2. Des dépenses d'assurance maladie rebelles à toute maîtrise ?

La révision des objectifs de dépenses des quatre branches prend acte, pour 2003, comme ce fut le cas les années précédentes, d'une dégradation significative en exécution du budget de la sécurité sociale.

Le dérapage s'élève à 0,7 %, soit 2,3 milliards d'euros, imputables pour l'essentiel à l'évolution plus rapide des dépenses d'assurance maladie qui y participe à hauteur de 1,7 milliard d'euros (+ 1,3 %).

L'évolution des dépenses d'assurance maladie explique à elle seule 75 % du dérapage de l'agrégat des objectifs de dépenses.

Pour autant, l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 présente une sensible amélioration par rapport à l'année précédente. En effet, et à la différence des recettes sur laquelle pèse une volatilité significative, l'évolution en exécution des dépenses reflète largement le caractère sincère de l'objectif initial.

A cet égard, la réalisation des objectifs de dépenses par branche pour 2003 témoigne d'une sensible amélioration, la sous-estimation initiale des dépenses de l'assurance maladie n'ayant été que de 1,3 % au lieu de 3,2 % en 2002, cette différence soulignant, à bien des égards, le caractère irréaliste de l'exercice de prévision auquel s'était livrée la précédente majorité.

Prévisions
initiales LFSS 2003

LFSS 2003
révisée

Écart 2003 révisées/2003 initiales

Écart 2003 révisées/2003 initiales
(en %)

Maladie, maternité, invalidité et décès

136,35

138,07

1,72

1,26

Vieillesse

140,36

140,68

0,32

0,23

Accidents du travail

9,40

9,39

- 0,01

- 0,11

Famille

43,62

43,98

0,36

0,83

Total des dépenses

329,73

332,12

2,39

0,72

(milliards d'euros)

3. Le relèvement par décret du plafond d'assurance

La loi de financement pour 2003 avait fixé le montant du plafond d'avance à 12,5 milliards d'euros, correspondant à un triplement de celui déterminé par la précédente loi de financement (4,4 milliards d'euros).

Selon l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) 1 ( * ) , l'évolution du profil de trésorerie du régime général pour l'exercice 2003 présente les caractéristiques suivantes :

- le solde moyen sur l'exercice est estimé à 5 milliards d'euros ;

- le point le plus bas a été atteint le 10 octobre 2003 à - 13,3 milliards d'euros ;

- le solde de fin d'année est estimé à - 13,2 milliards d'euros.

Ces considérations expliquent le relèvement du plafond à 15 milliards d'euros, qui correspond au point le plus bas prévu, majoré, par précaution, d'une marge d'environ 10 %.

Lors de la présentation de la loi de financement pour 2003, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, avait pris l'engagement, au nom du Gouvernement, de présenter un projet de loi de financement rectificatif si l'on devait observer un dérapage sensible par rapport aux prévisions initiales.

Cet engagement, ardemment réclamé par votre commission depuis plusieurs années, constituait un gage de la crédibilité que l'on pouvait attacher à la définition des hypothèses économiques - ambitieuses - soutenant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses pour 2003.

Or, d'après les informations disponibles, il apparaissait, dès le mois de mars dernier, que l'évolution des encaissements et des tirages respectifs des différentes branches auprès de l'ACOSS ne permettrait pas de tenir les prévisions initiales.

L'ACOSS considérait de ce fait, dès le mois d'avril 2003, qu'en l'absence de mesures correctives significatives, ce plafond risquait d'être insuffisant. Ceci a motivé, à la demande de son conseil d'administration, une intervention de son représentant à l'occasion de la Commission des comptes de la sécurité sociale du 15 mai 2003. Lors de la commission financière et statistique du 19 mai 2003 et du conseil d'administration du 23 mai 2003, il a été signalé qu'un retour des soldes dans les limites autorisées par la LFSS 2003 requérait des mesures de mise en conformité du profil de trésorerie avec les besoins réels du régime général et la prise de mesures exceptionnelles. En l'absence de ces mesures, un relèvement du plafond des avances semblait inévitable 2 ( * ) .

Le rapport remis par le Gouvernement en application de l'article L.O. 111-5 du code de la sécurité sociale, à la suite du relèvement par décret du plafond, indique pour sa part qu'« il est apparu en juillet que le plafond des avances serait dépassé malgré les diverses mesures de lissage de la trésorerie que le régime général et l'État pourraient prendre.

Or, le premier dépassement pouvait intervenir dès les premiers mois d'octobre. Il n'était donc pas possible, pour le Gouvernement, d'attendre la reprise des travaux parlementaires et de recourir à la partie rectificative du projet de loi de financement pour 2004 pour relever le plafond d'avances de trésorerie ».

Ces éléments l'avaient donc conduit à remédier à cette situation par décret pris en conseil des ministres dès la fin de l'été.

La date évoquée par son rapport ne fait toutefois référence qu'à l'ultime mesure d'alerte émise par le conseil d'administration de l'ACOSS et, de ce fait, elle ne semble qu'imparfaitement résumer les raisons qui l'ont conduit à écarter une voie législative, qui ne lui était d'ailleurs nullement imposée mais qu'il avait lui-même souscrite.

Votre commission a défini dès 1999 ce qu'elle considérait devoir être « la pratique du collectif social » à une période où le gouvernement d'alors avait lui-même par décret 3 ( * ) relevé ce plafond, alors même qu'il avait déjà obtenu de l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale initial, une première majoration sensible.

Par cette « doctrine », votre commission s'est attachée à souligner l'importance que revêt, à ses yeux, le dépôt d'un collectif :

- lorsque le plafond d'avances devient insuffisant ;

- lorsque l'adoption de mesures correctrices est jugée nécessaire en cours d'année.

Sans doute, l'encombrement excessif de l'ordre du jour parlementaire impose-t-il de faire des choix. Pour autant, à la différence du précédent gouvernement qui raillait délibérément l'exercice de vérité que constitue l'examen d'un tel collectif - « nous devrions réunir le Parlement, chaque mois, dès la première grippe » 4 ( * ) - votre commission demeure attachée à la légitimité d'un instrument qu'elle estime largement justifié par la prolifération d'accords portant de véritables mesures nouvelles qui seront imparfaitement ratifiées dans la loi de financement suivante.

* 1 Cf., en annexe, audition de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, et Frédéric Van Roeckeghem, directeur général, de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale - le 5 novembre 2003.

* 2 Cf. audition précitée de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, et Frédéric Van Roeckeghem, directeur général, de l'ACOSS.

* 3 Décret du 26 août 1998.

* 4 Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

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