ENRICHIR LE CONTENU DU PROJET DE LOI PAR LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI VOTÉE PAR LE SÉNAT LE 11 MAI 2000

Chacun, magistrat comme élu, s'accorde à reconnaître la nécessité d'une réforme des procédures des chambres régionales des comptes et des conditions d'examen de la gestion des collectivités locales et de leurs établissements publics.

L'urgence d'une telle réforme est accentuée par les évolutions jurisprudentielles récentes. Le Conseil d'Etat a ainsi annulé une décision juridictionnelle de la Cour des comptes au motif que l'affaire avait été précédemment évoquée dans le rapport public qui avait pris position sur la solution applicable 11 ( * ) . Il a également considéré comme contraire au principe d'impartialité le fait que le rapporteur d'une chambre régionale participe au jugement de comptes dont il a eu à connaître à l'occasion d'une vérification de gestion 12 ( * ) .

Force est cependant de constater que la proposition de loi tendant à réformer les conditions d'exercice de l'examen de la gestion et à renforcer la sécurité juridique des actes des collectivités territoriales, adoptée par le Sénat voilà un an, après de nombreuses consultations et un travail approfondi, n'a toujours pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale .

Lors de la discussion de ce texte au Sénat, Madame Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, avait indiqué que le projet de loi statutaire qui venait alors d'être discuté à l'Assemblée nationale, pouvait apparaître comme " le meilleur vecteur " 13 ( * ) d'une réforme des missions et des procédures des chambres régionales des comptes.

Le Gouvernement a d'ailleurs donné un avis favorable aux deux articles introduits par l'Assemblée nationale dans le présent projet de loi, tendant à accentuer le caractère contradictoire de la procédure applicable devant les chambres régionales des comptes et dont l'un s'inspire d'un article de la proposition de loi du Sénat.

Dès lors, votre commission des Lois vous propose de compléter le projet de loi en adoptant le dispositif de la proposition votée au mois de mai 2000 tendant à réformer les conditions d'exercice de l'examen de la gestion et à renforcer la sécurité juridique des actes des collectivités territoriales.

LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS

S'agissant du volet statutaire du projet de loi, la commission des Lois a adopté sept amendements tendant à :

- poser dans la loi le principe d'une composition paritaire entre membres de droit et membres élus de la Commission consultative de la Cour des comptes, à l'image des dispositions concernant la Commission consultative du Conseil d'Etat ( article 2 ) ;

- aligner le régime des sanctions disciplinaires applicables aux magistrats de la Cour des comptes sur celui des membres du Conseil d'Etat et prévoir la publicité des décisions ( article additionnel après l'article 2 ) ;

- ne pas prévoir le détachement et l'intégration des magistrats judiciaires dans le corps des conseillers de chambre régionale des comptes, ainsi que leur mise à disposition en tant que rapporteur (articles 7 et 8) ;

- remplacer l'obligation de mobilité tous les sept ans, applicable à l'ensemble des magistrats des chambres régionales des comptes, par un avancement sous condition de mobilité au grade de président de section ( article 9 bis ) ;

- permettre un accès des membres du corps des magistrats des chambres régionales des comptes aux trois quarts, et non aux deux tiers, des emplois de président de chambre régionale, les autres postes étant réservés aux magistrats de la Cour des comptes ( article 16 ) ;

- prévoir la publicité des sanctions disciplinaires applicables aux magistrats des chambres régionales des comptes ( article additionnel après l'article 25 ).

S'agissant des conditions d'examen de la gestion locale par les juridictions financières, la commission des Lois a adopté dix-neuf amendements tendant à :

- permettre à la Cour des comptes de formuler des recommandations sur le déroulement de la procédure d'examen de la gestion par les chambres régionales (article premier) ;

- définir dans la loi l'objet de l'examen de la gestion par les chambres régionales des comptes (article additionnel avant l'article 31) ;

- instituer un " droit d'alerte " des chambres régionales sur les insuffisances du cadre législatif et réglementaire (article additionnel avant l'article 31) ;

- réviser le seuil de partage de la compétence de jugement des comptes entre les comptables supérieurs du Trésor et les chambres régionales des comptes (article additionnel avant l'article 31) ;

- ramener de 30 à 5 ans le délai de prescription de la gestion de fait et interdire qu'une déclaration de gestion de fait puisse être prononcée sur les exercices ayant déjà fait l'objet d'un apurement définitif avec décharge donnée au comptable (article additionnel avant l'article 31) ;

- étendre aux documents provisoires des chambres régionales des comptes la règle de non communication déjà en vigueur pour les mêmes documents de la Cour des comptes (article additionnel avant l'article 31) ;

- permettre à tous les destinataires des lettres d'observations provisoires de s'entretenir avec le magistrat rapporteur ou le président de la chambre régionale des comptes (article additionnel avant l'article 31) ;

- permettre à un ordonnateur élu déclaré gestionnaire de fait de demander à l'assemblée délibérante de la collectivité concernée de se prononcer sur l'utilité publique des opérations litigieuses (article additionnel avant l'article 31) ;

- rendre obligatoire la présentation de conclusions par le ministère public avant l'arrêt des observations définitives de la chambre régionale des comptes (article additionnel après l'article 31) ;

- permettre à toute personne dont la gestion est mise en cause par une chambre régionale des comptes d'adresser une réponse écrite, jointe aux observations définitives , et suspendre la publication et la communication de ces observations dans la période de six mois précédant des élections concernant la collectivité contrôlée (article 32) ;

- ouvrir un droit à la rectification des observations définitives sur la gestion d'une collectivité (article additionnel après l'article 32) ;

- reconnaître aux observations définitives le caractère d'actes faisant grief et susceptibles d'être déférés devant le Conseil d'Etat (article additionnel après l'article 32) ;

- supprimer la sanction d'inéligibilité infligée aux élus locaux déclarés comptables de fait (articles additionnels après l'article 32) ;

- éviter la mise en débet à titre personnel d'un ordonnateur déclaré comptable de fait et ayant obtenu de la part de l'organe délibérant de la collectivité la reconnaissance du caractère d'utilité publique sur les comptes en l'absence de malversation, de détournement ou d'enrichissement personnel (article additionnel après l'article 32).

Par ailleurs, la commission des Lois a adopté quatorze amendements rédactionnels ou de précision et modifié l'intitulé du projet de loi désormais ainsi rédigé : " Projet de loi relatif aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes ".

*

* *

Sous réserve de ces observations et des modifications qu'elle vous soumet, votre commission des Lois vous propose d'adopter le projet de loi " relatif aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes ".

* 11 Conseil d'Etat, 23 février 2000, Labor Métal.

* 12 Conseil d'Etat, 6 avril 2001, Razel

* 13 Voir Journal Officiel - Débats parlementaires, Sénat n° 41, séance du 11 mai 2000, page 2664.

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