B. DÉCARBONATION DU TRANSPORT MARITIME : UNE DYNAMIQUE FRAGILE, À REBOURS DES AMBITIONS FRANÇAISES ET EUROPÉENNES

1. Le verdissement des navires : il y a urgence à prévoir des moyens ambitieux et opérants

Alors que le transport maritime représente près de 3 % des émissions mondiales de CO2, la réglementation encadrant les émissions du secteur est en voie de renforcement au niveau européen (intégration du transport maritime au marché carbone prévue par le paquet « Fit for 55 »).

Face à cette ambition, les moyens déployés sont loin d'être suffisants. Le transport maritime international repose aujourd'hui de manière quasi-exclusive sur les énergies fossiles, notamment le fioul lourd. Si des technologies (propulsion vélique) et carburants alternatifs se développent (GPL, hydrogène, électricité, biocarburants, etc.), leur degré de maturité, voire de disponibilité, est contrasté et les coûts d'acquisition demeurent élevés.

Si la publication d'une feuille de route sur la décarbonation du secteur en janvier 2023 est une avancée, le rapporteur appelle le Gouvernement à prévoir des outils et des moyens financiers adéquats pour accompagner cette transition.

Le rapporteur s'inquiète des conséquences de l'article 5 octies du PLF, introduit par le Gouvernement à l'Assemblée nationale pour se conformer à un règlement européen du 23 juin 2023, qui revient à abaisser considérablement les taux de déduction fiscale du dispositif de « suramortissement vert » (article 39 decies C du CGI). De l'avis des Armateurs de France, la modification proposée viderait le dispositif de sa portée, alors qu'il commençait enfin timidement à produire ses effets grâce à des ajustements opérés en loi de finances initiale (LFI) pour 2022.

Le rapporteur appelle donc à ajuster le « suramortissement vert » de manière à maintenir les équilibres du dispositif actuel, tout en assurant la conformité au nouveau cadre européen. La commission se félicite de l'adoption de l'amendement I-177 de la commission des finances, qui permet de préserver la portée du dispositif actuel.

2. Transition écologique des ports : un manque de visibilité sur le financement, des exigences renforcées par l'Union européenne

Le règlement européen sur les infrastructures de carburants alternatifs (dit « AFIR ») adopté en juillet 2023 prévoit des obligations de déploiement de bornes de recharge électrique à quai dans les ports à compter du 1er janvier 2030, pour certains types de navires (porte-conteneurs, ferries et paquebots) et selon le nombre d'escales réalisées à l'année.

État des lieux et objectifs de déploiement du branchement électrique à quai dans les 5 GPM qui seraient concernés par le  règlement AFIR

 
 

Équipements
de branchement
à quai déjà réalisés (porte-conteneurs, ferries et croisière)

Estimation des équipements
à réaliser d'ici 2030

Source : DGITM

Cinq des six grands ports maritimes (GPM) métropolitains10(*) et douze ports décentralisés pourraient être concernés par ces obligations, selon les estimations actuelles11. De très lourds investissements sont déjà mis en oeuvre pour le déploiement d'infrastructures de recharge à quai par les GPM, comme avait pu l'observer le rapporteur lors d'un déplacement au GPM de Marseille en mai 2023. Le rapporteur appelle à soutenir les ports dans cette transition avec des moyens plus ambitieux (seulement 175 M€ avaient été prévus dans le Plan de relance, désormais en grande partie consommés).


* 10 Selon le Ministère de la transition écologique, pourraient à ce jour être concernés les GPM de Marseille, Dunkerque, Haropa, Nantes Saint-Nazaire et Bordeaux, sur la base de l'historique des escales réalisées dans ces ports au cours des années 2017 à 2019. Toutefois, la liste définitive des ports concernés sera arrêtée en fonction du nombre d'escales mesuré au cours des années 2027 à 2029.

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