III. RÉAFFIRMER LA VOCATION SANITAIRE DE L'AIDE MÉDICALE D'ETAT

Le principe de l'aide médicale d'Etat (AME) découle de la loi du 24 vendémiaire An II qui disposait dans son article 18 que « tout malade, domicilié de droit ou non, qui sera sans ressources, sera secouru ou à son domicile de fait, ou à l'hospice le plus voisin » . Elle a été organisée par la loi du 15 juillet 1893 relative à l'aide médicale gratuite, qui précise qu'elle concerne les indigents français et étrangers, puis réformée par la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle (CMU) 8 ( * ) qui a permis l'accès de tous les citoyens français et étrangers ayant un titre de résidence à la couverture maladie offerte par la sécurité sociale.

Depuis cette date, en conséquence, l'AME est ouverte aux étrangers dépourvus de titre de résidence sur le territoire français. Ceux-ci peuvent bénéficier de cette forme de couverture de santé qui permet la prise en charge des dépenses de soins, de consultations médicales à l'hôpital ou en médecine de ville, de prescriptions médicales et de forfait hospitalier dès lors qu'ils sont pratiqués au tarif opposable. Le bénéficiaire de l'AME est dispensé de faire l'avance des frais, à l'hôpital ou en médecine de ville.

Les dispositions relatives à l'AME figurent aux articles L. 251-1 à L. 251-3 du code de l'action sociale et des familles. Son financement est assuré par une dotation du budget général inscrite au programme n° 183 « Protection maladie » de la mission Santé.

A. UN SYSTÈME ENCADRÉ ET CONTRÔLÉ

Après plus de cent ans d'existence, sous une forme ou sous une autre, l'aide médicale d'Etat fait aujourd'hui l'objet d'un contrôle étroit, tant sur le plan financier que sur les conditions d'accès.

1. L'absence de dérive financière du dispositif

L'AME fait l'objet du contrôle traditionnel de la part du Parlement lors du vote annuel de la dotation budgétaire qui lui est dédiée. Celle-ci est assortie de précisions en termes de montant et de volume des bénéficiaires, ce qui a d'ailleurs conduit les commissions des finances et des affaires sociales du Sénat à dénoncer, à plusieurs reprises au cours des dernières années, la sous-dotation de cette ligne budgétaire. Le projet de loi de finances pour 2011 semble y avoir mis un terme : le budget prévisionnel de l'AME s'établit en effet à 588 millions d'euros pour 215 763 bénéficiaires au 31 décembre 2009.

Ces données chiffrées permettent de constater que l'augmentation des dépenses liées à l'AME au cours des huit dernières années, soit 43 %, n'a pas disproportionnée par rapport à celle de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam), de 35 %, d'autant que l'état de santé moyen des titulaires de l'AME est vraisemblablement moindre que celui de la population générale. Le coût moyen par bénéficiaire est également resté stable sur les huit dernières années (+ 2% en huit ans). Il recouvre toutefois de très fortes disparités entre la prise en charge moyenne en ville, qui s'élève à 625 euros par an en moyenne, et à l'hôpital, 9 000 euros.

L'augmentation des dépenses hospitalières expliquerait, d'après les services du ministère de la santé, la moitié de la hausse du coût de l'AME depuis 2008. Or cette croissance est moins due à une recrudescence du nombre des soins ou à leur plus grande complexité qu'à la tarification adoptée par les hôpitaux. Le rapporteur général Alain Vasselle a, à juste titre, soulevé ce problème lors de l'examen du PLFSS pour 2011 : « Les hôpitaux facturent les assurés qui ne sont pas couverts par un régime d'assurance maladie au tarif journalier de prestation, ou TJP, qui est plus élevé que celui des GHS, c'est-à-dire les groupes homogènes de séjour, habituellement appliqué. Or, depuis quelques années, les établissements ont beaucoup augmenté le TJP, et cela sans justification particulière. Qui plus est, l'accueil des publics précaires est couvert depuis deux ans par une dotation spécifique au sein des Migac, les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation. » . Il apparaît donc que la facturation des soins hospitaliers dans le cadre de l'AME a augmenté au cours des dernières années pour répondre aux besoins financiers des hôpitaux, sans lien avec les malades. La ministre de la santé a estimé le montant des recettes hospitalière liés aux soins donnés aux titulaires de l'AME a « 180 millions d'euros, et 60 millions d'euros pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ».

Dans l'ensemble, le coût moyen des soins pour un titulaire de l'AME s'élève à 2 055 euros contre 2 188 pour les assurés sociaux. De plus, les premiers ont recours aux médicaments génériques dans la même proportion que les seconds. Surtout, les bénéficiaires de l'AME n'ont pas plus de droits que les titulaires de la CMU-c qui sont, au contraire, mieux protégés car ils ont accès au remboursement des soins dentaires et optiques supérieurs aux tarifs de la sécurité sociale et qui, contrairement aux bénéficiaires de l'AME, ne peuvent se voir appliquer de dépassements d'honoraires. Il n'est donc pas légitime d'affirmer, comme on l'entend parfois, que l'AME représente une charge financière disproportionnée par rapport à l'assurance maladie dont bénéficie le reste de la population.


* 8 Loi n° 99-641.

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