C. L'ÉVALUATION DES PREMIERS PPP SOULIGNE LA NÉCESSITÉ D'UN RÉFÉRENTIEL COMMUN

1. Des contrôles des premiers PPP peu encourageants

La Cour des comptes, dans son rapport public 2008, a étudié deux partenariats public-privé 19 ( * ) , qu'elle préfère qualifier de « montages innovants » plutôt que de PPP au sens strict. Selon elle, un contrat de partenariat public-privé est avant tout une prestation globale, ce que n'étaient pas les deux contrats étudiés, dont elle regrette qu'ils n'aient fait l'objet d'aucune évaluation préalable.

Mme Claire Bazy-Malaurie, rapporteur général de la Cour des comptes, lors de sa participation à la table-ronde du 19 mars 2008 relative aux enjeux budgétaires et comptables des PPP, a ainsi considéré que « le montage lié au centre des archives du ministère des affaires étrangères 20 ( * ) traduisait, avant tout, un choix de nature budgétaire, lié à l'absence de crédits ». Selon la Cour des comptes, dans son rapport public pour 2008, « la formule juridique et financière retenue pour en assurer la réalisation, à savoir une autorisation d'occupation temporaire du domaine public (AOT) assortie d'une convention de location, ne manquera pas d'avoir, à terme, de lourdes conséquences sur les comptes de l'Etat, tout en évitant dans l'immédiat de dégrader le déficit budgétaire et la dette publique au regard des critères de Maastricht ». Or, l'Etat devra verser au prestataire privé un loyer annuel pendant 28,17 années (soit 30 ans moins la période de construction). Au total, selon la Cour des comptes, le cumul des loyers acquittés par l'administration sera très supérieur, de 41 % , au coût d'un financement sur crédits budgétaires du même projet.

S'agissant de la location avec option d'achat (LOA) de l'immeuble abritant le pôle « renseignement » du ministère de l'intérieur, le coût de cette opération pour l'Etat, quelle que soit la méthode retenue pour le calculer, serait, selon la Cour des comptes, particulièrement élevé : le total des loyers (hors taxe) est de 366,2 millions d'euros, y compris le coût de la levée de l'option d'achat, supposée intervenir le 31 décembre 2026, pour un investissement de 179,9 millions d'euros. Selon le rapport précité, « en faisant payer l'immeuble par un tiers, c'est une charge supplémentaire d'environ 121,5 millions d'euros que l'Etat devra supporter au titre des intérêts » 21 ( * ) en l'absence de crédits de paiement pour le payer comptant.

Ces deux exemples, même s'ils ne sont pas formellement des contrats de partenariat, peuvent nourrir les arguments des détracteurs des PPP. Aussi font-ils rappeler que ces opérations présentent deux défauts majeurs qui témoignent de mauvaises décisions de gestion plutôt que de défauts intrinsèques aux PPP :

- d'une part, le recours à ces montages innovants a été clairement effectué pour éluder la contrainte budgétaire liée à l'absence de crédits de paiement , et sans en supporter les conséquences en termes d'inscription dans le déficit budgétaire et la dette publique ;

- d'autre part, Mme Claire Bazy-Malaurie, rapporteur général de la Cour des comptes, lors de sa participation à la table-ronde du 19 mars 2008 relative aux enjeux budgétaires et comptables des PPP, a souligné que la Cour des comptes n'avait « jamais pu vérifier les hypothèses financières du contrat, s'agissant par exemple de l'indice de la construction et du taux d'actualisation retenu ». Le principe de l'évaluation financière préalable des contrats, certes non obligatoire s'agissant des LOA et AOT, contrairement aux règles applicables aux contrats de partenariat, mais qui est de bonne gestion quel que soit le mode de réalisation de l'investissement public, n'a pas été respecté .

* 19 La réalisation du centre des archives diplomatiques du Quai d'Orsay à La Courneuve et celle de l'immeuble abritant le « pôle renseignement » du ministère de l'intérieur à Levallois-Perret, tous deux confiés à la société ICADE, filiale de la Caisse des dépôts et consignations.

* 20 Une autorisation d'occupation temporaire (AOT).

* 21 Dans sa réponse à la Cour des comptes, le ministère de l'intérieur souligne que le dispositif de location avec option d'achat « avait en l'espèce bénéficié d'une autorisation parlementaire formelle puisque cette opération figurait dans le projet de loi de finances pour 2006 qui avait prévu les autorisations d'engagement nécessaires ». Ceci justifie une surveillance accrue des autorisations d'engagement dont l'examen est aujourd'hui moindre, compte tenu du mode d'élaboration de la norme de dépense, que les crédits de paiement.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page