EXAMEN EN COMMISSION

Mercredi 9 avril 2014

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Je supplée bien volontiers Mme Bonnefoy, empêchée de nous présenter son rapport pour avis pour des raisons familiales, tout en sollicitant votre indulgence.

Le projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 21 avril 2013 et sur lequel la procédure accélérée a été engagée le 20 janvier 2014, a été adopté par les députés le 18 février 2014 en première lecture. Au Sénat, il a été délégué au fond à la commission des affaires économiques et son rapport confié à notre collègue Vaugrenard. Notre commission s'en est saisie au titre de ses compétences en droit commercial et en droit administratif.

Le texte réforme le régime des baux commerciaux qui, selon l'article L. 145-1 du code du commerce, s'applique aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, qu'il s'agisse d'un fonds de commerce ou d'un fonds artisanal. Il recouvre donc une très grande diversité de situations, depuis le petit artisan jusqu'à la grande surface. Mme Bonnefoy, sans dénaturer les mesures proposées, s'est efforcée de les rendre opérationnelles et concrètes, de supprimer les dispositions dont l'utilité n'est pas avérée quand le droit applicable fait consensus ou encore d'éviter les risques contentieux entre bailleurs et locataires quant à l'établissement de l'état des lieux ou encore de la répartition des charges.

Deuxième volet du projet de loi, les très petites entreprises. Les petits artisans, en particulier dans le secteur du bâtiment, réclamaient depuis longtemps la réforme du régime des auto-entrepreneurs qui, selon eux, crée une forme de distorsion de concurrence. Mme Bonnefoy, après avoir rappelé que l'auto-entreprise constitue un régime fiscal et social, et non un statut juridique, formule des observations sur l'opportunité d'un rapport portant sur la création d'un statut unique de l'entrepreneur individuel et propose de supprimer le principe de gratuité des formalités auprès du registre du commerce et des sociétés. Concernant le régime des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, elle soumet à votre approbation des amendements en lien avec le rapport pour avis d'Antoine Lefèvre sur le projet de loi de finances pour 2014.

Question plus épineuse, celle des rapports entre commerçants et personnes publiques. Notre rapporteur vous invite à accepter l'extension du droit de préemption des baux commerciaux aux établissements publics de coopération intercommunale et aux sociétés d'économie mixte. En revanche, autoriser une personne publique attribuant une subvention à une société commerciale à imposer à celle-ci des restrictions à la distribution des dividendes, comme l'a souhaité le député François Brottes, lui semble constitutionnellement douteux. Je vous renvoie à la récente décision du Conseil constitutionnel sur la loi dite « Florange ».

En outre, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements facilitant l'utilisation du domaine public à des fins d'activité commerciale : le premier consacre le droit, pour le titulaire d'une autorisation d'occupation dans un marché ou une halle, à présenter un successeur ; le second à solliciter l'autorisation d'occupation par anticipation, voire à la transmettre en cas de décès. Ces dérogations paraissent acceptables à Mme Bonnefoy à condition de les préciser et de conserver à la personne publique son droit de contrôle.

Enfin, Mme Bonnefoy présente des amendements de coordination avec d'autres textes concernant la commission nationale d'aménagement commercial, la commission nationale d'aménagement cinématographique et la représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des chambres de métiers et de l'artisanat.

Sous réserve de l'adoption de ses amendements, notre rapporteur recommande de donner un avis favorable aux articles dont nous sommes saisis, sachant qu'elle proposera peut-être d'ultimes modifications au vu du texte de la commission des affaires économiques.

M. René Vandierendonck . - Sans originalité aucune, je ne peux me résoudre à voir le domaine public régi par le code de commerce. C'est contraire à l'intérêt de la collectivité et à des principes de notre droit que nous ne pouvons pas oublier, n'est-ce pas monsieur Lecerf, après les avoir enseignés.

M. Alain Richard . - Sans doute M. Sueur pourrait-il nous en dire davantage sur la genèse de ces propositions. Les règles applicables au domaine public ont évolué, entre autres pour les ports ; c'est un fait. Convenons pourtant qu'il n'existe pas de situation plus tragique que celle des propriétaires d'un bail commercial, si ce n'est celle des propriétaires d'un bail rural. Ils n'ont aucun droit ; pour eux, c'est le rouleau compresseur ! Le Conseil constitutionnel, qui a récemment rappelé que la personne publique ne pouvait pas aliéner sa propriété, doutera certainement de la conformité à notre Constitution du droit de présentation d'un successeur.

M. Philippe Bas . - Tout en étant sensibles aux propos de nos collègues, n'oublions pas le souci que nous avons dans la gestion des relations avec les commerces qui bénéficient d'une autorisation temporaire d'occupation. Ceux-ci, par la redevance qu'ils acquittent auprès de la personne publique propriétaire, contribuent à l'équilibre économique des aéroports et des gares. Sans eux, le prix des billets serait bien plus élevé... Examiner la possibilité de reconnaître l'existence des fonds de commerce, qui rendent d'ailleurs service aux voyageurs, sur le domaine public ne me pose aucune difficulté de principe à condition de l'encadrer.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Monsieur Richard, ces dispositions sont issues d'un amendement du Gouvernement et de M. Brottes...

M. Jean-Jacques Hyest . - ... sous-amendé par le Gouvernement !

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Tout à fait. Face à une divergence d'approche, le Gouvernement a tranché en faveur de la Cour de cassation contre le Conseil d'Etat : il a consacré la possibilité d'exploiter un fonds de commerce sur le domaine public. Mme Bonnefoy suggère une position équilibrée : reconnaître ces fonds de commerce en précisant qu'ils n'ouvrent pas droit au bail. De même, pour le droit de présentation, il est clair que la collectivité publique peut refuser un successeur présenté...

M. Alain Richard . - Sans avoir à verser de compensation indemnitaire ?

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Oui.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR

Article 1 er A

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Vous savez l'attachement de notre commission à la langue française... Le terme de « monovalence » est fort peu gracieux, d'où l'amendement rédactionnel n° 1.

L'amendement n° 1 est adopté.

Article 1 er

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 2 maintient une durée maximale de trois ans pour un bail commercial dérogatoire ou des baux dérogatoires successifs. En revanche, il supprime la nouvelle rédaction de l'article L. 145-5 du code du commerce car elle soulève des difficultés au regard de la jurisprudence.

L'amendement n° 2 est adopté.

Article 1 er bis

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Avec l'amendement n° 3, nous codifions une définition jurisprudentielle bien établie, celle de la convention d'occupation précaire en matière de locaux commerciaux, plus souple que celle prévue dans le projet de loi.

L'amendement n° 3 est adopté.

Article additionnel après l'article 1 er bis

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 4 tire les conséquences de l'arrêt du 28 juin 2013 de la Cour de cassation, par laquelle elle a remis en cause une pratique existante en matière de renouvellement d'un bail de longue durée. Cette politique doit pouvoir se maintenir.

L'amendement n° 4 est adopté.

Article 1 er quater

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Préciser le cas de la scission de sociétés ajouté par le projet de loi, de même que celui de la transmission universelle de patrimoine, tel est l'objet de l'amendement n° 5. Vous le voyez, Mme Bonnefoy a accompli un travail très complet et très précis pour améliorer le texte.

L'amendement n° 5 est adopté.

Article 2

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'indice du coût de la construction pour l'indexation ou la révision des loyers des baux commerciaux serait abandonné au profit de l'indice des loyers commerciaux et celui des loyers des activités tertiaires. L'amendement n° 6 en tire toutes les conséquences.

L'amendement n° 6 est adopté.

Article 3

L'amendement n° 7 est adopté.

Article 4

L'amendement n° 8 est adopté.

Article 5

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 9 clarifie les différents cas de figure dans lesquels un état des lieux doit être établi contradictoirement entre bailleur et locataire d'un local commercial.

L'amendement n° 9 est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 10 précise les obligations d'information du bailleur en matière de charges récupérables sur le locataire afin de limiter le risque contentieux.

M. Jean-Jacques Hyest . - Soit, mais un ensemble commercial n'est pas forcément la propriété d'un seul. Que se passera-t-il dans ce cas ?

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Les dispositions s'appliquent uniquement aux travaux prévus par le bailleur.

M. Jean-Jacques Hyest . - Très bien.

L'amendement n° 10 est adopté, ainsi que l'amendement n° 11.

Article 6

L'amendement n° 12 est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Le droit de préférence du locataire en cas de projet de cession d'un local commercial ne se justifie pas toujours. Mieux vaut l'encadrer avec l'amendement n° 13.

L'amendement n° 13 est adopté.

Article 7 bis

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Autoriser les bailleurs à donner congé au moyen d'une lettre recommandée sera source de contentieux. Après consultation, et sans céder à la pression d'un quelconque lobby, Mme Bonnefoy estime indispensable de maintenir, pour des raisons de sécurité juridique, le recours obligatoire à un huissier, étant précisé que la prestation a un coût de l'ordre de 150 euros. Tel est le but de l'amendement n° 14.

M. Patrice Gélard . - En réalité, la somme est trois à quatre fois supérieure...

L'amendement n° 14 est adopté.

Article 13

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Accorder la gratuité des formalités aux auto-entrepreneurs reviendrait à faire supporter la charge de ces coûts aux greffiers des tribunaux. Encore une fois, il s'agit de tenir compte des réalités, non pas de céder aux pressions d'un lobby. En outre, comment reconnaître un auto-entrepreneur au stade de l'immatriculation ?

L'amendement n° 15 est adopté.

Article 17

Les amendements n os 16 et 17 sont adoptés.

Article 18

L'amendement n° 18 est adopté.

Article 20 AA

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Cet article, introduit par un amendement de M. Brottes à l'Assemblée nationale, autorise une personne publique attribuant une subvention à une société à lui imposer des règles restrictives sur la distribution des dividendes. Sa constitutionnalité est douteuse, il porte atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre sans motif d'intérêt général. Afin de vous épargner un long développement, je vous renvoie à la décision du Conseil constitutionnel sur la loi Florange. M. Desplan, notre rapporteur pour avis, avait d'ailleurs...

M. Jean-Jacques Hyest . - ... accompli un excellent travail !

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Adopter cet article en l'état serait courir un risque d'annulation. D'où cet amendement de suppression n° 19.

M. Alain Richard . - La gauche proudhonienne n'a jamais admis le droit de propriété...

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - ... quand la gauche rocardienne veut prendre en compte la réalité de l'entreprise !

L'amendement n° 19 est adopté.

Article 20 quater

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Les membres de la commission nationale d'aménagement commercial sont déjà soumis, par la loi relative à la transparence de la vie publique, au dépôt d'une déclaration patrimoniale et d'une déclaration d'intérêts. Il n'est peut-être pas utile de retenir les dispositions ajoutées par l'Assemblée nationale à l'initiative du député Chassaigne. En revanche, nous devons préciser que l'incompatibilité peut entraîner la suspension ou la fin d'un mandat d'un membre de la commission. Voilà le but de cet amendement n° 20.

L'amendement n° 20 est adopté.

Article 24 bis

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 21 qualifie expressément, ce qui n'était pas explicite, la commission nationale d'aménagement cinématographique d'autorité administrative indépendante. Ces membres sont donc assujettis à la loi relative à la transparence de la vie publique.

M. Jean-Jacques Hyest . - Je suite contre : il faut arrêter de créer des autorités administratives indépendantes à tire-larigot !

M. Alain Richard . - Je voterai l'amendement car je n'éprouve aucune hostilité envers les autorités administratives indépendantes. Cette commission constitue bel est bien une autorité régulatrice de concurrence.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Cette commission a toutes les caractéristiques d'une autorité administrative indépendante : le texte se limite à la reconnaître comme telle.

M. René Vandierendonck . - Soit, mais quelles sont les incidences financières et indemnitaires de cette qualification ?

M. Alain Richard . - Elle ne sera plus soumise au droit de la fonction publique...

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Je m'engage à apporter une réponse précise à M. Vandierendonck avant la séance publique.

M. Jean-René Lecerf . - L'article 40 de la Constitution ne devrait-il pas s'appliquer ?

M. René Vandierendonck . - J'aimerais beaucoup disposer d'une liste réactualisée des autorités existantes.

M. Patrice Gélard , président . - J'avais rédigé un rapport sur cette question en 2006 ; je pourrais le compléter.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Excellente proposition !

L'amendement n° 21 est adopté.

Article 28

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 22 supprime l'article 28 par coordination avec le projet de loi sur l'égalité entre les femmes et les hommes.

L'amendement n° 22 est adopté.

Article 30 bis

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Exiger trois ans d'activité sur une halle ou un marché pour qu'un commerçant puisse exercer le droit de présentation de son successeur se justifie dans le cas de Rungis, moins pour les marchés locaux. Faisons confiance, avec l'amendement n° 23, aux autorités locales...

M. René Garrec . - Enfin, nous appliquons le principe de subsidiarité !

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - ... pour fixer une durée adaptée dans la limite maximale de trois ans.

M. René Vandierendonck . - Le maire, agissant comme autorité de police du domaine public, devra-t-il obtenir une autorisation du conseil municipal pour agir ?

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Ma propre expérience de maire m'incite à croire que cela entre dans le champ des délégations.

L'amendement n° 23 est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 24 précise que la personne présentée sera également destinataire de la décision du maire, laquelle devra être motivée en cas de refus seulement. Lorsqu'on est satisfait, point n'est besoin d'explications...

M. Pierre-Yves Collombat . - Réalise-t-on dans quel maquis de contentieux on s'engage avec ce genre de texte ? L'amendement améliore plutôt les choses mais, franchement, motiver les décisions... Et pourquoi pas des appels d'offres ? Bravo, ça nous simplifiera la vie ! Il n'y a qu'à voir comment le client agit ensuite...

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Nous proposons de motiver seulement les refus. Les raisons présentées devront naturellement être acceptables, il ne s'agit pas d'invoquer une mauvaise tête.

M. Jean-Jacques Hyest . - Tout de même, ne faisons pas comme si les marchés étaient gérés par les communes et comme s'ils étaient tous florissants. Les commerçants ont besoin de stabilité pour espérer vendre ou céder leur activité à leur enfant. Vouloir assurer la pérennité de ces entreprises est une bonne chose.

M. Pierre-Yves Collombat . - Il n'empêche ; en multipliant les règles, on multiplie les sources de contentieux. Dans la plupart des marchés, et surtout dans les marchés ruraux, la difficulté est plutôt de trouver un successeur, c'est vrai. Cependant, la difficulté demeure : que racontera-t-on pour justifier un refus si plusieurs personnes sont intéressées ?

L'amendement n° 24 est adopté.

Article 30 ter

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - J'ai présenté cet amendement n° 25 dans mon propos liminaire. Le Gouvernement a tranché en faveur de la Cour de cassation en consacrant l'existence des fonds de commerce sur le domaine public. Cela est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

M. René Vandierendonck . - Pour bien connaître ces problèmes de domanialité publique, nous savons que le régime protecteur de la personne publique mis en place par le Conseil d'État est ancien. Je ne peux pas me résigner à mettre le petit doigt dans l'engrenage d'une privatisation du domaine public.

M. Jean-René Lecerf . - Tout à fait. J'ai le sentiment que les mots d'inviolabilité et d'incessibilité sont en voie de déshérence. Comment concilier affectation du domaine public et constitution d'un fonds de commerce ? Le maire pourra-t-il installer des fonds de commerce dans les églises ?

M. Jean-Jacques Hyest . - Des vendeurs de cierges !

M. Jean-René Lecerf . - Des précautions sont indispensables.

M. Pierre-Yves Collombat . - J'approuve entièrement les propos de MM. Vandierendonck et Lecerf.

M. Nicolas Alfonsi . - Moi aussi : le domaine public doit rester le domaine public.

M. Patrice Gélard , président . - Que se passera-t-il si l'amendement est rejeté ?

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - Nous en resterons au texte de l'Assemblée nationale...

M. Jean-René Lecerf et M. René Vandierendonck . - Nous pouvons le supprimer !

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - En effet, vous pouvez déposer un amendement de suppression de l'article. Mme Bonnefoy n'a pas jugé bon d'aller jusque-là, prenant acte de la position du Gouvernement.

M. Jean-Jacques Hyest . - Vous ne m'en voudrez pas si je vote cet amendement et propose la suppression de l'article en séance...

M. Philippe Bas . - De nombreuses collectivités publiques, notamment les établissements publics de transport ferroviaire, sont attachées à la valorisation de leur domaine public. Les autorisations d'occupation temporaire du domaine public donnant lieu à des redevances, elles y gagnent de l'argent. Plus la redevance est élevée, plus cela profite à la collectivité. Ne balayons pas d'un revers de main cette disposition introduite par les députés, confortons-la en l'encadrant et en la précisant avec la notion de « clientèle propre ». Elle n'est pas nécessairement négative pour les gestionnaires du domaine public.

M. Patrice Gélard , président . - Et l'indemnisation ?

M. Philippe Bas . - Elle existe déjà !

M. René Vandierendonck . - J'entends bien, mais il s'agit du domaine public. Je refuse qu'y pénètre la logique spéculative. Lors des débats sur le projet de loi relatif aux métropoles, souvenez-vous, nous nous sommes battus pour que les collectivités retrouvent un droit de regard sur la gouvernance des gares. Imaginons-en une qui voudrait réorganiser les accès ou les circulations entre la gare et les espaces publics à proximité. RFF lui répondra que le bien doit être apprécié à sa valeur vénale. Comment la calculera-t-il ? Par la méthode dite du compte à rebours en prenant en compte la valeur des éventuels fonds de commerce qui se seront constitués. Cela est choquant.

L'amendement n° 25 est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 26, très technique, prévoit que la cession du fonds conditionne le moment à partir duquel l'autorisation d'occupation du domaine public produit des effets, lorsque cette autorisation est sollicitée par anticipation.

L'amendement n° 26 est adopté.

M. Jean-Pierre Sueur , en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis . - L'article 30 ter prévoit que les héritiers et ayants droit d'un titulaire d'autorisation d'occupation du domaine public bénéficient de cette autorisation pour la durée qu'elle prévoit et au maximum un an afin de poursuivre l'exploitation du fonds. L'amendement propose de rendre le dispositif plus efficace et plus sûr sur le plan constitutionnel. D'une part, en cas de décès du commerçant, ses ayants droit, s'ils souhaitent poursuivre l'exploitation du fonds, se verraient délivrer une autorisation d'occupation du domaine public identique à celle du précédent titulaire pour trois mois, puis cette autorisation pourrait être reconduite selon les règles de droit commun. D'autre part, les ayants droit qui ne poursuivraient pas l'exploitation du fonds disposeraient d'un droit de présentation pendant six mois pour que le décès du commerçant ne cause pas une dépréciation brutale de la valeur du fonds de commerce. Il s'agit là de dispositions très pragmatiques et tout à fait pertinentes.

L'amendement n° 27 est adopté.

Sous réserve des amendements qu'elle a adoptés, la commission donne un avis favorable aux dispositions dont elle s'est saisie pour avis.

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