EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHE

Article additionnel après l'article 94
(art. L. 57-1 nouveau du code des pensions civiles et militaires de retraite)
Remise à plat et plafonnement du régime de l'indemnité temporaire majorant la retraite des fonctionnaires de l'État
dans certains territoires d'outre-mer

Objet : Cet article additionnel propose de plafonner à compter du 1 er janvier 2006, pour les seuls nouveaux bénéficiaires, le bénéfice de la majoration de pension dénommée indemnité temporaire.

Les retraités, titulaires d'une pension civile ou militaire de l'Etat, résidant à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna bénéficient, depuis les décrets n° 52-1050 du 10 septembre 1952 et n° 54-1293 du 24 décembre 1954, d'une majoration de pension variant entre 35 % et 75 %.

Réunion

35 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

40 %

Mayotte

35 %

Nouvelle-Calédonie

75 %

Polynésie française

75 %

Wallis et Futuna

75 %

Les bénéficiaires de cette mesure sont les fonctionnaires de l'Etat en poste dans l'une des collectivités concernées avant la liquidation de leur retraite et qui choisissent d'y demeurer. Mais elle s'applique aussi aux fonctionnaires métropolitains qui s'y installent ou s'y font domicilier pour leur retraite.

Les revenus provenant de cette indemnité bénéficient en outre des régimes fiscaux particuliers applicables outre-mer. Ainsi, à l'exception de la Réunion, collectivité départementale où elle est imposée selon le droit commun, la majoration n'est soumise ni à la retenue pour la CSG, ni à celle qui est effectuée pour la CRDS et elle n'est pas soumise à l'impôt sur le revenu, mais à certaines dispositions spécifiques qui varient selon le territoire. La seule condition posée par le décret n° 52-1050 du 10 septembre 1952 porte sur les conditions de résidence , qui doivent être « au moins équivalentes à celles imposées aux fonctionnaires en activité de service » .

Dans son rapport particulier sur les pensions des fonctionnaires civils de l'État d'avril 2003, la Cour des comptes souligne le caractère « quasi impossible » du contrôle de ce dispositif et procède à une analyse générale très critique de celui-ci. Elle en conclut qu' « il importe de mettre fin à l'attribution de cette indemnité injustifiée, d'un montant exorbitant et sans le moindre équivalent dans les autres régimes de retraite » .

Les indemnités versées à ces pensionnés outre-mer représentent, pour l'État, un coût élevé et croissant. Cette croissance s'explique, selon la Cour des comptes, « par la meilleure information diffusée sur le sujet par les services de retraites des administrations, la publicité donnée à la mesure par certaines émissions télévisées et par la baisse générale des tarifs aériens » .

Impact et coût de l'indemnité temporaire

Année

Nombre de pensions abondées de l'indemnité temporaire

Montant de l'indemnité temporaire

1995

17.329

120,0 M€

1999

21.019

141,3 M€

2000

21.539

147,6 M€

2001

22.529

158,8 M€

2004

24.699

211,4 M€

Le nombre des bénéficiaires s'est accru de 142% en seulement neuf ans entre 1995 et 2004. Le montant de l'indemnité dont ils bénéficient, en plus de leur pension liquidée dans des conditions normales, atteint désormais en moyenne 8.560 euros par an. Il s'agit de niveaux très élevés, voire, comme le souligne la Cour des comptes, « totalement exorbitants pour certains territoires » .

Montant moyen de l'indemnité temporaire servi en 2000

Pension civile

Pension militaire

Nouvelle-Calédonie

13.980 €

10.900 €

Polynésie française

12.070 €

11.460 €

Mayotte

5.770 €

3.760 €

Saint-Pierre-et-Miquelon

5.750 €

5.270 €

Réunion

620 €

Source : Cour des comptes

Votre commission estime que l'existence même du régime de « l'indemnité temporaire » est triplement inéquitable :

- vis-à-vis tout d'abord de tous les assurés sociaux qui se voient appliquer la réforme des retraites de 2003 ;

- vis-à-vis ensuite des assurés sociaux du secteur privé qui n'y ont pas accès par définition ;

- enfin à l'égard des fonctionnaires de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane qui, eux non plus, n'en bénéficient pas.

Votre commission considère au surplus que l'existence de fraudes pratiquées par des métropolitains se faisant domicilier fictivement dans ces territoires, s'oppose non seulement en tout point à la réforme des retraites, mais apparaît aussi et surtout attentatoire à l'image même de l'outre-mer.

Face à ces coûts croissants supportés par la collectivité, et au caractère injustifié de cette mesure, dans un contexte où la préservation des régimes de retraite impose d'importants efforts à tous les assurés sociaux, le présent article additionnel propose une remise à plat de cette disposition :

- en modifiant les conditions d'attribution pour les nouveaux bénéficiaires à compter du 1 er janvier 2006, sans remettre en cause la situation des personnes qui en bénéficient actuellement ;

- en n'ouvrant l'accès à ce dispositif qu'aux fonctionnaires civils et militaires ayant passé dans ces territoires les cinq dernières années précédant la liquidation de leur retraite ;

- et en ramenant au taux unique de 20 % du principal de la pension le plafond de cet avantage. Ce taux correspond à l'estimation de l'écart de prix entre la métropole et l'outre-mer qui a été établie en 2004 par l'inspection générale de l'Institut national des études statistiques et économiques (Insee).

En définitive, par cette démarche, votre commission entend répondre aux préoccupations qu'elle avait exprimées à l'occasion de l'audition organisée conjointement avec la commission des Finances, le 6 avril 2005, de Brigitte Girardin, alors ministre de l'outre-mer.

Votre commission ne se prononce donc pas en faveur de la suppression totale et brutale de ce dispositif, mais propose plutôt une remise à plat progressive reposant sur la fermeture de cet avantage pour l'avenir. Elle souhaite vivement que les économies réalisées grâce à cette mesure puissent dégager des moyens nouveaux pour satisfaire les besoins sociaux de l'outre-mer qui sont réels.

Votre commission vous propose d'insérer par voie d'amendement cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

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