B. LES CRÉDITS ALLOUÉS À L'INTÉGRATION : LA POURSUITE DU STATU QUO

Les objectifs d'intégration ambitieux issus du comité interministériel à l'immigration et à l'intégration du 5 juin 2018 se sont notamment traduits par le déploiement d'une version renforcée du contrat d'intégration républicaine (CIR) à partir du 1 er mars 2019 . Cette montée en puissance repose sur trois piliers : le doublement du nombre d'heures de formation linguistique et de formation civique, ainsi qu'un renforcement de l'insertion professionnelle (actions de formation et d'accompagnement et mise en place d'un entretien en fin de contrat pour permettre l'orientation vers l'acteur adéquat du service public de l'emploi).

Si 2020 devait être la première année de déploiement intégral du CIR, cette ambition a été percutée de plein fouet par la crise sanitaire, de sorte qu'il apparaît toujours délicat de tirer un premier bilan de la version renforcée du CIR . Ainsi, le nombre de CIR signés a diminué d'un quart entre 2019 (107 402) et 2020 (78 674) et le directeur général de l'OFII a indiqué au cours de son audition que l'année 2021 n'avait pas encore permis de retrouver un rythme de croisière.

Si la subvention allouée à l'OFII connaît une hausse de 3,1 %, de même que son plafonds d'emplois (+ 19 ETPT), cette progression s'explique en réalité principalement par l'ouverture d'une nouvelle direction territoriale à Mayotte destinée à piloter la mise en place du CIR (9 ETPT) 14 ( * ) et des conditions matérielles d'accueil (10 ETPT) 15 ( * ) sur le territoire. Les craintes exprimées l'année précédente quant à l'insuffisance des moyens attribués à l'OFII pour faire face à l'extension de son périmètre d'intervention, en particulier en matière d'insertion professionnelle - ce qui ne correspond pas à son coeur de métier - sont toujours d'actualité . Il en va de même s'agissant du taux de rotation annuel chroniquement élevé des effectifs (entre 30 et 40 % la première année), dont le directeur général de l'OFII a confirmé au cours de son audition qu'il tendait à devenir un problème structurel pour le fonctionnement de l'Office.

Enfin, les rapporteurs entendent insister sur les problématiques liées à la récurrence des violences commises à l'encontre des personnels d'accueil de l'OFII, majoritairement féminins , qui leur ont été rapportées par le directeur général, Didier Leschi. S'ils saluent le fait qu'un dépôt de plainte soit systématiquement effectué, ils estiment néanmoins indispensable de mieux armer l'OFII pour sanctionner ces violences, si besoin en étendant les possibilités d'interrompre le versement de l'ADA.

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En dépit de la hausse des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », les rapporteurs estiment que ce budget est dépourvu d'ambition réelle et ne permet en rien de répondre à l'ampleur des défis, aux besoins croissants des services et à la nécessité de protéger dans de bonnes conditions les personnes concernées . Loin de s'attaquer à la source de la pression migratoire ou aux facteurs qui favorisent le dévoiement de nos procédures, ce budget est, encore une fois, une simple adaptation aux fluctuations de la pression migratoire . Tout juste permet-il de se conformer, a minima , aux normes juridiques internes et aux engagements internationaux de la France.

Les rapporteurs appellent, une nouvelle fois, à engager des réformes de fond de nos politiques migratoires plutôt que de sans cesse pallier les insuffisances d'une politique structurellement sous-dimensionnée . La mise en place d'actions fortes pour parvenir à une « immigration choisie », avec un rôle accru du Parlement dans la définition des orientations de la politique migratoire, apparaît ainsi indispensable. La conditionnalité des aides, la poursuite de la restriction de visas aux pays non coopératifs en matière d'éloignement, ainsi que la simplification du contentieux de l'éloignement devraient également être des chantiers prioritaires.

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La commission des lois a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » inscrits au projet de loi de finances pour 2022.

Cet avis sera examiné en séance publique le 1 er décembre 2021.


* 14 L'article 240 de la LFI pour 2020 a reporté la date d'entrée en vigueur du parcours personnalisé d'intégration républicaine sur le territoire de deux ans, pour la fixer au 1er janvier 2022.

* 15 Il résulte de l'arrêt du Conseil d'État du 12 mars 2021 (n° 448453) que l'État a obligation d'assurer les conditions matérielles d'accueil sur le territoire mahorais.

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