3. Redonner toute sa place à l'école

a) Mieux combattre l'absentéisme scolaire

Il est incontestable que l'absentéisme peut parfois être synonyme de maltraitance, ou pour le moins d'une absence de « bientraitance » par indifférence. Or, les diverses ripostes envisagées, et notamment l'instauration d'un dispositif de suspension des prestations familiales en 1966, n'ont pas permis d'obtenir les améliorations escomptées.

C'est pourquoi M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a souhaité mettre en place, en octobre dernier, un groupe de travail composé des représentants des départements ministériels concernés (Education nationale, Famille, Intérieur, Santé), des partenaires sociaux, des associations familiales et de parents d'élèves, ainsi que de représentants des collectivités locales. Ce groupe était chargé d'étudier l'efficacité des mesures existantes et d'examiner les moyens de responsabiliser les familles afin de remédier aux manquements à l'obligation scolaire. Il a formulé les deux observations suivantes :

- Le droit en vigueur en la matière, notamment le décret n° 66-104 du 18 février 1966 relatif au contrôle de la fréquentation et de l'assiduité scolaires et aux sanctions que comportent, au regard du versement des prestations familiales et en matière pénale, les manquements à l'obligation scolaire, se caractérise par une complexité, et parfois une incohérence telles, que son application peut se révéler inefficace ou inéquitable ;

- Le dispositif de suspension des prestations familiales a pu notamment se révéler injuste car celles-ci n'ont pas pour seul objet de financer la scolarité de l'enfant. En outre, toutes les familles ne sont pas touchées de manière identique par cette sanction puisque celles qui n'ont qu'un seul à enfant ne sont pas éligibles aux allocations familiales, qui constituent une part importante des prestations. Enfin, les bénéficiaires du RMI ne sont pas concernés puisque ce dernier augmente en proportion de la baisse des prestations familiales.

C'est pourquoi ce dispositif, mal compris par les parents, est rarement appliqué , en raison notamment des réticences du corps enseignant à signaler certains cas d'absentéisme pour ne pas pénaliser les familles.

Face à un tel constat, le Gouvernement a décidé de donner une impulsion nouvelle à la lutte contre l'absentéisme scolaire avec la mise en oeuvre d'un plan d'action gouvernemental en faveur de l'assiduité scolaire et de la responsabilisation des familles , présenté en conseil des ministres le 26 mars dernier.

Ce plan, dont l'article 3 du présent projet de loi constitue l'un des éléments, s'articule autour de trois axes majeurs :

La clarification des responsabilités

Il s'agit de moderniser les textes et d'assurer la gestion des cas au niveau le mieux adapté à la situation :

l'établissement scolaire reste le lieu privilégié du traitement des absences, du dialogue avec les familles, d'une relation de confiance et de coopération qui assure l'assiduité de l'élève.

Le niveau départemental est le lieu de coordination des différents acteurs et d'harmonisation des pratiques d'établissement ; lorsqu'au bout d'un mois à compter de la première absence non justifiée, l'assiduité de l'enfant n'a pu être rétablie, des solutions adaptées doivent être proposées aux jeunes et à leurs familles (solutions scolaires ou solutions de soutien à la parentalité).

Au niveau judiciaire, le Parquet peut être saisi en dernier recours, si les étapes préalables ont été assurées et que tout a été fait pour trouver des solutions efficaces, en vain.

Il est ainsi prévu une modification du décret n° 66-104 du 18 février 1966 qui permettra de préciser les modalités de contrôle de l'assiduité des élèves soumis à l'obligation scolaire, de privilégier le dialogue avec les parents et de sanctionner plus sévèrement les familles lorsque l'absentéisme perdure malgré les mesures prises.

La mise en oeuvre d'une instance partenariale au niveau départemental

Les préfets de département ont été chargés de constituer cette instance dès septembre 2003 en y associant étroitement les services concernés, notamment l'inspection académique. Cette instance a pour objet d'élaborer des actions de prévention et de promotion des actions de soutien à la responsabilité parentale, notamment par la création d'un « module de soutien à la responsabilité parentale », destiné aux parents dont les enfants ne remplissent pas les obligations d'assiduité, malgré la concertation et le dialogue menés dans l'établissement. Il s'agit d'une pratique sociale nouvelle, tournée vers les familles, afin de les aider à mieux assurer leurs fonctions éducatives.


Les modules de soutien à la responsabilité parentale

La mise en place de modules de soutien à la responsabilité parentale contribue à créer une nouvelle pratique sociale qui s'inscrit délibérément dans le cadre des actions portées par les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents (REAAP) .

La mise en place des modules de soutien à la responsabilité parentale s'inscrit dans une politique de soutien à la parentalité mettant en oeuvre un partenariat local renforcé. Il est destiné aux parents dont les enfants ne remplissent pas les conditions d'assiduité en dépit de la concertation et du dialogue menés dans l'établissement.

Ces modules seront élaborés sous l'autorité du préfet après concertation avec les acteurs impliqués dans le soutien à la parentalité que sont notamment les CAF, les UDAF ou les associations de parents d'élèves.

Le recours au module de soutien à la responsabilité parentale sera décidé par l'inspecteur d'académie . Il doit s'inscrire le plus tôt possible dans l'histoire scolaire de l'enfant et de sa famille afin que la déscolarisation soit prévenue le plus précocement et qu'il soit remédié aux manquements de l'obligation scolaire relevés par l'établissement avant toute mise en oeuvre d'une procédure judiciaire pouvant aboutir à une sanction.

Le Gouvernement a situé le suivi du module dans une logique de total volontariat des familles , de sorte que le refuser ne saurait, à lui seul, entraîner une sanction immédiate ni être constitutif d'une infraction.

L'inspecteur d'académie garde parallèlement au recours à un module, toute latitude pour saisir le Procureur de la République face aux manquements répétés à l'assiduité scolaire et à l'inertie des parents.

Ainsi, chaque acteur est-il bien conforté sans ambiguïté dans son rôle et sa compétence.

Source : ministère délégué à la Famille

La définition de sanctions plus justes et efficaces

Compte tenu des observations précédentes, il est proposé ici d'abroger le dispositif de sanction fondé sur la suspension des prestations familiales, en raison de son caractère injuste et peu efficace.

Cette mesure est l'un des éléments importants du présent projet de loi. Dans cette perspective, M. Christian Jacob a donné instruction à ses services de ne plus mettre en oeuvre de procédure de suspension des prestations familiales à l'égard des parents dès la rentrée 2003.

En contrepartie, la sanction pénale, applicable aux familles dont l'enfant est en situation d'absentéisme scolaire lourd et qui n'ont pas réagit aux avertissements préalables, sera renforcée. Il s'agit d'une amende d'un montant maximum de 750 euros (création d'une contravention de quatrième classe). En outre, les peines encourues par les employeurs qui font appel au travail illégal des enfants soumis à l'obligation scolaire seront aggravées.

b) Réaffirmer l'interdiction du travail des enfants

Dès 1998, un rapport du ministère de l'emploi relatif au travail des enfants en France 4 ( * ) avait pris la mesure du phénomène et s'était prononcé pour la mise en oeuvre de plusieurs mesures visant à éviter plus efficacement toute forme d'abus de la part d'employeurs peu scrupuleux. Il proposait notamment de veiller au respect du dispositif existant par le renforcement de l'information sur les règles qui encadrent le travail des enfants et par la mise en oeuvre effective des sanctions.

Le présent projet de loi, reprenant certaines propositions de ce rapport, tend à améliorer la législation applicable en matière de sanctions à l'encontre des employeurs illégaux d'enfants, même si les avancées paraissent toutefois timides.

* 4 Cf. Le travail des enfants en France - Rapport du ministère de l'emploi - Direction des relations du travail (DRT) - Novembre 1998 - Cf. Infra annexe p. 97.

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