B. L'INDISPENSABLE RENFORCEMENT AU SEIN DU GOUVERNEMENT DE L'ADMINISTRATION CHARGÉE DE L'OUTRE-MER

1. Le besoin d'une administration forte pour assurer le suivi des engagements de l'Etat

Interministérielle par nature, la politique de l'État en faveur des populations et des collectivités d'outre-mer requiert impérativement une forte coordination et une autorité de pilotage capable d'exercer cette coordination et de veiller à l'intégration correcte de la dimension ultramarine dans toutes les politiques publiques et par tous les départements ministériels.

A cet égard, lors du premier conseil interministériel de l'outre-mer (CIOM), le 6 novembre 2009, le Président de la République déclarait :

« Ce qui est important à mes yeux, au-delà des mesures arrêtées, c'est que chaque membre du Gouvernement se sente directement concerné par les sujets ultramarins, qui ne doivent pas être traités exclusivement par le ministère en charge de l'outre-mer. »

Alors que, trop souvent, l'outre-mer est encore insuffisamment pris en compte, le ministère chargé de l'outre-mer et la délégation générale à l'outre-mer (DéGéOM) disposent-ils réellement aujourd'hui de cette autorité au sein du Gouvernement pour jouer pleinement leur rôle de coordination et imposer la question de l'outre-mer ? Votre rapporteur estime malheureusement que non. Une administration centrale trop faible n'est pas en mesure de coordonner l'action des différents départements ministériels dans le domaine de l'outre-mer, d'assurer une bonne prise en compte de l'outre-mer dans les politiques publiques, de peser dans les arbitrages interministériels pour faire valoir les spécificités des collectivités et des populations d'outre-mer et de veiller au respect des engagements pris par l'État envers l'outre-mer.

Pour l'accompagner vers son avenir, l'outre-mer a besoin d'une administration centrale solide, disposant de réelles capacités d'évaluation et de prospective, pour renforcer ce rôle d'analyse de l'efficacité des dispositifs spécifiques mis en place en faveur de l'outre-mer.

La réforme de l'administration centrale de l'outre-mer en 2008 devait permettre d'atteindre cet objectif.

2. Une réforme incomplète aux effets préoccupants pour la prise en compte de l'outre-mer

Dans le cadre global de la révision générale des politiques publiques (RGPP), l'administration centrale chargée de l'outre-mer a été réorganisée en 2008, sous forme d'une délégation générale à l'outre-mer (DéGéOM). Cette réorganisation visait à recentrer l'administration sur les fonctions d'expertise, de conception, de pilotage, de coordination et d'évaluation des politiques en faveur de l'outre-mer, plutôt que sur des tâches de gestion. Les fonctions support ont ainsi été mutualisées avec les services du ministère de l'intérieur. Pour assurer ces missions, un effectif de 142 agents était initialement prévu 16 ( * ) . Selon le Gouvernement, au 31 décembre 2009, 129 agents étaient en poste à la DéGéOM, dont 68 de catégorie A et 14 de catégorie A+. Sur ces 129 agents, seuls 7 sont chargés de la fonction d'évaluation et de prospective.

Au nom de la commission des finances du Sénat, notre collègue Marc Massion a récemment établi un rapport d'information sur la réorganisation administrative des services centraux du ministère de l'outre-mer 17 ( * ) . Ce rapport conclut à la mise en oeuvre défaillante d'une réforme mal préparée de cette administration, qui a vu ses effectifs drastiquement réduits sans pour autant avoir la capacité de se transformer réellement en administration de mission. La gestion de crédits reste prépondérante, limitant les effectifs dédiés aux fonctions de pilotage, de coordination interministérielle et d'évaluation. Sur ces aspects, la réforme est qualifiée par notre collègue d'« échec qualitatif ».

3. L'urgence du redressement par un positionnement réellement interministériel grâce à un rattachement au Premier ministre

Étant rattachée au ministère de l'intérieur, la DéGéOM ne dispose pas de l'autorité pour assurer sa mission de coordination interministérielle. De plus, ses effectifs ne paraissent pas adaptés aux missions qui devraient être les siennes en termes de conception, de pilotage, d'évaluation et de coordination.

Votre commission plaide à nouveau pour le rattachement direct au Premier ministre de l'administration centrale de l'outre-mer, sous forme d'une délégation interministérielle, d'une mission interministérielle ou mieux encore d'un secrétariat général à l'outre-mer, à l'instar du secrétariat général aux affaires européennes. Seule l'autorité du Premier ministre permet d'imposer à chaque département ministériel une réelle prise en compte de l'outre-mer dans les politiques dont il a la charge et d'organiser une réelle coordination, avec l'appui d'un réseau de référents outre-mer dans les différentes administrations centrales concernées. Cette remise à niveau est particulièrement urgente pour accompagner les profondes évolutions en cours outre-mer.


* 16 L'administration centrale comptait 212 agents en 2008, incluant les fonctions support.

* 17 Rapport n° 8, 2010-2011.

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