B. LES PRÉVISIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2004 : CONTENIR L'EXPLOSION

1. Le choix de différer la réforme de l'assurance maladie

D'un point de vue financier, la branche maladie constitue « la branche malade » de la sécurité sociale. Même lorsque l'économie nationale affichait un taux de croissance particulièrement élevé, elle n'a jamais réussi à reconstituer un excédent.

La période 1998-2001 s'est traduite par un double échec dans la maîtrise des comptes de l'assurance maladie :

- un déficit cumulé sur la période de 6,94 milliards d'euros ;

- un dérapage de l'ONDAM de 7,8 milliards d'euros.

Assurance maladie 1998-2001

(en milliards d'euros)

1998

1999

2000

2001

Total

Dépassement ONDAM rebasé

1,40

1,50

2,50

2,40

7,80

Déficit assurance maladie

- 2,10

- 0,70

- 2,50

- 1,64

- 6,94

Source : commission des Affaires sociales

Evidente à la vue de ces chiffres, l'absence de maîtrise des coûts de la santé a été plus manifeste encore avec l'entrée dans une phase de ralentissement économique et la poursuite concomitante de l'évolution des dépenses sur un rythme spontané très élevé (déficit respectif de 10,6 et 14 milliards d'euros en prévisions et hors mesures PLFSS pour 2003 et 2004).

Evolution spontanée des soldes des différentes branches
et du régime général

Source : commission des Affaires sociales.

Lire le tableau ainsi : en 2003, le solde de l'assurance maladie est en définitive de 10,6 milliards d'euros et celui du régime général de 8,9 mais, sans l'assurance maladie, les autres branches présentent des soldes créditeurs de 1,7 milliards d'euros.

Il est désormais acquis que l'équilibre à court et moyen termes des finances sociales a pour prix une réforme majeure de l'assurance maladie sans laquelle l'ensemble des comptes sociaux resteront globalement dégradés.

Le Gouvernement a déjà engagé la phase de réflexion préalable à la concertation avec l'ensemble des acteurs, dont votre rapporteur a rendu compte 5 ( * ) comme d'une « réflexion dans l'urgence ».

Pour sa part, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, créé par le décret du 7 octobre 2003, devra établir un diagnostic concerté et proposer des solutions avant l'été. En aucun cas, en effet, une réforme d'ampleur de l'assurance maladie ne saurait être plus avant différée.

2. Des prévisions de recettes fragiles

Les prévisions de recettes pour 2004, rapportées à celles de 2003, s'affichent en hausse de 3,7 %. Elles sont construites sur trois hypothèses macroéconomiques pour 2004 :

- une croissance du PIB de 1,7 % ;

- une évolution de la masse salariale de 2,7 % ;

- une évolution du plafond de sécurité sociale de 1,8 %.

Elles seront par ailleurs affectées par la rebudgétisation des ressources - et des dépenses - du FOREC 6 ( * ) qui résultera de la suppression de ce fonds en 2004.

Cette mesure modifie en effet substantiellement le montant des cotisations prises en charge par l'État (budget du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité) qui augmente de 17 milliards d'euros et participe pour une grande part à la réduction de 11,2 % du montant des impôts et taxes affectés (ITAF) aux régimes de sécurité sociale.

Trois raisons, jouant dans des sens contradictoires, expliquent les différences que produit l'effet FOREC, d'une part, sur les cotisations prises en charge, d'autre part, sur les ITAF :

- la croissance du montant des allégements compensés qui majorent, en 2004, les crédits budgétaires par rapport au périmètre FOREC 2003 ;

- l'augmentation spontanée des impôts et taxes affectés à la sécurité sociale ;

- l'augmentation des droits sur les tabacs, dont une partie significative demeure affectée à la CNAM.

Pour autant, ces prévisions conservent une part d'incertitude en raison du caractère volatile de leurs fondements.

Pour mémoire, votre rapporteur rappelle qu'en 2004 l'impact budgétaire d'une variation de faible ampleur de la masse salariale (0,1 point) équivaudrait à 150 millions d'euros de recettes, en plus ou en moins, et qu'une différence de réalisation de 1 % de CSG vaudrait 90 millions d'euros.

En outre, il souligne les réserves qu'appelle l'augmentation de la fiscalité sur le tabac spécifique au BAPSA qui, intervenant après une succession de fortes hausses du droit de consommation, pourrait introduire des écarts sensibles en réalisations. Pour reprendre les mots du rapporteur pour avis de la commission des Finances de l'Assemblée nationale : « certaines recettes, à l'instar des droits de consommation sur les tabacs, pâtissent de difficultés croissantes d'appréhension de leur élasticité de tarif » 7 ( * ) .

Incontestablement, un nombre croissant de recettes se trouvent perturbées par des évolutions rapides du contexte dans lequel elles évoluent (contraction de l'emploi, repli des marchés financiers). Les prévisions n'en sont que plus délicates à construire.

* 5 Alain Vasselle, Assurance maladie, Une réflexion dans l'urgence.

* 6 Cf. infra.

* 7 Cf. avis n° 1156 de M. François Goulard au nom de la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

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