III. ENSEIGNEMENTS ARTISTIQUES : VERS UN DÉSENGAGEMENT DE L'ÉTAT ?

A. DES CRÉDITS DIVISÉS PAR DEUX EN DEUX ANS

Votre rapporteur pour avis dresse un constat alarmant à la lecture du projet annuel de performances pour 2014. En effet, l'action n° 3 « Soutien aux établissements d'enseignement spécialisé » subit la plus forte baisse du programme 224 par rapport à 2013 . Ces crédits concernent les établissements d'enseignement initial ou spécialisé (conservatoires) de la musique, de la danse et de l'art dramatique.

Avec 15 millions d'euros en AE=CP, c'est une chute de plus de 31 % qui est constatée en 2014. Elle suit une baisse de 25 % l'année passée. Au total, les crédits auront été divisés par deux entre 2012 - où ils s'établissaient à un peu moins de 30 millions d'euros - et 2014 .

Votre rapporteur pour avis avait souhaité que les crédits soient sanctuarisés en attendant la mise en oeuvre de la décentralisation des enseignements artistiques.

En effet, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a organisé la répartition des compétences entre les collectivités territoriales et l'État en matière d'enseignement artistique en clarifiant le rôle respectif de chaque niveau de collectivité publique dans l'organisation territoriale des compétences. Les communes et leurs groupements se sont ainsi vus confier les enseignements initiaux, les départements, l'organisation de schémas territoriaux, les régions, l'organisation et le financement du cycle d'enseignement professionnel initial (CEPI) et l'État, le contrôle pédagogique des établissements d'enseignement initial et la responsabilité des établissements d'enseignement supérieur artistique.

En parallèle, la loi a prévu le transfert aux départements et régions des crédits que l'État continue d'apporter aux établissements d'enseignement initial. Néanmoins, et faute de consensus avec les départements et les régions, les dispositions financières de la loi de 2004 n'ont, à ce jour, pas pu être mises en oeuvre et les crédits n'ont donc jamais été transférés. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur pour avis analysait avec une attention toute particulière le budget proposé chaque année pour les conservatoires, qui constituent des relais essentiels de la politique culturelle, en assurant la transmission des savoirs et le développement des pratiques amateurs, et professionnelles.

Le paysage des enseignements artistiques en France

Établissements

Depuis dix ans, le nombre de conservatoires à rayonnement régional (CRR) et de conservatoires à rayonnement départemental (CRD) est stable et ne devrait pas connaître de progression majeure dans les années à venir. On en dénombrait 133 en 1994-1995, et 153 en 2013. En revanche, la catégorie des conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal (CRC - CRCI) est appelée à se développer pour répondre à un souci d'aménagement du territoire et à une répartition plus équitable des charges financières pesant sur les villes-centres. Aujourd'hui, on en compte 298.

Les conservatoires sont des établissements relevant de la responsabilité des communes et de leurs groupements pour plus de 95 % d'entre eux, quelques établissements dépendent de la responsabilité des départements.

Élèves

En un peu plus de quinze ans, les effectifs d'élèves des CRR et des CRD sont passés de 124 725 élèves en 1994, à 159 193 pour l'année scolaire 2008-2009, dont 136 877 en musique, 19 020 en danse et 3 296 en art dramatique.

Après s'être stabilisé en 2000-2001, l'effectif des élèves suivant un enseignement musical connaît une constante augmentation depuis l'année scolaire 2003-2004, qui, ajoutée à la croissance soutenue du nombre de danseurs et de comédiens, permet de confirmer la tendance à la hausse des effectifs totaux depuis plusieurs années.

Au regard des données partielles obtenues dans le cadre de l'enquête consacrée aux CRCI au titre de l'année scolaire 2007-2008, on constate une augmentation des effectifs d'élèves. En 2002, près de la moitié des écoles municipales agréées accueillaient moins de 400 élèves. En 2007-2008, sur un total de 151 établissements, on recense 84 699 élèves, ce qui représente une moyenne de 561 élèves par établissement. Les CRCI assurent tous un enseignement musical et plus de la moitié un enseignement de la danse. Un quart de ces établissements propose également un enseignement du théâtre.

Personnels

Les effectifs d'enseignants sont passés de 7 401 en 1995 à 9 274 pour l'année 2008-2009, dont 8 500 pour les seules disciplines musicales. Cependant, ces chiffres ne reflètent pas la réalité du nombre de professeurs intervenant dans l'enseignement artistique puisqu'ils ne concernent que les CRR et les CRD. 31 000 enseignants en musique ont été répertoriés par le département des études de la prospective et des statistiques (DEPS) en 2000, toutes écoles confondues (conservatoires, écoles municipales non agréées, écoles associatives).

S'agissant des CRD et des CRR, pour l'année 2008-2009, on recense environ 3 300 enseignants titulaires relevant du corps des professeurs d'enseignement artistique, les assistants spécialisés d'enseignement artistique titulaires sont, quant à eux, aux alentours de 2 200. En musique, près de 70 % des enseignants sont titulaires, un peu moins de 60 % en danse et de l'ordre de 30 % en théâtre. Les autres postes d'enseignant sont occupés, soit par des contractuels, soit par des vacataires.

Source : Ministère de la culture et de la communication 8 ( * )

L'encadré ci-dessus montre l'importance du réseau des enseignements artistiques. L'annonce de la baisse des crédits a suscité un grand nombre de réactions. Ainsi le Syndicat des personnels de direction des conservatoires (Spedic) a-t-il lancé une pétition - réunissant 13 300 signataires à la date du 11 novembre 2013. Il demande à la ministre de la culture de renoncer à la baisse des crédits alloués au fonctionnement des conservatoires.

Le projet annuel de performances pour 2014 indique que « dans le cadre d'un budget contraint par la situation économique, des choix de redéploiements entre actions ont dû être opérés. La subvention moyenne des CRR et CRD s'établit donc à un peu plus de 100 000 euros. Ces subventions représentent en moyenne entre 4 et 6 % du fonctionnement de ces structures . »


* 8 Les données chiffrées dont le ministère de la culture et de la communication dispose sur les établissements d'enseignement initial de la musique, de la danse et de l'art dramatique proviennent des enquêtes statistiques de son département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS). Ces études ont jusqu'à présent porté, selon un rythme annuel, sur les conservatoires nationaux de région (CNR), aujourd'hui conservatoires à rayonnement régional (CRR) et les écoles nationales de musique, de danse et de théâtre (ENMDT), aujourd'hui conservatoires à rayonnement départemental (CRD). Les écoles municipales agréées, non subventionnées par le ministère, ont été traitées par cette enquête au titre de l'année scolaire 2007-2008. Bien que le taux de réponse ait été jugé insuffisant pour permettre d'établir des données statistiques fiables, il a toutefois été décidé de procéder à l'analyse des éléments relatifs aux statuts des enseignants et aux effectifs d'élèves afin de dresser un état des lieux récent de cette catégorie d'établissements.

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