I de l'article 44 pour le 1° de l'article L. 1424-24 du code général des collectivités territoriales prévoit que le conseil d'administration comprend toujours vingt-deux membres mais que le nombre de sièges attribués au département est de quatorze au moins , tandis que quatre sièges au moins sont attribués aux communes et établissements publics de coopération intercommunale . Sous le bénéfice de ces dispositions, les sièges sont répartis proportionnellement aux contributions respectives du département, d'une part, et des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, d'autre part.

Le projet de loi initial prévoyait que le nombre de sièges attribués au département serait de douze, soit la majorité plus un siège. Sur proposition de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a souhaité porter les effectifs des représentants des départements à quatorze au moins (soit 64 % des sièges), afin d'affirmer la vocation du conseil général à devenir le « pilote » du SDIS.

Ces dispositions constituent la contrepartie de celles de l'article 46 qui prévoient que l'augmentation du coût des SDIS, à compter de la date de réalisation des transferts des matériels et des personnels, sera à la charge des départements. Lors de l'examen de l'article 44 à l'Assemblée nationale, le rapporteur au nom de la commission des lois indiquait d'ailleurs : « Il est en effet proposé ici de tenir compte, dans la composition du conseil d'administration, de la part que va désormais prendre le département dans leur financement » 5 ( * ) .

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, indiquait pour sa part que « compte tenu de la nécessaire augmentation de l'implication des départements dans le budget des services départementaux d'incendie et de secours, il convient de permettre au conseil général de remplir une fonction de régulateur financier et de renforcer son rôle au sein des SDIS pour l'attribution au département de la majorité des sièges au conseil d'administration » 6 ( * ) .

Le renforcement du poids du conseil général est surtout justifié pour des raisons tenant à l'efficacité du fonctionnement des SDIS. Sa mise en oeuvre pourra cependant poser des problèmes de légitimité. En effet, si le dispositif proposé accorde au conseil général la majorité des sièges au conseil d'administration, la plupart des conseils généraux participent aujourd'hui pour moins de 50 % au financement des SDIS.

D'après les contributions prévisionnelles des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale aux budgets primitifs 2001 des SDIS, 73 % des départements ont une contribution inférieure à 50 % du total des contributions, quatre d'entre eux contribuent à hauteur de 50 % et dix-neuf ont une contribution supérieure à 50 % du total des contributions. Les écarts entre la part des contributions des départements sont considérables puisque l'un d'entre eux n'assure le financement du SDIS qu'à hauteur de 12,27 % du montant total des contributions, tandis qu'un autre finance 99,90 % du total des contributions au budget du SDIS.

Contributions prévisionnelles des départements au budget primitif 2001 des SDIS

0-10 %

-

10-20 %

Bas-Rhin - Loiret - Nord - Savoie- Yonne

20-30 %

Ardennes - Ariège - Calvados - Charente - Côte d'Or - Finistère - Haute-Loire - Haute-Vienne - Hérault - Ille-et-Vilaine - Jura - Loire - Lozère - Maine et Loire - Manche - Marne - Meurthe et Moselle - Oise - Saône-et-Loire - Tarn-et-Garonne - Territoire de Belfort

30-40 %

Aisne - Allier - Alpes-maritimes - Aude - Aveyron - Bouches-du-Rhône - Cantal - Corrèze - Côte d'Armor - Eure et Loire - Gers - Haut-Rhin - Haute-Marne - Haute-Savoie - Hautes-Alpes - Hautes-Pyrénées - Loire Atlantique - Lot - Lot-et-Garonne - Martinique - Mayenne - Meuse - Morbihan - Pyrénées-Orientales - Sarthe - Somme - Tarn - Var - Vienne

40-50 %

Alpes de Haute-provence - Aube - Charente-Maritime - Drôme - Eure - Gard - Gironde - Haute-Corse - Isère - Loiret - Cher - Moselle - Pyrénées-atlantiques - Seine-Maritime - Vaucluse - Vosges Yvelines -

50-60 %

Ardèche - Cher - Creuse - Deux-Sèvres - Dordogne - Guadeloupe - Haute-Garonne - Indre - Indre et Loire - La Réunion - Orne - Puy-de-Dôme - Vendée

60-70 %

Corse-du-Sud - Haute-Saône - Landes - Nièvre - Rhône

70-80 %

Ain - Doubs - Guyane - Pas-de-Calais - Val d'Oise

80-90 %

Seine-et-Marne

90-100 %

Essonne

Source : direction de la défense et de la sécurité civiles .

Par ailleurs, l'application des dispositions du présent projet de loi ne conduira pas nécessairement à faire coïncider la majorité au conseil général avec la majorité au conseil d'administration . En effet, le texte proposé pour le 2° de l'article L. 1424-24 dispose que « les représentants du département sont élus par le conseil départemental en son sein au scrutin proportionnel au plus fort reste ». Les majorités au sein des conseils généraux étant souvent très courtes, il est envisageable de voir la majorité du conseil général n'occuper que huit des quatorze sièges attribués au département, l'opposition départementale et les représentants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale étant alors en mesure de s'opposer à la mise en oeuvre de la politique souhaitée par la majorité de l'assemblée départementale. Par conséquent, le système proposé par le présent projet de loi n'écarte nullement les risques de blocage au sein du conseil d'administration du SDIS.

Le droit actuel prévoit que « les représentants du département sont élus par le conseil général en son sein ». Si le conseil général est libre de déterminer comme il le souhaite les modalités des élections de ses représentants, il prévoit généralement une représentation de l'opposition politique. Il est légitime que, pour la représentation de l'assemblée départementale au sein des organismes extérieurs à elle, les différentes sensibilités politiques puissent être représentées. Par conséquent, les dispositions du présent projet de loi prévoyant une élection des représentants du département au scrutin à la proportionnelle au plus fort reste, en rendant obligatoire la représentation de l'opposition départementale sur la base de sa présence au sein du conseil général, ne bouleversent pas autant qu'il pourrait y paraître la situation existante dans un grand nombre de départements.

La position de votre commission

L'équilibre atteint en première lecture à l'Assemblée nationale en matière de répartition des sièges au conseil d'administration permet de concilier l'objectif d'efficacité et la nécessité d'assurer à la fois le pluralisme politique et la représentation des différents contributeurs.

Votre commission vous propose cependant un amendement prévoyant qu'un siège soit réservé aux communes, parmi les quatre sièges attribués aux représentants des communes et des établissements publics de coopération intercommunale. Il s'agit de garantir la représentation des communes qui ne sont pas membres d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'incendie et de secours.

Votre commission vous soumet également un amendement visant à rétablir une disposition de l'article L.1424-24 actuellement en vigueur, selon laquelle « le nombre de suffrages dont dispose chaque maire ou chaque adjoint au maire d'une part, chaque président d'établissement public, d'autre part, au sein de leur collège électoral respectif est déterminé par le montant de la contribution de la commune ou de l'établissement public, à due proportion du total des contributions des communes d'une part, et des établissements publics de coopération intercommunale, d'autre part ». S'il a pu être qualifié de « censitaire », un tel système garantit à ceux qui assument la plus grande part du financement des SDIS d'être représentés de manière satisfaisante au conseil d'administration.

* 5 In Journal Officiel Débats Assemblée nationale, 2 ème séance du 20 juin 2001, p. 4638.

* 6 In Journal Officiel Débats Assemblée nationale, 2 ème séance du 20 juin 2001, p. 4639.

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