III. SERVICES TUTÉLAIRES : EXPÉRIMENTER POUR MIEUX RÉFORMER

Le troisième et dernier axe du présent projet de loi s'attache non pas aux mineurs proprement dits, mais à une autre catégorie de personnes fragiles. Il vise l'expérimentation d'une nouvelle forme de financement des services assurant la prise en charge des majeurs sous sauvegarde de justice, sous tutelle, sous curatelle ou sous mesure de tutelle aux prestations sociales. Cette mesure doit être ici considérée dans l'attente d'une réforme ambitieuse des tutelles et curatelles, attendue en 2005.

A. UN DISPOSITIF DE FINANCEMENT À RÉFORMER

1. Le principe du financement « à la mesure »

Près de 600.000 personnes, soit plus de 1 % de la population majeure, se trouvent aujourd'hui sous un régime de protection juridique (mesures civiles, hors tutelle aux prestations sociales adultes). Au 31 décembre 2002, 153.200 d'entre elles étaient sous tutelle ou curatelle d'Etat (TE-CE), 65.000 sous tutelle aux prestations sociales adultes (TPSE) et près de 70.000 étaient prises en charge par des gérants de tutelle hospitaliers.

Le dispositif actuel de financement de ces mesures de protection juridique par les associations tutélaires est constitué, pour l'essentiel, de prélèvements sur les ressources des majeurs protégés, de la tutelle aux prestations sociales financées par les caisses d'allocations familiales (CAF) et d'un complément financier versé par l'Etat. Il s'agit d'un financement par mesure judiciaire qui entraîne, par conséquent, une différenciation des coûts en fonction de la nature de la mesure décidée.

2. Une réforme nécessaire

Ce dispositif de financement a fait l'objet de nombreuses critiques. C'est pourquoi la nécessité d'une réforme d'ensemble du dispositif de protection juridique, réclamée par un certain nombre d'associations tutélaires, a été mise en lumière à la suite notamment des conclusions du rapport des inspections générales (affaires sociales, services judiciaires, finances) publié en juillet 1998 et du rapport Favard 9 ( * ) rendu public en mai 2000.


Les principales propositions du rapport Favard

Renforcer la protection de la personne

Ce renforcement passe par la participation de la personne à la mise en oeuvre de sa protection, dans la mesure de ses facultés.

Réaffirmer les principes de nécessité et de subsidiarité de la mesure

Le rapport propose de supprimer ou de rendre exceptionnelle, la saisine d'office du juge et d'organiser en amont une évaluation médico-sociale des situations individuelles, par une équipe pluridisciplinaire. Une meilleure connaissance du terrain serait favorisée par la déconcentration au niveau local de ces équipes.

Il propose également la création d'une « mesure de gestion budgétaire et sociale » , afin d'assurer un accompagnement social aux personnes en difficulté mais qui ne présentent pas d'altération de leurs facultés personnelles, les empêchant de pourvoir seules à leurs intérêts.

Assurer un meilleur contrôle des comptes rendus par les tuteurs

Cette amélioration passe d'abord par une meilleure formation des tuteurs et par une aide fournie aux tuteurs familiaux pour formaliser ces comptes.

Le rapport propose d'autre part d'améliorer les outils de contrôle à la disposition des juges (inventaire initial du patrimoine, interdiction des « comptes pivots », moyens d'expertise supplémentaires).

Revoir le financement des mesures de protection

Il s'agit surtout d'harmoniser les rémunérations des gérants de tutelle et les prélèvements sur les revenus des majeurs protégés et de mettre en place un financement par dotation globale calculée en fonction de la réalité et de la qualité du service rendu.

Un axe important de la réforme devra concerner le dispositif de financement qui, du fait de ses imperfections, engendre des dérives et des dysfonctionnements. Les disparités et l'inégalité des financements actuellement en vigueur sont ainsi préjudiciables à la fois aux personnes protégées (régime de prélèvement inéquitable), aux opérateurs (allocation inadaptée des ressources) et aux financeurs publics (absence de maîtrise de la dépense).

L'une des imperfections les plus préjudiciables est le financement au « mois mesure ». En effet, ce système de financement ne permet pas d'allouer les ressources en fonction de l'activité réelle des services de tutelle. Il ne prend en compte ni la nature de la mesure, ni sa durée, ni le public concerné. Il a de plus un caractère inflationniste puisqu'il conduit à allouer des ressources en fonction du seul volume de mesures gérées et non de l'activité réelle du service.

* 9 Rapport définitif du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs, présidé par M. Favard. Avril 2000.

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