C. UN RAPPROCHEMENT ENCORE INACHEVÉ DEUX ANS APRÈS

L'article 62 de la loi n° 2010-737 du 1 er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation a placé auprès de l'INC la Commission de la sécurité des consommateurs et la Commission des clauses abusives, auxquelles il a adjoint la nouvelle Commission de la médiation de la consommation, dans un souci de rationalisation mais sans remettre en cause l'indépendance des commissions. L'article L. 531-3 du code de la consommation prévoit ainsi que l'INC et les trois commissions « disposent de services communs dirigés par un directeur général », qui est le directeur général de l'INC.

Dans son application réglementaire, ce regroupement administratif et technique a été correctement conçu. Le décret n° 2010-1221 du 18 octobre 2010 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'Institut national de la consommation et des commissions placées auprès de cet institut a organisé de façon précise ce regroupement et le fonctionnement des services communs, tout en veillant à préserver l'indépendance des commissions.

Des agents publics et des magistrats détachés auprès de l'INC ainsi que des salariés de l'INC peuvent être désignés collaborateurs de chaque commission par le directeur général de l'INC en accord avec le président de la commission concernée. L'instruction des avis et recommandations de chaque commission, sous l'autorité d'un de ses membres, peut être confiée à des agents de l'INC sur demande du président de la commission ou, au besoin, à des personnes extérieures. De manière générale, le directeur général de l'INC doit désigner des agents pour accomplir les travaux des commissions à la demande de leurs présidents. Il ne peut refuser de donner suite à ces demandes « que pour des motifs tirés de l'insuffisance des moyens de l'établissement ». Lorsque des personnels de l'INC sont désignés pour assister une commission, ils ne reçoivent d'instructions que de la commission et sont considérés comme agents de la commission, tenus au secret professionnel.

Par ailleurs, pour assurer l'indépendance financière des commissions, le décret précité a prévu que « les crédits nécessaires à la couverture des dépenses de fonctionnement hors personnel de chacune des commissions placées auprès de l'Institut national de la consommation pour l'accomplissement de leurs missions font l'objet d'une section distincte de l'état prévisionnel de ressources et de dépenses de l'établissement » (article R. 533-6 du code de la consommation).

Article R. 534-17 du code de la consommation

I. - Des agents publics et des magistrats détachés dans les services communs définis à l'article L. 531-3 ou mis à disposition de ces services et des salariés de l'Institut national de la consommation peuvent exercer des fonctions de secrétaire ou de collaborateur de la commission.

Les titulaires de ces fonctions sont choisis par le directeur général de l'Institut national de la consommation en accord avec le président de la commission.

II. - Pour l'instruction d'avis ou de recommandations sous l'autorité du président ou de membres de la commission désignés à cet effet par celui-ci, le président de la commission demande au directeur général de l'Institut national de la consommation de désigner des agents des services communs définis à l'article L. 531-3 ou de faire appel, avec l'accord du ministre intéressé, à des fonctionnaires de catégorie A ou des agents contractuels de l'État de niveau équivalent. Cette instruction peut être confiée à des personnes qualifiées choisies d'un commun accord entre le directeur général de l'Institut national de la consommation et le président de la commission.

III. - Pour l'accomplissement de travaux particuliers sous l'autorité du président ou de membres de la commission désignés à cet effet par celui-ci, le président de la commission demande au directeur général de l'Institut national de la consommation de désigner des agents des services communs définis à l'article L. 531-3.

IV. - Le directeur général de l'Institut national de la consommation ne peut refuser de donner suite aux demandes prévues aux II et III que pour des motifs tirés de l'insuffisance des moyens de l'établissement.

Dans l'exercice des fonctions ou l'accomplissement des travaux définis aux I à III du présent article, les agents ou personnes qualifiées ne reçoivent d'instructions que du président ou de membres de la commission désignés à cet effet par celui-ci. Ils ont qualité d'agents de la commission pendant toute la durée de leur collaboration, ne rendent compte de leurs activités qu'au président et aux membres de la commission et sont astreints au secret professionnel dans les conditions définies à l'article L. 534-10. Le président de la commission peut les inviter à assister aux séances de la commission lorsque sont examinées les affaires à l'instruction desquelles ils ont apporté leur concours.

Or, il apparaît que deux ans après l'adoption de la réforme par le Parlement, le rapprochement administratif et technique entre l'INC et les trois commissions demeure inachevé. Votre rapporteur déplorait déjà cet état de fait dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2012. Il constate avec regret que la situation n'a guère évolué en un an. Les crédits destinés au fonctionnement des trois commissions n'ont été à ce jour que partiellement transférés à l'INC par l'État et la mise en place des services communs entre l'INC et les commissions n'est pas complète, suscitant l'inquiétude des associations de consommateurs sur la qualité du travail des commissions.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, les crédits de fonctionnement courant de la CSC et de la CCA ont été transférés à l'INC en 2011, avec en outre une dotation de 49 000 euros destinée aux premières dépenses de fonctionnement de la CMC. Fin 2011, des crédits d'indemnisation des membres et des rapporteurs de la CSC et de la CCA ont également été versés à l'INC. Un personnel a été mis à disposition de la CMC afin d'assurer à temps partiel son secrétariat, tandis que le fonctionnaire qui assurait le secrétariat de la CCA a été détaché auprès de l'INC pour exercer, en outre, la fonction de chef du service juridique de l'INC, partageant son temps entre les deux fonctions et bénéficiant pour la CCA de l'appui du service dont il a désormais la charge, sans que cela ait donné lieu au transfert de crédits par l'État. La question du personnel de la CSC demeure.

Entendue par votre rapporteur, la présidente de la CMC a indiqué que la commission se réunissait dans les locaux de l'INC et qu'elle recevait bien de l'INC des crédits pour son fonctionnement courant. En revanche, elle n'a pas la possibilité d'assurer le paiement des indemnités et le remboursement des frais de ses membres, faute de publication des textes fixant le cadre et le montant de ces frais et indemnités 108 ( * ) . En outre, le personnel mis à disposition par l'INC pour assurer le secrétariat n'ayant pas donné satisfaction, une solution reste à trouver entre l'INC et la commission, de sorte qu'à ce jour la commission n'a plus de moyens de secrétariat. La présidente de la commission a estimé que la CMC n'était pas encore à ce jour pleinement installée.

Entendue par votre rapporteur, la présidente de la CCA a indiqué que la commission se réunissait dans les locaux de l'INC, avec l'aide de son secrétaire désormais chef du service juridique de l'INC, sans que cela pose de difficulté pratique ou de principe. Si les dépenses de fonctionnement sont bien prises en charge par l'INC, en fonction des crédits versés à cet effet par l'État dans la subvention à l'INC, il semble que leur montant soit insuffisant pour assurer le remboursement des rapporteurs. La présidente de la CCA a suggéré, dès lors que les trois commissions étaient regroupées, d'harmoniser le calcul des indemnités de leurs membres en vue d'un traitement financier identique.

Le président de la CSC, déjà entendu l'année dernière, a indiqué à votre rapporteur que les crédits de fonctionnement courant de la commission étaient bien gérés par l'INC mais que les crédits de rémunération des agents de la commission n'étaient toujours pas transférés à l'INC par la DGCCRF. Cette situation a démobilisé les agents, dont une partie a quitté la commission, alors que d'autres ne souhaitent pas rejoindre l'INC. Seuls six agents sur douze en poste encore actuellement 109 ( * ) , qui ont la qualité de fonctionnaire, ont accepté de rejoindre l'INC, sans que leur future position administrative ait encore été clarifiée. De plus, puisque le personnel de la CSC aurait dû rejoindre l'INC en 2011, le ministère de l'économie et des finances l'a fait déménager, le laissant occuper des locaux à titre provisoire dans l'attente du déménagement de l'INC. Le président de la CSC estime que la situation actuelle porte atteinte à la crédibilité de la CSC et de ses avis auprès de ses interlocuteurs.

D'après les éléments fournis à votre rapporteur, ce retard persistant résulterait de la situation budgétaire de la DGCCRF, dont l'insuffisance des crédits de personnel a rendu jusqu'à présent difficile le transfert des crédits de personnel de la CSC, représentant un nombre d'emplois important pour une administration très fortement mise à contribution depuis plusieurs années par la réduction des emplois publics 110 ( * ) . Si votre rapporteur est évidemment sensible à la situation de la DGCCRF, il ne saurait souscrire à un état de fait qui ne respecte pas le vote du Parlement.

Lors de ses auditions, votre rapporteur a cru cependant déceler des signes d'évolution de cette situation.

D'une part, la bonne volonté de l'INC est aujourd'hui unanimement reconnue pour chercher à améliorer le fonctionnement des trois commissions, malgré ses difficultés financières. Le projet de déménagement qui devrait intervenir en janvier 2013 a été organisé pour accueillir les secrétariats des commissions et en particulier les personnels affectés à la CSC, alors même que la surface des locaux devrait être inférieure à celle des bureaux actuels situés rue Lecourbe à Paris. La mutualisation existe déjà concernant les actions de communication, qui sont aujourd'hui assurées par l'INC à la satisfaction des trois commissions (refonte des sites internet...). A cet égard le regroupement visait bien une mutualisation des fonctions support pour faciliter l'action des commissions. La diffusion et la communication des avis des commissions auprès du public devraient s'en trouver améliorées.

D'autre part, selon la directrice générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, entendue par votre rapporteur, le transfert des crédits à l'INC devrait enfin intervenir au début de l'année 2013, même si apparemment le président de la CSC n'a pas été informé des modalités de ce transfert. Les crédits transférés devraient correspondre à un volume de dix emplois, étant donné que seulement six des douze agents actuels de la CSC ont accepté de rejoindre l'INC et que la décision a été prise en 2012 de fixer à dix le nombre des emplois transférés, pour un montant évalué à 850 000 euros, nécessitant par conséquent le recrutement de quatre nouveaux collaborateurs. Cette décision a été approuvée lors d'une réunion du conseil administration de l'INC. Compte tenu des compétences du service technique de l'INC, on peut attendre une collaboration avec les personnels de la CSC, sans que cela porte atteinte à l'indépendance de la commission.

Rencontrés par votre rapporteur, les représentants du personnel de l'INC ont fait part de leur approbation, en 2010, de la réforme de l'INC et du regroupement avec les trois commissions, qui devaient devenir un nouveau projet mobilisateur pour un établissement confronté à un avenir incertain. L'inachèvement de cette réforme a déçu le personnel, en particulier du fait de l'attente des agents de la CSC, qui devraient représenter environ 15 % des effectifs complets de l'INC. Les représentants du personnel se sont interrogés sur le risque de réduction des moyens affectés aux missions historiques de l'INC s'il faut renforcer les moyens des commissions. Cette situation accentue le questionnement existentiel posé au personnel de l'INC par l'avenir du magazine « 60 millions de consommateurs ».

Pour autant, votre commission invite instamment le Gouvernement à procéder au transfert des crédits correspondant aux dix postes prévus dans les meilleurs délais, dès le début de l'exercice 2013.

* * *

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie » inscrits au projet de loi de finances pour 2013.


* 108 A titre de comparaison, il faut citer le décret n° 82-1009 du 26 novembre 1982 relatif aux indemnités susceptibles d'être allouées au président, au vice-président, aux membres et aux rapporteurs de la CCA et l'arrêté du 2 décembre 2002 qui en fixe le montant, ainsi que le décret n° 85-1497 du 31 décembre 1985 relatif aux indemnités susceptibles d'être allouées au président, aux membres et aux rapporteurs de la CSC et l'arrêté du 24 août 2005 qui en fixe le montant. Aucun texte n'existe pour la CMC.

* 109 La CSC comptait auparavant quinze agents.

* 110 Voir supra p. 23.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page