Avis n° 103 (2009-2010) de M. Alain GOURNAC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 19 novembre 2009

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N° 103

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2009

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2010 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VII

TRAVAIL ET EMPLOI

Par M. Alain GOURNAC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , présidente ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. Nicolas About, François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; M. Alain Vasselle, rapporteur général ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mme Jacqueline Chevé, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-François Mayet, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, François Vendasi, René Vestri, André Villiers.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 1946, 1967 à 1974 et T.A. 360

Sénat : 100 et 101 (annexe n° 32 ) (2009-2010)

Les crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2010

Programmes

Crédits de paiement (en euros)

Variation 2010/2009 (en %)

Accès et retour à l'emploi

5 885 530 000

- 2,4 %

Amélioration de l'efficacité du service public de l'emploi

3 143 854 000

- 1,6 %

Mise en situation d'emploi des publics fragiles

2 741 676 000

- 3,4 %

Accompagnement des mutations économiques et développement
de l'emploi

4 636 831 528

- 11,8 %

Anticipation et accompagnement des conséquences des mutations économiques sur l'emploi

346 170 000

- 28,6 %

Amélioration de l'insertion dans l'emploi par l'adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences

3 106 464 528

- 2,1 %

Développement de l'emploi

1 184 197 000

- 25,8 %

Amélioration de la qualité de l'emploi
et des relations du travail

78 260 000

- 9,1 %

Santé et sécurité au travail

30 410 586

+ 19,6 %

Qualité et effectivité du droit

10 959 419

- 64,7 %

Dialogue social et démocratie sociale

36 889 995

+ 24,6 %

Lutte contre le travail illégal

-

-

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

812 596 760

+ 2,8 %

Gestion du programme « accès et retour à l'emploi

103 201 768

- 3,6 %

Gestion du programme « accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi »

75 335 723

- 9,5 %

Gestion du programme « amélioration de la qualité de l'emploi et des relations de travail »

267 107 444

+ 9,1 %

Soutien

329 612 483

+ 4,1 %

Etudes, statistiques, évaluation et recherche

37 339 342

- 3,6 %

Fonds social européen - Assistance technique

-

-

Total mission « Travail et emploi »

11 413 218 288

- 6,2 %

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les crédits affectés à la mission « Travail et emploi » dans le projet de loi de finances pour 2010 s'élèvent à un peu plus de 11,2 milliards d'euros. Ils sont, apparemment, en baisse par rapport à ceux ouverts en loi de finances initiale pour 2009 (12 milliards d'euros de crédits de paiement). L'analyse des seuls crédits de la mission ne donne cependant qu'une vision très incomplète de l'effort budgétaire réellement consenti en faveur du travail et de l'emploi.

En premier lieu, la loi de finances rectificative pour 2008 a créé une nouvelle mission budgétaire, intitulée « Plan de relance de l'économie », dans laquelle figurent, pour 2010, 1,4 milliard d'euros destinés à la politique de l'emploi. Le total des crédits budgétaires consacrés au travail et à l'emploi atteint donc, en réalité, 12,6 milliards d'euros.

Si votre rapporteur comprend l'intérêt de regrouper les dépenses de relance, qui présentent un caractère conjoncturel, dans une mission spécifique, il faut convenir que la répartition des crédits de l'emploi entre ces deux missions ne facilite pas leur appréciation d'ensemble ni leur comparaison avec ceux inscrits en loi de finances initiale pour 2009.

En second lieu, de nombreuses mesures de réduction d'impôt ou d'exonération de cotisations sociales ont pour objectif de soutenir l'emploi : les dépenses fiscales relevant de la mission passeront de 10,2 milliards d'euros en 2009 à près de 11 milliards l'an prochain ; le montant de l'allégement général de cotisations sociales et de l'exonération de cotisations sur les heures supplémentaires, qui sont compensés à la sécurité sociale par l'attribution de recettes fiscales et n'apparaissent donc pas dans les crédits de la mission, devrait par ailleurs dépasser 26 milliards d'euros en 2010 ; enfin, des mesures d'exonération ciblées, cette fois non compensées par le budget de l'Etat et assumées par la sécurité sociale, s'élèveront à 3 milliards de recettes l'an prochain.

Au total, la politique du travail et de l'emploi mobilisera donc plus de 52 milliards d'euros en 2010 . Dans un contexte difficile de récession et de remontée du chômage, le Gouvernement propose donc de réaliser un effort financier important pour atténuer l'impact de la crise sur l'emploi. Favorable à une utilisation contra-cyclique des dépenses publiques, votre commission soutient cette orientation.

La mission « Travail et emploi » conserve un caractère interministériel : si l'essentiel des crédits, consacré au financement de la politique de l'emploi, relève de la compétence de Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, et de son secrétaire d'Etat à l'emploi, Laurent Wauquiez, une petite part est gérée par Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité et de la ville.

Les quatre programmes qui composent la mission demeurent de tailles très inégales puisque les programmes 102 et 103, qui dépendent tous deux du ministère de l'emploi, regroupent plus de 90 % des crédits.

Décomposition des moyens de la mission « Travail et emploi »

(en milliards d'euros)

Crédits
de paiement pour 2010

Proportion du budget
de la mission

Programme 102 « Accès et retour à l'emploi »

5,8

51,5 %

Programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi »

4,6

40,8 %

Programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail »

0,08

0,7 %

Programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail »

0,8

7 %

Mission « Travail et emploi »

11,28

100 %

Source : projet de loi de finances pour 2010

I. LE SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI EST FORTEMENT SOLLICITÉ PAR LA REMONTÉE DU CHÔMAGE

La France a connu, en 2009, la plus grave récession depuis l'après-guerre. La contraction du Pib a eu un effet destructeur sur l'emploi, que les mesures d'urgence prises au cours de l'année écoulée ont cependant permis d'atténuer. Si la reprise s'annonce pour 2010, elle ne devrait pas être suffisante pour entraîner une baisse du chômage à court terme, l'emploi réagissant toujours avec retard aux variations de la conjoncture.

Dans ce contexte, l'assurance chômage a vu ses dépenses d'indemnisation s'accroître, et ses déficits se creuser, tandis que la nouvelle institution chargée du placement et de l'indemnisation des demandeurs d'emploi, Pôle emploi, a dû faire face à un surcroît d'activité intervenu au moment où elle était en train de se mettre en place.

A. UN MARCHÉ DU TRAVAIL DÉGRADÉ

Au cours de l'année écoulée, l'emploi a subi les conséquences de la crise économique et l'on a observé une forte augmentation du chômage. La France a cependant été moins durement touchée que d'autres pays développés, en partie grâce aux mesures de lutte contre le chômage décidées par les pouvoirs publics. Le retour probable de la croissance, espéré l'an prochain, devrait favoriser une stabilisation du marché du travail.

1. Le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 25 % en un an

Les données les plus récentes collectées par Pôle emploi et par la Dares 1 ( * ) montrent que le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 25,1 % entre septembre 2008 et la fin du mois de septembre 2009, pour s'établir à plus de 2,5 millions de personnes, soit 9,1 % de la population active (9,5 % en incluant l'outre-mer).

Cette forte augmentation du chômage s'explique par la contraction du Pib, qui devrait être de l'ordre de 2,2 % en 2009. De nombreux emplois ont été détruits dans le secteur marchand : 141 000 en 2008 et 242 000 environ au premier semestre de 2009, d'après les données, encore provisoires, fournies par l'Insee et la Dares. L'industrie a été particulièrement touchée, puisqu'elle a perdu 73 000 postes de travail en 2008 et plus de 100 000 au cours du seul premier trimestre de 2009.

Le moindre recours à l'intérim a été le mode d'ajustement privilégié des entreprises au repli de l'activité. Le nombre de postes dans l'intérim a chuté de 21 % en 2008 et le premier trimestre de 2009 a encore été marqué par un recul historique du nombre d'intérimaires (- 81 000 emplois).

2. La France a cependant mieux résisté que d'autres pays développés

Pour préoccupante que soit l'augmentation du chômage, la France n'est pas le pays le plus durement frappé : dans la zone euro, le nombre de demandeurs d'emploi a augmenté de 30 % depuis le début de la crise ; aux Etats-Unis, le nombre de demandeurs d'emploi a doublé, faisant passer le taux de chômage à 10 % de la population active ; en Espagne, le taux de chômage a progressé de 11 points pour atteindre près de 20 % de la population active.

La moindre vulnérabilité française s'explique, pour partie, par la relative rigidité du marché du travail : face à la crise, les entreprises françaises ont besoin de plus de temps pour se séparer de leurs salariés que leurs concurrentes américaines, par exemple.

Mais elle s'explique aussi par le volontarisme de la politique menée en France dans le domaine de l'emploi. L'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) et la Communauté européenne ont récemment interrogé leurs Etats membres pour savoir quelles mesures ils avaient adopté pour soutenir l'emploi face à la crise. Comme l'illustre le tableau ci-dessous, la France a mobilisé une grande variété d'outils pour contenir la hausse du chômage ; celui qui a eu l'effet le plus significatif est certainement l'assouplissement des conditions de recours au chômage partiel.

Mesures pour l'emploi adoptées pour faire face à la crise économique

Mesures destinées
à augmenter la demande de travail

Mesures destinées à aider
les chômeurs à retrouver un emploi

Mesures de soutien
du revenu des personnes
au chômage ou des bas salaires

Mesures
de formation

Subventions à l'embauche ou création d'emplois publics

Allégements de charges

Chômage partiel

Nouvelles obligations pour les demandeurs d'emploi

Accompagnement dans la recherche d'emploi

Incitation à la reprise d'emploi ou la création d'entreprise

Programmes destinés à procurer une expérience professionnelle

Programmes de formation

Amélioration de l'indemnisation du chômage

Aide sociale pour les demandeurs d'emploi

Mesures d'aide complémentaire et soutien en nature

Mesures fiscales en faveur des personnes à bas revenu

Formation professionnelle des salariés

Apprentissage

Autriche

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Belgique

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Canada

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République tchèque

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Danemark

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Finlande

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France

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Allemagne

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Grèce

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Hongrie

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Irlande

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Italie

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Japon

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Hollande

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Pologne

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Portugal

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Espagne

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x

Suède »

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x

Royaume-Uni

x

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x

Etats-Unis

x

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x

x

x

Source : « Adressing the labour market challenges of the economic downturn :
a summary of country responses to the OECD-EC questionnaire », document de l'OCDE, septembre 2009, p. 3.

Un rappel historique suggère que l'emploi en France a également mieux résisté que par le passé : lors de la précédente récession, en 1992-1993, le nombre de demandeurs d'emploi avait crû de 800 000, et franchi la barre des trois millions, alors que la contraction du Pib avait été moindre (- 1,3 %). Cette meilleure résistance résulte des mesures conjoncturelles mises en oeuvre, mais également de changements structurels intervenus depuis lors sur le marché du travail, notamment l'allègement du coût du travail peu qualifié.

3. Vers une reprise en 2010 ?

En cette fin d'année 2009, plusieurs signes positifs permettent d'espérer que la période la plus difficile est maintenant derrière nous :

- le chômage continue à progresser, mais à un rythme ralenti : le nombre de demandeurs inscrits à Pôle emploi a augmenté de 21 000 en septembre, alors qu'il progressait de 90 000 unités chaque mois en début d'année ;

- le nombre de contrats d'apprentissage conclu à la rentrée 2009 est stable par rapport à celui de 2008 ;

- le nombre d'offres d'emploi collectées par Pôle emploi est également resté stable en septembre, après avoir reculé de 16 % en un an ;

- les prévisions de croissance pour 2010 ont été revues à la hausse : le Pib pourrait progresser de 1 % à 1,5 % alors que les premières estimations étaient de l'ordre de 0,8 %.

La baisse du chômage n'est cependant pas encore à l'ordre du jour. L'Unedic estime que le taux de chômage devrait atteindre 9,7 % de la population active à la fin de l'année et se situer encore autour de 10 % à la fin de 2010. Plus pessimiste, l'OCDE envisage un taux de chômage de 11,3 % l'an prochain.

L'emploi s'ajuste traditionnellement avec retard à une embellie de l'activité. Plutôt que de licencier, beaucoup d'entreprises ont en effet diminué leur production en réduisant la productivité de leurs salariés. Elles disposent donc, à présent, de réserves de productivité qu'elles peuvent mobiliser pour augmenter leur production sans avoir à embaucher. Les incertitudes relatives à l'ampleur et à la durée de la reprise sont par ailleurs de puissants facteurs d'attentisme.

Un enjeu important pour l'avenir est d'éviter que les personnes qui ont perdu leur emploi ne soient victimes du chômage de longue durée, alors que la durée moyenne du chômage en France - treize mois - est déjà l'une des plus élevées d'Europe. Cela suppose d'investir dans la formation continue, l'accompagnement personnalisé des demandeurs d'emploi et le développement d'activités d'avenir.

B. DES DÉPENSES D'INDEMNISATION DU CHÔMAGE EN AUGMENTATION

La hausse du chômage a eu un impact direct sur les comptes de l'Unedic, ainsi que sur ceux du régime de solidarité.

1. L'Unedic a renoué avec les déficits

De 2006 à 2008, l'Unedic a dégagé des excédents qui lui ont permis de réduire la dette qu'elle avait accumulée au cours des années antérieures. Avant le début de la crise, l'Unedic envisageait de dégager un nouvel excédent en 2009, de l'ordre de 5 milliards d'euros, ce qui lui aurait permis d'effacer complètement cette dette.

a) Les effets de la remontée du chômage

La remontée du chômage a bien sûr bouleversé ces prévisions : l'assurance chômage a dû verser des prestations à un plus grand nombre d'allocataires, tandis que ses recettes ont diminué. L'équilibre financier de l'Unedic est assuré avec un ratio de dix cotisants pour une personne indemnisée ; or ce ratio est aujourd'hui de huit pour une.

Dans ces conditions, l'Unedic table désormais sur un déficit de 900 millions d'euros à la fin de l'année, ce qui portera sa dette à près de 5,9 milliards ; son déficit, encore plus élevé en 2010, aurait pour effet de la porter à 9,5 milliards l'an prochain.

Résultats financiers de l'assurance chômage

(en millions d'euros)

Situation financière

2005
(R)

2006
(R)

2007
(R)

2008
(R)

2009
(P)

2010
(H)

Recettes

27 695

29 394

30 532

30 522

30 365

30 563

Dépenses

30 887

29 050

27 013

25 924

31 267

34 182

Résultat de l'année (R-D)

- 3 192

344

3 519

4 598

- 902

- 3 619

Situation financière au 31 décembre

- 13 452

- 13 108

- 9 590

- 4 992

- 5 893

- 9 512

(R) : réalisé (P) : prévision (H) : hypothèse Source : Unedic

Ces résultats sont établis sur la base d'hypothèses de croissance du Pib de - 2,2 % en 2008 et de 1,1 % en 2009.

b) L'entrée en vigueur de la nouvelle convention d'assurance chômage

Le 19 février dernier, trois organisations patronales (le Medef, la CGPME et l'UPA) et un seul syndicat de salariés (la CFDT) ont signé une nouvelle convention d'assurance chômage, qui couvre la période 2009-2011. Cette nouvelle convention a été agréée par le Gouvernement le 1 er avril et est entrée en application le même jour.

Ouvertes le 15 octobre 2008, les négociations ayant conduit à la conclusion de cette convention ont été difficiles, ce qui explique qu'un seul syndicat ait approuvé le document. La CGT et Force ouvrière se sont opposées à cet accord, mais l'opposition formelle de trois syndicats sur cinq était requise pour lui faire échec. La décision de la CFTC et de la CFE-CGC de ne pas signer la convention, sans exercer pour autant leur droit d'opposition, a finalement permis son entrée en vigueur.

Le principal point de désaccord ente les partenaires sociaux portait sur le volet « recettes » de la convention. A la demande de la CGPME, le texte prévoit en effet, dans son article 3, que le taux des contributions à l'assurance chômage sera réduit, à compter du 1 er janvier ou du 1 er juillet de chaque année, si le résultat d'exploitation semestriel du semestre précédent est excédentaire d'au moins 500 millions d'euros. Les organisations syndicales ont contesté cette disposition, en faisant valoir que l'augmentation du chômage devait plutôt inciter à préserver les ressources de l'assurance chômage, afin d'indemniser convenablement les assurés.

En ce qui concerne les allocations, la nouvelle convention repose sur les principes suivants :

- elle instaure une filière unique d'indemnisation qui obéit au principe « un jour travaillé égale un jour indemnisé » ;

- tous les salariés ayant cotisé au moins quatre mois au cours des vingt-huit derniers mois ont droit à une indemnisation, alors que la précédente convention exigeait six mois de cotisations au cours des vingt-quatre derniers mois ;

- la durée maximale d'indemnisation est portée de vingt-trois à vingt-quatre mois et maintenue à trente-six mois pour les demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans.

L'Unedic a calculé que l'entrée en vigueur de la nouvelle convention a permis d'indemniser 58 000 personnes supplémentaires, qui n'auraient pas perçu d'allocation sous l'empire de la précédente convention, ce qui a occasionné un coût supplémentaire de 105 millions d'euros.

La dégradation de la situation financière de l'assurance chômage en cours d'année n'a en outre pas permis de procéder à la baisse des cotisations demandée par la partie patronale.

Ces observations amènent votre rapporteur à considérer que les critiques formulées par certains syndicats à l'encontre de la nouvelle convention étaient sans doute un peu excessives : le nombre de personnes indemnisées a en effet augmenté et une baisse des contributions est exclue à court terme.

2. Le régime de solidarité

Depuis 1982, le fonds de solidarité rassemble les moyens de financement de huit allocations versées aux demandeurs d'emploi en fin de droit, notamment l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

Le fonds dispose d'une ressource propre, la contribution de solidarité des agents du secteur public, qui a rapporté 1,27 milliard d'euros en 2009, à laquelle s'ajoute une part (1,25 %) de la taxe sur les tabacs, qui a produit 114 millions de recettes. Ces ressources sont complétées par une subvention de l'Etat qui s'est élevée, cette année, à 1,45 milliard. Ces recettes permettront au fonds de faire face à ses dépenses évaluées, en 2009, à 2,8 milliards.

En 2010, la contribution de solidarité devrait rapporter au fonds 1,28 milliard et la taxe sur les tabacs 121 millions. Le projet de loi de finances prévoit de porter la subvention de l'Etat à 1,52 milliard. Ces recettes permettraient de couvrir des dépenses évaluées, l'an prochain, à un peu plus de 2,9 milliards d'euros.

Cette progression maîtrisée des dépenses s'explique par la revalorisation, à compter du 1 er janvier 2010, des allocations versées par le fonds, à hauteur de 1,2 %, et par l'augmentation du nombre d'allocataires, qui devrait passer de 423 000 en 2009 à plus de 440 000 l'an prochain.

Cette hausse globale des effectifs masque des évolutions contrastées : si le nombre d'allocataires de l'ASS devrait croître de plus de 30 000 celui des bénéficiaires de l'allocation équivalent retraite (AER) devrait fortement diminuer. L'AER ayant été supprimée à compter du 1 er janvier 2009, le fonds de solidarité n'a plus à sa charge que le versement des allocations dues aux personnes qui en étaient déjà titulaires à cette date.

Evolution des effectifs

Effectif

2008 (RAP)

2009 (PAP)

2010 (PLF)

ASS

328 531

344 480

375 740

AER

84 203

61 077

45 025

AFF

44 138

7 735

11 698

ASS-ACCRE

6 099

6 500

5 439

AF-CNE

111

-

-

APS

121

230

203

AFD

-

2 483

2 586

AT

8 223

1 170

TOTAL

471 426

423 675

440 691

ASS : allocation de solidarité spécifique - AER : allocation équivalent retraite - AFF : allocation fin de formation - ASS-Accre : allocation de solidarité spécifique - aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise -
AF-CNE : allocation forfaire-contrat nouvelles embauches - APS : allocation de professionnalisation et de solidarité - AFD : allocation de fin de droits -
AT : allocation transitoire

Source : ministère de l'emploi

C. UNE SITUATION COMPLEXE À GÉRER POUR PÔLE EMPLOI

Pôle emploi, nouvel opérateur issu de la fusion de l'ANPE et des Assedic, a été créé officiellement le 1 er janvier 2009. Sur le plan opérationnel, la fusion n'est cependant pas encore complètement achevée ; sa mise en oeuvre a été compliquée par l'afflux de demandeurs d'emploi en cours d'année, la nouvelle institution ayant dû faire face à un important surcroît d'activité alors qu'elle était en phase de réorganisation.

1. Pôle emploi a traversé une passe difficile au premier semestre

Pendant les premiers mois de 2009, Pôle emploi a dû procéder à l'inscription de 90 000 demandeurs d'emploi supplémentaire chaque mois, tout en menant à bien sa réorganisation. C'est en particulier pendant cette période que les nouvelles équipes de direction ont été constituées. Cette situation a été facteur de tensions et de retards, que l'opérateur a réussi à surmonter, notamment en renforçant ses effectifs.

? Plusieurs indicateurs indiquent que Pôle emploi a eu du mal à faire face à l'augmentation brutale de sa charge de travail au premier semestre :

- sa plate-forme téléphonique, le « 3949 », a été saturée : en juillet 2009, 60 % seulement des appels permettaient d'entrer en contact avec un opérateur ;

- le taux de décisions d'indemnisation prononcées en moins de quinze jours a oscillé autour de 82 % au cours du premier semestre, alors que l'objectif de la direction est d'atteindre un taux de 100 % ;

- le nombre de dossiers d'indemnisation en instance en fin de mois a fortement augmenté pour atteindre 60 000 au mois de mai et 65 000 au mois de juillet.

? Pôle emploi a réagi en recrutant du personnel supplémentaire et en lançant un vaste appel d'offres auprès des opérateurs privés de placement.

Le jour de sa création, l'opérateur comptait 42 972 agents, en équivalent temps plein, régis pour certains par le code du travail, pour d'autres par un statut de droit public, ce qui en faisait déjà le premier établissement public national par l'importance de ses effectifs.

Les effectifs de Pôle emploi au 1 er janvier 2009

ETPT

Droit public

Droit privé

TOTAL

CDI

23 190

15 271

38 461

CDD

1 142

2 000

3 142

Contrats aidés

0

1 369

1 369

TOTAL

24 332

18 640

42 972

ETPT : équivalent temps plein travaillé

A l'été 2009, 1 840 agents supplémentaires ont été recrutés, 1 000 en CDI et 840 en CDD. Pour améliorer l'efficacité des procédures d'inscription et d'indemnisation, une partie de ces agents a suivi, dès le mois d'août, une formation intensive de vingt-cinq jours afin de pouvoir être opérationnels dès la rentrée.

En outre, 500 personnes ont été recrutées en CDD à l'occasion de la mise en place de plateformes téléphoniques régionales et 500 autres ont été embauchées en contrats aidés pour assurer l'accueil physique des demandeurs d'emploi et animer les sites.

Enfin, un appel d'offres a été lancé, en avril 2009, auprès des opérateurs privés de placement afin de leur confier l'accompagnement renforcé de 320 000 demandeurs d'emploi sur deux ans. Ce marché a été organisé par région et par bassin d'emploi pour s'adapter aux plus près des besoins locaux. Il comprend deux lots : le premier concerne l'accompagnement renforcé, pendant six mois, de 170 000 personnes éloignées de l'emploi, le second porte sur l'accompagnement et le retour à l'emploi de 150 000 personnes victimes d'un licenciement économique et ayant adhéré au contrat de transition professionnelle (CTP) ou à la convention de reclassement personnalisé (CRP).

Ces initiatives ont permis de faire passer de 60 % à 80 % le taux des appels téléphoniques qui aboutissent et de ramener, dès le mois d'août, le nombre de dossiers d'indemnisation en instance autour de 35 000. Elles ont également permis d'éviter tout retard dans le versement des allocations.

Elles n'ont cependant pas été suffisantes pour maintenir constant le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller : il était en effet de 90 au mois de mars, puis 91,8 au mois d'août et a atteint 94 au mois de novembre.

2. La fusion s'est néanmoins poursuivie à un rythme soutenu

Malgré cette lourde charge de travail, Pôle emploi a réussi à mettre en place un grand nombre de sites mixtes, a formé ses collaborateurs pour les rendre plus polyvalents et a achevé la négociation de la nouvelle convention collective qui va régir ses salariés de droit privé.

? En ce qui concerne d'abord les sites mixtes , qui ont vocation à rassembler, selon une logique de « guichet unique », les services des anciennes agences ANPE et Assedic, des progrès notables ont été accomplis, même si l'objectif volontariste initialement affiché -  l'achèvement du réseau d'ici la fin de l'année - ne pourra vraisemblablement pas être tenu.

Fin octobre, un peu plus de 450 sites avaient en effet été constitués ; 400 sites supplémentaires doivent encore voir le jour pour compléter le réseau. Le directeur général de Pôle emploi, Christian Charpy, a indiqué à votre rapporteur que le réseau devrait être achevé, à la fin de l'année, dans dix-neuf régions métropolitaines sur vingt-deux.

Dans les régions Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Rousillon, la création des sites mixtes a pris du retard en raison des délais plus importants que prévu de consultation des institutions représentatives du personnel. Certains syndicats, hostiles à la fusion, y ont en effet multiplié les manoeuvres dilatoires.

? Les conseillers de Pôle emploi ont vocation à exercer les missions qui étaient autrefois remplies par les conseillers de l'ANPE et par ceux des Assedic. Ils doivent donc, à la fois, maîtriser les règles d'indemnisation des demandeurs d'emploi, telles qu'elles sont définies par la convention d'assurance chômage, et accompagner le demandeur dans sa recherche d'emploi. Le parcours du demandeur d'emploi est ainsi simplifié, puisqu'il est suivi par un référent unique.

A ce jour, 16 000 agents de Pôle emploi ont reçu une formation destinée à leur permettre d'acquérir cette nouvelle polyvalence et ce nombre devrait être porté à 20 000 d'ici la fin de l'année. Toutefois, Christian Charpy a admis que des formations complémentaires devront être dispensées l'an prochain, certains agents ne se sentant pas encore à l'aise pour exercer l'ensemble de leurs nouvelles tâches.

? La négociation de la convention collective nationale applicable aux agents de droit privé de Pôle emploi s'est achevée le 4 novembre 2009. Le texte a été approuvé par une majorité d'organisations syndicales (FO, CFDT, Unsa, CFTC, CFE-CGC) et pourra donc entrer en application le 1 er janvier prochain.

La convention prévoit que les agents de l'ex-ANPE, soumis à un statut de droit public, auront deux ans pour décider s'ils souhaitent conserver leur statut actuel ou opter pour l'application de la convention collective. Pour garantir leur pouvoir d'achat, il est précisé que la rémunération nette annuelle qui leur sera proposée, s'ils exercent leur droit d'option, ne pourra être inférieure à celle qu'ils auront perçue au cours des douze mois précédents.

La convention institue un système de primes de résultats au profit de certains cadres qui occupent des fonctions de direction, de coordination ou d'animation d'équipe.

En ce qui concerne la retraite complémentaire, la convention prévoit que les nouveaux agents seront affiliés à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (Ircantec), comme le sont déjà les agents issus de l'ANPE. Elle ne tranche pas, cependant, la question de l'affiliation des anciens salariés des Assedic, qui sont actuellement couverts par l'Agirc ou l'Arrco, les négociateurs ayant souhaité s'accorder un peu de temps pour avancer sur ce sujet.

Elle précise que les agents de Pôle emploi ne sont pas affiliés à l'assurance chômage, l'institution relevant du système de l'auto-assurance.

La convention collective devra être complétée puisqu'elle ne traite ni de la classification des emplois, ni de l'organisation du temps de travail et de la formation.

? La mise en oeuvre de la fusion à un rythme soutenu a provoqué des tensions au sein du personnel de Pôle emploi.

En octobre, sept syndicats de Pôle emploi ont appelé à une journée de grève nationale, qui a été largement suivie puisqu'entre 35 % et 40 % des agents y ont participé. Les syndicats ont voulu protester contre la mise en place trop rapide des sites mixtes et contre la pratique de l'entretien unique d'inscription.

En réponse, la direction de Pôle emploi a précisé que la mise en place de l'entretien unique serait conditionnée à l'achèvement des formations adéquates. Dans l'attente, deux agents, l'un chargé de l'indemnisation, l'autre du placement, continueront à accueillir les demandeurs d'emploi. Elle s'est également engagée à ce que les conditions de travail au sein des sites mixtes soient régulièrement examinées au sein des commissions paritaires techniques régionales. Enfin, une négociation sur les conditions de travail et la prévention des risques psychosociaux a été annoncée. Elle s'appuiera sur les réponses apportées par les agents de Pôle emploi à un questionnaire qui leur a été adressé début novembre, selon une démarche qui n'est pas sans rappeler celle retenue à France Telecom.

*

En dépit de ces problèmes, et du retard accumulé dans certains domaines, votre commission tient à saluer l'ampleur du travail accompli à Pôle emploi depuis que le processus de fusion a été lancé.

Il était inévitable que cette opération complexe, qui conduit à réunir dans une même institution des personnels de statut et de culture différents, se heurte à des difficultés et suscite des tensions. Le contexte de forte augmentation du chômage qui l'a accompagnée a rendu la tâche des gestionnaires et des salariés de Pôle emploi encore plus ardue. Ces éléments ne remettent cependant en cause ni la pertinence de la fusion, ni la méthode retenue pour la mettre en oeuvre. Votre commission soutient le processus engagé et demande qu'il soit poursuivi, dans un délai compatible avec le maintien de la qualité de service due aux demandeurs d'emploi.

Une interrogation demeure toutefois, celle du rôle des deux cent cinq maisons de l'emploi dans le nouveau paysage institutionnel résultant de la fusion. Dans son rapport sur les crédits de la mission, la commission des finances de l'Assemblée nationale souligne, à juste titre, que « face à Pôle emploi, les maisons de l'emploi peinent à trouver leur place » 2 ( * ) . Leur offre de services est variable selon les lieux et parfois trop restreinte pour représenter un véritable apport par rapport aux sites mixtes de Pôle emploi.

La création de nouvelles maisons ayant été interrompue, le projet de loi de finances prévoit seulement de reconduire, en 2010, les crédits nécessaires au fonctionnement des maisons déjà conventionnées, soit 95 millions en crédits de paiement.

3. Les ressources de Pôle emploi se situent à un niveau satisfaisant

Pôle emploi dispose de deux ressources principales :

- une subvention de l'Etat dont le montant est fixé, l'an prochain, à 1,36 milliard d'euros, soit le même niveau qu'en 2009 ;

- une contribution versée par l'assurance chômage, égale à 10 % des sommes qu'elle collecte, soit environ 3 milliards.

Ces ressources sont complétées par des recettes diverses, provenant notamment des collectivités locales, pour un montant de l'ordre de 400 millions.

En 2009, les dépenses de Pôle emploi se sont élevées à 4,7 milliards, réparties entre dépenses de fonctionnement (3,7 milliards) et d'intervention (1 milliard). Ses ressources lui ont permis de faire face, sans difficulté, à l'ensemble de ses obligations.

Les crédits prévus pour financer certaines dépenses ne seront pas entièrement consommés. Tel est le cas, en particulier, des crédits de formation et d'aide à la mobilité : la raréfaction des embauches explique cette sous-consommation, dans la mesure où l'utilisation de ces crédits est généralement la conséquence d'une reprise d'emploi. Tel est également le cas des crédits prévus pour rémunérer les organismes privés de placement, les marchés n'ayant été conclus qu'au cours de l'été.

L'an prochain, l'institution devra assumer des charges supplémentaires, liées à l'application de la nouvelle convention collective et aux recrutements effectués en 2009 ; elle devrait donc jouir d'une moindre aisance financière, qui ne remettrait cependant pas en cause sa capacité à assumer ses missions.


La réorganisation de l'administration du travail

L'année 2009 est marquée par le début de la mise en place des nouvelles directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte).

Ces directions vont reprendre les compétences actuellement dévolues aux directions régionales et départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP et DDTEFP). Elles seront également en charge du développement de l'économie et de la régulation des marchés (concurrence et protection des consommateurs). Une phase de préfiguration est en cours dans cinq régions (Aquitaine, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Rhône-Alpes).

Chaque direction sera subdivisée en trois pôles, chargés, respectivement, du travail, de l'économie et de l'emploi, et de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Elle comportera également des unités territoriales, dont le ressort pourra ne pas être départemental.

Depuis la publication du décret n° 2008-1510 du 30 décembre 2008 relatif à la fusion des services d'inspection du travail , un seul service d'inspection regroupe celles qui dépendaient, jusque là, des ministères du travail, des transports et de l'agriculture.

Cette inspection unique est rattachée au ministère du travail, qui consulte cependant ceux en charge de l'agriculture et des transports pour la définition de son programme de travail.

L'administration du travail participe, enfin, à l'effort de réduction des effectifs de la fonction publique, puisque 163 emplois ne seront pas remplacés l'année prochaine, essentiellement des emplois de catégorie C.

II. LE PROJET DE BUDGET VISE À ATTÉNUER LA HAUSSE DU CHÔMAGE ET À PRÉPARER LA SORTIE DE CRISE

Les actions lancées, en 2009, pour lutter contre la progression du chômage vont se poursuivre l'an prochain. Le Gouvernement a su agir avec un grand pragmatisme et a mobilisé tous les outils à sa disposition. Il a cependant résisté à la tentation de recourir aux mesures d'âge, ce dont votre commission se félicite, car une telle orientation aurait compromis l'objectif d'amélioration du taux d'emploi des seniors.

Si la plupart des dispositifs de la politique de l'emploi sont financés sur les crédits de la mission, une partie des crédits sont inscrits dans la mission « Plan de relance de l'économie », dont la durée de vie devrait être limitée à deux ans.

A. ÉVITER LES LICENCIEMENTS ET FAVORISER LE RETOUR À L'EMPLOI

Le recours au chômage partiel, les contrats aidés et le soutien aux formations en alternance ont été les outils privilégiés de la politique de l'emploi en 2009.

1. Le recours au chômage partiel a été facilité

Le contingent d'heures indemnisables au titre du chômage partiel a été relevé et l'indemnisation des heures perdues a été améliorée.

Un arrêté du 30 décembre 2008 a d'abord relevé le contingent annuel d'heures indemnisables au titre du chômage partiel de 600 à 800 heures et à 1 000 heures dans certains secteurs particulièrement touchés par la crise (textile-habillement et automobile).

Le 8 juillet 2009, les partenaires sociaux ont conclu un accord national interprofessionnel (Ani) sur la gestion sociale des conséquences économiques de la crise, dans lequel ils demandaient aux pouvoirs publics de porter le contingent à 1 000 heures pour tous les secteurs d'activité. Un arrêté du 3 septembre 2009 leur a donné satisfaction.

? Un salarié mis au chômage partiel par son employeur a droit une indemnisation qui comprend plusieurs éléments :

- une allocation spécifique, visée à l'article L. 5122-1 du code du travail, qui est avancée par l'entreprise puis remboursée par l'Etat ; son montant varie en fonction de la taille de l'entreprise : 3,84 euros par heure perdue si l'entreprise emploie au plus deux cent cinquante salariés, et 3,33 euros au-delà ;

- une allocation conventionnelle, versée par l'employeur en application de l'Ani du 21 juin 1968 ; elle porte l'indemnisation globale du salarié à 60 % de son salaire antérieur, sans pouvoir être inférieure à 6,84 euros par heure perdue.

Si l'entreprise connaît des difficultés particulières, l'allocation conventionnelle peut être prise en charge par l'Etat, ainsi que le prévoit l'article L. 5122-2 du code du travail.

? Pour améliorer l'indemnisation des salariés au chômage partiel, un décret du 29 avril 2009 a défini le régime de l' activité partielle de longue durée : ce nouveau dispositif bénéficie aux salariés qui subissent une réduction de leur activité pendant une longue période (trois mois minimum, renouvelable dans la limite de douze mois). Il leur permet de percevoir une indemnité égale à 75 % au moins de leur rémunération brute antérieure.

L'allocation, qui est versée par l'entreprise, est financée par l'Etat et l'Unedic : la participation de l'Etat s'élève à 1,90 euro par heure indemnisée, dans la limite des cinquante premières heures ; au-delà de la cinquantième heure, l'Unedic intervient et verse une participation de 3,90 euros de l'heure.

Le bénéfice de ce dispositif est subordonné à la conclusion d'une convention d'activité partielle entre l'Etat et l'entreprise ou une organisation professionnelle. L'employeur s'engage à maintenir dans l'emploi les salariés subissant une réduction de leur durée d'activité pendant une période égale au moins au double de la durée de la convention. Il doit également proposer à chaque salarié bénéficiant du dispositif un entretien individuel afin d'envisager les actions de formation ou de bilan de compétences pouvant être engagées pendant la période d'activité partielle.

? Sous l'effet de la crise, le nombre d'heures indemnisables au titre du chômage partiel a fait un bond en 2008 par rapport à 2007 : il est en effet passé de 2 à 4,1 millions d'heures, dont 3,3 millions ont été autorisées à partir du mois de septembre.

Le nombre d'heures indemnisables n'est cependant pas égal au nombre de jours réellement indemnisés : il correspond au nombre d'heures de chômage partiel qui ont été demandées par les entreprises puis autorisées par l'administration du travail. Le nombre de journées indemnisées est resté, en 2008, légèrement inférieur à 880 000. Cet écart s'explique par la prudence des chefs d'entreprise, qui ont demandé, par précaution, un nombre d'heures supérieur à leurs besoins, mais aussi par le fait qu'un grand nombre d'heures ont été accomplies à la toute fin de l'année et n'ont été payées qu'en 2009.

L'industrie en a été le principal secteur utilisateur, notamment l'industrie automobile.

? Si les dépenses de l'Etat au titre du chômage partiel (financement de l'allocation spécifique) sont restées limitées à 14 millions d'euros en 2008, elles ont fortement progressé en 2009.

La loi de finances initiale avait prévu de consacrer 39 millions au financement de l'allocation spécifique. Cette dotation s'est rapidement révélée insuffisante : un premier décret, du 23 juin 2009, a abondé ces crédits à hauteur de 100 millions, prélevés sur la mission « Plan de relance de l'économie ». Au début du mois d'octobre, un second décret, transmis pour information à votre commission, a procédé à un nouveau transfert de 209 millions en autorisations d'engagement et 169 millions en crédits de paiement.

Pour 2010, le projet de loi de finances propose une dotation de 60 millions d'euros, qui paraît faible au regard des dépenses engagées cette année mais tient compte de l'amélioration de la conjoncture.

2. Le nombre de contrats aidés a été accru

Le nombre de contrats aidés conclus en 2009 a fortement augmenté par rapport à 2008, notamment dans le secteur non marchand, de façon à atténuer la hausse du chômage. L'année 2010 va être marquée par l'entrée en vigueur du nouveau contrat unique d'insertion (CUI), qui va se substituer aux contrats aidés issus du pl an de cohésion sociale de 2005.

a) Une politique volontariste a été conduite en 2009

Actuellement, deux contrats coexistent dans le secteur marchand : le contrat initiative-emploi (CIE), qui a été rénové en 2005, et le contrat d'insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA), conçu dans une logique d'activation des minima sociaux 3 ( * ) . Les employeurs du secteur non marchand ont également à leur disposition deux types de contrat : le contrat d'avenir, qui répond à la même logique d'activation des minima sociaux que le CI-RMA, et le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE).

? Le Gouvernement a décidé, en 2009, d'utiliser de manière volontariste l'outil des contrats aidés pour lutter contre le chômage. Ces contrats permettent en effet de maintenir dans le monde du travail des personnes qui risqueraient, sinon, de s'en éloigner durablement.

L'objectif poursuivi est la conclusion de 380 000 contrats dans le secteur non marchand et de 100 000 contrats dans le secteur marchand. Le nombre de contrats aidés conclus dans le secteur non marchand était proche de 300 000 au mois d'octobre 2009 et a atteint 326 000 à la mi-novembre. L'objectif fixé devrait donc pouvoir être atteint si ce rythme de progression est maintenu jusqu'à la fin de l'année. Pour encourager la conclusion de CAE, il a été décidé, dans le cadre du plan de relance, de majorer le taux de prise en charge de ces contrats par les pouvoirs publics pour le porter à 90 %, alors qu'il se situe habituellement, en moyenne, autour de 70 %.

Cumul des prescriptions CAE et CAV en 2009
(au 25/10/2009)

Les contrats aidés dans le secteur marchand sont plus difficiles à mobiliser dans la mesure où la récession n'incite guère les entreprises à embaucher, même avec une aide de l'Etat. 78 000 contrats avaient cependant été conclus à la mi-novembre.

? Les contrats aidés ont été particulièrement mobilisés au profit des jeunes demandeurs d'emploi. Le Président de la République a annoncé, le 24 avril 2009, un « plan d'urgence pour l'emploi des jeunes » proposant :

-  50 000 CIE, au cours du second semestre de 2009, à des jeunes de moins de vint-six ans, afin de les orienter vers des métiers porteurs ;

-  30 000 CAE « passerelle » à des jeunes de moins de vingt-six ans : ce contrat est identique, sur le plan juridique, au CAE de droit commun ; il s'en distingue seulement par ses modalités de mise en oeuvre : le contrat est passé avec une collectivité dans le but de faire acquérir au jeune des compétences qui seront ensuite transférables dans le secteur privé.

La mission d'information sénatoriale sur la politique en faveur des jeunes avait souligné tout l'intérêt de ces contrats, qui permettent « de faire acquérir à leurs titulaires des compétences valorisables ensuite dans le secteur privé (dans les domaines de l'informatique, de la communication, de la petite enfance...) selon une logique de « passerelle » entre le public et le privé » 4 ( * ) .

Un dispositif exceptionnel a par ailleurs été institué au profit des jeunes demandeurs d'emploi : le contrat d'accompagnement formation (Caf). Ce contrat comporte des actions de formation, des périodes en entreprise, sous statut de stagiaire de la formation professionnelle, dans le but de faire acquérir au jeune une certification ou l'aider à accéder à un emploi durable. Il est envisagé de conclure 50 000 de ces contrats au cours du dernier trimestre de 2009.

b) La création du nouv eau contrat unique d'insertion

La loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008, généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion, prévoit de substituer aux contrats aidés existants un nouveau contrat unique d'insertion (CUI). Cette réforme entre en vigueur le 1 er janvier 2010.

Le CUI comporte cependant deux volets : son régime est en effet différent selon que l'employeur est dans le secteur marchand ou non marchand ; on distingue ainsi un CUI-CAE pour le secteur non marchand et un CUI-CIE pour le secteur marchand.

Sans revenir sur le détail des règles applicables au CUI 5 ( * ) , votre rapporteur souligne que ce nouveau contrat est plus souple que les contrats existants : il pourra prendre la forme d'un CDI ou d'un CDD et sa durée variera entre vingt et trente-cinq heures. Les conseils généraux travailleront en partenariat avec l'Etat pour adapter la mise en oeuvre du CUI aux particularités locales et pourront participer, par une contribution forfaitaire, à son financement.

Le délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle, Bertrand Martinot, a indiqué à votre rapporteur que le SPE veillerait au suivi des titulaires de CUI, en leur accordant des entretiens réguliers pendant la durée de leur contrat ou en organisant des périodes d'immersion en entreprise pour accroître leur expérience professionnelle.

c) Des moyens budgétaires adaptés

Le projet de budget pour 2010 tient compte de la création du CUI : 920 millions d'euros de crédits sont prévus au titre du CUI-CAE, ce qui permettrait de financer 360 000 contrats, et 90 millions au titre du CUI-CIE, permettant de financer 50 000 contrats. Le nombre de contrats aidés devrait donc se maintenir l'an prochain à un niveau élevé.

Pour encourager la conclusion de CUI-CAE, la majoration du taux de prise en charge introduite en avril 2009 pour le CAE va être maintenue l'an prochain. Plus de 367 millions d'euros sont prévus à cet effet dans le programme 316 de la mission « Plan de relance ».

Par ailleurs, des CAE, CIE, CI-RMA et contrats d'avenir conclus en 2009, voire en 2008, vont continuer de s'appliquer l'année prochaine et devront être financés :

- 65 millions sont ainsi prévus au titre du CIE ;

- 310 millions au titre du CAE ;

- 200 millions au titre du contrat d'avenir ;

- 24 millions au titre du CI-RMA.

De plus, 67 millions sont prévus dans le programme 316 de la mission « Plan de relance de l'économie » pour financer, en 2010, la majoration du taux de prise en charge des CAE conclus en 2009.

Une partie des CIE et des CAE « passerelle » conclus avec des jeunes en 2009 vont également se poursuivre l'an prochain. Les crédits prévus pour les financer sont inscrits dans le programme 316, à hauteur de 102 millions pour les CIE et de 167 millions pour les CAE « passerelle ». Enfin, les crédits prévus pour financer les Caf - 181,5 millions d'euros-  figurent dans le même programme.

d) Les crédits de l'insertion par l'activité économique sont maintenus

L'insertion par l'activité économique regroupe :

- des structures commercialisant des biens et des services : entreprises d'insertion (EI), entreprises de travail temporaire d'insertion (ETTI) et associations intermédiaires (AI) ;

- des organismes développant des activités d'utilité sociale et pouvant commercialiser, le cas échéant, une partie de leur production (ateliers et chantiers d'insertion).

Tous les employeurs du secteur de l'IAE reçoivent une aide de l'Etat (aide au poste ou aide à l'accompagnement du salarié), ce qui leur permet de recruter puis de former des personnes éloignées de l'emploi.

Les statistiques les plus récentes portent sur l'année 2007, voire 2006 pour les AI, de sorte qu'il n'est pas possible d'apprécier dans quelle mesure le secteur de l'IAE a contribué à l'effort de lutte contre le chômage depuis le début de la crise. Il est d'ailleurs regrettable que la collecte et la consolidation des données statistiques soit si lente alors que l'Etat est directement impliqué dans le financement de ce secteur.

Le montant des crédits figurant dans la mission « Travail et emploi » pour 2010 est rigoureusement identique à celui voté en 2009, soit :

- 140 millions d'euros pour les EI et ETTI ;

- 21 millions pour le fonds de développement de l'insertion (FDI), qui a pour mission de soutenir et développer les structures d'insertion ;

- 12,7 millions pour l'aide à l'accompagnement par les AI ;

- 23,5 millions pour les ateliers et chantiers d'insertion.

Seul le montant des exonérations de cotisations sociales pour les structures agréées s'inscrit en léger retrait par rapport à l'an dernier : 10,4 millions contre 11 millions en 2009.

Ces crédits sont cependant complétés par une dotation inscrite dans la mission « Plan de relance », pour un montant de 7,3 millions d'euros. Cette dotation permettra de financer les 1 500 aides aux postes supplémentaires dans les EI qui ont exceptionnellement été autorisées en 2009 dans le cadre du plan de relance.

Il est à noter que l'année 2009 a été marquée par l'entrée en vigueur d'une réforme des modalités de conventionnement entre les structures d'IAE et l'Etat, destinée à mieux évaluer leur performance : des objectifs sont désormais négociés (taux d'insertion dans l'emploi durable, capacité à mobiliser des financements complémentaires de ceux de l'Etat) et complétés par des indicateurs de contexte et d'activité.

3. Les outils de sécurisation des parcours professionnels

La convention de reclassement personnalisé (CRP) et le contrat de transition professionnelle (CTP), qui étaient jusqu'ici intégralement financés par des crédits inscrits dans la mission « Travail et emploi », seront financés, en 2010, sur les crédits du programme 316 de la mission « Plan de relance de l'économie ».

a) La convention de reclassement personnalisé

Les partenaires sociaux ont conclu, le 19 février 2009, une nouvelle convention relative à la convention de reclassement personnalisé.

? La CRP, dont la durée est désormais de douze mois, permet aux salariés des entreprises de moins de mille salariés, licenciés pour motif économique, de bénéficier, après la rupture de leur contrat de travail, d'un ensemble de mesures favorisant leur reclassement professionnel.

Le titulaire de la CRP bénéficie d'un accompagnement renforcé, assuré par un conseiller de Pôle emploi. Des moyens spécifiques sont mis à sa disposition : évaluation des compétences professionnelles, suivi individualisé, mesures d'appui social et psychologique, orientation dans la recherche d'emploi, validation des acquis de l'expérience (VAE), formation. En contrepartie, il s'engage à réaliser les actions définies dans son plan d'action de reclassement personnalisé.

Le titulaire de la CRP perçoit un revenu de remplacement, l'allocation spécifique de reclassement personnalisé (ASR), versée, sans délai de carence, pour une durée maximum de douze mois à compter de la rupture de son contrat de travail.

Sous réserve que le salarié justifie d'au moins deux ans d'ancienneté dans son entreprise, le montant de l'ASR est égal, pendant les huit premiers mois, à 80 % du salaire brut moyen des douze derniers mois, puis à 70 % de ce salaire brut pendant les quatre mois suivants. L'Ani, précité, du 8 juillet 2009 prévoit de fixer le montant de l'ASR à 80 % du salaire de référence pendant la totalité de sa durée de versement. Si le salarié ne justifie pas de deux ans d'ancienneté, le montant de l'ASR est égal à celui de l'allocation chômage.

Le financement de la CRP est assuré par l'employeur, l'Etat et l'Unedic.

L'employeur contribue au financement de l'allocation versée aux bénéficiaires justifiant de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise en s'acquittant, auprès de l'assurance chômage, du paiement d'une somme correspondant à deux mois de salaire de l'intéressé.

Quelle que soit l'ancienneté du salarié, l'employeur verse également une participation au financement des prestations d'accompagnement et des aides au reclassement personnalisé. Cette participation est égale au montant de l'allocation de formation correspondant aux heures acquises par le titulaire de la CRP au titre du droit individuel à la formation (Dif) et n'ayant pas donné lieu à utilisation.

L'Etat participe au financement des mesures d'accompagnement. Dans le projet de loi de finances, 47 millions d'euros sont prévus à ce titre.

L'Unedic, enfin, verse une somme forfaitaire pour chaque adhérent à la CRP. Son montant a été porté à 915 euros à compter du 1 er octobre 2009.

La CRP a été fortement mobilisée depuis le début de la crise : à la fin du mois de mai 2009, on estimait à 58 000 le nombre de titulaires de la CRP, chiffre en augmentation de 138 % sur un an.

Entre juin 2005 et juin 2009, 243 583 adhésions à la CRP ont été enregistrées, dont 70 456 depuis le début de l'année 2009. En moyenne, un tiers des personnes à qui la CRP est proposée acceptent d'entrer dans le dispositif. Il est encore trop tôt pour apprécier si les changements intervenus en cours d'année auront un impact sur ce taux d'adhésion.

A la fin du mois suivant le terme de la CRP, on observe que 60 %, en moyenne, des personnes qui en ont bénéficié sont encore allocataires de l'assurance chômage. Une minorité seulement des titulaires de la CRP parvient donc à se réinsérer dans l'emploi au terme de la convention.

b) Le contrat de transition professionnelle

Mis en place, à titre expérimental, par l'ordonnance n° 2006-339 du 23 mars 2006, le contrat de transition professionnelle (CTP) s'adresse aux salariés dont le licenciement économique est envisagé dans les entreprises de moins de mille salariés.

D'une durée maximale de douze mois, le CTP permet un meilleur accompagnement des salariés dans la phase de transition qui suit leur licenciement économique. Cet accompagnement peut inclure des périodes de formation et de travail au sein d'entreprises ou d'organismes publics. Pendant la durée du contrat, et en dehors des périodes durant lesquelles il exerce une activité rémunérée, le titulaire du CTP perçoit une allocation de transition professionnelle, égale à 80 % du salaire brut moyen perçu au cours des douze mois précédant la conclusion du contrat.

Le CTP a d'abord été créé dans sept bassins d'emplois (Charleville-Mézières, Montbéliard, Morlaix, Saint-Dié, Toulon, Valenciennes et Vitré). La loi de finances pour 2009 a ensuite prolongé l'expérimentation jusqu'au 31 décembre 2009 et l'a étendue à dix-huit nouveaux bassins d'emplois. La loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie a prolongé l'expérimentation jusqu'au 1 er décembre 2010 et l'a étendue à quinze bassins d'emplois supplémentaires, ce qui portera leur nombre total à quarante.

Dans les sept bassins d'emplois initiaux, le contrat est conclu entre le salarié et une filiale de l'Afpa, créée à cet effet, dénommée Transitio. Dans les autres bassins, Pôle emploi est chargé de sa mise en oeuvre.

Le CTP se distingue de la CRP sur plusieurs points :

- son champ d'application est plus large, puisque le CTP est proposé à tous les salariés licenciés, quels que soient leurs droits à l'assurance chômage ;

- l'accompagnement est renforcé : le titulaire du CTP rencontre au moins une fois par semaine son conseiller référent ; le contrat peut comprendre des périodes de travail courtes, en contrat à durée déterminée, pour une durée de neuf mois maximum ; il permet, le cas échéant, de développer un parcours de reconversion comportant une formation longue ;

- il s'accompagne d'incitations fortes au retour à l'emploi : le salarié peut percevoir une indemnité différentielle de reclassement ou recevoir, sous forme de prime, une somme correspondant à la moitié des droits à allocation restant à courir s'il retrouve un emploi avant le terme du contrat.

Au 30 juin 2009, le CTP concernait un peu plus de 6 500 personnes, selon la répartition suivante :

Sites CTP Transitio

Nombre de bénéficiaires

Charleville-Mézières

513

Montbéliard

569

Morlaix

264

Saint-Dié

435

Toulon

555

Valenciennes

427

Vitré

156

Sites CTP Pôle emploi

Nombre de bénéficiaires

Auxerre

40

Calais

320

Châteauroux

346

Châtellerault

92

Douai

226

Dreux

40

Etang de Berre

103

Le Havre

564

Mulhouse

574

Niort

765

Saint-Quentin

50

Les Mureaux-Poissy

80

Vallée de l'Arve

400

Hagetmau

nd

Total

6 519

Les premières évaluations du CTP sont relativement encourageantes : dans les sept bassins initiaux, 8 209 entrées ont été constatées et le taux de retour à l'emploi durable (CDI ou CDD de plus de six mois) s'établit à 58 % pour les cohortes sorties du dispositif.

Le financement du CTP est partagé entre l'Etat, l'assurance chômage, les organismes paritaires collecteurs agréés des fonds de la formation professionnelle (Opca), les régions, l'employeur et le salarié lui-même, par l'apport de son indemnité de licenciement.

Dans le projet de loi de finances, 68 millions d'euros sont prévus au titre du financement du CTP par l'Etat, sur la base d'une hypothèse de 18 650 bénéficiaires en 2010.

B. LA PRIORITÉ DONNÉE À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

En 2009, la formation professionnelle a été une priorité de l'action des pouvoirs publics, comme l'attestent la réforme récemment adoptée par le Parlement mais aussi le soutien apporté aux formations en alternance dans le cadre du « plan d'urge nce pour l'emploi des jeunes ».

1. Un cadre renouvelé

? Le loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle 6 ( * ) vient d'être promulguée. Ce texte reprend largement les dispositions d'un Ani conclu par les partenaires sociaux au mois de janvier.

Cette réforme n'a pas d'incidence sur le budget de l'Etat, puisqu'elle modifie seulement les modalités de financement de la formation professionnelle par les entreprises privées. Il est néanmoins important d'en faire mention dans le présent rapport, dans la mesure où elle renouvelle le cadre juridique dans lequel s'effectue la formation professionnelle dans notre pays.

La réforme prévoit notamment la création d'un fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), qui va permettre de consacrer plus de moyens à la qualification de salariés ou de demandeurs d'emploi dont le faible niveau de formation menace le maintien ou le retour dans l'emploi. De cette façon, les fonds de la formation professionnelle seront davantage orientés vers ceux qui en ont le plus besoin.

? L'année 2009 a également été marquée par l'achèvement du transfert aux conseils régionaux de la compétence générale en matière de formation professionnelle, conformément aux dispositions de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

La dotation de décentralisation versée par l'Etat aux régions s'élève, en 2010, à 1,7 milliard d'euros, en légère progression par rapport à l'an dernier (1,68 milliard).

? L'association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) poursuit son ouverture à la concurrence : en 2007, 80 % de son chiffre d'affaires provenaient encore de subventions ; d'ici quatre ans, 90 % du chiffre d'affaires devraient provenir des commandes, publiques ou privées, obtenues par appel d'offres. Le marché de la formation est très concurrentiel, puisque 13 000 organismes y participent.

Par ailleurs, la loi relative à l'orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie a prévu que les neuf cents salariés de l'Afpa chargés de l'orientation des demandeurs d'emploi seront transférés à Pôle emploi au plus tard le 1 er avril 2010.

En conséquence, la subvention versée par l'Etat à l'Afpa est en baisse : elle sera, l'an prochain, de 178,5 millions d'euros, alors qu'elle était proche de 200 millions en 2009.

2. Un fort soutien aux formations en alternance

De nombreuses mesures ont été adoptées, dans le cadre du « plan d'urgence pour l'emploi des jeunes », pour soutenir les formations en alternance. On pouvait craindre en effet, dans un contexte de récession, que de nombreux jeunes en contrat d'apprentissage ou en contrat de professionnalisation ne parviennent pas à trouver d'entreprise disposée à les accueillir.

Ces mesures complètent les dispositions de droit commun qui encouragent déjà le développement des formations en alternance.

Un employeur qui recrute un apprenti bénéficie ainsi d'exonérations de cotisations et de contributions sociales, dans les conditions prévues aux articles L. 6243-2 et suivants du code du travail. En 2010, près de 940 millions de crédits sont prévus pour financer la compensation à la sécurité sociale de ces exonérations.

Un employeur qui recrute en contrat de professionnalisation un salarié âgé de moins de vingt-six ans ou de plus de quarante-cinq ans bénéficie, quant à lui, d'une exonération de cotisations sociales patronales (hors cotisations d'accidents du travail et de maladie professionnelle). Un peu plus de 72 millions de crédits sont prévus dans le projet de loi de finances pour compenser cette exonération.

Dans la fonction publique, enfin, existe le parcours d'accès aux carrières des fonctions publiques territoriale, hospitalière et de l'Etat ( Pacte) , auquel 3 millions sont consacrés. Cette somme permet de compenser les exonérations de cotisations associées au Pacte.

Les crédits nécessaires au financement de ces dispositifs figurent dans le programme 103 de la mission « Travail et emploi ».

Plusieurs aides complémentaires ont été instaurées en 2009 :

- le décret n° 2009-693 du 15 juin 2009 a créé une prime de 1 800 euros pour l'embauche d'un apprenti supplémentaire ; les crédits prévus pour financer cette mesure s'élèvent à 36 millions, ce qui permettrait de verser 20 000 aides ;

- le décret n° 2009-694, du même jour, a créé une prime pour l'embauche d'un jeune en contrat de professionnalisation, d'un montant de 1 000 euros, porté à 2 000 euros si le jeune a un niveau inférieur au baccalauréat ; une dotation de 144,5 millions est inscrite pour financer cette mesure ;

- le décret n° 2009-695, du même jour encore, a introduit le dispositif « zéro charge » pour le recrutement d'un apprenti dans les entreprises de plus de dix salariés ; ce dispositif prévoit le remboursement à l'employeur, pendant douze mois, des cotisations de retraite complémentaire et d'assurance chômage en cas d'embauche d'un apprenti entre le 24 avril 2009 et le 30 juin 2010 ; la dotation prévue est de 53 millions, sur la base d'une hypothèse de recrutement de 120 000 apprentis.

Les dotations permettant de financer ces mesures sont inscrites dans le programme 316 de la mission « Plan de relance de l'économie ».

Enfin, au cours de la discussion du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a fait adopter un amendement qui majore de 7,5 millions d'euros les crédits consacrés aux formations en alternance. Cette majoration de crédits vise à soutenir les établissements d'enseignement supérieur privés pour qu'ils développent, dans une démarche de contractualisation avec l'Etat, les formations en alternance, notamment l'apprentissage. Le ministère de l'enseignement supérieur y apportera 7,5 millions supplémentaires.

3. Les entrées en formation en alternance devraient se maintenir à un niveau satisfaisant en 2010

Comme l'indique le tableau suivant, les mesures prises en faveur de l'alternance devraient permettre de maintenir le nombre d'entrées dans les différents dispositifs à un niveau satisfaisant, certes en retrait par rapport à 2008, mais avec une perspective de reprise en 2010.

Le nombre de contrats d'apprentissage, en particulier, a augmenté de 4,8 % en septembre, après avoir baissé depuis le début de l'année 2009, ce qui laisse penser que le nombre d'apprentis pourrait se rapprocher, à la fin de l'année, de ce qu'il était un an plus tôt.

Entrées dans les différents dispositifs de formation en alternance

Dispositifs d'exonérations

2008 (réalisées)

2009 (prévisions)

2010 (prévisions)

Contrats d'apprentissage

301 377

241 102

262 206

Contrats de professionnalisation jeune

145 433

147 000

150 000

Contrats de professionnalisation senior

3 750

3 000

3 494

Pacte

897

850

1 077

TOTAL

480 075

391 952

416 777

Source : projet de loi de finances pour 2010

4. Les autres actions en faveur de la formation

? L'Etat assure la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle lorsqu'il s'agit de chômeurs non indemnisés poursuivant une formation agréée.

En 2009, 216 millions d'euros ont été inscrits en loi de finances pour faire face à cette dépense. Environ 50 millions avaient été prélevés sur les fonds de l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). Pour 2010, les crédits sont en légère baisse (208 millions) mais figurent intégralement sur les crédits de la mission.

? Le décret n° 2009-458 du 22 avril 2009 a institué une allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation (Afdef) : cette allocation permet aux demandeurs d'emploi qui ont commencé, en 2009, un stage de formation professionnelle validé par Pôle emploi de continuer à percevoir un revenu, à l'expiration de leurs droits à l'assurance chômage, jusqu'à la fin de leur formation. La durée d'indemnisation cumulée au titre de l'assurance chômage puis au titre de l'Afdef ne peut cependant excéder trois ans.

L'Afdef se substitue exceptionnellement, en 2009, à l'allocation de fin de formation (AFF), supprimée à compter du 31 décembre 2008.

Les crédits prévus dans le projet de loi de finances s'élèvent à 65 millions d'euros. Ils sont établis sur la base d'un effectif moyen de 14 000 bénéficiaires chaque mois. Le fonds unique de péréquation (Fup), qui mutualise les ressources de la formation professionnelle, contribue au financement de l'allocation pour un même montant.

? L'Etat verse des subventions à diverses associations qui interviennent dans le domaine de la formation. Certaines sont actives au niveau national, par exemple l'association pour faciliter l'insertion des jeunes diplômés (Afij) ou le centre d'études supérieures industrielles (Cesi), d'autres sont présentes au niveau régional, comme les centres d'animation et de ressources de l'information sur la formation (Carif) et les observatoires régionaux de l'emploi et de la formation (Oref). Au total, 34 millions seraient consacrés à ces subventions.

? Par une circulaire de la DGEFP en date du 3 janvier 2008, l'Etat a rénové la politique d'intervention du ministère de l'emploi en faveur de l'accès à la formation professionnelle des personnes ne maîtrisant pas un socle minimal de compétences nécessaires à leur insertion ou à leur maintien dans l'emploi. Il est proposé de consacrer, l'an prochain, 41 millions d'euros à cette politique.

? La validation des acquis de l'expérience (VAE) permet à toute personne de faire valider les acquis de son expérience en vue de l'obtention d'un titre ou d'un diplôme. Les crédits prévus dans le projet de loi de finances au titre de la VAE s'élèvent à 13,2 millions d'euros (après 15 millions en 2009).

C. LA SOLUTION DU RECOURS AUX PRÉRETRAITES A ÉTÉ ÉCARTÉE

Le Gouvernement a refusé de faciliter les départs en préretraite, en dépit des demandes qui se sont exprimées dans ce sens. Des voix se sont en effet élevées dans le monde syndical, notamment à la CGT et à FO, pour réclamer un retour à la politique des préretraites.

Attachée à l'objectif d'amélioration du taux d'emploi des seniors, votre commission soutient le choix du Gouvernement. Alors que les préretraites ont été largement utilisées en France pendant une vingtaine d'années, il est maintenant établi qu'elles ne sont pas un outil efficace pour faire reculer le chômage. Et la situation financière très dégradée des régimes de retraite ne laisse que fort peu de marges de manoeuvre en ce domaine.

Le Gouvernement a cependant su se montrer pragmatique, comme en témoigne le rétablissement temporaire de l'allocation équivalent retraite (AER) en 2009.

1. Le déclin des mesures d'âge se poursuit

Il existe trois dispositifs en matière de préretraite : les allocations spéciales du fonds national pour l'emploi (ASFNE), la cessation d'activité de certains travailleurs salariés (Cats) et la préretraite progressive (PRP). En 2003, l'accès à ces dispositifs a été rendu plus restrictif, ce qui a permis de réduire graduellement les crédits qui y sont consacrés. Cette tendance va se poursuivre l'année prochaine.

La préretraite ASFNE permet, dans le cadre d'une procédure de licenciement économique, et sur la base d'une convention entre l'Etat et l'entreprise, d'assurer un revenu de remplacement à des salariés âgés dont l'emploi est supprimé et dont les perspectives de reclassement sont réduites.

L'employeur participe au financement du dispositif, ce qui peut le dissuader d'y avoir recours. Le montant de sa contribution est négocié, au cas par cas, avec l'Etat en fonction de la taille de l'entreprise, de sa situation financière et de la qualité du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) qu'elle a élaboré.

Pour restreindre encore davantage l'accès à l'ASFNE, toute demande de conventionnement portant sur un effectif potentiel d'au moins cinq bénéficiaires doit, depuis le 1 er janvier 2008, être autorisée par l'administration centrale du ministère de l'emploi.

Le nombre de bénéficiaires de l'ASFNE a nettement fléchi depuis 2003. Alors que l'on comptait encore 7 000 entrées dans le dispositif en 2003, on n'en dénombrait plus que 3 400 en 2007 et moins de 2 000 en 2008.

Evolution du nombre de bénéficiaires de l'ASFNE

Nombre de conventions signées

Entrées

Stock moyen

2003

2 191

7 071

33 313

2004

1 913

4 855

27 472

2005

1 628

4 048

22 080

2006

1 452

3 631

17 545

2007

1 064

3 400

14 717

2008

666

1 892

12 358

2009 (au 30 juin)

382

830

10 350 (fin avril)

Source : ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Le nombre de bénéficiaires devrait encore décliner en 2010, quoique de manière sans doute plus modérée que les années précédentes, ce qui explique que les crédits inscrits dans le projet de loi de finances s'inscrivent en retrait par rapport à 2009. Ils s'élèvent à 113 millions d'euros, contre 125 millions l'an passé. Ils seraient complétés par 21 millions provenant d'un fonds de concours.

Le montant de la dotation se maintient à un niveau relativement élevé, en raison de la suppression, en 2008, de la « contribution Delalande », dont la moitié du produit servait autrefois à financer l'ASFNE.

Le dispositif de cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés (Cats) présente la particularité de reposer largement sur la négociation collective. Le départ de salariés en cessation d'activité n'est en effet possible que si un accord de branche le prévoit et si l'entreprise a signé un accord de gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences. Le financement de la Cats est pris en charge partiellement par l'Etat seulement si les salariés ont connu des conditions de travail pénibles.

Ce dispositif est en voie d'extinction : en 2010, un seul accord de branche autorisera toujours des adhésions au dispositif, les autres accords étant arrivés à leur terme. En 2008, 284 adhésions ont été recensées et le nombre de bénéficiaires s'est établi, en moyenne sur l'année, à 15 499, dont 11 371 sont pris en charge par l'Etat, ce qui représente une baisse de 34 % par rapport à 2007. Cette tendance étant appelée à se poursuivre l'année prochaine, les crédits demandés pour 2010, 53,5 millions d'euros, sont en très nette baisse par rapport à 2009 (93,6 millions).

Les conventions de préretraites progressives (PRP), conclues entre l'Etat et un employeur, permettaient à des salariés âgés de plus de cinquante-cinq ans de transformer leur emploi à temps plein en emploi à temps partiel. La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu la suppression de ce dispositif à compter du 1 er janvier 2005. Depuis cette date, il n'est plus possible de signer de nouvelles conventions de préretraite progressive.

La dotation budgétaire consacrée à la PRP couvre donc les dépenses engagées au titre des personnes entrées dans le dispositif avant cette date. Ces dépenses sont en forte baisse car le nombre de bénéficiaires diminue désormais rapidement. La dotation inscrite dans le projet de loi de finances s'élève à 18,7 millions, à comparer avec celle de 47,4 millions votée dans la loi de finances initiale pour 2009.

Evolution du nombre de bénéficiaires des préretraites progressives

Nombre de conventions signées

Entrées

Stock moyen

2003

2 689

15 940

48 657

2004

2 085

7 725

44 742

2005

0

5 096

36 604

2006

0

0

26 753

2007

0

0

15 949

2008

0

0

8 108

2009 (30 avril)

0

0

4 500

Source : ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

2. Une mesure pragmatique : le rétablissement de l'allocation équivalent retraite en 2009

Créée en 2002, l'allocation équivalent retraite (AER) garantit un niveau minimal de ressources aux demandeurs d'emploi qui ont une durée de cotisation à l'assurance vieillesse suffisante pour ouvrir droit à une retraite à taux plein mais qui ne peuvent percevoir leur pension parce qu'ils n'ont pas encore atteint l'âge de soixante ans.

Votre rapporteur a déjà eu l'occasion d'indiquer, dans la première partie de ce rapport, que l'AER a été supprimée, à compter du 1 er janvier 2009 et que le fonds de solidarité ne verse plus, en conséquence, cette allocation qu'aux personnes qui en étaient déjà bénéficiaires avant cette date.

Face à la crise et aux difficultés rencontrées par les seniors pour retrouver un emploi, le Gouvernement a cependant, par le décret n° 2009-608 du 29 mai 2009, rétabli, à titre exceptionnel, cette allocation jusqu'au 31 décembre 2009.

Pour financer, en 2010, le versement de la prestation aux personnes entrées dans le dispositif en 2009, une dotation de 161,4 millions d'euros est inscrite dans le programme 316 de la mission « Plan de relance de l'économie ».

*

Le Gouvernement a eu recours à tous les outils traditionnels de la politique de l'emploi pour lutter contre la hausse du chômage. En 2010, votre rapporteur souhaite que d'autres pistes soient encore explorées, par exemple le télétravail, les groupements d'employeurs ou le prêt de main-d'oeuvre, afin qu'aucun gisement d'emplois ne soit négligé.

III. LES MESURES D'EXONÉRATION FISCALES ET SOCIALES DEMEURENT UN OUTIL MAJEUR DE SOUTIEN À LA CRÉATION D'EMPLOIS

Pour réduire le coût du travail peu qualifié, l'Etat a multiplié les mesures d'exonérations fiscales et sociales. Certaines exonérations sont d'application très générale, d'autres sont ciblées sur un territoire ou un secteur d'activité. Une petite partie seulement de cet effort financier trouve une traduction budgétaire dans les crédits de la mission : les exonérations de cotisations sont, en effet, majoritairement compensées par l'affectation à la sécurité sociale de recettes fiscales, voire ne donnent lieu, pour certaines, à aucune compensation ; les dépenses fiscales se traduisent, pour leur part, par une simple réduction des recettes de l'Etat.

A. LES MESURES GÉNÉRALES

L'allègement général de cotisations sociales et l'exonération sur les heures supplémentaires sont compensés à la sécurité sociale par l'affectation de ressources fiscales. Elles n'apparaissent donc pas dans les crédits de la mission. Compte tenu de l'importance des sommes en jeu, il paraît cependant justifié d'en faire mention dans le présent rapport.

1. L'allégement général de cotisations

Depuis 2003, toutes les entreprises bénéficient d'un allégement de cotisations sociales sur les salaires compris entre 1 et 1,6 Smic. Cet allégement, dégressif, est égal à vingt-six points de cotisations sociales patronales pour un salaire égal au Smic. Depuis le 1 er juillet 2007, il a été porté à 28,1 points de cotisations dans les entreprises de moins de vingt salariés.

Dix millions de salariés sont aujourd'hui concernés par cet allégement. En 2010, son coût devrait être légèrement supérieur à 22 milliards d'euros. Il serait, du fait de la dégradation de l'emploi, en légère diminution (- 1 %) par rapport à 2009.

2. L'exonération sur les heures supplémentaires

Depuis le 1 er octobre 2007, les rémunérations versées au titre des heures supplémentaires sont exonérées de cotisations sociales salariales et se voient appliquer une réduction forfaitaire sur les cotisations patronales. La rémunération perçue par le salarié n'est, en outre, pas imposée au titre de l'impôt sur le revenu.

Ces dispositions ont un impact budgétaire non négligeable. En 2008, le montant des exonérations de cotisations s'est élevé à 2,8 milliards d'euros (2,1 milliards au titre des cotisations salariales et 692 millions au titre des cotisations patronales) et celui de l'exonération d'impôt sur le revenu à 220 millions. Chaque trimestre, 40 % environ des entreprises déclarent des heures supplémentaires. Sur l'ensemble de l'année 2008, ce sont 726 millions d'heures supplémentaires qui ont été effectuées, soit près de trente-neuf heures en moyenne par salarié employé dans les entreprises du secteur concurrentiel.

Les données disponibles pour le premier semestre de 2009 suggèrent, de manière assez prévisible, que le nombre d'heures supplémentaires est en net repli : au premier semestre de 2008, le nombre d'heures supplémentaires s'était élevé à 357 millions ; il n'est plus que de 331 millions au premier semestre de 2009, soit une baisse de plus de 7 %.

Cette baisse est une conséquence directe de la conjoncture : face à la baisse des carnets de commande, le nombre d'entreprises qui ont besoin de faire accomplir des heures supplémentaires à leurs salariés diminue, en toute logique. En septembre 2008, la Dares a interrogé un échantillon de 5 500 entreprises, de toutes tailles : l'évolution de l'activité a été la raison la plus fréquemment évoquée par les employeurs pour justifier le recours aux heures supplémentaires.

B. LES EXONÉRATIONS CIBLÉES

Demeurent dans le budget de l'Etat les crédits destinés à compenser les pertes de recettes supportées par la sécurité sociale en raison de mesures d'exonération territorialisées ou sectorielles.

1. Les aides territorialisées

Les deux dispositifs qui ont la plus forte incidence budgétaire concernent les zones de revitalisation rurale (ZRR).

Les entreprises installées dans une ZRR qui emploient moins de cinquante salariés ont droit à une exonération pour chaque salarié embauché en CDI ou en CDD pour une durée supérieure à douze mois. L'exonération, qui est limitée, depuis 2008, aux salaires inférieurs à 2,4 Smic, porte sur la part du salaire inférieure à 1,5 Smic et s'applique pendant une durée de douze mois. Les crédits prévus dans le projet de loi de finances s'élèvent à 45 millions d'euros. Ils sont en retrait par rapport à l'an passé (69,5 millions), mais l'année 2009 a été marquée par des opérations de régularisation qui ont fait temporairement augmenter le niveau des dépenses et sont aujourd'hui achevées.

Les organismes d'intérêt général situés dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) bénéficient, depuis 2005, d'une exonération de cotisations patronales ; la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 interdit à de nouveaux organismes de bénéficier de cette exonération mais la maintient pour ceux à qui elle s'applique déjà. Les dépenses progressent pourtant encore de manière dynamique, puisque la dotation inscrite dans le projet de loi de finances s'élève à 190,7 millions, contre seulement 158 millions d'euros l'an passé.

2. Les aides sectorielles

Le projet de budget permet de financer les aides aux secteurs des hôtels, cafés et restaurants et des services à la personne.

a) L'aide aux hôtels, cafés et restaurants

L'aide instituée, en 2004, au profit du secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR) a été supprimée par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques. En contrepartie, une des anciennes revendications du secteur a été satisfaite, puisque le taux de TVA applicable à la restauration sur place (hors boissons alcoolisées) a été ramené de 19,6 % à 5,5 %.

Face au refus de certains pays européens d'accepter la baisse du taux de TVA demandée par la France 7 ( * ) , la loi n° 2004-804 du 9 août 2004, relative au soutien à la consommation et à l'investissement, avait instauré une aide à l'emploi dans les hôtels, cafés et restaurants.

D'abord créée à titre transitoire, cette aide avait ensuite été pérennisée par la loi de finances pour 2008, qui l'avait cependant limitée à trente équivalents temps plein afin de se conformer au plafond autorisé par le droit communautaire en matière d'aides de minimis .

Le régime juridique de cette aide à l'emploi a été modifié à plusieurs reprises. A compter du 1 er janvier 2007, il prévoyait le versement :

- dans le secteur de la restauration traditionnelle, d'une aide de 180 euros par salarié, quel que soit son niveau de rémunération ;

- dans le secteur des hôtels avec restaurant, des cafés-tabacs et des débits de boisson, d'une aide d'un montant moyen de 90 euros ;

- d'une aide à l'embauche « d'extras » (travailleurs occasionnels), limitée à 540 euros par entreprise et par an.

En 2009, la dépense assumée par l'Etat au titre de cette aide a été de 530 millions d'euros.

Précisons que l'aide à l'emploi était cumulable avec l'allégement général de cotisations sociales, qui profite fortement au secteur HCR dans la mesure où 40 % de ses salariés sont rémunérés au Smic.

Cette aide n'est pas allée sans contreparties : deux accords collectifs, étendus respectivement le 13 juillet 2004 et le 5 février 2007, ont ainsi prévus :

- la suppression du « Smic hôtelier » : les employeurs étaient auparavant autorisés à rémunérer leurs salariés en dessous du Smic s'ils fournissaient des avantages en nature (nourriture) ;

- l'octroi de sept jours de congé supplémentaires ;

- la participation des employeurs à un régime de prévoyance ;

- la revalorisation des salaires.

Le secteur HCR a été fortement créateur d'emplois entre 2004 et 2007, puisque ses effectifs salariés ont progressé de 7,6 % au cours de cette période pour atteindre 880 000 personnes. Sur la même période, le salaire mensuel de base 8 ( * ) du secteur a progressé de 9,8 %, contre 8,4 % dans l'ensemble des secteurs marchands. En 2008, le secteur est resté créateur net d'emplois (+ 10 000), alors que l'économie dans son ensemble a détruit des emplois.

La baisse de la TVA appliquée depuis juillet dernier devrait priver l'Etat de 2,8 milliards d'euros de recettes. Le Gouvernement a négocié avec les représentants de la branche un « contrat d'avenir », qui comporte plusieurs engagements de la profession :

- le prix d'au moins sept produits de la carte doit diminuer de 11,8% ;

- 40 000 emplois doivent être créés en trois ans ;

- une négociation doit s'ouvrir pour améliorer les salaires, la protection sociale et la formation ;

- des investissements doivent être réalisés pour moderniser les établissements.

Pour l'instant, la baisse des prix tarde à se matérialiser : si l'engagement de la profession est respecté, il devrait se traduire par une baisse des prix de 3 % en moyenne. Or, depuis l'entrée en vigueur de la baisse de TVA en juillet, les prix n'ont baissé que 1,46 % dans les restaurants, selon l'Insee, et seraient restés stables dans les cafés. Dans les restaurants, la baisse ne semble pas devoir se prolonger puisque les prix ont augmenté de 0,1 % en octobre.

Il ne serait pas acceptable que les efforts déployés par la France, au niveau européen, pour obtenir la baisse de la TVA ne se traduisent par aucun résultat significatif en matière de prix ou de créations d'emplois. Certes, il est encore trop tôt pour dresser un bilan définitif d'une mesure récemment entrée en application, mais votre rapporteur compte rester vigilant et exigeant en ce domaine.

Malgré la baisse de la TVA, les employeurs du secteur HCR conservent le bénéfice de l'exonération spécifique introduite par la loi de finances pour 1998 : l'avantage en nature que constitue la fourniture du repas aux salariés est ainsi toujours exonéré de cotisations patronales. Dans le projet de budget, 150 millions d'euros sont prévus pour compenser à la sécurité sociale cette perte de recettes.

b) Le secteur des services à la personne

La loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne a introduit, au bénéfice de ce secteur, des dispositions d'ordre fiscal et social, dont les premiers résultats paraissent encourageants.

Les particuliers employeurs qui déclarent les droits sociaux de leurs salariés sur la base de l'assiette réelle de leur rémunération bénéficient d'un allégement de cotisations patronales de sécurité sociale à hauteur de quinze points. Les organismes agréés prestataires de services à la personne bénéficient également d'une exonération de charges des cotisations patronales pour leurs salariés. Les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour compenser les pertes de recettes subies par la sécurité sociale s'élèvent, respectivement, à 303,2 millions et 223 millions d'euros. Ils sont en forte progression par rapport à 2009, où ils s'élevaient seulement à 169,7 millions et 162,6 millions.

Les entreprises qui participent au financement des services à la personne, notamment par l'abondement du chèque emploi service universel (Cesu préfinancé), bénéficient d'un crédit d'impôt sur les sociétés, à hauteur de 25 %, et les particuliers employeurs peuvent déduire de l'impôt sur le revenu 50 % des sommes versées pour des services à la personne, dans la limite d'une dépense de 12 000 euros par an. Depuis 2008, les particuliers non imposables peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sous certaines conditions. La perte de recettes subie par l'Etat au titre de l'impôt sur le revenu est évaluée à 3 milliards d'euros en 2010.

La loi a également institué l'agence nationale des services à la personne (ANSP), chargée d'oeuvrer au développement et à l'organisation du secteur. Elle disposerait d'une dotation budgétaire de 20 millions d'euros en 2010, identique à celle de 2009.

Le dynamisme du secteur des services à la personne s'est confirmé en 2008 : le nombre d'emplois créés est estimé à 95 000 et la progression du nombre d'heures travaillées à 4 %. Le nombre de prestataires agréés est proche de 15 200 alors qu'il était seulement de 12 000 en 2007. Enfin, plus de 18 millions de Cesu préfinancés ont été émis, pour un montant total de 289 millions d'euros en progression de 65 % par rapport à 2007.

3. Une aide exceptionnelle en faveur des TPE

Une mesure d'incitation à la création d'emplois dans les très petites entreprises (TPE) a été décidée dans le cadre du plan de relance et mise en oeuvre par le décret n° 2008-1357 du 19 décembre 2008.

L'aide bénéficie, en 2009, aux entreprises de moins de dix salariés. Son montant est dégressif : maximal pour l'embauche d'un salarié payé au Smic (184,94 euros), il devient nul pour un salaire égal à 1,6 Smic.

Dès le mois de septembre, un demi-million d'embauches avaient donné lieu au versement de cette aide. Sur l'ensemble de l'année, le secrétariat d'Etat à l'emploi table sur un total de 700 000 embauches, pour un coût de 400 millions d'euros, ce qui correspond au nombre de recrutements auquel procèdent ordinairement les TPE au cours d'une année. La mesure aurait donc permis de maintenir constant le niveau des embauches dans ces entreprises malgré la gravité de la récession.

Fort de ce succès, le Gouvernement a décidé, par le décret n° 2009-1396 du 16 novembre 2009, de prolonger l'aide pour les embauches effectuées jusqu'au 30 juin 2010.

C. LE SOUTIEN AUX CRÉATEURS D'ENTREPRISES

En 2009, deux dispositifs d'aide à la création d'entreprise - l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles (Eden) et les chèques conseils - ont fusionné pour créer le « nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise » (N acre).

1. Le dispositif « nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise »

Le Nacre a pour objectif de favoriser, chaque année, le développement d'entreprises créées ou reprises par 20 000 demandeurs d'emploi ou bénéficiaires de minima sociaux.

Pour ce faire, une offre de services d'accompagnement renforcé est organisée sur l'ensemble du territoire. Il est possible d'y avoir recours pour le montage du projet, son démarrage et pour soutenir le développement de l'entreprise pendant les trois années suivant sa création. Cet accompagnement est réalisé par des organismes professionnels conventionnés par l'Etat et la Caisse des dépôts et consignations.

Le créateur ou repreneur d'entreprise peut, par ailleurs, bénéficier d'un prêt à taux zéro, facilitant le recours au crédit et aux services bancaires professionnels. La Caisse des dépôts a apporté à cette fin 100 millions d'euros.

Pour l'Etat, cette réforme s'est réalisée à budget constant, grâce au redéploiement des fonds alloués aux dispositifs Eden et chèques conseils (40 millions).

En août 2009, 8 149 porteurs de projets étaient accompagnés dans le cadre du parcours Nacre et 2 327 prêts à taux zéro, d'un montant moyen de 5 415 euros, avaient été accordés.

Nacre se poursuivra l'an prochain et l'Etat prévoit d'y consacrer un budget identique de 40 millions d'euros.

2. Les exonérations de cotisations en faveur des créateurs d'entreprise

Plusieurs dispositifs d'exonération ont été mis en place pour encourager la création d'entreprise.

La loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique a exonéré les salariés ou les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé (API) qui créent ou reprennent une entreprise des cotisations dues au titre de cette nouvelle activité. Près de 12 millions de crédits sont prévus pour compenser cette exonération à la sécurité sociale.

La loi n° 2008-776 de modernisation de l'économie a modifié le régime social de la micro-entreprise, en supprimant, pour les auto-entrepreneurs, toute cotisation sociale minimale. Ainsi aucune cotisation n'est due si le chiffre d'affaires réalisé est nul.

Cette mesure privera la sécurité sociale de 157,5 millions de recettes en 2010, compensées sur les crédits de la mission.

L'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises (Accre) leur permet de disposer d'une exonération de cotisations sociales pendant douze mois, trente-six mois s'ils optent pour le statut de la micro-entreprise. Elle n'occasionne pas de dépense budgétaire car la mesure d'exonération ne fait pas l'objet d'une compensation à la sécurité sociale, à qui elle coûtera, l'an prochain, 157 millions de recettes.

*

* *

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission approuve ce projet de budget qui répond au problème posé par la montée du chômage tout en préparant efficacement la sortie de crise.

Elle a donc émis un avis favorable à l'adoption des crédits du travail et de l'emploi pour 2010, ainsi qu'à l'adoption des articles rattachés 61 à 63, sous réserve de l'adoption de l'amendement qu'elle vous présente .

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 61 (art. L. 5134-30-1 et L. 5423-24 du code du travail) - Adaptation des dispositions relatives au financement du contrat unique d'insertion pour certains publics

Objet : Cet article propose, d'une part, de majorer, en 2010, le montant maximal de l'aide que peut recevoir un atelier ou un chantier d'insertion lorsqu'il recrute un salarié en contrat unique d'insertion (CUI), d'autre part, de prévoir que l'aide à l'employeur est versée directement par l'Etat en cas d'embauche en CUI d'une personne titulaire de l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I propose de majorer, pour l'année 2010, le montant de l'aide financière qui peut être versée aux ateliers et chantiers d'insertion conventionnés avec l'Etat pour l'embauche d'un salarié en CUI.

Actuellement, un atelier ou un chantier d'insertion qui recrute un salarié en contrat aidé peut bénéficier d'une aide financière dont le montant peut atteindre jusqu'à 105 % du Smic 9 ( * ) .

La loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion remplace, à compter du 1 er janvier 2010, les contrats aidés existants par un contrat unique d'insertion (CUI), qui comporte deux volets : contrat d'accompagnement vers l'emploi (CUI-CAE) dans le secteur non marchand et contrat initiative-emploi (CUI-CIE) dans le secteur marchand.

La loi dispose que le montant maximal de l'aide financière versée en cas d'embauche en CUI-CAE est égal à 95 % du Smic, sans prévoir d'exception pour les ateliers et chantiers d'insertion.

Afin de les soutenir dans une période économique difficile, il est proposé de majorer, l'an prochain, le montant de l'aide, qui pourrait ainsi atteindre 105 % du Smic brut par heure travaillée, dans la limite de la durée légale hebdomadaire du travail.

L'étude d'impact qui accompagne cet article indique que cette majoration est proposée à titre transitoire, dans l'attente de la mise en oeuvre d'une réforme du financement de l'insertion par l'économique, qui prévoirait une modulation de l'aide à l'employeur.

Le paragraphe II poursuit un tout autre objet : il propose d'abroger l'article L. 5423-24 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi généralisant le RSA.

Cet article, qui ne devait entrer en vigueur que l'an prochain, dispose que le fonds de solidarité gère les moyens de financement de l'aide versée aux employeurs en cas d'embauche en CUI d'une personne titulaire de solidarité spécifique (ASS).

La suppression de cette disposition a pour effet de transférer à l'Etat la gestion de cette aide.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

La première disposition proposée par cet article va dans le sens d'un soutien renforcé au secteur de l'insertion par l'activité économique, dont votre commission a souligné le rôle crucial en cette période de crise. Elle est donc favorable à cette mesure temporaire de soutien aux ateliers et chantiers d'insertion, dont le coût est estimé à 23,8 millions en 2010 et à 15,5 millions en 2011.

La seconde simplifiera utilement le circuit de financement des contrats aidés en écartant l'intervention du fonds de solidarité, qui n'apparaît pas indispensable.

Votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.

Article 62 (art. L. 5141-5 du code du travail) - Public bénéficiaire du nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, précise quels peuvent être les bénéficiaires d'actions d'accompagnement à la création ou à la reprise d'entreprise financées par l'Etat.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le premier alinéa de l'article L. 5141-5 du code du travail, dans sa rédaction actuelle, dispose que « l'Etat peut participer par convention au financement d'actions de conseil, de formation et d'accompagnement organisées avant la création ou la reprise d'entreprise et pendant les trois années suivantes ». Depuis 2009, ces actions d'aide à la création ou à la reprise sont organisées dans le cadre du parcours Nacre (nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise).

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale, sur l'initiative du Gouvernement, propose une nouvelle rédaction pour cet alinéa : « l'Etat peut, par convention, participer au financement d'actions d'accompagnement et de conseil organisées avant la création ou la reprise d'entreprise, et pendant les trois années suivantes, en faveur des personnes éloignées de l'emploi pour lesquelles la création et la reprise d'entreprise sont des moyens d'accès, de maintien et de retour à l'emploi. Les conditions d'application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. »

Cette formulation se distingue de celle aujourd'hui en vigueur sur deux points : elle précise qui peut bénéficier de mesures d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise - des « personnes éloignées de l'emploi » - et elle renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin d'apporter les nécessaires mesures d'application.

II - La position de votre commission

Cet article, qui n'est sans doute pas indispensable sur le plan juridique, revêt une finalité surtout politique : l'objectif est d'associer le Parlement à la réforme des conditions d'accès aux aides à la création d'entreprise que le Gouvernement envisage de prendre par décret.

Actuellement, le bénéfice des aides à la création d'entreprise est limité aux publics éligibles à l'Accre. Ces publics sont énumérés à l'article L. 5141-1 du code du travail et incluent, notamment, les demandeurs d'emploi indemnisés, les demandeurs d'emploi non indemnisés inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois au cours des dix-huit derniers mois, les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) ou du revenu de solidarité active (RSA), les salariés qui reprennent leur entreprise si celle-ci est en difficulté et les créateurs d'entreprise en zone urbaine sensible (Zus).

Lors de la discussion en séance publique à l'Assemblée nationale, le secrétaire d'Etat à l'emploi, Laurent Wauquiez, a critiqué le caractère parfois arbitraire de ces critères d'éligibilité : « Pourquoi un demandeur d'emploi devrait-il attendre six mois avant de déposer un projet de création d'entreprise ? S'il a un projet, autant l'aider tout de suite. De plus, s'il perçoit des minima sociaux, il ne peut être aidé sans avoir eu, au préalable, le statut de demandeur d'emploi. À mon sens, il faut supprimer ces stupides scories bureaucratiques et aider non des statuts, mais des gens. Tel est le but de l'amendement . » 10 ( * )

Votre commission partage ce souci d'aider les personnes indépendamment de leur statut et est favorable à ce que les critères d'accès aux aides à la création d'entreprise soient assouplis.

On peut cependant se demander si la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale n'est pas un peu restrictive au regard de l'objectif affiché : une personne qui vient tout juste de perdre son emploi peut-elle être considérée comme « éloignée de l'emploi » et être éligible, à ce titre, à une aide ? Par ailleurs, il pourrait être justifié d'aider des personnes qui ont certes un emploi, mais un emploi précaire ; or l'expression « personne éloignée de l'emploi » ne semble pas pouvoir s'appliquer à eux, sauf à l'interpréter de manière très extensive.

En conséquence, pour lever toute incertitude sur le plan juridique, votre commission vous propose, par voie d'amendement, de viser plutôt les personnes sans emploi ou rencontrant des difficultés pour s'insérer durablement dans l'emploi.

Enfin, il n'est pas nécessaire d'ajouter qu'un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application de cette disposition, dans la mesure où l'article L. 5141-6 du code du travail le prévoit déjà.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 63 (art. L. 7232-4 du code du travail) - Extension aux régies de quartier du régime d'agrément des associations de service à la personne

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, propose d'étendre aux régies de quartier l'agrément prévu pour les services à la personne.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Les régies de quartier sont des associations qui jouent un rôle important en matière de politique de la ville et d'insertion par l'activité économique. Elles offrent des services collectifs et individuels aux habitants et répondent à des besoins non couverts par les entreprises du secteur marchand.

Ces régies sont actuellement exclues du bénéfice des mesures incitatives au développement des services à la personne : taux de TVA réduit, réduction d'impôt sur le revenu, exonération de charges sociales, possibilité de payer du personnel par chèque emploi service universel (Cesu). Le bénéfice de ces dispositions est en effet subordonné à la délivrance d'un agrément, qui ne peut être accordé qu'aux structures consacrées exclusivement aux activités de services à la personne, ce qui n'est pas le cas des régies de quartiers.

Des exceptions sont toutefois prévues, à l'article L. 7232-4 du code du travail, pour les structures qui, par leur nature ou leur fonctionnement, ne présentent pas de menace pour la concurrence. Tel est notamment le cas des associations intermédiaires, dont l'activité consiste à embaucher des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales ou professionnelles particulières, afin de les mettre, à titre onéreux, à la disposition de personnes physiques ou morales.

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des affaires sociales, vise à permettre aux régies de quartier, qui s'adressent à un public similaire à celui des associations intermédiaires et qui ont des activités comparables, d'obtenir l'agrément « services à la personne ».

II - La position de votre commission

La mesure proposée est de nature à encourager le développement des régies de quartier, qui effectuent un travail de terrain utile. Son impact budgétaire, quoique non précisément chiffré par l'administration, apparaît en outre plus modeste.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 25 novembre 2009 , sous la présidence de Muguette Dini, présidente, la commission a procédé à l' examen du rapport pour avis d' Alain Gournac sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission « Travail et emploi » et les articles 61, 62 et 63 rattachés).

Alain Gournac , rapporteur pour avis, a souligné que le chômage a progressé de 25 % en un an, sous l'effet de la grave récession qu'a connue l'économie française. Si l'ampleur des problèmes à résoudre invite chacun à la modestie, elle ne doit pas conduire à céder au pessimisme : la France a en effet mieux résisté à la crise que d'autres pays développés et on discerne quelques signes encourageants de reprise.

En 2009, les pouvoirs publics ont mobilisé tous les outils de la politique de l'emploi pour atténuer la montée du chômage ; il leur faut poursuivre cet effort et préparer la sortie de crise, en veillant tout particulièrement à éviter que les personnes qui ont perdu leur emploi ne soient victimes du chômage de longue durée.

Les crédits de la mission s'élèvent à 11,2 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter, si l'on veut avoir une vision globale de l'effort consenti en faveur de l'emploi, 1,4 milliard d'euros de crédits figurant dans la mission « Plan de relance de l'économie », 11 milliards d'euros de dépenses fiscales et près de 30 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales. L'ensemble des moyens affectés au travail et à l'emploi est donc supérieur à 52 milliards d'euros.

Ces moyens servent d'abord à financer le service public de l'emploi, qui est actuellement très sollicité.

Pôle emploi, l'opérateur issu de la fusion de l'ANPE et des Assedic, a eu du mal à faire face, pendant le premier semestre de l'année, à l'afflux des demandeurs d'emploi, qui est intervenu à un moment où il était dans une phase de réorganisation interne. Il a cependant réussi à surmonter ces difficultés en recrutant, en cours d'année, plus de 2 800 personnes qui sont venues renforcer ses équipes, et en lançant un appel d'offres pour confier le placement de certains demandeurs d'emploi à des opérateurs privés.

La fusion s'est poursuivie, sur le plan opérationnel, à un rythme soutenu : le nombre de sites mixtes, rassemblant les services de l'ANPE et des Assedic, devrait atteindre 850 à la fin de l'année ; 16 000 agents ont reçu une formation pour devenir plus polyvalents ; enfin, la négociation de la nouvelle convention collective qui va s'appliquer aux salariés de droit privé de Pôle emploi a été menée à son terme. Il faut saluer l'ampleur du travail accompli par la direction et les salariés de Pôle emploi et souligner la pertinence du choix de la fusion. En 2010, la subvention de l'Etat à Pôle emploi s'élèvera à 1,36 milliard d'euros, complétée par une dotation de 3 milliards versée par l'assurance chômage.

La situation financière de l'Unedic s'est dégradée du fait de la crise : l'augmentation du nombre de demandeurs d'emploi indemnisés combinée à la baisse des recettes a produit un déficit de 900 millions en 2009. La dette cumulée par l'assurance chômage s'élève désormais à 5,9 milliards d'euros et devrait atteindre 9,5 milliards l'an prochain.

Puis Alain Gournac , rapporteur pour avis, a expliqué que le Gouvernement a mobilisé une grande variété d'outils pour lutter contre le chômage :

- le recours au chômage partiel a été facilité : le nombre d'heures indemnisables a été porté à 1 000 heures dans l'année et leur indemnisation a été améliorée ; les dépenses d'indemnisation ont, par conséquent, fortement augmenté et absorbé 300 millions d'euros de crédits ; pour 2010, une dotation plus modeste - 60 millions d'euros - est prévue ; il serait d'ailleurs souhaitable que le Gouvernement précise quelles sont ses intentions dans le cas où cette dotation se révèlerait insuffisante ;

- le Gouvernement s'est donné pour objectif la conclusion, en 2009, de 380 000 contrats aidés dans le secteur non marchand et de 100 000 contrats dans le secteur marchand ; en 2010, la dotation inscrite dans le projet de loi de finances, un peu supérieure à 1 milliard d'euros, permettra de financer 360 000 contrats uniques d'insertion (CUI) dans le secteur non marchand et 50 000 dans le secteur marchand ;

- le nombre de conventions de reclassement personnalisé (CRP) et de contrats de transition professionnelle (CTP), qui visent à sécuriser les parcours professionnels, a été fortement accru ; créé à l'origine, à titre expérimental, dans seulement six bassins d'emploi, le CTP s'appliquera prochainement dans quarante bassins d'emploi touchés par la crise ; plus de 110 millions d'euros sont inscrits dans le projet de budget pour financer ces dispositifs en 2010 ;

- dans le cadre du « plan d'urgence pour l'emploi des jeunes », des mesures ont été prises pour soutenir les formations en alternance : l'embauche d'un jeune en contrat de professionnalisation ou en apprentissage ouvre droit à une prime et un dispositif « zéro charge » s'applique en cas de recrutement d'un apprenti dans une entreprise de plus de dix salariés ; plus de 200 millions d'euros sont inscrits sur les crédits de la mission « plan de relance de l'économie » pour financer ces mesures en 2010.

Le Gouvernement a su, en revanche, résister à la tentation d'avoir recours plus largement aux dispositifs de préretraites, qui ne sont ni efficaces pour lutter contre le chômage, ni compatibles avec la situation financière des caisses de retraite. Face aux difficultés rencontrées par les seniors pour retrouver un emploi, il a cependant rétabli, à titre exceptionnel, l'allocation équivalent retraite (AER) en 2009.

A l'avenir, il est nécessaire que de nouvelles pistes soient explorées, par exemple dans le domaine du télétravail, des groupements d'employeurs ou du prêt de main-d'oeuvre, afin qu'aucun gisement de créations d'emplois ne soit négligé.

Alain Gournac , rapporteur pour avis, a ensuite rappelé que la politique de l'emploi repose également sur de nombreuses mesures d'exonérations fiscales et sociales : d'abord, l'allègement général de cotisations sociales, dont le montant devrait être supérieur à 22 milliards d'euros l'an prochain ; ensuite l'exonération applicable aux heures supplémentaires qui a coûté, en 2008, environ 3 milliards d'euros sachant que le nombre d'heures supplémentaires devrait diminuer en 2009 sous l'effet de la récession ; enfin, diverses mesures d'exonération applicables à certains territoires ou à certains secteurs. Sur ce point, l'année 2009 a été marquée par la décision de ramener à 5,5 % le taux de TVA dans la restauration, ce qui occasionne un manque à gagner pour les finances publiques de 2,8 milliards d'euros. En contrepartie, l'aide à l'emploi qui avait été instaurée en 2004 a été supprimée et la profession a conclu un « contrat d'avenir » avec l'Etat, qui prévoit des baisses de prix, des investissements, 40 000 recrutements entre 2009 et 2011 et l'ouverture de négociations sur les salaires, la protection sociale et la formation.

Evidemment, il ne serait pas acceptable que les efforts considérables déployés au niveau européen pour obtenir cette baisse de la TVA ne se traduisent par aucune avancée significative en matière de prix ou de création d'emplois. S'il est encore trop tôt pour dresser le bilan définitif d'une mesure qui est entrée en vigueur au mois de juillet, il importe de rester vigilant et exigeant à l'égard des restaurateurs.

Par ailleurs, dans le cadre du plan de relance, une mesure exceptionnelle d'aide aux TPE a été décidée : les entreprises de moins de dix salariés perçoivent ainsi une aide en cas d'embauche d'un salarié, dont le montant est maximal pour un salarié payé au Smic (185 euros) puis décroît pour s'annuler à 1,6 Smic. En septembre, 500 000 embauches avaient déjà donné lieu au versement de cette aide, ce qui a incité le Gouvernement à prolonger la mesure jusqu'au 30 juin 2010.

Enfin, deux dispositifs d'aide aux créateurs d'entreprise - l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles (Eden) et les chèques conseils - ont fusionné, en 2009, pour créer le « nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise » (Nacre). Le Nacre, auxquels sont consacrés 40 millions d'euros de crédits, permet aux créateurs d'entreprise de bénéficier d'un accompagnement au moment du lancement de leur projet et dans les trois années qui suivent et donne également accès à des prêts à taux zéro.

Pour conclure, Alain Gournac , rapporteur pour avis, a présenté les trois articles rattachés aux crédits de la mission :

- l'article 61 majore, en 2009, le taux maximal de prise en charge des CUI conclus par un atelier ou un chantier d'insertion, afin de le porter de 95 % à 105 % du Smic ; cette mesure est de nature à aider les chantiers et ateliers d'insertion à traverser la crise, dans l'attente de la réforme de leur financement qui devrait intervenir en 2011 ;

- l'article 62 précise qui peut bénéficier de mesures d'aide à la création d'entreprise, en indiquant qu'il s'agit de « personnes éloignées de l'emploi », point sur lequel il proposera un amendement au vote de la commission ;

- l'article 63, enfin, étend aux régies de quartier l'agrément prévu pour les associations de services à la personne, ce qui leur permettrait de bénéficier de dispositions fiscales et sociales avantageuses.

Janine Rozier s'est émue du grand nombre de dispositifs et de contrats existants dans le domaine de l'emploi. Elle s'est par ailleurs interrogée sur l'efficacité des services chargés d'aider les demandeurs d'emploi, si l'on en juge par les résultats très positifs obtenus par certaines émissions de radio ou de télévision qui proposent, avec succès, de faciliter la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi. Elle a ensuite déploré que de trop nombreux jeunes enchaînent des stages qui ne débouchent sur aucun emploi, alors que les entreprises du bâtiment peinent à recruter, en particulier pour les travaux de second oeuvre.

Isabelle Debré a regretté la diabolisation du télétravail alors qu'il peut être utile, par exemple pour permettre à des personnes à mobilité réduite d'exercer une activité professionnelle. Elle a ensuite indiqué qu'elle accueille en stage deux ou trois jeunes, chaque année, et suggéré à tous ses collègues d'en faire de même.

Sans nier l'utilité des actions mises en oeuvre pour l'emploi, Gérard Dériot s'est demandé s'il ne serait finalement pas plus efficace de diminuer les charges des entreprises plutôt que de continuer à financer tous ces dispositifs. Par ailleurs, si les formations en alternance sont un moyen efficace de former les futurs salariés, elles le sont aussi pour les futurs chefs d'entreprise, dans la mesure où le jeune apprenti peut se familiariser avec les problèmes de gestion au contact de son maître d'apprentissage.

Raymonde Le Texier a fait part de son admiration devant la capacité du rapporteur à présenter un rapport optimiste alors que la situation est si dramatique. Elle a rappelé que les parlementaires de son groupe avaient émis des réserves concernant le calendrier de mise en oeuvre de la fusion de l'ANPE et des Assedic, qui leur paraissait trop précipité. Or, les agents de Pôle emploi manquent incontestablement de la formation nécessaire pour orienter efficacement l'ensemble des demandeurs d'emploi.

En ce qui concerne les restaurateurs, les rodomontades des politiques ne les impressionnent à l'évidence guère : ils ont utilisé la baisse de la TVA pour augmenter leurs marges, sans revaloriser les salaires ni améliorer les conditions de travail. Dans la mesure où le Président de la République a d'ores et déjà décidé qu'il ne reviendrait en aucun cas sur la baisse de la TVA, de quels moyens l'Etat dispose-t-il pour faire pression sur les restaurateurs et quel rôle reconnaît-on encore au Parlement dans ce cadre ?

Les jeunes rencontrent, par ailleurs, d'énormes difficultés pour trouver une entreprise disposée à les accueillir en apprentissage, au point qu'un grand nombre d'entre eux sont contraints d'interrompre leur formation, tandis que les seniors continuent d'être licenciés dès l'âge de cinquante ans.

Si le nombre de créations d'entreprise est en progression, il faut rappeler que 40 % seulement des auto-entrepreneurs déclarent un chiffre d'affaires : les autres n'ont pas de réelle activité.

Elle s'est ensuite étonnée de l'affirmation d'Isabelle Debré selon laquelle le télétravail aurait été diabolisé : peut-être a-t-elle voulu faire référence à la proposition du député Frédéric Lefebvre d'autoriser les personnes en arrêt maladie à travailler chez elles, qui a suscité effectivement une légitime opposition ?

Gisèle Printz a dénoncé l'absence de revalorisation, depuis plusieurs années, des crédits destinés aux entreprises d'insertion, qui a conduit une entreprise de son département à se séparer d'une dizaine de ses collaborateurs. Elle a appelé de ses voeux un contrôle des aides versées aux entreprises, afin de s'assurer que les exonérations dont elles bénéficient ont bien une contrepartie en termes d'emploi.

Annie Jarraud-Vergnolle a rappelé que la ministre de l'économie, de l'emploi et de l'industrie s'était engagée à ce que chaque conseiller de Pôle emploi suive, à terme, soixante demandeurs d'emploi ; or, dans de nombreux départements dont le sien, les Pyrénées-Atlantiques, ce ratio est actuellement de 1 pour 120. Les recrutements auxquels a procédé Pôle emploi pour renforcer ses équipes sont donc manifestement insuffisants.

Elle a ensuite demandé à quelle date sera effectif le transfert du recouvrement des cotisations d'assurance chômage aux Urssaf.

Elle a souhaité savoir pour quelles raisons le dispositif « zéro charges », mentionné par le rapporteur, ne s'applique qu'aux entreprises de plus de dix salariés, alors que ce sont souvent les plus petites entreprises qui recrutent des apprentis.

Concernant le parcours Nacre, enfin, elle a demandé si les créateurs d'entreprises continuent à bénéficier de prestations d'accompagnement pour le développement commercial ou d'appui à la gestion auxquelles ils pouvaient accéder autrefois grâce aux chèques conseils.

Yves Daudigny a fait observer qu'il existe en France des emplois non pourvus, alors que le nombre de demandeurs d'emploi est élevé. On invoque traditionnellement la faiblesse des salaires ou les mauvaises conditions de travail pour comprendre cette situation, mais ces explications paraissent aujourd'hui insuffisantes : c'est donc à une véritable revalorisation de certains métiers qu'il faut désormais procéder.

Il a insisté sur la gravité de la crise de l'emploi, qui frappe en particulier l'industrie. Dans le département de l'Aisne, dont il est l'élu, une usine très performante de fabrication de fils de cuivre va bientôt fermer ses portes, entraînant la disparition de deux cents emplois, parce qu'il est possible d'acheter ces fils moins cher auprès de fournisseurs étrangers. Il ne sert à rien d'avoir une politique de l'emploi si l'on n'a pas, en même temps, une politique industrielle et si l'on ne change pas les stratégies des grands groupes dont la seule préoccupation semble être d'offrir une rémunération à deux chiffres à leurs actionnaires.

A son tour, Alain Vasselle a souligné la difficulté persistante que rencontrent les jeunes pour trouver un stage en entreprise. Il a ensuite fait observer que le dispositif des zones franches urbaines a parfois pour effet de pénaliser des territoires qui se trouvent en périphérie de la zone que l'on souhaite avantager : dans son département de l'Oise, il a observé que des entreprises, auparavant implantées dans de petites communes rurales, se sont installées dans un quartier difficile de Beauvais pour y bénéficier d'avantages fiscaux et sociaux. Ne faudrait-il pas limiter le bénéfice de ces avantages aux entreprises nouvellement créées, afin d'éviter ces phénomènes de délocalisation ?

Alain Gournac , rapporteur pour avis, a répondu à Janine Rozier que toutes les initiatives destinées à favoriser la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi méritent d'être encouragées. Il a ensuite regretté le caractère encore trop théorique de certaines formations dispensées par Pôle emploi et insisté sur l'« intelligence de la main » et sur la nécessité de revaloriser l'image de métiers qui cherchent à recruter mais ne trouvent pas de candidats.

En réponse à Isabelle Debré, il a estimé que plus que le télétravail, c'est le travail lui-même qui est diabolisé par certains. En ce qui concerne le télétravail, le problème qui se pose est celui du manque de contacts humains dont souffrent les salariés qui le pratiquent. Il peut néanmoins constituer effectivement une réponse adaptée aux problèmes de mobilité des travailleurs handicapés.

Répondant à Raymonde Le Texier, il a d'abord insisté sur le fait que la France a mieux résisté à la crise que d'autres pays. Au sujet de Pôle emploi, la direction a l'intention de proposer, l'an prochain, des formations complémentaires aux agents qui rencontrent des difficultés pour exercer leurs nouvelles fonctions. Par ailleurs, le comportement des entreprises à l'égard des seniors est en train de changer. Enfin, il faut se réjouir du succès du statut de l'auto-entrepreneur, même s'il est vrai que toutes les entreprises nouvellement créées ne pourront pas perdurer.

En réponse à Gisèle Printz, il a indiqué que les exonérations dont bénéficient les entreprises ne sont pas conditionnées à des engagements d'embauches mais visent à créer un environnement favorable à la création d'emplois. Il s'est engagé à examiner le problème qu'elle a soulevé relatif au montant des aides aux entreprises d'insertion.

Répondant à Annie Jarraud-Vergnolle, il a indiqué qu'effectivement, le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller de Pôle emploi a augmenté sous l'effet de la crise et est aujourd'hui trop élevé. Si le dispositif « zéro charge » s'applique seulement aux entreprises de plus de dix salariés, c'est parce que les entreprises qui sont en dessous de ce seuil sont déjà exonérées de cotisations sociales patronales en cas d'embauche d'un apprenti. Dans le parcours Nacre, une offre de services d'accompagnement est organisée sur l'ensemble du territoire ; il est possible d'y avoir recours pour le montage du projet, son démarrage et pour soutenir le développement de l'entreprise pendant les trois années suivant sa création.

Comme l'a signalé Yves Daudigny, des emplois sont effectivement non pourvus et un grand nombre de suppressions d'emplois résultent de la concurrence internationale.

Ainsi que l'a indiqué Alain Vasselle, il est exact que le dispositif des zones franches peut avoir des effets pervers, ce qui justifierait que l'on examine de quelle manière on pourrait éviter les délocalisations qu'il a évoquées.

A Raymonde Le Texier qui demandait les raisons qui expliquent l'augmentation de 24 % des crédits de l'action « Dialogue social et démocratie sociale » en 2010, Alain Gournac , rapporteur pour avis, a répondu que cette augmentation résulte, en grande partie, du lancement du projet Mars (mesure de l'audience de la représentativité syndicale), qui est une conséquence de la réforme de la représentativité syndicale adoptée en 2008.

La commission a ensuite examiné l'amendement présenté par le rapporteur sur les articles rattachés à la mission.

Elle a adopté l' article 61 (adaptation des dispositions relatives au financement du contrat unique d'insertion pour certains publics) sans modification.

A l' article 62 (public bénéficiaire du nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise), elle a adopté un amendement tendant à élargir le champ des bénéficiaires des aides à la création d'entreprise.

Elle a adopté l' article 63 (extension aux régies de quartier du régime d'agrément des associations de service à la personne) sans modification.

Elle a enfin donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi ».

* 1 Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, qui dépend des ministères en charge du travail et de l'emploi.

* 2 Cf. Rapport spécial AN n° 1967, annexe 45 (XIII e législature) sur le projet de loi de finances pour 2010, fait par Chantal Brunel, au nom de la commission des finances, p. 29.

* 3 Il s'adresse aux titulaires du RMI, de l'allocation spécifique de solidarité, de l'allocation parent isolé et de l'allocation adulte handicapé.

* 4 Cf. le rapport Sénat n° 436 (2008-2009) fait par Christian Demuynck, au nom de la mission commune d'information sur la politique en faveur des jeunes.

* 5 Elles sont exposées dans le rapport Sénat n° 25 (2008-2009) fait par Bernadette Dupont, au nom de la commission des affaires sociales.

* 6 Cf. le rapport Sénat n° 618 (2008-2009), fait par Jean-Claude Carle au nom de la commission spéciale.

* 7 Rappelons que les taux de TVA sont encadrés par une directive communautaire et que les décisions, en matière fiscale, se prennent à l'unanimité au niveau européen.

* 8 Le salaire mensuel de base est le salaire mensuel brut hors primes, indemnités et autres formes de rémunération.

* 9 Cela ne signifie pas que l'employeur réalise un bénéfice en procédant à une embauche, car le coût total du travail s'établit à 113 % du Smic si l'on tient compte des cotisations patronales non exonérées qui restent à sa charge.

* 10 Compte rendu intégral des débats de l'Assemblée nationale, deuxième séance du jeudi 5 novembre, publié au Journal Officiel le vendredi 6 novembre.

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