II. LA MISE EN oeUVRE DU PLAN CANCER II

Le plan cancer II, qui couvre la période 2009-2013, a été présenté le 2 novembre dernier à Marseille par le Président de la République. Son discours prolonge l'engagement du Président Jacques Chirac contre cette maladie, engagement qui s'est traduit d'abord par la signature de la « Charte de Paris contre le cancer » le 4 février 2000, puis par l'annonce du premier plan cancer, le 24 mars 2003, pour une durée de cinq ans.

Cette continuité dans l'impulsion politique au plus haut niveau se comprend aisément. Comme le souligne le Président de la République : « La lutte contre le cancer, c'est un enjeu majeur pour la France. Chaque année, on estime à 350 000 le nombre de nouveaux cas de cancer en France. Les cancers sont devenus depuis 2004 la première cause de mortalité. Chacun d'entre nous est touché, soit directement dans sa famille, soit dans son cercle d'amis. On ne peut pas rester indifférent. C'est une cause nationale et c'est une cause sur laquelle le chef de l'Etat doit s'engager. Ce n'est pas un choix à mes yeux, c'est un devoir » . Pour faire face aux enjeux de santé publique liés au cancer, le plan est doté de 2 milliards d'euros, dont près de 750 millions de mesures nouvelles sur l'ensemble de sa durée.

Dépenses nouvelles du plan cancer II

en euros

Recherche

95 287 000

Observation

12 241 000

Prévention - Dépistage

177 359 000

Soins

402 772 000

Vivre pendant et après un cancer

45 000 000

TOTAL

732 659 000

Source : INCa

Le plan cancer II se propose d'achever la mise en place d'une véritable politique de prévention et, en surmontant les blocages qui caractérisent le système de santé français, de servir de modèle pour la lutte contre d'autres pathologies.

A. VERS UNE VÉRITABLE POLITIQUE DE PRÉVENTION

Après une année de transition, le plan cancer II se fonde sur les recommandations du rapport du professeur Jean-Pierre Grünfeld « Recommandations pour le Plan Cancer 2009-2013 - Pour un nouvel élan », remis au Président de la République le 27 février 2009. Il s'attache à l'amélioration quantitative, mais surtout qualitative, du contenu du plan cancer I.

1. L'articulation entre les plans cancer I et II

Le nouveau plan se décompose en cinq axes (recherche, observation, prévention-dépistage, soins, vivre pendant et après le cancer) déclinés en trente mesures et cent dix-huit actions. Tout en visant à consolider et à compléter les acquis du plan cancer I, trois objectifs fondamentaux lui sont assignés : l'excellence des soins, la réduction des inégalités en matière de santé et d'accès au traitement, l'amélioration de la qualité de vie après le cancer.

Ainsi le plan cancer II ne reprend pas exactement les objectifs du plan précédent mais les complète. Une évaluation continue des moyens mis en oeuvre est donc impossible, même si les objectifs finaux restent les mêmes. Néanmoins, malgré la priorité budgétaire accordée aux soins, l'impulsion donnée par l'INCa s'effectuant principalement au travers de la recherche, on peut retenir comme indicateur les objectifs assignés à ce domaine : « réduire la mortalité liée à ces maladies, faire reculer leur fréquence et améliorer la survie et la qualité de vie des patients par des traitements plus efficaces et moins toxiques. Enfin, favoriser l'équité pour tous les citoyens face à la prévention, à l'accès au diagnostic précoce et à un traitement innovant et efficace » 4 ( * ) .

Si la qualité des objectifs retenus n'est pas contestable, il est regrettable qu'ici encore n'aient pas été définis des indicateurs d'impact social, et donc non purement quantitatifs, et en même temps pérennes, c'est-à-dire permettant une évaluation continue des politiques menées. Cette situation aboutit au paradoxe selon lequel aucun plan n'aura fait l'objet d'aussi nombreux rapports que le plan cancer I 5 ( * ) sans que cet effort de mobilisation des instances de contrôle, de conseil et d'expertise ne puisse se traduire dans la durée autrement que par la perspective pour chacune des institutions de mener à nouveau une évaluation à l'issue du plan cancer II. Il serait au contraire souhaitable que l'évaluation puisse avoir lieu au fil de la mise en oeuvre des plans, de manière à assurer une continuité et à réorienter éventuellement l'action au plus tôt. L'absence d'indicateurs reconnus aboutit donc à une perte d'efficacité dans la mobilisation des moyens d'évaluation publics et au risque d'une absence de consensus sur les résultats.

2. Cibler des populations fragiles

L'un des apports majeurs des plans cancer a été de renforcer les moyens alloués au dépistage et au traitement des cancers chez des populations fragiles ou particulièrement touchées. Des résultats importants ont ainsi été obtenus en matière de dépistage du cancer du sein puisque l'InVS a pu établir que près de 50 % des femmes constituant la population cible avaient participé au dépistage en 2006, soit cinq points de mieux qu'en 2005 6 ( * ) . Si l'objectif d'atteindre 80 % de dépistage, qui était assigné au premier plan, s'est avéré irréaliste, une véritable dynamique est amorcée, appuyée par des actions de communication destinées aux femmes, comme « octobre rose », qui pourraient permettre d'atteindre l'objectif de 100 % de dépistage assignés au deuxième plan.

Le plan cancer II consacre également plusieurs actions aux enfants atteints du cancer. Une intervention spécifique se justifie car les résultats les plus importants ont été acquis pour les personnes adultes, voire déjà âgées. La médiane d'âge des personnes atteintes du cancer est en effet de soixante-sept ans, âge auquel le traitement offre une perspective de quinze années de vie supplémentaires. Or, chaque année, 1 700 enfants de moins de quinze ans sont atteints d'un cancer. Pour eux, les perspectives moyennes offertes par les soins ne sont guère satisfaisantes. Il faut donc développer une prise en charge adaptée, qui intègre le développement d'un projet de vie.

Apporter aux enfants atteints d'un cancer les soins nécessaires suppose également un effort de recherche considérable, car les pathologies en cause ne peuvent être réellement prises en charge que par des traitements innovants. En outre, les enfants nécessitent une prise en charge personnalisée, particulière à leur cas. Les consultations existantes seront donc renforcées et des consultations pluridisciplinaires mises en place afin de mieux assurer le passage de la médecine pédiatrique à la médecine pour adultes. Un projet élaboré par le professeur Marcel Rufo, l'Espace méditerranéen de l'adolescent, offre ainsi la perspective de mettre en place en milieu hospitalier des lits consacrés à la prise en charge physique, psychique et culturelle des adolescents après les soins liés au cancer, mais également ouverts à d'autres adolescents en convalescence.

Plus largement, le plan cancer II vise à changer l'image sociale du cancer dans une optique liée à la guérison et à la vie par la suite. Un dispositif d'information qui vise à favoriser « un nouveau regard sur les cancers » a été mis en place le 18 novembre dernier. Il est la première étape de ce processus qui veut déstigmatiser les personnes atteintes ou ayant été atteintes par ces pathologies. A terme, ce changement d'attitude doit permettre des évolutions sociales profondes comme, au-delà des dispositifs existants, la fin des discriminations dans l'accès à l'assurance ou au crédit.

* 4 INCa, présentation du plan cancer 2009-2013.

* 5 Cour des comptes, rapport public thématique 2008, La mise en oeuvre du plan cancer ; Haut Conseil de la santé publique, évaluation du Plan cancer, rapport final, janvier 2009 ; Igas : évaluation des mesures du Plan cancer 2003-2007 relatives au dépistage et à l'organisation des soins, juin 2009 ; Centre d'analyses stratégiques, La lutte contre le cancer : surmonter les cloisonnements, septembre 2009.

* 6 InVS, Programme de dépistage du cancer du sein en France : résultats 2006, septembre 2009.

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