II. LA QUESTION PARTICULIÈRE DE LA NATIONALITÉ DE L'ENTREPRISE

A. LE CADRE ISSU DE LA CONVENTION DE CHICAGO

1. La convention de Chicago, fondement du droit aérien moderne

L'accord relatif au transit des services aériens internationaux signé à Chicago le 7 décembre 1944 a défini le cadre du transport aérien civil jusqu'à ce jour. La nationalité des entreprises aériennes en constitue une clef de voûte, car les services aériens étaient alors conçus comme indissociables de l'exercice de la souveraineté. L'internationalisation des échanges et surtout le formidable développement de l'aviation civile depuis un demi-siècle ont transformé la réalité du transport aérien. Ce cadre juridique reste néanmoins valable.

La principale raison de cette immuabilité des règles internationales est sans doute à rechercher, paradoxalement, dans l'importance pratique de ces règles. En effet, les conventions régissant le transport aérien et l'Organisation de l'Aviation civile internationale (OACI) rassemblent tous les pays du monde. Toute modification d'un système conventionnel aussi étendu se révèle donc très complexe à mettre en oeuvre.

Pour cette raison, le paysage aérien international est fortement marqué par la section 5 de l'article 1 er de cet accord, qui stipule que « chaque Etat contractant accorde aux autres Etats contractants les libertés de l'air suivantes [...] : le privilège de survoler son territoire sans atterrir ; le privilège d'atterrir à des fins non commerciales ». D'où s'ensuit que l'exploitation de liaisons aériennes à des fins commerciales est soumise à l'accord par le pays d'arrivée de droits de trafic. Cette autorisation est obtenue dans le cadre d'accords bilatéraux d'Etat à Etat, ce qui suppose que soit connue la nationalité de chaque compagnie désirant exploiter des liaisons internationales.

2. Une application effective...

La perspective qu'un changement de nationalité remette en cause les droits de trafics d'une compagnie, pour être rare, n'est pas théorique. Après son rachat par British Airways en 1992, Air Liberté avait ainsi perdu ses droits de trafic au Maroc. De même les Etats-Unis ont-ils restreint les droits de trafic d'Aerolinas Argentinas après sa prise de contrôle par Iberia.

3. ... mais peu courante

Les exemples de perte de droits de trafic, s'ils existent, restent peu nombreux, dans la mesure où une telle évolution nuit gravement à la situation économique de la compagnie aérienne. Il n'est donc pas dans l'intérêt économique d'un investisseur étranger d'entrer au capital d'une entreprise dont la valeur va s'effondrer du fait même de son entrée.

Le cas le plus vraisemblable est donc celui d'un dépassement accidentel du seuil de nationalité. Toutefois, dans la mesure où peuvent être mis en place des seuils d'alerte, par exemple lorsque les 45 % de participation étrangère sont franchis, et où la remise en cause des droits de trafic n'est pas instantanée, ce risque demeure très limité. Naturellement, il convient d'y parer avec un mécanisme de protection de la nationalité. De tels mécanismes existent donc chez tous nos principaux partenaires pour les grandes compagnies aériennes.

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