CHAPITRE II - LES PROGRAMMES RELATIFS À LA POLITIQUE DU LOGEMENT

I. LE FINANCEMENT DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT EN 2010

A. L'EFFORT NATIONAL EN FAVEUR DU LOGEMENT DOIT ÊTRE CONFORTÉ

L'effort national en faveur du logement comprend les aides du budget de l'État, les dépenses fiscales prises en charge par l'État, ainsi que les contributions des régimes sociaux et des employeurs (Fonds national d'aide au logement, 1 % logement).

1. Les crédits mobilisés au titre de la politique du logement

Selon le projet annuel de performances, la politique du logement mobilise pour 2010, 6,98 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), soit une hausse de 4,7 % par rapport à 2009, et 7,1 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 6,3 %. Votre rapporteur pour avis observe que cette hausse est essentiellement due à l'augmentation des aides personnalisées au logement 38 ( * ) du programme n° 109 « Aide à l'accès au logement ». Cela tient en large partie aux effets mécaniques de la crise économique, une telle augmentation n'ayant pas été prévue dans le cadre de la loi de programmation triennale des finances publiques 2009-2011.

Votre rapporteur pour avis observe à cet égard, qu'en retirant les aides personnalisées au logement du périmètre de l'enveloppe budgétaire totale des crédits consacrée au logement, il n'y aurait en réalité aucune augmentation de ce budget 39 ( * ) et même, pire, celui-ci accuserait une légère diminution .

Ce budget pour 2010 est également marqué par des changements de périmètre. À la suite du rattachement du secrétariat d'État au logement au ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, les crédits consacrés à la rémunération des personnels en charge de la politique du logement, auparavant comptabilisés dans le programme n° 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement », sont désormais inscrits dans le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer » de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables ».

2. La réforme de la contribution du « 1 % logement » qui devient « Action logement »

En complément des moyens budgétaires retracés dans le cadre de la mission, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) participe à la mise en oeuvre des politiques publiques du logement grâce au financement du « 1 % logement » .

Créé en 1953, le système de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC 40 ( * ) ) constitue aujourd'hui l'une des principales masses de crédits utilisés en faveur de la politique du logement. Sont ainsi assujetties à l'obligation de consacrer 0,45 % de leur masse salariale toutes les entreprises occupant au minimum 20 salariés 41 ( * ) et ne relevant pas du régime agricole. La différence, soit 0,50 % est versée au Fonds national d'aide au logement (FNAL) qui finance diverses allocations logement sans contrepartie pour les ménages. L' Union d'économie sociale du logement (UESL), organisme géré paritairement par les partenaires sociaux, est placée à la tête du réseau des 110 collecteurs avec pour missions de représenter les intérêts communs des associés collecteurs et d'assurer la coordination des grandes politiques nationale d'emploi des fonds du « 1 % logement ».

A sa création, le « 1 % logement » intervenait dans deux domaines : l'investissement en matière de logements locatifs 42 ( * ) et le financement de prêts aux salariés . Ces dernières années, il s'est également impliqué dans la mise en oeuvre du PNRU et du plan de cohésion sociale ainsi que du plan d'action renforcé en faveur des sans-abri ( PARSA 43 ( * ) ).

En 2008, les ressources du « 1 % logement » étaient constituées du produit de la collecte directe auprès des entreprises, soit 1,6 milliard d'euros, et des retours sur prêts à long terme qui se sont élevés à 2,3 milliards d'euros, soit au total, près de 4 milliards d'euros consacrés à diverses actions en faveur du logement .

La loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion a introduit une réforme en profondeur de la participation des employeurs à l'effort de construction . Cette réforme consiste selon le Gouvernement « à refonder le « 1 % logement » et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des ressources vers les politiques prioritaires dans le domaine du logement et de limiter les coûts de gestion ». Votre rapporteur pour avis note surtout que le montant des ressources issues de la PEEC, qui relevaient jusqu'à présent d'accords passés entre les partenaires sociaux et l'État, sont désormais arrêtés par décret, après concertation avec ceux-ci.

Par ailleurs, il relève que le « 1 % logement » devra prendre en charge financièrement les interventions de l'ANRU et de l'ANAH au titre de l'amélioration du parc locatif privé et de la rénovation urbaine. Votre rapporteur pour avis s'inquiète en particulier de voir le « 1 % logement » se substituer totalement à l'État dans le financement de l'ANAH .

Le décret relatif aux enveloppes financières consacrées aux emplois de la PEEC a ainsi été pris le 22 juin 2009 44 ( * ) et arrête pour la période triennale 2009-2011 une somme de l'ordre de 4 milliards d'euros, soit le montant des ressources annuelles du 1 % logement, ce qui doit permettre un équilibre du système. Il est notamment prévu que les contributions du « 1 % logement » au financement du renouvellement urbain et de l'amélioration de l'habitat privé augmentent : ainsi une enveloppe de 770 millions d'euros par an est prévue pour l'ANRU, et l'intervention nouvelle en faveur de l'ANAH est budgétée à hauteur de 480 millions d'euros par an .

Les échéanciers de versements des subventions de l'UESL ont pour leur part été fixés par arrêtés en date du 10 août 2009. Votre rapporteur pour avis relève, à cet égard, la part importante désormais consacrée aux subventions, soit 60 %, dans l'emploi des fonds. Or, jusqu'à cette réforme, le « 1 % logement » intervenait principalement à travers des prêts. Votre rapporteur pour avis s'inquiète donc d'une telle situation qui n'est pas sans poser de problèmes pour l'activité future du « 1 % logement », puisque les remboursements de prêts antérieurs vont se tarir. Le Gouvernement devra donc indiquer clairement ce qu'il compte faire pour éviter à l'ensemble des CIL d'être déficitaires à partir de 2012.

Enfin, votre rapporteur pour avis entend demander des précisions au Gouvernement à propos d'un rapport confidentiel de l'autorité de contrôle du 1 % logement dont la presse 45 ( * ) s'est fait l'écho, permettant aux administrateurs de l'Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction (ANPEEC) d'être informés du montant des salaires de ses directeurs généraux. Il semblerait que sur quatre-vingt-neuf directeurs, « trois déclarent plus de 200 000 euros par an, dix-neuf affichent entre 150 000 euros et 200 000 euros, et trente et un perçoivent entre 100 000 euros et 150 000 euros ; et encore ne s'agit-il là que des salaires : ni les primes, ni les indemnités de départ, ni les éventuelles retraites chapeaux ne sont signalées », précise le quotidien national. Votre rapporteur pour avis estime que la représentation nationale doit être clairement et totalement informée vis à vis d'une telle situation .

Aussi, note-t-il que la Cour des comptes s'était déjà étonnée, en février dernier, de la gestion dispendieuse des sommes récoltées dans le cadre du « 1 % logement » et appelait à une modernisation de l'agence . Cela a conduit à une réorganisation consistant notamment à une division par cinq du nombre de CIL. Selon Jérôme Bédier, président de l'UESL, « ces affaires vont nous permettre de tourner définitivement la page des anciennes pratiques 46 ( * ) ». Quoi qu'il en soit, votre rapporteur pour avis espère que la gouvernance des futurs CIL sera améliorée et que des rémunérations exorbitantes du droit commun ne seront pas tolérées. En la matière, il recommande la mise en place de comités de rémunérations au sein des conseils d'administration.

3. Les dépenses fiscales en faveur du logement sont aujourd'hui déterminantes

Selon le projet annuel de performances, les dépenses fiscales directement rattachables à la politique du logement représentent, pour 2010, 11,3 milliards d'euros, soit plus du tiers de l'effort national en faveur du logement (34,9 milliards d'euros). Elles sont principalement orientées vers le soutien au secteur du bâtiment et un encouragement à l'accession à la propriété. Parmi celles-ci on note :

- l' application d'un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux 47 ( * ) dans les locaux à usage d'habitation privée, qui devrait représenter 5,2 milliards d'euros en 2010, contre 5,1 milliards d'euros en 2009 ;

- le crédit d'impôt sur le revenu pour les intérêts d'emprunt 48 ( * ) supportés à raison de l'acquisition ou de la construction de l'habitation principale, représentera en 2010 une dépense d'1,5 milliard d'euros pour l'État, contre 1 milliard en 2009 ;

- le prêt à taux zéro 49 ( * ) (PTZ) dans le cadre de l'accession sociale à la propriété, représentera en 2010 une dépense de 950 millions d'euros, contre 500 millions un an auparavant.

- les dispositifs fiscaux bénéficiant au logement social : exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), taux réduit de TVA à 5,5 % pour la livraison et la vente de logements sociaux (750 millions d'euros) ainsi que pour l'achat de terrains à bâtir (60 millions d'euros), exonération d'impôt sur les sociétés des organismes HLM et des offices publics d'aménagement et de construction (700 millions d'euros) ;

- le développement du parc locatif privé grâce aux dispositifs fiscaux favorisant les revenus tirés de l'investissement locatif : dispositifs dits Robien, Borloo, Périssol, Besson et Scellier pour un montant de 665 millions d'euros en 2010.

Votre rapporteur pour avis observe que le plan de relance de l'économie comporte des mesures en faveur de la politique du logement, mais regrette que les sommes soient relativement modestes . Du point de vue comptable, ces crédits sont regroupés au sein du programme « Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité » de la mission « Plan de relance de l'économie », créée par la loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009, puis transférés par décret en gestion vers les programmes de la mission « Ville et logement ».

Ces moyens supplémentaires 50 ( * ) sont destinés à construire de nouveaux logements sociaux , soutenir l'accession à la propriété et la rénovation de l'habitat , créer des places d'hébergement et humaniser les centres . Par ailleurs, dans le cadre de la politique de la ville, le plan de relance doit également financer la rénovation de logements sociaux dans les quartiers sensibles . Il a enfin été décidé de doubler le montant du prêt à taux zéro (PTZ) pour les logements neufs en 2009. L'article 46 du projet de loi de finances propose ainsi de prolonger cette mesure au 1 er semestre 2010. Votre rapporteur pour avis se félicite de cette prolongation et de ce doublement du PTZ en 2010, ayant lui-même plaidé en faveur du maintien de ce dispositif compte tenu de l'effet de levier qu'il procure en matière d'accession sociale à la propriété .

* 38 En effet celles-ci augmentent de 8,5 % par rapport à 2009.

* 39 Celui-ci passerait en effet entre 2009 et 2010, de 1,7 milliard d'euros à 1,6 milliard d'euros en AE et resterait constant à 1,7 milliard d'euros en CP.

* 40 Les employeurs soumis à la PEEC ont la possibilité de se libérer de leur obligation soit sous forme de subventions, soit sous forme de prêts sans intérêt d'une durée minimum de vingt ans. Leur contribution peut être versée soit à des collecteurs spécialisés dits « financiers », soit à des collecteurs constructeurs, comme des organismes HLM ou des SEM, pour le financement de leurs propres opérations locatives. Les collecteurs financiers, qui doivent être agréés par l'autorité administrative, sont soit des chambres de commerce et d'industrie (CCI) dotées d'un service logement, soit des associations aux statuts réglementés, les comités interprofessionnels du logement (CIL).

* 41 Le relèvement de 10 à 20 salariés a été effectué, à compter du 1 er janvier 2006, par l'ordonnance n° 2005-895 du 2 août 2005.

* 42 Actions de renouvellement urbain, offre de logements locatifs sociaux et conventionnés, offre de logements meublés.

* 43 En vertu de la Convention du 7 juillet 2007.

* 44 Décret n° 2009-747 du 22 juin 2009.

* 45 Source : le Monde, « les beaux salaires des directeurs du 1 % logement », 2 novembre 2009.

* 46 Interview accordée au Figaro, le 12 novembre 2009.

* 47 Selon la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, il s'agit des travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien.

* 48 Introduit par l'article 5 de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA).

* 49 Crédit d'impôt compensant l'absence d'intérêts perçus par les banques.

* 50 Soit 240 millions d'euros en AE et 149 millions d'euros en CP.

Page mise à jour le

Partager cette page