B. LA GESTION DU COMPTE N'EST PRATIQUEMENT JAMAIS CONFORME AUX PRÉVISIONS TRANSMISES AU PARLEMENT

1. Les dépenses et recettes exécutées s'éloignent de plus en plus de leurs prévisions...

Compte tenu du caractère notionnel des crédits ouverts sur le compte et des usages multiples qui en sont faits (utilisation du produit des cessions pour financer des acquisitions, véhicule budgétaire entre une mission et un opérateur, contribution au désendettement), l'exécution des crédits n'a dorénavant presque plus rien à voir avec les prévisions annoncées, ainsi qu'en témoigne le graphique suivant :

Prévisions et exécutions des recettes du CAS « PFE » depuis 2014

(en milliards d'euros)

Source : commission des affaires économiques à partir des données de l'APE

Le même constat devrait s'appliquer à l'année 2020. Alors que 12,2 milliards d'euros de recettes étaient prévues pour le CAS en 2020, leur montant effectivement perçu ne s'élevait au 27 octobre qu'à 6,4 milliards d'euros, la privatisation d'ADP n'ayant, ainsi qu'attendu, pas eu lieu. Au-delà du fait que seules 52 % des prévisions ont été exécutées, la nature même de ces recettes diverge de celle prévue en loi de finances initiale. En effet, alors que cette dernière indiquait 1,1 milliard d'euros de versements du budget général, ils atteignaient déjà, à cette date, un montant d'environ 5 milliards d'euros. Selon les informations transmises par l'APE, un autre versement en provenance du programme 358, d'un montant de 4,8 milliards d'euros, devrait abonder le compte d'ici fin décembre 2020.

Bien entendu, le versement destiné à financer le soutien à Air France KLM, en provenance du programme 358 « plan d'urgence » et d'un montant de 3,2 milliards d'euros, ne pouvait être anticipé en décembre 2020. Pour autant, même en retirant ce versement du total des versements budgétaires, ces derniers s'élèvent toujours à 1,7 milliard d'euros, soit déjà 500 millions d'euros de plus à cette date que le montant voté en LFI 2020.

Toujours au 27 octobre 2020, 4,1 milliards d'euros de dépenses ont été effectivement engagées sur le total de 12,2 milliards d'euros prévus. Selon l'APE, le versement à Air France-KLM du prêt d'actionnaire de 3 milliards d'euros devrait intervenir avant la fin de l'année, de même que la participation de l'État actionnaire à une augmentation de capital de la holding de tête de la SNCF, à hauteur de 4,1 milliards d'euros.

2. ... et entraînent une dégradation alarmante du solde du compte

En 2019, 2,8 milliards d'euros de recettes sont effectivement venues abonder le compte tandis que 1,1 milliard de dépenses ont été engagées (dont la moitié a concerné des opérations hors du périmètre de l'APE). Par conséquent, le solde d'exécution 2019 s'est établi à 1,7 milliard d'euros et le solde cumulé est remonté à 3,2 milliards d'euros. Ce résultat en apparence positif ne correspond en réalité pas au niveau réel de ce dernier, le produit de la cession des titres FDJ (1,87 milliard d'euros 12 ( * ) ) n'ayant pas encore été affecté à une utilisation précise au 31 décembre 2019.

Évolution du solde cumulé du CAS entre 2010 et 2020

(en milliards)

Source : commission des affaires économiques, à partir des données APE

Une fois soustrait le produit de la cession des titres de la FDJ, versé en 2020 au Fonds pour l'innovation (cf. infra ), le solde cumulé du compte était fin 2019 à son plus bas niveau depuis 10 ans (hors 2012), à 1,43 milliard d'euros. Le Gouvernement, en trois ans, a donc puisé dans le solde à hauteur de 60 %. Selon les informations fournies par l'APE, le solde cumulé fin 2020 devrait s'établir à 2,21 milliards d'euros, en raison notamment du report sur 2021 de deux opérations initialement prévues fin 2020. Lorsque ces dépenses auront été réalisées en 2021, le solde cumulé s'établira à 1,3 milliard d'euros.

De surcroît, le solde du compte est annoncé déficitaire pour 2021, à hauteur de 515 millions d'euros, ce qui réduirait le solde cumulé à 850 millions d'euros (une fois déduites les deux opérations reportées à 2021), un niveau 4,3 fois inférieur à celui de 2016.

Les principales recettes et dépenses à venir entre octobre et décembre 2020

D'octobre à décembre 2020, les principes recettes dont devrait bénéficier le compte sont deux versements du budget général, l'un en provenance du programme 358 à hauteur de 4,75 milliards d'euros et l'autre en provenance des programmes 421 et 423 au titre du PIA 3.

Les principales dépenses attendues, sans être certaines toutefois, sont le versement à Air France KLM d'une ou plusieurs tranches du prêt d'actionnaire prévu dans le cadre du plan de soutien à l'entreprise, d'un montant de 3 milliards d'euros, et le versement de 450 millions d'euros au titre des opérations en fonds propres, correspondant à la recette équivalente susmentionnée.

3. En 2021, le compte sera réduit à n'être qu'un simple véhicule budgétaire

Contrairement aux autres années, aucun produit de cessions n'est prévu en 2021. Les recettes du compte devraient se répartir comme suit :

• 12,7 milliards d'euros de versements du budget général, dont :

o 11 milliards à partir du programme 358 au titre du renforcement des fonds propres et quasi-fonds propres des entreprises stratégiques vulnérables ;

o 953 millions d'euros à partir du programme 365 pour financer un renforcement de ceux de l'Agence française de développement (AFD) ;

o 250 millions d'euros à partir du programme « Compétitivité » de la mission « Relance » afin que l'État investisse dans un fonds de fonds régionaux de capital investissement participant au renforcement des fonds propres des PME.

• 76 millions d'euros de remboursement de créances rattachées à des participations financières, la société Naval Group devant rembourser l'avance d'actionnaire qui lui a été octroyée le 18 juin 2020 pour une durée d'un an ;

• 20 millions d'euros de retours sur investissement de plusieurs fonds de capital-risque (fonds de câblage internet, fonds de fonds technologique 3, etc.).

La fonction essentielle du compte en 2021 sera donc de servir de véhicule entre programmes budgétaires.


* 12 La cession partielle de la participation de l'État dans la FDJ a entraîné une recette brute de 1,89 milliard d'euros. Le produit net, quant à lui, s'est établi à 1,87 milliard d'euros, compte tenu des commissions versées au bénéfice des intermédiaires financiers ayant participé à la mise en oeuvre de l'opération, qui représentent 14,8 millions d'euros (taux de commission de 0,78 %).

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