D. LES ÉLÉMENTS FINANCIERS DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT POUR 2000 : FINANCER À TOUT RISQUE LES 35 HEURES AU DÉTRIMENT DES RETRAITES

Le cadrage économique de la loi de financement de la sécurité sociale paraît cette année ne pas appeler de contestation particulière. Il est, comme à l'habitude, commun au projet de loi de finances.

1. Dépenses et recettes en progression sensible

Le projet de loi de financement initial présente des objectifs de dépenses en hausse de 2,75 % et des prévisions de recettes en hausse de 3,45% par rapport aux prévisions d'exécution de 1999.

Recettes et dépenses du projet de loi de financement pour 2000

(en milliards de francs)

 

Exécution PLFSS 1997

Exécution PLFSS 1998

Prévisions d'exécution LFSS 1999

Prévisions PLFSS 2000

Ecart 1999 / 2000

Prévisions de recettes

1.664,5

1.736,4

1.810,9

1.873,2

+ 3,44 %

Objectifs de dépenses

1.695,7

1.744,8

1.806,6

1.856,3

+ 2,75 %

La hausse du périmètre est presque entièrement le résultat de l'extension du champ de la loi de financement au passage aux 35 heures et à la couverture maladie universelle.

Le champ de la loi de financement tire notamment profit des nombreux prélèvements obligatoires nouveaux qui lui sont affectés (cf. supra ), mais aussi des recettes de la croissance économique. Ainsi, le rendement de la CSG devrait-il continuer à progresser pour apporter 12,4 milliards de plus qu'en 1999.

Rendement de la CSG

 

1998

1999

2000

Montant (milliards de francs)

318,5

353,5

365,9

Ecart (milliards de francs)

 

+ 35

+ 12,4

Ecart ( %)

 

+ 11

+ 3,5

Principaux éléments de cadrage macroéconomique - 1998-1999-2000

(Variation en volume, moyenne annuelle, en %, sauf indications contraires)

 

1998

1999

2000

Environnement international

 
 
 

PIB :

 
 
 

OCDE hors France

2,3

2,6

2

Union européenne à 15

2,8

1,9

2,7

Zone euro

2,8

2

2,7

Prix à la consommation zone euro

1,4

1,2

1,6

Prix moyen du pétrole importé FAB (dollars/baril)

12,7

16,4

18

Cours du dollar en euros

1,112

1,072

1,06

France

 
 
 

PIB en volume

3,2

2,3

2,6 - 3

PIB en valeur

4,1

2,9

4

Montant du PIB (en milliards de francs)

8.565

8.816

9.169

Pouvoir d'achat du revenu disponible des ménages

2,5

2,6

2,6

Consommation des ménages

3,2

2,4

2,7

Investissement des entreprises

6,7

6

5

Prix à la consommation des ménages

 
 
 

Ensemble

0,7

0,6

1

Hors tabac

0,6

0,5

0,9

Masse salariale secteur privé (ENFNA)

4

3,7

4

Salaire moyen par tête

2,1

2,2

2,3

Effectifs salariés

1,9

1,5

1,7

Exportations

6,2

0,7

4,7

Importations

8,7

2,1

4,9

Solde de la balance commerciale FAB/FAB (données douanières, en milliards de francs)

154

102

102

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale

2. Les conséquences de la couverture maladie universelle

a) La mise en place de la CMU

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, mais également le projet de loi de finances pour 2000, prend acte des nombreux changements inaugurés par la création de la couverture maladie universelle (CMU).

Celle-ci se compose de deux parties :

• une couverture de base attribuée aux personnes exclues de tout système de protection. Elle succède donc à l'assurance personnelle qui donnait lieu à des financements croisés importants et laissait cependant de côté 150.000 personnes ; cette couverture est gratuite jusqu'à un certain niveau de ressources ;

• une couverture complémentaire accordée gratuitement sous condition de ressources à 6 millions de personnes ; les caisses primaires d'assurance maladie comme les organismes complémentaires prennent alors en charge les assurés, selon un double système, un paiement au franc le franc des dépenses engagées pour les CPAM, un forfait de 1500 francs par assuré pour les autres.

Cette vaste réforme nécessite des circuits de financement importants. Pour la couverture de base, la loi aménage les transferts existants autour de l'actuelle assurance personnelle pour rendre la nouvelle couverture de base la plus neutre financièrement possible lors de sa première année de mise en place. Il fait ainsi disparaître l'ensemble des cotisations versées par les départements, l'Etat, la CNAF, le FSV et les assurés. Pour équilibrer l'ensemble, il procède à des transferts de recettes au profit de la CNAMTS.

La CNAF transfère à la CNAMTS 28 points sur les 50 points du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et produits de placement qui lui sont affectés, soit 2,7 milliards de francs pour un allégement de 2,38 milliard de francs de dépenses. Au total, elle supporte une perte de 320 millions de francs justifiée, d'après le Gouvernement, par la non prise en charge de cotisations d'assurance personnelle pendant plusieurs années, au détriment des départements.

Pour compenser la charge actuelle de 4,05 milliards versés par les départements et l'Etat au titre de l'aide médicale gratuite, la CNAMTS obtient l'affectation à son profit d'une fraction du produit des droits de consommation sur les tabacs (3,5 milliards de francs), soit une différence de 550 millions de francs.

La CNAMTS récupère 5 points des 60 % des droits de consommation sur les alcools affectés au FSV, soit une recette de 600 millions de francs compensant 610 millions de dépenses supprimées par ce dernier.

Les cotisants voient leurs cotisations se réduire, pour passer de 440 à 100 millions de francs, ce qui représente une perte de recettes pour la CNAMTS de 340 millions de francs.

La CNAMTS doit par ailleurs prendre en charge l'intégralité du déficit de l'assurance personnelle, actuellement réparti entre les régimes obligatoires, soit un surcroît de dépenses de 570 millions de francs. En compensation, elle devrait percevoir 830 millions de francs au titre de la cotisation sur les véhicules terrestres à moteur. Les 260 millions de francs de différence aujourd'hui perçus par les autres régimes devraient être compensés par une subvention de l'Etat.

Enfin, la CNAMTS devra supporter le coût de l'extension du champ de la couverture de base, estimé à 600 millions de francs.

Le financement de la couverture complémentaire est pris en charge par un fonds spécial. Le coût total a été évalué la première année à 1.500 francs par an et par bénéficiaire pour 6 millions de personnes, soit 9 milliards de francs. Le financement obéit à un principe inégal : reversement pour les organismes privés (dès qu'un organisme prend en charge un bénéficiaire de la CMU, il reçoit cette somme forfaitaire), remboursement au franc le franc pour l'assurance maladie.

Les recettes de ce fonds proviennent :

• d'une contribution de 1,75 % du chiffre d'affaires des activités " santé " des mutuelles et des compagnies d'assurance, avec un paiement trimestriel. Cette contribution est nette des reversements aux mêmes organismes par le fonds pour la prise en charge de bénéficiaires de la CMU (1.500 F par affilié), chaque organisme ne versant au fonds que la différence (ou percevant le surplus théorique) entre sa contribution et les reversements ; sa ressource est estimée à un montant maximum de 1,8 milliard de francs ;

• d'une subvention d'équilibre de l'Etat évaluée ex post , estimée en première année à 7,2 milliards de francs au moins.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 tire donc les conséquences de ces réformes. Les prévisions de recettes tiennent ainsi compte des nouveaux prélèvements et des nouvelles affectations de ceux qui existent.

Synthèse du financement annoncé par le Gouvernement
pour la première année de la couverture de base de la CMU

(en milliards de francs)


Pertes de recettes et dépenses supplémentaires

 

Recettes supplémentaires et moindres dépenses

 

CNAF

 
 
 

reprise de 28 points sur les 50 qu'elle touche du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et produits de placement

2,7

suppression des cotisations à l'assurance personnelle

2,38

 
 

Perte nette

0,32

CNAMTS

 
 
 

Perte des cotisations de la CNAF à l'assurance personnelle

2,38

Affectation de 28 points sur les 50 qu'elle touche du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et produits de placement

2,7

Perte des cotisations versées par l'Etat et les départements au titre de l'assurance personnelle

4,05

Fraction du produit des droits de consommation sur les tabacs

3,5

Perte des cotisations versées par le FSV

0,61

Fraction des 60 % des droits de consommation sur les alcools affectés au FSV

0,6

Prise en charge du déficit de l'assurance personnelle

0,57

Cotisation sur les véhicules terrestres à moteur

0,83

Perte de cotisations des assurés

0,44

Cotisations nouvelles des assurés

0,1

Extension du champ

0,6

Perte nette

0,92

Départements

 
 
 

Reprise de 95 % des sommes affectées à l'aide médicale sous forme de DGD

8,7

Suspension du versement des prestations d'aide médicale

9,15

Gain net

0,45

 
 

Etat

 
 
 

Subvention aux régimes spéciaux pour compenser la perte de recettes liée à l'arrêt de la cotisation sur les véhicule terrestres à moteur

0,26

Perte nette

0,26

b) Les craintes énoncées lors de l'examen du projet de loi restent valables

Votre rapporteur pour avis avait lors de la discussion du projet de loi émis plusieurs critiques de fond sur le nouveau dispositif dont il estimait qu'il remettait en cause les principes même de notre protection sociale. Il s'était également largement inquiété de son coût et avait indiqué qu'il lui semblait impossible que ce dernier se limite à ce qu'annonçait le Gouvernement.

Ces craintes commencent aujourd'hui à rejoindre la réalité. La première concerne l'assurance maladie. Le coût net pour la CNAMTS de la CMU devait s'élever à 900 millions de francs (soit le quart du déficit de la CNAMTS prévu pour 2000). Il est trop tôt pour savoir si le prévisions de consommation médicale des nouveaux assurés de base seront respectées. En revanche votre rapporteur constate que le Gouvernement a donné l'autorisation à la CNAMTS de procéder à l'embauche de 1.400 agents pour assumer les nouvelles taches induites par la mise en place de la couverture maladie universelle. Votre rapporteur pour avis avait expliqué que la CNAMTS ne disposait pas du personnel nécessaire et qu'il lui faudrait procéder à des embauches ce qui engendrerait un coût non prévu par le projet de loi. Il constate que ces embauches et donc ce coût sont bien au rendez-vous.

Par ailleurs, les organismes complémentaires reconnaissent aujourd'hui que le forfait de 1.500 francs par assuré complémentaire sera insuffisant. D'abord se produiront des phénomènes de rattrapage d'autant plus explicables que les bénéficiaires auront été exclus des soins durant longtemps. Ensuite, le Gouvernement a refusé les propositions des organismes de protection complémentaires visant, dans un souci d'égalité avec ceux qui s'assurent de leur propre chef, à encadrer certaines catégories de dépenses comme les soins dentaires ou le forfait hospitalier. Il convient de rappeler qu'un dépassement de 15 % du forfait prévu représente un coût pour l'Etat et les organismes de protection complémentaire de 1,2 milliard de francs.

Enfin, la non parution des décrets d'application vient encore retarder et compliquer les modalités d'application du texte. Votre rapporteur pour avis avait indiqué qu'il ne lui semblait pas possible de respecter la date prévue : " les modalités pratiques de mise en place de la couverture maladie universelle laissent douter de la capacité des différents acteurs à être prêts pour le 1 er janvier 2000, date inscrite dans le projet de loi pour son entrée en vigueur. " . Il tient à redire son pessimisme. Comme il l'avait expliqué dans son avis, votre rapporteur remarque que la CNAMTS rencontre notamment des difficultés pratiques insurmontables pour vérifier les conditions de ressources qui s'appliqueront, ce qui permet de craindre que le nombre de bénéficiaires ne soit plus élevé que prévu.

La commission des finances suivra avec une attention extrême tout dérapage des dépenses consacrées à la couverture maladie universelle puisque celles-ci reposeront en définitive sur les finances de l'Etat par la subvention d'équilibre et sur les prélèvements obligatoires, tandis que la CMU, révélatrice des limites de la protection sociale française, porte en germe des dérives très dangereuses de celle-ci.

3. Le solde dégradé par des dépenses nouvelles

Le projet de loi de financement intègre deux réformes majeures : la couverture maladie universelle et le passage aux 35 heures hebdomadaires. Celles-ci ont un coût élevé pour les finances sociales, coût amené à croître dans les années à venir.

Par ailleurs, il devait permettre d'abonder de façon substantielle le fonds de réserve pour les retraites par le biais des excédents du Fonds de solidarité vieillesse et des régimes sociaux. Il n'en est rien puisque le projet de loi vient ponctionner ce fonds de réserve avant même qu'on en connaisse les objectifs et les modes de gestion, par le biais du prélèvement de 5,6 milliards de francs sur les droits sur les alcools attribués au FSV (cf. infra ) et d'un milliard de francs sur la CSG attribués au BAPSA.

Votre rapporteur pour avis regrette profondément qu'ayant dû choisir entre financer un fonds de réserve pour les retraites et le passage au 35 heures, le Gouvernement ait préféré la deuxième solution, la plus handicapante pour notre économie, la moins favorable pour les générations futures.

Par ailleurs, le projet de loi de financement dégrade en profondeur le solde pourtant fragile du régime général en le faisant passer de 14,1 milliards de francs à moins de 2 milliards de francs.

Conséquences du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2000
sur le solde du régime général

(en millions de francs)

 

Maladie

Accidents du travail

Vieillesse

Famille

Total

Solde annoncé

- 3.700

650

6.500

2.550

+6.000

Réintégration

- Contributions fonds de réserve sur les retraites
-
Allocation de rentrée scolaire

+ 2.554

+ 360

+ 1.010

+ 1.771

+ 2.500

+ 5.695

+ 2.500

Solde tendanciel

- 1.146

+1.010

+7.70

+ 6.821

+ 14.195

Mesures

- 1.310

- 60

- 3.210

- 4.657

- 9.237

- " Coup de pouce " 0, 3 % BMAF

 
 
 

- 340

- 340

- Versement des aides au logement jusqu'à 21 ans

 
 
 

- 220

- 220

- Versement du complément familial jusqu'à 21 ans

 
 
 

- 330

- 330

- Fonds d'action sociale CNAF

 
 
 

- 250

- 250

- " Coup de pouce " de 0,3 % aux pensions

- 50

- 60

- 950

 

- 1.060

- Contribution exceptionnelle des laboratoires

+ 1.200

 
 
 

+ 1.200

- Transfert de charges de l'Etat

- 100

 
 
 

- 100

- Fonds de modernisation des cliniques privées

- 100

 
 
 

- 100

- Allocation de rentrée scolaire

 
 
 

- 2.500

- 2.500

- Fonds de réserve pour les retraites

 
 

- 2.900

 

- 2.900

- Perte de 2% sur le revenu du patrimoine

- 2.260

 

- 2.260

- 1.017

- 5.537

Total

- 2.456

+ 950

+ 1.400

+ 2.164

+ 2.058

Source :PLFSS 2000.

Alors que le régime général a bénéficié de surcroîts de recettes exceptionnels, fruits de la croissance économique, et que des besoins urgents se font sentir dans le domaine de la santé ou de la vieillesse, le Gouvernement dégrade de plus de 12,2 milliards de francs le solde du régime général.

Si on retire de ces 12,2 milliards ce qui va au fonds de réserve pour les retraites, ce sont encore 3,7 milliards de francs de dépenses nouvelles que crée le Gouvernement.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il s'agit là d'une politique peut responsable qui hypothèque l'avenir et qui est en incohérence totale avec le discours du Gouvernement sur l'affectation des excédents de la sécurité sociale au fonds de réserve pour les retraites.

Tout débat sur l'affectation d'excédents potentiels de la sécurité sociale ne doit se faire, selon votre rapporteur pour avis, que entre trois solutions non exclusives :

la réduction de la dette sociale car il est économiquement équivalent de désendetter la sécurité sociale que de mettre de l'argent de côté pour l'avenir : avec 215 milliards de francs de dette à la CADES et 8,5 milliards de déficit de trésorerie de l'ACOSS, les générations futures hériteront un fardeau lourd de nos erreurs ;

• la réduction des prélèvements obligatoires sociaux : le projet de loi de financement crée 15,9 milliards de francs de nouveaux prélèvements quand il bénéficie d'un excédent potentiel du régime général de 14,1 milliards de francs ;

• éventuellement, dans un souci d'affichage, mais en définissant clairement les objectifs assignés et les modes de gestion, au fonds de réserve pour les retraites.

Votre rapporteur pour avis estime que les conditions ne sont réunies ni pour une baisse massive des prélèvements sociaux, ni pour une mise en réserve dont on voit qu'elle serait destinée à être ponctionnée pour d'autres dépenses comme les 35 heures. Il estime donc préférable, pour préserver l'avenir de nos enfants et respecter le principe posé de la séparation comptable des branches d'affecter toute amélioration du régime général à la diminution de l'encours de la CADES.

De plus, le solde de l'ACOSS, malgré les excédents potentiels, restera déficitaire fin 1999 de 8,5 milliards de francs qui pèsent sur sa trésorerie et devraient, en bonne logique, s'ajouter à la dette de la CADES.

Enfin, cet équilibre est fragile quand on sait qu'un point supplémentaire de dépenses maladie représente 5 milliards de francs de dépenses nouvelles, ou que un point de revalorisation des pensions coûte 3,4 milliards de francs, ou encore que l'assurance maladie compte sur une contribution de l'industrie pharmaceutique à la régularité douteuse de 1,2 milliard de francs, à comparer au 1,9 milliard d'excédent restant du régime général.

Ainsi, l'heure n'est pas aux dépenses nouvelles, mais reste plus que jamais leur maîtrise, à celle des prélèvements et à l'utilisation de marges de manoeuvre potentielles au désendettement de la sécurité sociale, c'est à dire de la CADES.

4. Les dangereuses mesures de recettes

a) La soumission à impositions sociales des grosses indemnités de licenciement (article 2 A)

L'article 2 A nouveau du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui résulte d'un amendement de notre collègue député M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, a pour objet de déterminer les seuils d'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale et à la contribution sociale généralisée, des indemnités versées aux salariés ou aux mandataires sociaux d'une entreprise, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions.

Il est le pendant de l'article 2 bis du projet de loi de finances pour 2000, également introduit par voie d'amendement, qui fixe les conditions d'assujettissement de ces mêmes indemnités à l'impôt sur le revenu. Ces conditions sont codifiées à l'article 80 duodecies nouveau du code général des impôts (CGI).

Ainsi, seule la fraction des indemnités de licenciement soumise à l'impôt sur le revenu en vertu de cet article 80 duodecies du CGI entrerait dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale.

Ce dispositif doit être analysé au regard de la jurisprudence et de la doctrine actuelles en matière d'indemnités de rupture de contrat qui repose sur les principes suivants :

- les indemnités de licenciement ont pour objet de réparer le préjudice moral et financier résultant du licenciement ;

- la part conventionnelle (ou légale) de ces indemnités correspond à la réparation du préjudice moral et doit, à ce titre, être exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales ;

- la fraction qui excède le montant prévu par les accords collectifs ou par la loi répare le préjudice financier résultant de la perte de revenus et doit à ce titre être incluse dans l'assiette de l'impôt sur le revenu, et, parfois, des cotisations sociales.

Toutefois, s'agissant du régime fiscal des indemnités de licenciement, la jurisprudence est éminemment fluctuante.

On observera que le dispositif proposé par l'article 2 A, outre qu'il évite les désagréments liés aux fluctuations de la doctrine, a l'avantage d'être plus souple puisqu'il fixe à un niveau relativement élevé le seuil d'exonération (au moins deux fois le salaire brut annuel de l'année précédant le licenciement, dans la limite de 2,35 millions de francs).

En revanche, s'agissant de la CSG, le dispositif actuel, plus rigoureux, serait maintenu qui prévoit l'assujettissement à la CSG de toutes les sommes qui excèdent le montant légal ou conventionnel des indemnités de licenciement.

A ce titre, il mérite probablement d'être amendé par cohérence avec le régime des cotisations sociales.

(1) Les différences entre le régime social et le régime fiscal actuel des indemnités de rupture de contrat
(a) Régime fiscal

A l'heure actuelle, le régime fiscal des indemnités versées en cas de cessation d'activité des salariés est fixé essentiellement par la doctrine de l'administration et la jurisprudence, sur la base du principe selon lequel la fraction des indemnités de licenciement qui a pour objet la réparation d'un préjudice autre que financier (préjudice moral ou professionnel notamment) bénéficie d'une exonération.

Les indemnités de départs volontaires sont en revanche imposables.

A titre de pratique, l'administration considère que l'indemnité de licenciement correspondant au minimum fixé par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel, ou, à défaut, par la loi, n'est pas imposable.

Lorsqu'une indemnité plus élevée est versée en vertu d'un accord particulier (contrat de travail, transaction, etc.) ou d'une décision de l'employeur, le surplus est imposable sauf s'il est établi que l'indemnité répare un préjudice autre que la perte de salaires.

En pratique, peu d'indemnités sont déclarées et imposées à l'impôt sur le revenu.

(b) Régime social
(i) Les indemnités de rupture de contrat entrent pour partie dans l'assiette de la CSG et de la CRDS

Dans l'état actuel du droit, les indemnités versées lors de la rupture d'un contrat de travail sont soumises à la cotisation sociale généralisée 4( * ) (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale 5( * ) (CRDS) pour la fraction qui excède " le montant prévu par la convention collective de branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi ".

L'assiette de la CSG a en effet été alignée sur celle de la CRDS par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 6( * ) .

On notera qu'en vertu d'une circulaire du 2 février 1996 relative à la CRDS sur les revenus d'activité et de remplacement, les indemnités de licenciement prévues dans le contrat de travail ou déterminées dans un accord d'entreprise ne donnent lieu à exonération que pour la part de l'indemnité versée conformément à la convention collective ou à l'accord professionnel ou interprofessionnel éventuellement applicable, ou, à défaut, par la loi.

On observera également que la même circulaire substitue à la notion de " montant prévu ", celle de montant minimum. Or, une telle interprétation n'est pas sans conséquences dans le cas où la loi renvoie à l'accord des parties, au juge ou à un organisme professionnel, le soin de déterminer, au vue des circonstances propres à chaque cas, le montant de l'indemnité due. Tel est le cas des dommages - intérêts pour licenciement abusif, des dommages-intérêts pour rupture anticipée par l'employeur du contrat à durée indéterminée, de l'indemnité de clientèle des VRP, ou de l'indemnité de licenciement des journalistes ayant plus de quinze ans d'ancienneté.

On peut regretter que l'administration ait adopté cette interprétation contestable tant au plan de l'équité (la fraction ainsi assujettie à CRDS est celle qui répare un préjudice aggravé) qu'au regard du texte de l'ordonnance du 24 juillet 1996 (le montant " prévu " par la loi est celui fixé dans chaque cas et non le minimum.

(ii) La fraction des indemnités de rupture de contrat correspondant à des dommages et intérêts n'entre pas dans l'assiette des cotisations sociales

Pour établir la nature des indemnités de rupture de contrat au regard des cotisations sociales, le juge distingue tout d'abord les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement - qui ne sont pas soumises à cotisations sociales -, et les indemnités négociées ou transactionnelles - qui peuvent être soumises à cotisations. Le juge opère ensuite un distinguo entre les indemnités qui ont le caractère de dommages-intérêts et les indemnités qui constituent des rémunérations au regard du travail accompli.

En vertu d'une jurisprudence bien établie, les indemnités conventionnelles ou légales de licenciement ne sont pas assujetties aux cotisations de sécurité sociale .

A la différence de l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à la rémunération du travail qu'aurait accompli le salarié s'il était resté au service de son employeur pendant la durée du délai-congé, les indemnités de licenciement sont destinées à réparer, en fonction de l'ancienneté, le préjudice qu'a subi le travailleur du fait de la perte de son emploi et ne constituent pas un supplément de rémunération versé à raison ou à l'occasion du travail. En conséquence, elles ne sont pas soumises à cotisations. Ainsi en a jugé la Cour de cassation a plusieurs reprises.

Dans un arrêt n° 661 du 9 juin 1966 7( * ) , la chambre civile de la Cour de cassation a ainsi estimé " qu'une indemnité de licenciement, bien qu'elle ait pour origine le contrat, constitue non un revenu mais des dommages et intérêts, c'est-à-dire la réparation d'un préjudice, ce qui ne saurait être assimilé à un revenu quel qu'il soit ".

De même, les indemnités versées par l'employeur aux salariés qui acceptent de quitter volontairement l'entreprise et qui ont, comme les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement, le caractère de dommages-intérêts compensant le préjudice résultant de la rupture de leur contrat de travail et la perte prématurée de leur emploi ne doivent pas être incluses dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale 8( * ) .

Le juge a ainsi considéré qu'un salarié subit du fait de la cessation prématurée de son activité dans le cadre d'un plan social, qui constitue une forme atténuée de licenciement, un préjudice matériel et moral ; dès lors, l'indemnité qui lui est versée a pour objet de réparer ce préjudice et ne constitue pas la rémunération d'un travail 9( * ) .

Il en est de même pour l'indemnisation volontaire supplémentaire allouée aux salariés en raison de leur acceptation d'un départ anticipé de l'entreprise, qui, selon le juge, présente le caractère de dommages-intérêts.

On notera donc avec intérêt que les sommes allouées à titre transactionnel à des salariés qui renoncent en contrepartie à réclamer des dommages-intérêts pour rupture injustifiée du contrat de travail ne sont pas soumises à cotisations sociales, même pour la part de ces sommes qui excède le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement .

Toutefois, le juge est tenu de rechercher si la somme versée dans le cadre d'une transaction n'englobe pas des éléments de rémunération soumis à cotisations, quelle que soit la qualification retenue par les parties.

En revanche, les sommes versées par l'employeur lors de la démission d'un salarié n'ont pas, en principe, la nature de dommages-intérêts, sauf s'il est établi qu'en réalité, la rupture du contrat de travail a été provoquée par l'employeur et que les sommes versées réparent le préjudice né de la perte de l'emploi.

La Cour de cassation a, par exemple, jugé que l'indemnité versée à un directeur général à l'occasion de son départ de la société qui ne constitue ni le dédommagement d'une révocation qui serait intervenue dans des conditions abusives, ni la réparation d'un préjudice qui serait résulté pour lui de la cessation forcée de ses fonctions, constitue un élément de rémunération soumis à cotisations 10( * ) .

(iii) Le cas des indemnités versées aux mandataires sociaux

S'agissant des mandataires sociaux, les tribunaux ont jugé que les dommages-intérêts alloués par décision de justice au président-directeur-général d'une société anonyme en réparation du préjudice subi du fait de la révocation de son mandat social ne sont pas soumises à cotisations 11( * ) .

(2) Le dispositif " Hollande - Cahuzac " aligne les régimes fiscal et social soumis à la CSG

Il est utile de revenir sur le dispositif de l'article 2 bis du projet de loi de finances pour 2000 dans la mesure où les conditions d'assujettissement aux cotisations sociales des indemnités de rupture de contrat sont strictement les mêmes (à l'exception de la CSG) que celles fixées par cet article.

(a) Le dispositif fiscal (article 2 bis du PLF pour 2000)

L'article 2 bis du projet de loi de finances pour 2000 est composé de deux volets.

Le premier volet concerne le régime fiscal applicable aux indemnités de rupture des contrats de travail des salariés . Il transpose dans la loi fiscale les principes doctrinaux et jurisprudentiels actuels en les assouplissant .

Le second règle le régime fiscal des indemnités de toutes natures versées aux mandataires sociaux et dirigeants de sociétés à l'occasion de la cessation de leurs fonctions. Il distingue lui-même deux cas : celui du départ volontaire des mandataires, qui occasionne le traitement fiscal le moins favorable, et celui de la cessation forcée des fonctions, qui ne provoque taxation qu'au delà d'un plafond de 2,35 millions de francs.

(i) Le cas des salariés

Le premier paragraphe du 1 de l'article 80 duodecies pose le principe de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu de la fraction des indemnités de licenciement représentative de la réparation d'un préjudice financier (perte de revenus), la fraction conventionnelle ou légale de l'indemnité de licenciement - censée indemniser le préjudice moral - restant exonérée .

Toutefois, le deuxième paragraphe du 1 atténue sensiblement ce principe en accroissant la fraction exonérée des indemnités de licenciement. Il prévoit enfin un plancher général d'imposition pour les sommes qui excèdent 2,35 millions de francs .

Au total, le dispositif serait le suivant :

• Les indemnités de licenciement seraient, en tout état de cause, exonérées à hauteur de la fraction correspondant au montant prévu par la convention collective de branche, l'accord professionnel, ou à défaut, par la loi 12( * ) .

• Au delà, les indemnités ne seraient imposables que pour la fraction qui excède la plus grande des deux sommes suivantes :

- soit la moitié des indemnités de licenciement versées ;

- soit le double de la rémunération brute perçue l'année précédant la rupture du contrat de travail.

Autrement dit, les indemnités de licenciement seraient soumises à impôt, soit pour la moitié de leur montant, si ce dernier excède le double de la rémunération brute perçue l'année précédente, soit pour la fraction qui excède deux fois le salaire de l'année précédente, dans les autres cas.

Enfin, au delà d'un seuil de 2,35 millions de francs (moitié de la première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune, les indemnités de licenciement seraient automatiquement assujetties à l'impôt sur le revenu pour la fraction qui excède ce plancher 13( * ) .

Pour récapituler, le seuil de déclenchement de l'imposition serait, pour les indemnités inférieures à 2,35 millions de francs, le plus élevé des trois montants suivants :

- montant des indemnités de licenciement conventionnelles ;

- moitié des indemnités de licenciement versées ;

- deux fois le montant du salaire brut perçu l'année précédente.

Au delà d'un seuil de 2,35 millions de francs, toutes les indemnités seraient taxées, quelle que soit leur nature.

Exemples :


1 er cas : une indemnité de licenciement de 2 millions de francs touchée par un salarié qui aurait perçu un salaire brut d'un million de francs l'année précédente serait exonérée d'impôt sur le revenu.

2 ème cas : une indemnité de licenciement de 2 millions de francs touchée par un salarié qui aurait perçu un salaire brut de 800.000 F l'année précédente serait imposable à hauteur de 400.000 F.

3 ème cas : une indemnité de licenciement de 2 millions de francs touchée par un salarié qui aurait perçu un salaire brut de 400.000 F l'année précédente serait imposable à hauteur de un million de francs.

4 ème cas : une indemnité de licenciement de 3 millions de francs serait imposable, quel que soit le salaire touché l'année précédente, pour la fraction qui excède 2,35 millions de francs, soit 650.000 F.

Enfin, ne seraient jamais taxables les indemnités de départ volontaires versées dans le cadre d'un plan social ainsi que les indemnités versées à un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse (article L. 122-14-4 du code du travail).

(ii) Le cas des mandataires sociaux et dirigeants d'entreprises

Le 2 de l'article 80 duodecies concerne les mandataires sociaux et dirigeants d'entreprises.

Il dispose que toute indemnité versée à l'occasion de la cessation de leurs fonctions serait imposable, sans conditions de seuil.

Toutefois, en cas de cessation forcée des fonctions, notamment de révocation, le régime serait le même que pour les salariés, c'est-à-dire que seule la fraction des indemnités qui excède les seuils évoqués plus haut serait soumise à l'impôt sur le revenu.

Ces dispositions seraient applicables :

• dans les sociétés anonymes :

- au président du conseil d'administration,

- au directeur général,

- à l'administrateur provisoirement délégué,

- aux membres du directoire,

- à tout administrateur ou membre du conseil de surveillance chargé de fonctions spéciales ;

• dans les sociétés à responsabilité limitée : aux gérants minoritaires ;

• dans les autres entreprises ou établissements passibles de l'impôt sur les sociétés : aux dirigeants soumis au régime fiscal des salariés ;

• dans toute entreprise : à toute personne occupant un emploi salarié dont la rémunération totale excède la plus faible des rémunérations allouées aux dirigeants de cette entreprise.

(b) Le dispositif social proposé par l'article 2A du présent projet de loi de financement

L'article 2 A du présent projet de loi est le pendant de l'article 2 bis du projet de loi de finances pour 2000. Il pose le principe de l' assujettissement des indemnités de licenciement aux cotisations de sécurité sociale, pour la fraction qui est elle-même soumise à l'impôt sur le revenu.

Toutefois, s'agissant de la CSG, le dispositif actuel, plus rigoureux, est réaffirmé.

(i) Le renforcement de l'assujettissement à la CSG

Bien que l'utilité d'une telle disposition ne soit pas établie au regard de l'état actuel du droit, il est prévu d'assujettir à la CSG, " en tout état de cause " la fraction des indemnités de licenciement qui est soumise à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du CGI.

Cette disposition n'apporte rien de nouveau car les indemnités de licenciement sont actuellement soumises à la CSG pour la fraction qui excède le montant prévu par la convention collective de branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi, ce qui est plus sévère que ce que l'amendement " Hollande " prévoit en matière d'impôt sur le revenu.

En revanche, l'article 2 A innove en prévoyant de soumettre explicitement à la CSG la totalité des indemnités perçues par les mandataires sociaux et dirigeants à l'occasion de la cessation de leurs fonction, sauf en cas de cessation forcée de ces fonctions, où seule la fraction assujettie à l'impôt sur le revenu entrerait dans l'assiette de la CSG.

On constate donc que les salariés seraient plus rigoureusement traités que les mandataires sociaux , puisque le seuil d'assujettissement de leurs indemnités à la CSG serait plus bas que celui retenu pour les mandataires sociaux. Une telle discrimination mérite probablement correction .

(ii) L'assujettissement de la fraction imposable des indemnités de licenciement aux cotisations de sécurité sociale

Le régime social des indemnités de licenciement serait totalement calqué sur le régime fiscal prévu par l'article 80 duodecies du CGI résultant de l'amendement " Hollande " , à savoir :

- pour les salariés, n'entrerait dans l'assiette des cotisations sociales que la fraction des indemnités de licenciement assujettie à l'impôt sur le revenu ;

- la totalité des indemnités perçues par les mandataires sociaux et dirigeants d'entreprises entrerait dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale, sauf en cas de cessation forcée des fonctions où seule la fraction assujettie à l'impôt sur le revenu serait prise en compte.

Les cotisations de sécurité sociale concernées sont :

- les cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales (article L. 242-1 du code de la sécurité sociale) ;

- les assurances sociales agricoles (article 1031 du code rural) ;

- les cotisations familiales des salariés agricoles (article 1062 du code rural) ;

- les cotisations d'assurance maladie des travailleurs agricoles (article 1154 du code rural).

(3) L'utilité d'une correction concernant la CSG

Votre commission des finances fera connaître, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, ses analyses sur les seuils d'assujettissement des indemnités à l'impôt sur le revenu retenus par l'article 2 bis , et notamment sur le plancher d'imposition de 2,35 millions de francs que rien ne justifie a priori .

Mais dans la mesure où l'article 2 A du présent projet renvoie, pour la soumission des indemnités de rupture de contrat aux cotisations de sécurité sociale, aux seuils fixés à l'article 2 bis du projet de loi de finances, toute modification de ces seuils à l'occasion de l'examen de l'article 2 bis se répercuterait automatiquement sur l'article 2 A.

En outre, si l'on met de côté les objections de principe que l'on peut formuler à l'égard d'une législation ad hominem, il est déjà possible d'observer que les critères retenus sont relativement généreux par rapport à ce que la doctrine ou le juge pouvaient jusqu'à présent appliquer.

Une fois ce constat effectué, il convient dès lors de trancher la question de savoir s'il convient d'aligner le régime social des indemnités versées à l'occasion de la rupture d'un contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, sur le régime fiscal de ces indemnités.

A cette question, votre commission a répondu par la positive en considérant que, dès lors que des indemnités s'apparentent à un complément de rémunération - et non à des dommages-intérêts -, et sont à ce titre soumises à l'impôt sur le revenu, elles doivent entrer dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale.

La soumission à l'impôt sur le revenu doit donc déclencher l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale et l'article 2 A.

En vertu du même raisonnement, votre commission considère qu'il convient d'aligner l'assiette de la CSG - dont on a vu qu'elle n'était pas modifiée par l'article 2 A pour les salariés - sur celle des cotisations sociales.

Au total, seul le paragraphe I de l'article 2 A relatif à l'assiette de la CSG mérite d'être corrigé.

b) Le spectre de la progressivité sur la CSG (article 2 C)

A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un article 2 C prévoyant de faire passer de 160 francs à 400 francs le seuil de mise en recouvrement de la CSG, la CRDS et du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital. Cet amendement a été présenté dans un objectif de simplification et pour alléger la charge sur les revenus les plus modestes, notamment ceux des retraités : " Cela évitera des complications, notamment aux retraités non imposables " a ainsi précisé en séance le rapporteur pour avis notre collègue député Monsieur Jérôme Cahuzac.

N'est en revanche pas venu en discussion un amendement de la commission des finances rejeté par la commission des affaires sociales qui prévoyait un montant minimum de 500 francs pour la réduction de 5 % opérée au titre des frais professionnels sur l'assiette de la CSG.

Votre rapporteur pour avis estime que l'amendement adopté sur le seuil de recouvrement présente le mérite de la simplification. Il tient cependant à en souligner le coût et surtout la logique extrêmement dangereuse. Il s'agit en réalité d'introduire dans les prélèvements sociaux de la progressivité alors qu'il est essentiel qu'elle en soit exclue.

En effet, ces prélèvements s'appuient sur une logique de proportionnalité et de simplicité. Votre rapporteur pour avis estime qu'il serait dangereux pour les recettes de la sécurité sociale, mais aussi pour l'équilibre du système fiscal, pour la simplicité de la CSG de remettre en cause ce principe, en tout cas au détour d'un amendement d'apparence technique.

Les vrais questions posées par la CSG aujourd'hui sont tout autres et résident dans sa diversité : la cohabitation de taux différents, d'assiettes déductibles ou non du revenu imposable devraient plus sûrement faire l'objet d'une réflexion. Il vaut mieux élargir l'assiette en supprimant les cas particuliers qui existent plutôt que de la compliquer et de le faire avec un coût très lourd en termes de rendement.

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