LES PROCÉDURES DE CONTRÔLE DES CHAMBRES RÉGIONALES DES COMPTES RESTENT PERFECTIBLES

La réforme du statut des magistrats des chambres régionales des comptes doit être menée de pair avec celle des procédures.

Le contrôle financier exercé par les chambres régionales des comptes constitue la contrepartie du renforcement des pouvoirs dévolus aux collectivités locales.

Corollaire indispensable de la décentralisation, ce contrôle représente également un indéniable facteur de transparence de la gestion publique locale.

Si les fonctions de jugement des comptes et de rétablissement des budgets sont aujourd'hui bien acceptées, la procédure d'examen de la gestion demeure imparfaite.

Les fonctions de jugement des comptes et de rétablissement des budgets sont aujourd'hui bien acceptées

Héritée de la Cour des comptes, la fonction de jugement des comptes des comptables des collectivités et des établissements publics locaux constitue la fonction première des chambres régionales des comptes qui, seule, justifie leur statut de juridiction.

La déconcentration totale du jugement des comptes opérée en 1982 ayant entraîné une tâche extrêmement lourde pour les chambres régionales, la loi du 5 janvier 1988 a rétabli , en le rationalisant, le système de l'apurement administratif des comptes des petites communes .

Les comptables supérieurs se sont ainsi vu confier, sous la surveillance des chambres, l'apurement des comptes des communes ou groupements de communes dont la population n'excède pas 2.000 habitants et dont le montant des recettes ordinaires figurant au dernier compte administratif est inférieur à deux millions de francs ainsi que de leurs établissements publics.

Cette mesure a permis d'alléger les tâches des chambres, puisque le nombre des jugements rendus par elles a été divisé par deux en trois ans, traduisant la " sortie " des comptes d'environ 24.000 communes.

Salutaires, les effets positifs de la loi de 1988 n'ont cependant cessé de s'amenuiser depuis car, en l'absence de revalorisation du seuil de deux millions de francs, l'augmentation des budgets locaux a conduit un nombre croissant d'organismes locaux à basculer du régime de l'apurement administratif vers le contrôle des chambres régionales des comptes.

Le contrôle budgétaire , né du vide créé par la suppression de la tutelle budgétaire et financière exercée avant la loi du 2 mars 1982 par le préfet, est à la fois précisément défini et relativement bien accepté par les collectivités locales.

Il ne s'exerce qu'à l'encontre d'un très petit nombre d'actes budgétaires puisqu'il ne porte, au total, que sur moins d'un pour cent des actes budgétaires pris chaque année par les collectivités locales.

La plupart des difficultés sont d'ailleurs souvent réglées de façon informelle par une concertation entre le représentant de l'Etat et les collectivités concernées.

La procédure d'examen de la gestion demeure imparfaite

Comme l'a montré le groupe de travail sur les chambres régionales des comptes constitué en avril 1997 par le Sénat 6 ( * ) , la procédure d'examen de la gestion des collectivités territoriales suscite un certain malaise, tant auprès des élus que des magistrats.

Le groupe de travail a recensé les principales critiques qui sont adressées aux interventions des chambres régionales des comptes dans ce domaine. Si elles ne contestent pas dans leur principe les missions exercées par les juridictions financières, ces critiques mettent en revanche en cause les conditions de mise en oeuvre des contrôles.

En premier lieu, la médiatisation excessive des observations provisoires que les chambres régionales des comptes peuvent être amenées à formuler sur la gestion des collectivités locales est légitimement très mal ressentie par nombre d'élus locaux.

En deuxième lieu une très grande insécurité juridique résulte pour les élus locaux de l'absence d'articulation entre le contrôle de légalité mis en oeuvre par les préfets et le contrôle opéré par les chambres régionales des comptes.

A la suite de différents groupes de travail, le rapport de notre collègue Michel Mercier au nom de la mission d'information sur la décentralisation, présidée par M. Jean-Paul Delevoye 7 ( * ) a récemment de nouveau souligné la précarité que cette superposition des contrôles fait subir aux actes des collectivités locales.

Plusieurs griefs sont émis à l'encontre des conditions dans lesquelles l'examen de la gestion est mis en oeuvre par les chambres régionales des comptes : le très grand décalage entre les conditions d'exercice de l'action locale et la perception que peut en avoir un contrôle opéré souvent plusieurs années après les décisions prises, la crainte légitime d'une dérive du contrôle vers un contrôle d'opportunité, l'absence de critères fiables et communs, les limites de la procédure contradictoire, l'absence de procédure de recours contre les lettres d'observations définitives.

Le groupe de travail a ainsi constaté que face à l'examen de la gestion, la situation des collectivités locales apparaissait fragilisée . Des actes préparatoires et des lettres d'observations provisoires font trop souvent l'objet d'une divulgation abusive. Les lettres d'observations présentent des lacunes qui affectent leur capacité à constituer un instrument d'aide à une bonne gestion, notamment parce que les observations ne sont pas hiérarchisées.

Enfin, les conditions de mise en oeuvre de l'examen de la gestion concourent à l'insécurité juridique des actes des collectivités locales : compte tenu des délais inévitables dans lesquelles interviennent les lettres d'observations définitives, elles sont plus par nature une " photographie " d'une situation passée qu'un reflet d'une situation présente ; les divergences d'analyse entre le contrôle de légalité et les chambres régionales des comptes sont une source indéniable d'insécurité juridique et ne peuvent donc qu'être préjudiciables à la bonne gestion locale.

* 6 " Chambres régionales des comptes et élus locaux : un dialogue indispensable au service de la démocratie locale ". Rapport d'information n° 520 (Sénat, 1997-1998) de MM. Jean-Paul Amoudry, président, et Jacques Oudin, rapporteur.

* 7 " Sécurité juridique et conditions d'exercice des mandats locaux : des enjeux majeurs pour la démocratie locale et la décentralisation. " Rapport d'information n° 166 (Sénat, 1999-2000).

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