EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 60 (art. L. 426-1 (nouveau) du code des assurances, art. L. 1142-2, L. 1142-14, L. 1142-15, L. 1142-16, L. 1142-21 et L. 1142-21-1 du code de la santé publique) - Responsabilité civile des professionnels de santé

Objet : Cet article prévoit la création d'un dispositif de mutualisation assurantiel des risques encourus par les professionnels de santé libéraux au titre de leur responsabilité civile.

I - Le texte proposé

Depuis l'affaire « Perruche » en 2000, la question de la responsabilité civile médicale des professionnels libéraux, et plus particulièrement de certains d'entre eux exerçant des spécialités particulièrement à risque, donne lieu à des débats récurrents au Parlement. La mise en cause de la responsabilité de ces professionnels est plus fréquente qu'auparavant et les indemnisations accordées aux victimes plus élevées. Cette situation suscite une inquiétude très forte des professionnels concernés sans qu'une solution pérenne et satisfaisante ait jusqu'à présent pu être mise en place.

Actuellement, ces professionnels sont tenus de s'assurer pour un montant minimal de 3 millions d'euros par sinistre et de 10 millions par an. Ils peuvent bénéficier d'une aide à la souscription d'une assurance en responsabilité civile de la part de la caisse primaire d'assurance maladie. La plupart des médecins libéraux bénéficient aujourd'hui de couvertures d'assurance allant au-delà du minimum imposé et sont assurés à hauteur de 6 à 8 millions par sinistre.

Si ces dispositions permettent d'assumer la plus grande partie des sinistres, certaines décisions d'indemnisation peuvent dépasser le niveau des garanties souscrites ou intervenir plus de dix ans après la cessation d'activité du professionnel, à un moment où sa couverture a expiré.

L'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a pris en compte cette situation en prévoyant l'intervention de l'Oniam, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, lorsqu'un médecin libéral exerçant une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d'anesthésie-réanimation est condamné par une juridiction à réparer les dommages subis par la victime à l'occasion d'un acte lié à la naissance, que la couverture d'assurance du professionnel est épuisée et que le victime ne peut obtenir l'exécution intégrale de la décision auprès du professionnel concerné. Lorsque l'Oniam règle la part d'indemnité non prise en charge par l'assureur du professionnel, ce dernier doit remboursement de la créance sauf dans le cas où le délai de validité de la couverture d'assurance est expiré « ou que le juge compétent a constaté l'incompatibilité du règlement de la créance avec la solvabilité du professionnel ».

Ces dispositions ont été étendues aux sages-femmes par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, mais n'ont pas mis fin aux inquiétudes des professionnels de santé libéraux. Elles ne concernent en effet que certaines spécialités et exclusivement les actes liés à la naissance.

En janvier 2011, Gilles Johanet, conseiller-maître à la Cour des comptes et nommé depuis président du comité économique des produits de santé, a établi un rapport sur la question, proposant la mise en oeuvre d'une solution de mutualisation du risque assurantiel entre professionnels concernés pour prendre en charge les indemnisations dépassant un certain plafond.

A la suite de ce rapport, un dispositif de nature publique entièrement mutualisé entre les professionnels concernés a été intégré à la proposition de loi dite « Fourcade » mais ensuite censurée par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif.

Ce dispositif invalidé a été intégré au projet de loi de finances dans des termes identiques. Il a pour vocation de faire disparaître l'ensemble des « trous de garantie » pouvant exister pour les professionnels libéraux.

Le texte se compose de trois parties.

La première crée un nouveau chapitre au sein du code des assurances relatif au fonds de garantie des dommages consécutifs à des actes de prévention de diagnostic ou de soins dispensés par des professionnels de santé. Ce fonds indemnisera les victimes de dommages consécutifs à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins dispensés par les professionnels de santé libéraux pour la part de leur préjudice qui dépassera le plafond de l'assurance obligatoire ou celui du contrat du professionnel concerné s'il est supérieur.

L'exposé des motifs de cet article précise que « Le seuil réglementaire de couverture minimale obligatoire est actuellement fixé à 3 millions d'euros. Il sera relevé à 8 millions d'euros par décret en Conseil d'Etat afin de ne pas empiéter sur le marché existant ». Le fonds interviendra donc pour payer les dommages fixés au-delà de 8 millions d'euros.

La gestion du fonds sera assurée par la caisse centrale de réassurance (CCR), société anonyme, détenue intégralement par l'Etat. La CCR gère déjà cinq fonds publics, parmi lesquels le fonds de prévention des risques naturels majeurs.

L'ensemble des professionnels de santé visés par le code de la santé publique, soit environ trois cent mille personnes, devront contribuer à ce fonds, au travers d'une cotisation annuelle, perçue par les assurances, dont le montant sera fixé par arrêté entre 15 et 25 euros par an.

Aucune transaction ne pourra être opposée au fonds s'il n'y est pas partie.

Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application de ces dispositions.

La deuxième partie prévoit la remise au Parlement d'un rapport gouvernemental dressant un bilan du dispositif cinq ans après sa mise en oeuvre.

La troisième partie organise les relations entre le fonds et l'Oniam.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatorze amendements à cet article à l'initiative du Gouvernement et de Gérard Bapt pour :

- interdire toute action récursoire du fonds contre le professionnel concerné ;

- inclure parmi les dommages pris en charge par le fonds ceux qui seraient prononcés après l'expiration de la couverture d'assurance du professionnel de santé ;

- préciser la date d'entrée en vigueur du dispositif ;

- apporter des précisions rédactionnelles.

III - La position de la commission

La mise en place de ce fonds apporte une réponse à l'inquiétude des professionnels et garantit l'indemnisation des victimes. Néanmoins, les cas où le fonds interviendra sont heureusement appelés à demeurer peu nombreux. Votre rapporteur note cependant que ce sont les primes d'assurance excessives et le refus par les assureurs de couvrir le risque exceptionnel qui sont la cause de l'intervention de l'Etat. Une réflexion sur l'intérêt de conserver au secteur privé l'assurance de la responsabilité civile médicale doit donc être menée. Dans cette attente, le dispositif proposé peut paraître équilibré.

Afin de suivre au plus près la mise en oeuvre du dispositif, votre commission a adopté un amendement prévoyant la présentation au Parlement d'un rapport d'étape dans les trois ans, puis d'un bilan définitif à établir deux ans après pour apprécier le bien-fondé du mécanisme proposé.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 60 bis (art. 165-11 du code de la sécurité sociale) - Instauration d'une taxe affectée au profit de la Haute Autorité de santé

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, vise à instaurer une taxe perçue par la HAS à l'occasion du dépôt des dossiers d'évaluation des dispositifs médicaux.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le projet de loi relatif aux produits de santé prévoit de rendre obligatoire l'évaluation par la HAS de certaines catégories de dispositifs médicaux. Il introduit à cette fin un article L. 165-11 dans le code de la sécurité sociale.

Comme pour toutes les autres procédures d'évaluation de produits de santé, cet article prévoit que le dépôt d'un dossier d'évaluation par l'industriel s'accompagne du paiement d'une contribution d'un montant maximal de 5 580 euros versée à la HAS.

II - La position de la commission

Votre rapporteur note que le système des taxes affectées aux autorités sanitaire perdure malgré l'affaire du Mediator. Or, il est par principe opposé à ces méthodes qui ne peuvent qu'alimenter les soupçons de dépendance de la HAS vis-à-vis de l'industrie.

Il note par ailleurs que cette disposition figure également à l'article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, où elle trouve plus naturellement sa place.

Votre commission vous propose donc de supprimer cet article.

Article 60 ter - Fonds d'indemnisation des personnes victimes du tabac

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, vise à demander un rapport sur la mise en place d'un fond d'indemnisation des personnes victimes du tabac.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Cet article vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 31 décembre 2012, un rapport sur les perspectives d'instauration d'un fonds de prévention et d'indemnisation des personnes victimes du tabac.

Ce fonds serait alimenté par une taxe spéciale de 10 % assise sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les fabricants de tabac. Ce chiffre d'affaires s'élève à 2,1 milliards d'euros pour l'année 2010.

II - La position de la commission

Votre rapporteur note, pour s'en amuser, que l'idée portée par cet article aurait sans doute paru excessive si elle émanait d'un groupe de la majorité sénatoriale. Or, elle résulte d'une initiative du député UMP Yves Bur et a été adoptée à l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement.

En attendant la mise en place d'une véritable politique complète et cohérente de lutte contre le tabac, peut être dans le cadre de la stratégie pluriannuelle annoncée par le ministre, cette proposition présente l'intérêt de relancer le débat sur le poids de choix individuels de santé face à l'influence des lobbys.

Votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.

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