C. LA MISE EN oeUVRE DES RÈGLES PÉNITENTIAIRES EUROPÉENNES : LA NÉCESSAIRE ADHÉSION DES PERSONNELS

L'administration pénitentiaire a souhaité s'appuyer sur les règles pénitentiaires européennes -dont la deuxième version a été adoptée par le Conseil de l'Europe le 11 janvier 2006- comme aiguillon non seulement pour améliorer concrètement les conditions de prise en charge des personnes détenues mais aussi pour moderniser les pratiques professionnelles des agents du service public pénitentiaire.

L'année 2009 aura été marquée par la généralisation à l'ensemble des établissements pénitentiaires des sept règles pénitentiaires européennes d'abord expérimentées sur une trentaine de sites pilotes :

- la séparation -totale ou partielle - des prévenus et des condamnés est mise en oeuvre dans 103 établissements pénitentiaires (79 % des sites concernés contre 35 % en 2007) ;

- des quartiers accueillant des détenus arrivants et une procédure d'accueil sont mis en place dans 121 établissements (68 % des sites contre 42 % en 2007) ;

- des commissions pluridisciplinaires uniques composées de l'ensemble des acteurs de la vie en détention (administration pénitentiaire, enseignement, UCSA, prestataire privé...) ont été créées dans 63 des établissements pénitentiaires (93 % des sites contre 30 % en 2007) ;

- une procédure formalisée de traitement des requêtes des personnes détenues (assurant une meilleure « traçabilité » des requêtes et de la prise en compte de la demande formulée) est désormais garantie dans 39 % des sites ;

- un système d' interphonie complet permettant aux personnes détenues d'entrer en contact de jour comme de nuit avec un personnel pénitentiaire est installé dans 67 établissements (contre 51 en 2007), 86 établissements disposant par ailleurs d'un système d'interphonie partiel ;

- le téléphone équipe 95 maisons d'arrêt (73 % des sites concernés) ; jusqu'alors ce droit n'était pas ouvert aux détenus dans ce type d'établissement ;

- l'augmentation de la durée des parloirs depuis 2007 dans 24 établissements (14 % des sites) et la rénovation des lieux d'accueil réservés aux familles et/ou aux parloirs au sein de 33 établissements (19 % des sites).

Par ailleurs, 19 établissements ont obtenu une labellisation délivrée par un organisme indépendant, AFNOR, qui certifie le respect d'une vingtaine de règles pénitentiaires européennes relatives à la prise en charge et à l'accompagnement de la personne détenue durant la phase d'accueil.

D'après les informations communiquées par la DAP, une étude menée sur cinq sites pilotes a permis de montrer une diminution de 22 % des dégradations en détention sur la période 2007 et 2008.

Au-delà du bilan quantitatif, les progrès apportés par l'introduction des RPE dépendent beaucoup de l' implication des personnels , ce qui, à l'évidence, votre rapporteur l'a constaté, suppose un changement d'état d'esprit dans certains établissements.

Maison d'arrêt de Douai (3 juillet 2009)

D'une capacité théorique de 389 places, la maison d'arrêt de Douai connaît un taux d'occupation de l'ordre de 160 %.

La maison d'arrêt a organisé un quartier « arrivants » dans lequel les détenus sont accueillis pendant une semaine.

A leur arrivée, il leur est notamment remis un document -dont il existe des versions en plusieurs langues- relatif à leurs conditions de détention ainsi qu'un nécessaire de toilette et du linge propre.

Au cours de cette période, ils font l'objet de visites systématiques de la part des personnels de direction, de surveillance, des services sociaux ainsi que des personnels médicaux de l'UCSA. Au terme de la semaine d'observation, une décision collective est prise dans le cadre d'une commission pluridisciplinaire sur l'affectation de la personne détenue. Plusieurs critères sont pris en compte (les fumeurs ne sont pas mélangés avec les non-fumeurs, les personnes ne parlant pas français ne sont pas isolées etc). L'observation permet également d'évaluer le risque auto ou hétéro agressif de la personne détenue. Les informations recueillies durant cette première semaine constituent les premiers éléments de la fiche de suivi qui accompagnera le détenu.

La commission pluridisciplinaire, qui se réunit de manière hebdomadaire, constitue le cadre d'un échange continuel et d'un travail d'équipe.

Elle permet une mutualisation des informations. Sur la base de cette expérience, la maison d'arrêt a obtenu le label concernant la conformité des conditions d'accueil au sein du quartier arrivant aux règles pénitentiaires européennes.

Par ailleurs, l'établissement comporte un étage pour des détenus considérés comme vulnérables, en particulier les délinquants sexuels.

En outre, la maison d'arrêt a structuré l'organisation des bâtiments en fonction des régimes différenciés. Dans le régime de détention le plus favorable, les détenus bénéficient d'un régime de portes ouvertes et d'espaces communs dans lesquels ils peuvent partager certaines activités.

L'établissement a également innové en mettant en place dans certains espaces de la détention, des bornes permettant d'assurer l'enregistrement des requêtes des détenus. Ce système permet d'assurer un suivi de la demande par l'administration pénitentiaire et garantit en principe une réponse dans des délais satisfaisants. Il devrait progressivement être étendu aux autres établissements pénitentiaires.

Un effort particulier est également fait pour favoriser l'activité des détenus. Votre rapporteur a notamment noté le fait que certaines formations, comme par exemple l'apprentissage d'un instrument de musique, étaient assurées par les détenus eux-mêmes selon leurs compétences.

Au cours de la table ronde organisée à l'occasion de la visite de l'établissement, les responsables de l'éducation nationale ont indiqué que les demandes ne pouvaient pas être toutes satisfaites mais qu'un doublement de l'espace consacré aux activités scolaires permettrait de répondre aux besoins. Ils ont souligné que le taux de présence en classe de l'ordre de 95 % était particulièrement satisfaisant. Ils ont observé également que la perspective de réductions de peine supplémentaires souvent utilisée pour inciter les détenus à suivre une activité scolaire ne pouvait suffire car cette seule motivation ne permettait pas de garantir la continuité de la présence en classe.

Le nombre de procédures disciplinaires est passé entre 2006 et 2008 de 570 à 320. La sanction maximale (45 jours de quartier disciplinaire) n'a été prononcée en 2008 que dans deux cas.

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