N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 janvier 2004

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relatif à la politique de santé publique ,

Par MM. Francis GIRAUD et Jean-Louis LORRAIN,

Sénateurs.

Tome II :

Auditions et Tableau comparatif

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, André Geoffroy, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Yves Krattinger, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mmes Valérie Létard, Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (12 ème législ.) : 877 , 1092 et T.A 192

Sénat : 19 (2003-2004)

Santé.

AUDITIONS

I. AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS MATTEI, MINISTRE DE LA SANTÉ, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPÉES

M. Nicolas ABOUT, président - Bonjour, monsieur le ministre. Je vous remercie d'avoir une nouvelle fois répondu à notre invitation. Votre présence est d'autant plus précieuse que vous avez pris l'habitude de consacrer un temps conséquent à nos auditions. Je vous en remercie au nom de la Commission.

Le grand projet de politique de santé publique est aujourd'hui à l'ordre du jour. Il constitue une grande nouveauté en France : il s'agit du premier texte relatif à la santé publique depuis un siècle. Ce projet de loi dense soulève de nouvelles questions. Je vous propose dans un premier temps d'exposer le projet de loi, après quoi le rapporteur et les commissaires ne manqueront pas de vous interroger.

M. Jean-François MATTEI, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Merci monsieur le président, monsieur le rapporteur, madame la sénatrice et messieurs les sénateurs. C'est toujours un plaisir de rencontrer la commission des affaires sociales du Sénat. Je ne compte pas mon temps au sein de la présente assemblée car nos échanges sont toujours instructifs et enrichissants. Je souhaite, si vous le permettez, m'exprimer pendant une demi-heure avant de répondre à l'ensemble des questions qui me seront posées.

Lors de la re-fondation de ses institutions en 1946, la République a accueilli un certain nombre de droits économiques et sociaux nouveaux, relatifs notamment à l'emploi, à la formation, à la culture et à la santé. Aux frontispices de sa charte commune, elle a alors inscrit le principe suivant : « la Nation garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé. » Il s'agit là d'un des principes particulièrement nécessaires à notre temps et auquel a été reconnue une valeur constitutionnelle. Le droit à la protection de la santé signifie le devoir pour les pouvoirs publics de protéger collectivement les populations contre les risques qui pourraient menacer leur santé. A ce droit, qui s'inscrit dans la longue tradition de la police sanitaire, s'attachent aujourd'hui une signification, une demande et une urgence nouvelles.

Permettez-moi de présenter tout d'abord la signification nouvelle du droit à la santé. Les promesses scientifiques donnent aujourd'hui un sens tout à fait nouveau à la prévention. La prévention ne signifie plus l'isolement des villes dans lesquelles s'est déclarée une épidémie de peste, mais le moyen de traiter en amont les déterminants des maladies grâce à des techniques de dépistage précoce et des thérapeutiques performantes. La prévention consiste en d'autres termes à faire progresser l'éducation sanitaire de nos concitoyens afin qu'ils évitent les conduites qui nuisent à leur santé. Enfin, les connaissances que la recherche biomédicale est en train d'accumuler pourraient donner naissance à une médecine prédictive qui, à condition d'en encadrer les éventuelles dérives, est une chance formidable pour la santé publique. La politique de prévention a aujourd'hui un sens nouveau : elle n'est plus un palliatif à l'impuissance médicale, mais s'appuie au contraire sur les perspectives prometteuses ouvertes par les progrès thérapeutiques. Il s'agit bien-là d'une signification nouvelle de la prévention.

La politique de santé publique fait également l'objet d'une demande nouvelle de la part de nos concitoyens. L'idée même d'une santé publique est longtemps restée incomprise. Autrefois, l'intervention de l'État en matière sanitaire n'échappait jamais aux soupçons qui la dénonçaient comme une tentative de moralisation et de redressement des comportements individuels jugés condamnables. Il est vrai qu'un certain hygiénisme voulait prévenir les infections comme la syphilis, la tuberculose, les pathologies de l'alcoolisme ou encore la stérilité consécutive à des avortements clandestins, non seulement en raison de leurs effets sur la santé, mais aussi parce que ces infections étaient issues de modes de vie qui, du point de vue public, méritaient réprobation. Aujourd'hui, ces stigmates me semblent heureusement oubliés. La légitimité pour l'État d'intervenir dans les affaires de santé afin de protéger la population n'est plus remise en question. Chaque fois que la santé des concitoyens ou celle de leurs proches est en danger, c'est bien à l'État et à ses agents que les Français et les Françaises s'adressent pour exiger une protection efficace. Aujourd'hui, non seulement le rôle de l'État n'est plus contesté, mais il est réclamé à juste titre. L'actualité atteste que seul l'État peut lutter efficacement contre les épidémies comme le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), les méningites, le SIDA, la grippe ou l'hépatite B. Une demande nouvelle existe.

Enfin, une urgence nouvelle caractérise la santé publique. En effet, nous répondons encore de façon insuffisante à la demande de nos concitoyens. Deux constats mettent en lumière les conséquences de cette négligence. Premièrement, la mortalité prématurée, définie comme celle survenant avant l'âge de 65 ans, reste à un niveau anormalement élevé en France, alors que ses causes en sont connues et qu'elle est évitable. Des pays comme l'Allemagne, l'Italie ou le Japon connaissent une mortalité adulte inférieure à la nôtre. Ce décalage est d'autant plus choquant qu'il contraste avec la qualité et la réputation de nos personnels et de nos établissements de santé. L'État peut agir, et les Français attendent qu'il le fasse. La lutte contre le tabagisme, la première cause de cancer et de mortalité évitable, a montré des premiers résultats spectaculaires. Il faut également lutter contre la consommation de drogues. La France détient le sinistre record de la consommation de cannabis chez les jeunes : 50 % d'entre eux ont déjà fumé du cannabis, et 10 % d'entre eux en consommeraient de façon régulière. Par ailleurs, l'inégalité des Français face à la maladie et la mort est éloquente. Selon la géographie et le milieu social, nos concitoyens ne sont pas exposés de la même façon aux maladies cardio-vasculaires et aux cancers par exemple. Les individus les moins favorisés ont la plus faible espérance de vie, car ils font les frais de l'absence de priorités de santé publique. L'État doit à présent assumer son rôle de garant de la santé de la population et de la solidarité nationale.

Le projet de loi, déposé dès le mois de mai à l'Assemblée nationale, a l'ambition de donner à l'État les moyens de tenir son rôle de garant de la santé publique, et fait justice d'une compréhension des faiblesses structurelles les plus graves qui ont handicapé notre système de santé cet été. Il existe un profond déséquilibre entre le soin et la prévention, pour laquelle la responsabilité de l'État peine à s'affirmer, du fait de la dispersion des acteurs et des moyens consentis. Sur 150 milliards d'euros consacrés aux dépenses de santé, seulement 3,6 milliards d'euros (soit 2,4 %) sont consacrés à la prévention définie strictement, et 10 milliards d'euros (7 % des dépenses totales) selon des critères élargis.

D'autre part, la responsabilité de l'État dans le domaine de la santé publique est mal définie et insuffisamment organisée. C'est en effet à coups de catastrophes écologiques (naufrage de l'Amoco-Cadiz), de scandales (la vache folle, le sang contaminé), de paniques plus ou moins scientifiquement fondées (l'ozone) ou d'accidents hospitaliers anesthésiques ou obstétriques que l'État a dû trouver, à la hâte, de nouvelles formes d'intervention. Le mouvement de l'opinion ne doit pas être négligé dans ce processus. Le premier naufrage d'un pétrolier géant (l'Exxon Valdez) était une catastrophe écologique. Le naufrage de l'Erika a été considéré comme une atteinte sanitaire. L'évolution est significative : le regard porté sur un événement de même importance a considérablement évolué en vingt ans. La santé publique n'a jamais été considérée en tant que telle comme une responsabilité de l'État, et n'a jamais été définie comme un domaine prioritaire d'action. Par conséquent, en l'absence de politique d'ensemble, l'organisation actuelle est le résultat de réformes successives qui ont manqué d'une vision globale et dont la compréhension n'était pas l'objectif premier. Le projet de loi consiste à fonder en France, pour la première fois depuis 1902, une politique pérenne de santé publique.

En 1998, à l'initiative de la Haute assemblée, la France s'est dotée d'un premier ensemble complet d'outils destinés à garantir la sécurité sanitaire de notre environnement, de notre alimentation et de nos produits de santé. Un réseau de veille sanitaire a ainsi été institué. La création à cette époque des agences sanitaires a correspondu à une première étape sur la voie d'une meilleure approche du devoir de santé publique au sein duquel le Parlement a joué un rôle prééminent. Ce projet de loi est la deuxième étape de cette démarche, étape structurante et plus aboutie que la première. Il affirme la responsabilité de l'État en matière de santé publique et s'atèle à une tâche difficile qui consiste à tirer le meilleur parti possible de l'extraordinaire dispersion des acteurs et des efforts qui caractérise le monde de la prévention.

Si l'État est garant de la santé publique, il n'a pas vocation à en être l'acteur unique. Le rôle que nous entendons donner aux pouvoirs publics dans ce domaine est conforme aux missions d'un État moderne, à savoir un État dont les missions consistent à garantir plutôt que gérer, à organiser les rôles de chacun des acteurs plutôt que s'y substituer, à tracer la direction à suivre et à évaluer les résultats plutôt qu'empiéter sur les compétences des acteurs de la santé publique sur le terrain.

Le rôle de garant de la politique de santé publique que les Français souhaitent voir assumer par l'État se traduit de deux façons. Il appartient tout d'abord à l'État d'arrêter, au terme d'une large concertation, les priorités qu'il faut assigner en vue d'améliorer l'état de santé des Français. Pour que chaque acteur puisse situer son rôle et comprendre le sens de son action, il doit pouvoir inscrire celle-ci dans un cadre de référence explicite. Il convient par conséquent de définir une série d'objectifs permettant de déterminer la pertinence de telle ou telle action. La définition d'objectifs pour le système de santé publique sur un horizon de cinq ans constitue le premier axe directeur du projet de loi. Jusqu'à présent, les objectifs concernaient les dépenses d'assurance maladie. Cette logique est non seulement par nature inflationniste, mais elle est appauvrissante. La question consiste en effet à savoir si les ressources consacrées au système de santé ont le meilleur impact possible sur l'état de santé de la population. C'est pourquoi nous avons défini cinq grandes priorités à la politique de santé publique dont nous aurons à répondre dans cinq ans : la lutte contre le cancer, la santé environnementale (qui inclut la santé au travail), la violence et les comportements à risques, les maladies graves et la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques. Le projet comporte par ailleurs un rapport annexé qui propose une centaine d'objectifs ayant vocation à constituer un tableau de bord pour améliorer le pilotage de notre système et mieux analyser ses forces et ses faiblesses. Ces objectifs n'ont pas vocation à être exhaustifs : il s'agit d'indicateurs destinés à faire périodiquement le point sur les évolutions de la situation sanitaire du pays, et de repérer les progrès et les manques.

Deuxièmement, si l'État n'a pas le monopole des actions en termes de santé publique, il lui revient d'organiser sous sa responsabilité un partenariat regroupant les acteurs publics et privés. Ce projet de loi vise à organiser l'action sur le terrain, car c'est là que se gagne la bataille de la santé. Il doit permettre de rapprocher les professionnels du soin et de l'action sociale. La nécessité pressentie dans l'élaboration de cette loi s'est cruellement confirmée cet été. Devant les lacunes et les mauvais résultats que j'ai évoqués, il serait tentant d'appeler à une hausse des dépenses de santé publique. Certes, des besoins restent insatisfaits, mais il convient de mieux utiliser les moyens dont nous disposons et d'éviter le gaspillage en créant une véritable synergie entre les acteurs de la santé. A côté des deux grands acteurs (l'État et les caisses d'assurance maladie) coexistent d'une part les collectivités territoriales et, d'autre part, une kyrielle de structures (observatoires de la santé, comités départementaux d'éducation sur la santé, associations spécialisées, espaces santé jeunes, observatoires de la santé au travail) au sein desquelles la répartition des responsabilités est confuse. Le projet de loi propose un mécanisme permettant d'associer l'intégralité des acteurs.

Nous souhaitons simplifier et rationaliser le paysage institutionnel national en organisant trois niveaux. Le premier niveau consiste en la concertation, l'expertise et la coordination autour de trois instances. La Conférence nationale de la santé, qui est une instance permanente de débats entre les associations, les professionnels et les sociétés savantes, sera consacrée à la concertation. Le Haut conseil de la santé publique sera l'instance d'expertise, et reprendra les missions du Conseil supérieur d'hygiène publique et celles du Haut comité de la santé publique. Enfin, le Comité National de la Santé sera l'instance de coordination interministérielle et de gestion politique. Au niveau politique, le Gouvernement soumettra tous les cinq ans à l'approbation du Parlement une loi fixant les priorités de la politique de la santé publique, dont le ministre de la santé arrêtera les plans nationaux. Enfin, le niveau de mise en oeuvre de la politique réunira les organismes sanitaires, les associations, l'assurance maladie et les collectivités territoriales.

Le schéma sera similaire au niveau régional. La région apparaît comme le meilleur niveau pour la mise en place de la politique de santé publique. C'est à cet échelon sanitaire que les objectifs nationaux doivent être déclinés, en tenant compte des spécificités locales. La concertation y sera assurée par la Conférence régionale de la santé, qui réunira tous les acteurs et proposera des objectifs pour un plan régional de santé publique arrêté par le préfet de région au terme de la concertation. La mise en oeuvre coordonnée du plan sera confiée à une structure partenariale, le groupement régional de santé publique. Une des principales entraves à la performance de notre système actuel de santé publique tient à l'extrême dispersion des acteurs de terrain, cependant que leur diversité constitue une richesse. Le schéma que je viens de vous présenter permettra de concilier la diversité et la collaboration des acteurs. Les collectivités locales et l'assurance maladie pourront affermir leurs compétences et développer leurs actions. Nous prévoyons d'ailleurs que le conseil régional soit habilité à développer des actions particulières. Je propose un mécanisme souple d'association au sein d'un groupement d'intérêt public. Cette instance opérationnelle sera chargée de la mise en oeuvre du plan régional de santé publique tout en respectant la personnalité et l'intégrité de chacun des acteurs. Ce groupement d'intérêt public permettra de potentialiser les financements au niveau régional. Il permettra la coordination des actions sur la base des priorités établies par le Conseil d'administration au sein duquel siégeront, outre l'État et l'assurance maladie, les collectivités locales et l'ARH.

Permettez-moi de préciser, monsieur le président, monsieur le rapporteur, madame et messieurs les sénateurs, que je compte sur le travail que nous effectuerons ensemble pour améliorer les conditions de fonctionnement et de pilotage de cette structure. Je suis tout à fait ouvert à toutes les suggestions.

J'ajoute que je me suis attaché à porter au niveau international le message du caractère primordial de la santé publique. Au cours des derniers mois, grâce à l'intervention de la France dans les conseils des ministres européens de la santé, trois sujets ont progressé significativement. Nous avons vaincu les dernières hésitations de nos partenaires et avons permis, en décembre dernier, l'adoption d'une directive interdisant la publicité transfrontalière du tabac. Je souhaite que cette directive soit transposée dans le projet de loi de santé publique. Par ailleurs, c'est également à l'initiative de la France que les ministres da la santé européens ont adopté en mai dernier un certain nombre de recommandations décisives dans la lutte contre l'épidémie de SRAS. Enfin, depuis ma prise de fonction, je m'emploie à ce que voie le jour un centre européen de contrôle des maladies transmissibles, sur le modèle du CDC d'Atlanta, afin de doter l'Europe d'une capacité opérationnelle pour lutter efficacement contre les grandes épidémies. Je suis heureux de vous annoncer que le vote a été acquis par le conseil des ministres de la santé à l'unanimité : ce projet est devenu réalité. Nous prévoyons enfin d'aboutir dans les prochains mois à la conclusion d'une vaste convention de coopération avec l'OMS.

Permettez-moi de présenter de façon synthétique les cinq grands titres du projet de loi de santé publique.

Le titre I définit le périmètre de la santé publique, clarifie les responsabilités, simplifie les instances impliquées. Je souligne que le Gouvernement a été guidé par le souci de parvenir à une architecture efficace et beaucoup plus simple que celle que nous connaissons actuellement.

Le titre II est relatif aux outils d'intervention de l'État. Il précise les missions de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, institue les consultations de prévention et établit de nouvelles dispositions relatives à la politique vaccinale. Dès la première lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, nous avons proposé de nombreux amendements qui ont été regroupés sous le titre II bis afin de tirer rapidement un certain nombre de conclusions de la crise de l'été dernier. Je précise que le projet de loi prévoyait déjà un certain nombre de dispositions relatives à la crise sanitaire permettant d'améliorer la mobilisation des moyens en cas de menace. Il renforçait les contrôles sur la production et l'utilisation de micro-organismes et de leurs toxines, notamment dans le cadre de la lutte contre le bioterrorisme. Il permettait aussi de renforcer les systèmes d'information sanitaire en ménageant un équilibre entre la nécessité d'avoir accès à des données importantes pour la santé et celle de protéger la vie privée.

Nous avons complété, lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, ces dispositions dans trois directions. Premièrement, notre système d'alerte sanitaire, cinq ans après sa création, nécessitait des renforcements et des précisions. Sans en changer les périmètres, nous avons mieux défini les différentes tâches de l'Institut de veille sanitaire - cet organisme doit mener des réflexions prospectives sur les facteurs de risques sanitaires non identifiés, compléter son approche par pathologie, mais aussi établir une approche par population en fonction des groupes à risques afin de déterminer des indicateurs d'alerte. L'article 11 - l'obligation faite aux médecins et aux établissements publics de signaler aux autorités sanitaires les risques dont ils auraient connaissance - a été étendu à l'ensemble du secteur sanitaire et médico-social. Par ailleurs, les moyens d'action des pouvoirs publics pour prévenir une menace sanitaire grave ou atténuer l'impact d'une crise sanitaire ont été nettement renforcés. L'article 10 autorise le ministre de la santé à prescrire les dispositions appropriées en cas de crise sanitaire grave et à habiliter le préfet à mettre en oeuvre ces prescriptions en prenant, dans des conditions strictement encadrées, les mesures individuelles et collectives qui s'imposent. Nous avons également donné une base légale au plan blanc hospitalier, précisé les conditions dans lesquelles ce plan peut être déclenché, et donné au préfet la possibilité de recourir à des plans blancs élargis au secteur privé et libéral. Troisièmement, nous avons amélioré le système de remontée des certificats de décès. L'objectif est double : d'une part, simplifier le circuit afin de permettre son informatisation, et d'autre part permettre à l'Institut national de veille sanitaire de s'appuyer sur ce circuit pour construire un dispositif d'alerte et de mesures au jour le jour. Je m'exprimerai à nouveau sur ces mesures lors de la mission d'information sénatoriale consacrée à la canicule. Aujourd'hui, le ministre de la santé est totalement dépourvu de capacités pour apporter des chiffres fiables en matière de décès, ce qui est inacceptable.

Le titre III comporte des dispositions relatives aux cinq plans de santé publique nationaux.

Dans le domaine du cancer, nous créons l'Institut national du cancer, conformément aux engagements annoncés par le Président de la République en mars 2003. Cet Institut a pour vocation de mieux coordonner les acteurs du cancer et constituera la « tour de contrôle » de la lutte contre cette maladie. Il veillera notamment à la mise en oeuvre et au bon déroulement du Plan Cancer selon le calendrier prévu, de la prévention aux soins, de l'observation à l'organisation, de l'action médicale au financement de la lutte, dans un souci constant de développer les synergies européennes et internationales. L'Institut sera la maison commune des patients et des soignants. Il permettra par ailleurs de renforcer les institutions de recherche sans s'y substituer.

Par ailleurs, un plan national de santé environnementale sera déployé, conformément aux demandes du Président de la République. Il comportera un volet relatif aux situations météorologiques extrêmes. Ce plan facilitera également la surveillance épidémiologique en milieu professionnel, actualisera les dispositions relatives à la préservation de la qualité de l'eau, simplifiera les conditions d'exploitation des sources d'eaux minérales, naturelles et thermales et, enfin, renforcera les mesures de lutte contre le saturnisme.

Les dispositions du titre IV ont trait à la recherche et à la formation en santé. Elles créent en premier lieu l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique. La santé publique n'ayant jamais été définie comme priorité en France, nous ne disposons pas des structures permettant de former les grands spécialistes de la santé publique dont nous avons besoin. Notre haute administration manque de grands spécialistes dans ce domaine. L'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique formera des spécialistes français, de même que la London School ou encore Harvard forment des spécialistes de santé publique anglais et américains. Ce nouvel établissement profitera à l'ensemble des professionnels aujourd'hui formés à l'ENSP qui gagnera en notoriété et en attrait en délivrant des diplômes nationaux en étant adossée à un réseau performant d'enseignement universitaire en matière de santé publique.

Le titre IV actualise par ailleurs de dispositif d'encadrement des recherches biomédicales issu là encore de la Haute Assemblée. La révision que nous proposons s'impose par la nécessité de transposer en droit interne la directive européenne 2001-20-CE relative aux essais cliniques de médicaments, mais aussi par le besoin exprimé par les acteurs de la recherche en santé d'adapter le dispositif existant. La directive européenne nous conduit sur le terrain des principes et des droits fondamentaux de la personne. Le gouvernement a souhaité définir, au-delà du médicament, les règles et un cadre commun à toutes les recherches biomédicales. Trois modifications majeures sont proposées, à savoir le remplacement de l'actuel régime déclaratif par un régime d'autorisation, la suppression de la distinction entre la recherche sans bénéfice direct et la recherche avec bénéfice direct au profit de l'appréciation beaucoup plus fine d'un bilan bénéfice risque et, enfin, la participation à la recherche des personnes vulnérables ou hors d'état d'exprimer leur consentement afin qu'elles profitent des progrès de la recherche - je pense en particulier aux personnes atteintes de maladies neuro-dégénératives telle la maladie d'Alzheimer.

Enfin, le titre V simplifie le dispositif de formation médicale continue. Il s'agit-là d'une des conditions de la réussite de la politique de succès des soins qui, selon moi, doit être le seul régulateur de notre système de santé à l'exclusion de régimes comptables. Les médecins perçoivent parfaitement la nécessité de se former pour continuer à délivrer des soins de qualité : ils souscrivent de façon responsable à la démarche de la formation continue. Je souhaite lier l'obligation de formation continue à des mécanismes d'incitation et de valorisation professionnelle qui devront se développer dans une politique conventionnelle avec les Caisses d'assurances maladie. Par exemple, l'accès à certaines responsabilités professionnelles pourrait être conditionné au respect de l'obligation de formation continue. Les primes d'assurances professionnelles pourraient être modulées dès lors que les praticiens s'engageraient à s'acquitter de leurs obligations de formation. Les discussions préliminaires sur ces mesures nouvelles se sont ouvertes avec les assureurs et les syndicats médicaux.

Madame et messieurs les sénateurs, l'histoire de l'interventionnisme de l'État est celle d'une quadruple aventure. Il s'agit tout d'abord d'une aventure scientifique. En effet, si la réglementation est toujours, par la force des choses, à la remorque de la vie et de la nature, je crois que l'État peut, selon qu'il investit ou néglige au contraire la santé publique, stimuler ou freiner le progrès scientifique. Il s'agit par ailleurs d'une aventure administrative, car l'adaptation simultanée des structures administratives aux attentes du public, des professionnels et des responsables en matière de politique sanitaire est en perpétuel recommencement. L'interventionnisme de l'État constitue également une aventure économique, car l'État a toujours été prié de faire davantage en dépensant moins. Il s'agit enfin d'une aventure juridique dans laquelle l'État déploie toutes les facettes de ses compétences : l'information, la réglementation, l'interdiction, le contrôle, l'incitation... L'État assume ces responsabilités et c'est vers lui que le public se retourne. Selon les époques, l'interventionnisme de l'État a été plus ou moins ponctuel et fécond. Aujourd'hui, le gouvernement vous invite à prendre part à cette aventure en écrivant dans l'histoire de la politique de santé publique une page structurante et en marquant une étape qui répondra aux faiblesses structurelles de notre système et donnera à tous les acteurs de la santé publique les moyens d'améliorer significativement l'état de santé des Français. Une première lecture de ce texte a eu lieu à l'Assemblée Nationale. Le système des navettes fait que le texte sera présenté au Sénat les 13 et 14 janvier, après quoi il sera présenté pour une deuxième lecture dans chacune des deux assemblées.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, madame et messieurs les sénateurs, je vous remercie.

M. le PRÉSIDENT - Merci monsieur le ministre. Je vous invite à vous lancer dans l'aventure législative, qui suit les quatre aventures que vous venez de citer, et qui commence aujourd'hui. Je tiens à excuser le départ de Monsieur Lorrain, qui rapporte actuellement au nom de notre commission le projet de loi sur la protection de l'enfance en séance publique. Je transmets la parole à Monsieur le Rapporteur.

M. Francis GIRAUD - Monsieur le ministre, comme l'a précisé monsieur le président, le projet de loi que vous nous avez présenté constitue un texte fondateur. Il est vrai qu'à une période de l'année où chaque Français s'apprête à adresser ses voeux de santé à ses voisins, nous devons reconnaître que le terme de santé publique est un concept qui ne nous est pas familier. Je retiendrais donc de votre texte l'adjectif « publique » et la notion de « prévention ».

Le texte de loi qui nous est présenté conduit à un certain nombre d'interrogations. C'est la raison pour laquelle je souhaite vous poser une question de structure et une question éminemment conjoncturelle.

D'un point de vue structurel, chacun de nous s'accordera sur le fait que l'État doit organiser la santé publique au niveau national en impulsant les programmes et les objectifs. L'article 2, qui définit le rôle du représentant de l'État dans chaque région, est plus problématique. Il prévoit que le représentant de l'état définira les objectifs régionaux selon les plans nationaux, arrêtera le plan régional de santé publique et le mettra en oeuvre grâce au Groupement régional de santé publique, qui aura la forme d'un groupement d'intérêt public associant l'État et beaucoup d'acteurs. Or l'article 5 prévoit que le Groupement régional de santé publique sera présidé par la Préfet et que l'État y disposera de la moitié des voix. Les élus locaux s'interrogent sur le fonctionnement de ce Groupement régional de santé publique. Pouvons-nous envisager de chercher ensemble, monsieur le ministre, des solutions permettant de renforcer les aspects partenariaux dans ce Groupement régional de santé publique ? Comme vous le savez, le Sénat a vocation à représenter les élus locaux ; attribuer à ces derniers une place dans le Conseil régional de santé publique permettrait de renforcer leurs responsabilités.

La seconde question, quant à elle, est relative à l'amendement Accoyer ; celui-ci n'est pas contenu dans la loi, mais a été introduit par l'Assemblée nationale. Elle est apparue comme un véritable arsenal nucléaire aux yeux d'un certain nombre de personnes s'occupant de santé mentale, de psychologie. Celles-ci sont organisées de façon parfois incohérente. Le Sénat les a d'ailleurs auditionnées et je suis heureux de préciser que nos collègues des affaires sociales y ont participé. Cela a souvent occasionné des moments extrêmement forts. Quoi qu'il en soit, nous souhaiterions connaître vos orientations sur cet amendement, sur la manière dont nous pouvons assurer la protection de la population française dans ce type d'activités.

Enfin, ma dernière question sera beaucoup plus courte, elle porte sur la formation médicale continue : nous avons interrogé au cours des auditions de nombreuses personnes s'intéressant à ces problèmes. Le fait de rendre obligatoire cette formation médicale continue, même assortie de conditions, représente un point d'interrogation. Monsieur le ministre, il vous appartient maintenant de nous répondre.

M. Jean-François MATTEI , ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Je vous remercie. Sur le dernier point, je vais vous répondre très rapidement : je pense que la formation médicale continue doit être obligatoire. Prendriez-vous l'avion si vous n'aviez pas la certitude que le pilote est régulièrement ré-entraîné, et que ses connaissances sont réellement mises à jour, à intervalles réguliers ? La réponse est évidemment négative. Vous ne prendriez pas l'avion si le pilote n'avait pas été re-qualifié depuis dix ou quinze ans. La médecine, chacun le sait, comme toutes les sciences tournant autour de la santé, évolue constamment. Il serait quand même étrange que l'on veuille encadrer certaines pratiques médicales et que, dans le même temps, l'on se désintéresse totalement de la formation médicale continue. Nous savons que la durée de vie des connaissances médicales n'est que de cinq ans, et que ces connaissances, si elles ne sont pas réactualisées fréquemment, deviennent totalement obsolètes. Nous avons donc besoin d'être certains que nos praticiens font les efforts nécessaires pour apprendre les nouvelles techniques, les nouveaux médicaments et les nouvelles thérapeutiques. En conséquence, la formation médicale continue, dans mon esprit, doit être obligatoire.

Néanmoins, nous n'avons pas voulu sanctionner financièrement et de manière vexatoire les professionnels de santé. Dans un premier temps, nous avons préféré conclure avec eux un contrat moral dans un premier temps, via l'existence de mesures incitatives. Si nous avons, dans le domaine conventionnel, à faire en sorte que la rémunération puisse régulièrement évoluer dans un continuum de carrières, en fonction des efforts faits pour se tenir au courant et progresser, si nous y ajoutons le fait que pour atteindre des responsabilités professionnelles il faut donner l'exemple et se former, je crois que les médecins seront sanctionnés positivement. Je pense de toute façon qu'ils sont très désireux de le faire. En outre, lorsque les textes seront publiés, nous disposerons alors, dès à présent, des trois conseils nationaux de formation médicale continue.

En ce qui concerne la structure elle-même, comme vous, je dispose d'une expérience de terrain : j'ai pendant longtemps appartenu au conseil scientifique, et au conseil d'administration de l'Observatoire régional de la santé de la région Provence Alpes Côte d'Azur. J'ai également travaillé pour le conseil régional dans ce domaine, j'ai été conseiller général, et j'ai été chargé, par le maire de Marseille, de m'occuper des problèmes de toxicomanie et de SIDA. Dans ce cadre, j'ai collaboré avec de nombreux acteurs intervenant dans le domaine du social. Je me suis rendu compte assez rapidement qu'il y avait, dans chaque département, dans chaque région, cinq ou six structures qui travaillaient séparément dans les lycées, les collèges, les plannings familiaux. Honnêtement, j'estime que le rapport d'autorité ne va pas de soi. Le préfet, ou le président de conseil régional, doit s'assure que tous les éléments du plan national de santé publique soient mis en oeuvre, thème par thème. Dès lors que les tâches sont réparties, chacun doit agir comme il l'entend, par ses propres moyens, et en tirer les bénéfices. Il n'est donc pas question de prendre l'argent, de le mettre dans un pot commun pour ensuite le redistribuer, ce qui ne serait pas une bonne pratique.

J'entends bien que les collectivités départementales sont impliquées. Prenons le cancer du sein, il est évidemment exclu que les départements se désintéressent d'une telle question, pour des raisons évidentes de santé publique. En outre, certaines collectivités locales s'impliquent dans des conseils de nutrition, dans des conseils de prévention de la toxicomanie, pour la contraception... En tant que ministre, depuis18 mois, j'ai rencontré nombre de difficultés de santé publique. Il s'agit évidemment de la canicule, de l'épidémie de SRAS, des épidémies de méningite dans plusieurs régions. Nous avons également dû faire face à des épidémies de légionellose et de listériose, apparues ici ou ailleurs. Or nous sommes en train d'organiser le système de veille sanitaire, y compris par le biais des urgences et des médecins. Il est clair que l'État doit s'assurer que les tâches nécessaires à garantir la santé publique sont bel et bien attribuées à tel ou tel acteur et, à défaut, il doit les prendre en charge lui-même. Il est évident que quelqu'un doit se charger de la coordination des actions de santé publique.

J'ai pris connaissance avec un grand intérêt, hier soir, de la déposition du ministre de l'intérieur à propos de la canicule, devant la mission d'information du Sénat. Qu'a-t-il dit ? Au-delà de la critique de la réforme de 1996, il a clairement dit que l'on avait écarté la tutelle hospitalière du centre compétent pour la confier aux agences régionales de l'hospitalisation (ARH). En clair, on a retiré la compétence sanitaire aux préfets, ce qu'il regrettait. Or le ministre de l'intérieur est aussi le ministre des libertés locales. Il est également celui qui garantit la sécurité, y compris la sécurité sanitaire, sur l'ensemble du territoire. A un moment donné, un chef d'orchestre devient nécessaire, sans que, pour autant, il s'immisce dans ce que fait tel ou tel ministre. Si la Haute Assemblée pense que la rédaction actuelle est trop dirigiste, trop étatiste, le ministre que je suis ne verrait aucun inconvénient à ce que le Parlement précise tel ou tel aspect. Je crois qu'il est capital que l'État garde la parfaite connaissance de ce qu'il faut faire, de ce qui est fait, de qui le fait, comment et à quel coût. Il faut enfin connaître les résultats visés, de façon à garantir l'égale santé de l'ensemble des citoyens sur l'ensemble du territoire.

Le danger serait qu'il y ait 26 régions, et 26 politiques de santé publiques différentes. Il faut de toute façon que l'État, in fine , puisse s'assurer que les politiques de santé publique qui ont été votées par le Parlement soient effectivement déclinées en région, sous l'autorité de l'État, mais également dans un système de délégation aux opérateurs permettant la répartition des tâches. Telle est la position du Gouvernement. Je tiens à dire également que ce système permet de réaliser des économies, donc d'éviter des redondances, et surtout des « blancs » : en effet, si l'on ne fait pas l'inventaire des tâches, nous courons le risque de les voir apparaître. Tel est donc le but de ce groupement régional de santé publique, qui, en outre, ne vient pas du tout empiéter sur le pouvoir des collectivités territoriales : par ailleurs, nous mettons le conseil régional face à une nouvelle compétence sanitaire, nous lui donnons également la possibilité de définir des priorités régionales de santé publique, dans la mesure où, évidemment, ces priorités ne sont pas les mêmes en PACA et dans le Nord-Pas-de-Calais. Il doit donc être possible de pouvoir mettre l'accent sur la lutte contre l'alcoolisme, par exemple. Cette compétence vient donc en sus du plan national. Je crois enfin que la formule adoptée est la plus souple possible, puisqu'elle permet de respecter l'identité de chacun, tout en faisant en sorte que chacun s'engage sur des objectifs communs.

Enfin, en ce qui concerne la psychothérapie, je souhaite vous dire plusieurs choses. Bernard Accoyer développe depuis plusieurs années une réflexion qui lui a été transmise par des associations de familles victimes de psychothérapie. Il a donc décidé de déposer un amendement en première lecture à l'Assemblée nationale. Cet amendement part d'une bonne intention, il est en effet légitime. Pour autant, il a été voté en l'espace de quelques minutes, et, au fond, l'amendement dit qu'il faut protéger les esprits fragiles de manipulateurs. Je crois que nous devons, avec beaucoup de modestie, reconnaître qu'il est pratiquement impossible de différencier les situations normales des situations pathologiques en matière de comportement. En clair, qui dit thérapie dit traitement, ce qui sous-tend l'idée de pathologie. Nous nous trouvons dès le départ devant une difficulté de définition : nous ne parlons en effet que de pathologie, mais comment définit-on une pathologie ? On peut aussi être pris en charge en-dehors d'une pathologie avérée et classique, je pense par exemple à des femmes ayant perdu un enfant et se trouvant alors en situation de détresse ; il peut également s'agir de situations de la vie courante, qui conduisent une personne à être désespérée, celle-ci ressentant alors le besoin de se confier, ou d'obtenir des conseils. Il se trouve que le psychiatre, le psychologue ou le psychothérapeute sont là pour répondre à cette attente. Il est donc difficile de dissocier les situations normales, et les situations où une pathologie est de mise.

La seconde difficulté est la suivante : il faut bien discerner le champ d'intervention des psychanalystes. En effet, dans un amalgame trop rapide, certains ont considéré qu'ils étaient concernés par cet amendement. Or l'analyse, par définition, n'est pas une thérapie, n'est pas une psychothérapie. Nous devons donc l'extraire du champ de l'amendement, d'autant que cette technique ne s'apprend pas à l'université, mais dans des cercles privés particulièrement nombreux. Les psychiatres, parce qu'ils sont médecins, bénéficient d'un a priori favorable. Des psychiatres très honnêtes vous disent qu'ils ne sont pas compétents en psychothérapie, celle-ci ne s'apprenant pas sur les bancs de l'université. Ils ne demandent donc pas mieux que d'obtenir un label favorable mais, à la limite, ils ne sont pas certains de pouvoir l'utiliser. La troisième difficulté concerne les psychologues, qui revendiquent une formation particulière, dans les facultés de sciences humaines et sociales. Ils sont formés, ils sont diplômés, ils peuvent prétendre à la psychothérapie, pour autant néanmoins qu'ils suivent une formation complémentaire théorique, clinique et pratique. Cela dit, comment pouvons-nous valider une telle formation ? En ce qui concerne les psychothérapeutes, il s'agit d'une population dont l'immense majorité, probablement, est compétente. Ils sont incontestablement utiles. Pour autant, leur formation est attestée par qui, par quoi, et sur quels critères ? Au final, il est très difficile de distinguer le psychothérapeute patenté et réel, et celui qui ne l'est pas. Nous voyons donc qu'il est difficile de « faire le tri » entre tous les acteurs.

Une autre difficulté concerne un éventuel encadrement de la fonction et de l'action des psychothérapeutes. Certains seraient en effet des « psycho-conseils », des « psycho-réflexos »... Nous aurions certes assuré un cadre, mais nous n'aurions pas la garantie que les personnes en difficulté n'aillent pas voir ces gens. Je ne suis donc pas certain que la démarche de protection soit assurément garantie d'effet. Par ailleurs, après avoir rencontré tous ces acteurs, j'ai également rencontré toutes les associations de victimes. Celles-ci ont eu une position qui m'est apparue beaucoup moins abrupte que je ne l'aurais pensé. Elles reconnaissent en effet la grande difficulté à qualifier, et elles réclament surtout la possibilité de pouvoir se retourner avec des preuves contre des personnes ayant subi des dommages après avoir suivi une psychothérapie. Or les associations sont tout à fait conscientes de ne disposer d'aucune de ces preuves, elles n'ont strictement rien à produire, elles ne peuvent même pas prouver que les consultations ont eu lieu.

Je souhaite donc vous résumer mon sentiment : à un moment donné, M. Bernard Accoyer a eu le mérite de poser le problème. Je ne verrais aucun inconvénient à ce qu'il soit ramené à une déclaration formelle, accompagnée d'un amendement nous conduisant, par exemple, à écarter les psychanalystes du champ de l'amendement. Il est souhaitable, pour conforter tous les professionnels de la psychothérapie, de promouvoir une information claire et transparente sur ce secteur d'activités. Pourquoi vous dis-je cela ? Nous sommes clairement dans un schéma très libre : les patients vont voir ces personnes librement, y retournent librement, et conseillent à leurs proches d'aller voir le même psychothérapeute librement. Nous ne sommes pas les seuls à nous poser des questions sur ce sujet, certains adoptent d'ailleurs une attitude beaucoup plus autoritaire. D'autres, les Italiens par exemple, sont parvenus à la conclusion qu'il fallait un encadrement mixte, qui aboutirait à une solution peu efficace. Les Anglais, enfin, ont accepté le désordre, tout en considérant que ce désordre devait être éclairé : la population est informée très exactement de ce qui se passe. Nous sommes sur une piste de réflexion très humble, dans la mesure où nous n'avons pas encore trouvé la rédaction adéquate pour l'amendement, nous donnant totale satisfaction. Nous aimerions beaucoup qu'il y ait une déclaration des psychothérapeutes quant à la prise en charge des patients, de telle sorte que des preuves existent. En définitive, les familles de victimes ne demandent pas beaucoup plus que cela, à savoir un engagement du psychothérapeute à prendre en charge la personne. Nous devons encore utiliser la période nous séparant de l'article 88, et, sur ce sujet très ouvert, je ne suis pas certain que nous pourrons, au Sénat, aboutir à une première lecture ferme et définitive. Probablement, nous devrons aboutir à une seconde rédaction, avant de voir comme elle est reçue par les uns et les autres.

M. le PRÉSIDENT - Monsieur le ministre, j'ai encore en mémoire vos propos concernant la formation continue des médecins, visant à dire qu'il n'était pas concevable de confier des soins à un médecin qui n'entrerait pas dans cette logique de formation continue. A partir du moment où l'on parle de thérapie, il me semble que la formation doit devenir nécessaire, dans la mesure où l'on va prendre en charge quelqu'un pour le traiter. Nous avons eu un tel débat à propos d'autres professions, à savoir les ostéopathes et les chiropracteurs. Je rappelle que nous avions réussi, après de longues discussions et de nombreuses auditions, à tirer quelques conclusions. Je pense donc que nous devrions traiter le problème qui nous occupe aujourd'hui, en miroir de cette autre question. Nous avons fait preuve d'un traitement prudent, sage, en décidant de définir par décret la formation que devaient suivre tel ou tel pour pouvoir se réclamer d'un titre : nous avions estimé que cela représentait une bonne garantie. Pour autant, est-ce que cela doit signifier que les autres ne se référeront pas à un autre label ? Evidemment, nous n'empêcherons jamais cela, quelles que soient les décisions que nous prendrons. Pour autant, nous devons définir clairement ceux qui ont le droit de prétendre à un titre de psychothérapeute. J'invite la commission à se demander si nous ne pouvons pas utiliser le parallélisme des formes, de telle sorte que ce dossier soit réglé de la même manière.

M. Jean-François MATTEI , ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Effectivement, le rapporteur de la Commission m'avait parlé de cette éventualité, je me suis donc penché de près sur les textes concernés. Il est dit que « l'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou la chiropraxie délivré par un établissement de formation agréé, par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret ».

Tout d'abord, la psychothérapie ne s'enseigne aujourd'hui que dans des institutions ou des écoles privées. En outre, comment allons-nous les agréer, et sur quels critères ? Comment allez-vous justifier que certaines de ces écoles, qui sont à la limite de la pratique sectaire sans que, pour autant, nous ayons des preuves, puissent être non reconnues ? Je rappelle que toutes ces questions sont renvoyées à un décret, et je ne crois pas non plus que les décrets relatifs à l'ostéopathie et à la chiropraxie soient encore parus. Je dois vous dire que je suis incapable, comme toutes les personnes que j'ai rencontrées, de définir les critères permettant d'agréer les 500 écoles ou instituts qui, moyennant de très fortes sommes, prétendent délivrer un diplôme de psychothérapeute. Engager le ministère de la santé à valider une école privée de psychothérapie, sachant la fragilité des critères d'appréciation, cela me semble être difficile : je ne dis pas que cela constitue une mauvaise idée, mais je suis très dubitatif quant à la faisabilité de cette logique. Le programme et la nature des épreuves pour délivrer de tels diplômes sont fixés par voie réglementaire : quel peut être le programme, quelles peuvent être les études et les épreuves dans le cadre d'un programme d'études pour la psychothérapie ? Franchement, je ne le sais pas. Si, d'aventure, vous parveniez à établir de telles données, je dois vous dire que vous nous faciliteriez grandement la tâche. Pour le moment, personnellement, je suis totalement incapable de vous répondre.

M. le PRÉSIDENT - Nous avions posé ces questions à l'époque au ministre de la santé. Nous lui avions demandé comment il allait agir pour reconnaître un programme, des conditions de passage d'un diplôme, et il nous avait répondu que cela ne concernait que lui-même, et non le Sénat. Effectivement, le dispositif existe, mais il est important de pouvoir vérifier les compétences de celui qui exerce. Vous posez maintenant la question au législateur, mais je crois, dans le cas présent, que le problème est d'ordre réglementaire. En effet, le législateur est là pour s'assurer que celui qui se dit thérapeute a effectivement les moyens de l'être, et les capacités d'exercer. Nous ne disons pas quelles sont les conditions dans lesquelles le pouvoir réglementaire doit s'assurer que l'enseignement est correctement donné. Or, en ce qui concerne les chiropracteurs et les ostéopathes, il n'y avait aucune école publique, aucun diplôme reconnu. Dans le cas présent, nous sommes exactement dans la même situation : si nous demandons le retrait de l'amendement Accoyer, nous resterions dans la situation existante, en nous contentant d'une grande déclaration d'intention qui n'apportera rien. Nous pouvons également agir comme nous l'avons fait par le passé avec les chiropracteurs et les ostéopathes en demandant au Gouvernement quand, d'un point de vue réglementaire, il sera capable d'agir.

M. Gilbert BARBIER - Je dois vous dire que je ne perçois pas tout à fait la différence entre prévention et dépistage. Je pense que la définition des acteurs et des actes posera toujours problème, notamment au niveau des pouvoirs publics et de l'assurance-maladie. Ceci posera des difficultés, je crois, dans l'organisation pratique de cette question. En outre, nous devons rappeler que les collectivités territoriales peuvent participer aux politiques de prévention dans le domaine de la santé publique. Pour autant, elles ne sont pas obligées de conduire de telles politiques. En outre, compte tenu du transfert de certaines politiques, actuellement en cours en ce qui concerne les départements, je crains que les collectivités territoriales aient plutôt tendance à se dégager de ce secteur, en considérant qu'il appartient à l'État de s'assurer de ce dossier. Quels seront les moyens donnés aux régions pour s'investit en matière de santé publique ?

Ma seconde question concerne les partenariats. Avez-vous volontairement oublié de parler du domaine économique concerné ? Je veux notamment parler de la lutte contre l'alcoolisme : vous savez comme moi que les défenseurs de la viticulture se sont insurgés contre l'alinéa 2 de l'article 13. Nous avions d'ailleurs retiré une formulation très précise pour la remplacer par un texte beaucoup plus flou. Nous pouvons également citer toutes les publicités qui vont à l'encontre des décisions que vous avez prises récemment : les laboratoires Boiron diffusent en effet de nombreux messages sur les bienfaits de l'homéopathie. Ne devons-nous pas mettre en place un partenariat avec ces acteurs, de façon à nouer un dialogue avec les partenaires économiques ?

Ma troisième question concerne la future création de l'École des hautes études en santé publique. Si j'ai bien compris, il s'agira uniquement de santé publique, mais les textes sont néanmoins très flous. Il est également curieux que les médecins ne puissent pas y avoir accès, seuls les fonctionnaires de l'État semblent pouvoir entrer dans cette école. Pour autant, il me semble que les médecins sont concernés par la santé publique, ils devraient donc clairement disposer d'un accès. Je dois vous dire que la terminologie utilisée m'étonne. Je me demande si nous devons créer un nouvel ENA, dédié spécifiquement à la santé publique. Pour être franc, une telle initiative m'inquiète quelque peu.

M. Paul BLANC - Je souhaite faire une première réflexion, à propos des psychiatres. Certains considèrent qu'il faudrait « psychiatriser » les masses laborieuses, et je n'en suis pas là. Cela dit, je m'étais beaucoup investi sur le texte relatif aux chiropracteurs et aux ostéopathes, et je crois qu'il existe une différence essentielle avec les psychiatres : les premiers travaillent sur une dimension physique, alors que les psys travaillent sur l'esprit. Je sais que les chiropracteurs prennent en compte la dimension psychique. Avec le Ministre de l'époque, nous avions d'ailleurs parlé de la question des études d'anatomie pour de tels métiers. Je crois, à mon avis, que nous aurons l'occasion d'en discuter très longuement, et je souhaite participer au débat. Simplement, je souhaite aujourd'hui poser une question au ministre, qui nous a dit que l'État devait garantir l'égalité de santé sur l'ensemble du territoire : ce dernier terme représente une grande préoccupation, dans la mesure où le nombre de médecins par habitant sur le territoire est pour le moins disparate. Je ne parle même pas de la question de l'éloignement des centres. Le texte de loi comportera-t-il des dispositions particulières pour régler ce problème ? Faudra-t-il aller jusqu'au numerus clausus modifié ?

M. Gilbert CHABROUX - J'ai suivi avec intérêt votre exposé. Je voudrais connaître votre cheminement par rapport à vos déclarations initiales, dans la mesure où, au début de la législature, vous nous aviez annoncé une grande loi de programmation à propos de la santé publique, comportant des investissements, des moyens financiers, des objectifs chiffrés... Ensuite, vous avez parlé de loi d'orientation et, maintenant, vous nous parlez d'un projet de loi sans moyens financiers. Il me semble que nous assistons là à un recul, et je souhaite savoir pourquoi vous êtes revenu en arrière par rapport à vos premières intentions. Clairement, c'est la place de la santé publique qui est en cause, et qui a régressé. Je voudrais également savoir pourquoi il n'y a pas eu de véritable débat public et de concertation préalable, en particulier vis-à-vis des usagers et des associations de malades. Dans ces conditions, quelle est la cohérence des « 100 objectifs » ? Ne videz-vous pas la loi de sa substance, en sachant que vous ne pourrez pas quantifier tous ces objectifs, qu'il sera très difficile d'évaluer les résultats que nous allons obtenir ?

Je relève en outre des faiblesses par rapport à la santé au travail. Vous avez dit qu'il s'agissait de l'une de vos priorités, et j'aimerais être rassuré sur ce sujet. Nous avions dit que les problèmes étaient particulièrement graves dans certains secteurs, et votre plan semble comporter bien peu de dispositions par rapport à cette question de la santé au travail. De même, sur la santé et l'environnement, je pense que beaucoup doit encore être fait.

Je souhaite enfin dire un mot à propos de la lutte méritoire que vous avez engagée face au tabac. Maintenant, où en est-on, étant donné qu'un moratoire est de mise suite à la victoire des débitants de tabac ? Le combat va-t-il se poursuivre ? Sommes-nous capables de conduire le même combat par rapport à l'alcoolisme ?

M. Gérard DÉRIOT - Monsieur le ministre, je souhaite dire un mot à propos des ostéopathes et des chiropracteurs : nous avons éprouvé de réelles difficultés, qui étaient d'autant plus ardues que notre assemblée comportait de nombreux défenseurs de ces deux professions. Je me souviens également que le ministre de l'époque reconnaissait qu'il serait très difficile de mettre en place quelque chose d'organisé, tout en estimant que cela représenterait néanmoins le moyen pour tous les rassembler et les orienter vers une formation unique. Pour vous, cela peut représenter un moyen pour rassembler le maximum de psychothérapeutes sous un système commun. En tant que législateurs, nous estimons que cela représente la meilleure solution.

En ce qui concerne la loi, vous mettez l'accent à juste raison sur la prévention, la santé publique étant avant tout constituée par la prévention. Malheureusement, nous avons souvent parlé de prévention, et nous nous sommes toujours rendu compte qu'il était difficile d'inscrire les politiques afférentes dans la durée. Très vite, nous assistons à un oubli, c'est bien pour cela qu'il faut faire régulièrement des opérations de relance à propos des politiques de prévention, de telle manière qu'elles soient efficaces. En effet, notre société veut des résultats immédiats, alors que la prévention agit sur le long terme. C'est pour cela, à mon avis, que nous devons pouvoir « relancer la machine » en permanence, de façon à ce que nous allions, en général, au bout des préventions.

En ce qui concerne les problèmes d'organisation sur le terrain, vous dites que le représentant de l'État en aura la charge. En tant que président de conseil général, je suis prêt à reconnaître et à accepter que quelqu'un décide, et il est normal que cela soit le représentant de l'État. Pour autant, je pense qu'il peut être bon de préciser qu'il s'agit bel et bien du préfet et non des directeurs d'ARH. Hier, ce que nous a dit le ministre de l'intérieur n'a fait que confirmer ce que nous ressentons depuis que les ARH sont créées : nous nous demandons réellement qui s'occupe de la santé, dans la mesure où les ARH ont pris le pas sur les préfets ou sur les préfets de régions. Ainsi, les directeurs d'hôpitaux ne connaissent plus que les ARH, et non les préfets. Le même constat peut être fait pour les DDASS et les DRASS. Plus généralement, je crois que nous sommes en train d'assister à un problème majeur dans toutes les régions : les ARH, qui sont d'excellents gestionnaires de fonds publics, ignorent totalement ce que sont les élus locaux. Or je ne crois pas que les problèmes de santé publique doivent dépendre d'une telle organisation, ils doivent au contraire dépendre des préfets. Il faut repréciser cela, et le dire très clairement. En outre, vous avez besoin de moyens : vous les aurez avec les préfets, mais je ne suis pas certain que vous les aurez avec les ARH.

M. Serge FRANCHIS - Je crois que ce projet de loi doit être reconnu comme un texte fondamental. J'estime néanmoins dommage qu'il soit élaboré dans un contexte de crise. Au cours d'une audition, il y a plusieurs mois, vous aviez reconnu que les connaissances en matière de santé mentale n'étaient pas suffisamment connues, nous en étions, peu ou prou, demeurés à l'époque de Laennec. Des efforts étaient donc tout à fait nécessaires en matière de recherche, il fallait les entreprendre. Vous aviez indiqué que le projet de loi relatif à la santé publique contiendrait des orientations à ce sujet. Certes, deux des 100 objectifs concernent la santé mentale, mais j'ai l'impression que ces objectifs sont insuffisants, tellement le retard est important, tant dans notre pays que dans le monde. Malheureusement, nombre de nos contemporains doivent gérer de tels problèmes.

M Alain GOURNAC - Pour ma part, je serais très inquiet si les préfets ne reprenaient pas la main sur les politiques de santé publique. Monsieur le ministre, je profite de votre présence parmi nous aujourd'hui pour vous dire que les ARH ne reconnaissent pas les élus, il est impossible de les rencontrer. Ils se moquent totalement des élus locaux, et même des élus nationaux. Par exemple, l'ARH refuse de rencontrer le sénateur que je suis : peut-être n'a-t-il pas le temps, peut-être a-t-il de très bonnes raisons de ne pas me recevoir. Pour autant, au minimum, nous avons le droit de bénéficier d'entretiens téléphoniques, d'obtenir des réponses de l'ARH. En outre, si un sénateur de la République souhaite le rencontrer pour évoquer plusieurs dossiers, il doit le recevoir. Je dois vous dire que, sur certains dossiers, il est plus facile d'en parler avec le ministre qu'avec l'ARH.

M. le PRÉSIDENT - Je confirme cette dernière information.

Monsieur le Ministre, permettez-moi d'évoquer avec vous le problème suivant. La création des Groupes régionaux de santé publique vise à rationaliser le financement et le co-financement des politiques de santé publique. Cette création se fait-elle dans des conditions convenables au regard de la clarification des comptes ? Comment seront organisés les flux financiers versés par la CNAMTS et, plus généralement, par l'assurance maladie ? Ne serait-il pas souhaitable de les faire figurer dans l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ?

M. Jean-Louis Lorrain, qui rapporte actuellement dans le cadre de la commission sur le projet de loi relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance, souhaite vous poser la question suivante : le projet de loi prévoit, dans le cadre d'un engagement pris en 1999, un plan national de prévention des risques pour la santé liés à l'environnement. Une commission nationale, installée le 17 septembre 2003, est chargée d'élaborer des propositions en vue de la fixation définitive du plan prévu en juin 2004 : pouvez-vous nous préciser l'état d'avancement de cette commission ? Le projet de loi fixe par ailleurs huit objectifs en matière de sécurité sanitaire et environnementale : comment s'articuleront-ils avec le plan ? Quels sont les moyens juridiques et pratiques nécessaires à leur mise en oeuvre ?

M. Jean-François MATTEI, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées - Tout d'abord, je veux dire combien je suis heureux de cet échange, et je devine combien seront intéressants les échanges dans l'hémicycle ; les sujets qui sont abordés sont des questions, effectivement, essentielles. Monsieur le Sénateur Barbier, vous avez évoqué quatre questions essentielles : vous vous êtes interrogé tout d'abord sur des questions financières. Cette loi fixe des priorités pour une durée de cinq années, et les financements, en l'état actuel des choses sont accordés par annuités sur le PLF, et sur le PLFSS. Vous avez vu, et vous l'avez d'ailleurs noté, que nous étions passés à un montant de PLF très important au niveau de la santé publique, puisque nous étions à 150 millions d'euros en 2002, et à 195 millions d'euros en 2004 : cela représente dès à présent un effort considérable de la part de l'État. S'ajouteront en outre les sommes provenant de l'augmentation du prix du tabac pour financer le Plan Cancer. Nous avons là une forte montée en puissance, par le truchement d'une vraie programmation, qui nous conduira à consacrer des sommes dont le montant s'élèvera jusqu'à 600 millions d'euros par an. Nous aboutirons, sur une durée de cinq années, à 1,6 milliard d'euros. N'oublions pas que cette somme est incluse dans la loi, le Plan Cancer représentant l'un des cinq thèmes prioritaires de la loi. J'ajoute également que, dans le cadre du FNPEIS de l'assurance maladie, environ 150 millions d'euros sont prévus, ils seront dévolus aux actions des GRSP. Pour le moment, il est inutile de déployer davantage d'argent, tant que la loi ne sera pas mise sur rail et que nous n'aurons pas encore pris de nouvelles mesures. Quoi qu'il en soit, il y aura bien les trois piliers principaux que sont le PLF, le FNPEIS et l'assurance maladie au travers du Plan Cancer. Viendront s'ajouter l'investissement des collectivités territoriales, qui participeront à cela. Dans l'enveloppe globale, la part prise par les collectivités territoriales doit donc être comptée.

L'une de vos interrogations concernait la différence entre prévention et dépistage. Je tiens tout d'abord à rappeler qu'il existe trois niveaux de prévention. Nous avons tout d'abord la prévention primaire, qui se situe en amont, elle évite que la maladie n'apparaisse. Par exemple, la lutte contre le tabagisme évite que le cancer du poumon n'apparaisse. Lorsque l'on suspend le traitement de la THS, l'on évite la possible survenue du cancer du sein. En clair, la prévention primaire est le comportement qui évite la survenue de risque.

La prévention secondaire est ce que nous appelons vulgairement le dépistage : il s'agit de déceler le plus tôt possible la maladie pour la traiter le plus précocement possible. La prévention tertiaire essaie de prévenir les complications et les conséquences d'une maladie évolutive. Nous avons donc trois niveaux, et il n'est pas toujours simple d'opérer une distinction. Le partage entre toutes les tâches a été défini : par exemple, certaines collectivités territoriales, en matière de cancer, ont été mise en charge de la compétence du dépistage.

Par ailleurs, je crois que vous ne devez pas comparer l'Ecole des hautes études en santé publique à l'ENA. Je suis entouré d'énarques, et j'en suis très content, mais je ne suis pas seulement entouré d'énarques ! Si cela était le cas, je ne suis pas certain que j'avancerais à un pas harmonieux et efficace. L'Ecole des hautes études en santé publique est bien le mariage entre formations universitaires et formations de l'Ecole de santé publique de Rennes, visant à conduire la formation initiale et continue pour toutes les personnes ayant besoin de progresser. En clair, nous voulons former des techniciens, des ingénieurs et des médecins, nous devons former les personnes dont nous avons besoin. Actuellement, ils ne peuvent pas être formés à Rennes pour deux raisons : cette école ne délivre pas de diplômes reconnus au niveau européen, et, en outre, cet école dispose d'axes pédagogiques ne permettant pas un apprentissage complet de tous les volets de la santé publique. Elle n'en enseigne que certains, sur lesquels elle demeurera spécialisée.

Quant aux acteurs industriels, vous avez raison de les évoquer, d'autant que ce sujet est difficile. En réalité, nous avons pensé que les industriels doivent intervenir au niveau de la conférence nationale, et au niveau des conférences régionales ; c'est là que se fait la concertation, c'est là que sont consultés tous ceux qui ont quelque chose à apporter, sans pour autant être des opérateurs. Je crois donc que les industriels sont des partenaires essentiels, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je me suis laissé convaincre sans grande difficulté par l'Assemblée nationale qu'il fallait rétablir les conférences régionales et la conférence nationale.

Monsieur le sénateur Blanc, vous montrez bien, dans votre question, que les soins et la santé publique sont deux points intimement liés, même si on les présente dans deux textes différents. Je souhaite vous dire trois choses à ce sujet : sans aucun doute, le Gouvernement proposera un amendement à propos de l'article 88, prenant date pour le processus de réflexion tendant à définir les modalités d'installation. Par ailleurs, je vous rappelle que j'ai déjà validé trois types d'incitation à l'installation dans les zones sous-médicalisées : il s'agit d'incitations de l'État, d'incitations de collectivités territoriales, et d'incitations conventionnelles. Enfin, le décret définissant très précisément les zones sous-médicalisées est paru il y a quelques jours. Il définit en effet clairement les zones sous-médicalisées qui pourraient bénéficier de tous les avantages d'incitation à l'installation, ceci pour tous les professionnels de santé. Nous avons donc véritablement une politique démographique en matière de santé, et force est de constater qu'elle n'existait pas auparavant.

Monsieur le sénateur, vous me questionnez sur les objectifs. Nous avons clairement défini cinq thématiques, sur lesquelles nous aurons cinq plans. Il s'agit du Plan Cancer, et, sur les autres points, nous aurons les plans nécessaires.

Vous m'avez questionné sur la concertation. Je dois vous dire que je suis un peu consterné, dans la mesure où la conception et l'écriture de cette loi sont le résultat d'un double processus : il y a eu une journée de concertation dans chacune des régions, j'ai moi-même participé à deux d'entre elles, comme des acteurs de la DGS et des membres de mon cabinet : ils ont animé chacun au moins une journée de concertation sur les objectifs de santé publique. Par ailleurs, lors de séances de travail, nous avons regroupé 140 spécialistes reconnus dans le domaine de la santé publique, et ce dans l'Europe toute entière. J'en profite d'ailleurs pour vous dire qu'aucun de ces 140 spécialistes, dont certains font partie de l'OMS, ne nous a alertés sur une surveillance particulière des risques liés aux extrêmes climatiques. J'aurai l'occasion de vous le rappeler dans le cadre de la commission d'enquête sur la canicule. Ainsi, nous avons consulté ces 140 spécialistes, ce qui nous a conduit à retenir 100 objectifs.

Pourquoi avons-nous retenu ce chiffre ? En fait, ces 100 objectifs ne sont pas exhaustifs, ils représentent des sujets parfaitement expertisés, et 60 % d'entre eux sont dès à présent quantifiés, ils permettent parfaitement de dire que, par exemple, nous voulons diminuer de 20 % le nombre de fumeurs d'âge adulte. Les objectifs sont donc quantifiés, et sont donc définis. En effet, je ne suis pas un spécialiste de santé publique, c'est bien pour cela que j'ai décidé de m'entourer de spécialistes qualifiés. Nous avons donc clairement fait appel à des spécialistes reconnus, sur la question du tabac comme sur celle du déremboursement d'ailleurs. Nous disposons ainsi de repères, notamment chiffrés, et nous pouvons voir, avec les avis des experts, si les politiques que nous menons sont efficaces.

Vous m'avez également questionné sur des problèmes de santé au travail. Nous avons installé, François Fillon, Roselyne Bachelot et moi-même, une commission d'information pour répondre à la préoccupation et à la commande du Président de la République à propos d'un plan Santé-Environnement. Cette commission a été mise en place il y a quelques mois, elle a remis aujourd'hui même son rapport préliminaire. Ce rapport reprend l'environnement général, mais aussi tous les risques particuliers, dont les risques liés à l'environnement de travail. Ce rapport a été discuté ce matin, sous ma présidence, au conseil national de sécurité sanitaire, avec l'ensemble des directeurs d'agences et d'administrations centrales qui ont en charge ce sujet. Le rapport définitif nous sera remis fin janvier. Comme pour le Plan Cancer, une commission interministérielle d'orientation se réunira, et un groupe restreint définira un plan, qui sera, in fine , validé. Nous aurons donc un plan Santé-Environnement, et un plan Sécurité au travail. Quoi qu'il en soit, nous disposons dès à présent d'un rapport qui nous permettra de construire les plans adéquats.

L'une de vos questions portait sur le tabac et sur l'alcool. Je vous redirai ce que je vous ai déjà dit pour le PLF et le PLFSS : nous avons affaire à deux drogues, qui viennent s'ajouter aux autres drogues psychotropes, quelles qu'elles soient. Pour autant, l'évolution du tabagisme et de l'alcoolisme vont dans des sens totalement différents, la consommation d'alcool est plutôt sur une pente bien descendante, alors que le tabagisme connaît une croissance considérable. Nous avons donc décidé qu'il fallait tout d'abord se saisir de l'exigence de la lutte contre le tabac, qui était en outre un élément essentiel du Plan Cancer. Je pense que nous avons là un bel ensemble, nous avons eu la convention de l'OMS, la directive européenne à propos de la publicité transfrontalière et nos propres actions en faveur d'une augmentation des prix. Je ne vais pas développer dès à présent tout l'argumentaire, mais j'ai le sentiment que notre action est considérable ; loin d'être terminée, elle se poursuit en jouant sur d'autres dimensions, en ne nous focalisant pas uniquement sur la question de l'augmentation du prix. Nous savons de toute façon que nous sommes maintenant devant la nécessité d'observer un palier, sauf à développer des effets pervers. Quoi qu'il en soit, en neuf mois, nous avons beaucoup plus augmenté le prix du tabac qu'en cinq années, il est donc temps de faire une évaluation et de compléter ce dispositif par d'autres actions.

Monsieur Dériot, je vous remercie tout d'abord pour votre éclairage sur l'ostéopathie, et pour vos réflexions sur les problèmes que nous pourrions rencontrer dans notre définition des psychothérapeutes, par rapport à celle qui a été décidée pour les ostéopathes. Pour ma part, je n'ai aucune recommandation à faire à la commission. Quoi qu'il en soit, je dois vous dire que je suis dans l'embarras, dans la mesure où je ne sais pas comment appréhender ce dossier. Pour autant, nous sommes en train de travailler à la rédaction d'un amendement, qui pourrait bien marquer la réalité du problème. De toute façon, notre souci à tous est de progresser.

En ce qui concerne l'ARH et les préfets, je dois vous dire que le problème de l'ARH est très difficile. En effet, l'ARH est un GIP mariant les CRAM et les DRASS : il s'agit de l'alliance d'un service de l'État et d'un service de l'assurance maladie. En conséquence, il est bien évident que nous ne pouvions mettre la CRAM sous l'autorité du préfet autrement que par le biais de la sécurité sanitaire et des précautions qui sont à prendre. C'est d'ailleurs bien le problème que nous rencontrons dans l'élaboration des ARS, que nous avons tous en tête, et que nous voulons créer. Dans un premier temps, l'ARH voudrait pouvoir marier l'hôpital et la médecine ambulatoire : or, parmi les hôpitaux, certains sont publics - donc gérés par l'État - d'autres privés - en relation plus directe avec l'assurance maladie. Quant à la médecine ambulatoire, elle dépend des CRAM. En conséquence, si nous confions la responsabilité de l'ARS à l'État, il est évident que la CNAM nous reproche d'étatiser la sécurité sociale, en la plaçant sous l'autorité du préfet. Si nous confions l'ARS à un responsable de la CNAM, les fonctionnaires de la fonction publique hospitalière disent alors clairement qu'ils ne veulent pas être sous les ordres de quelqu'un issu d'un partenariat syndical à la CNAM. Il est donc presque miraculeux que les ARH fonctionnent relativement bien, nous avons tout de même une bonne amélioration de notre paysage hospitalier. En outre, les ARH ont réussi à faire en sorte que le secteur public et le secteur privé se rapprochent, se complètent parfois et se marient de temps en temps. Naturellement, les choses ne sont pas parfaites, et, avec le plan Hôpital 2007, nous devons entrer dans le deuxième âge des ARH. Cela dit, si l'on veut bien considérer que le champ de la santé est composé de trois parties (la santé publique, dont fait partie la sécurité sanitaire, les hôpitaux publics et privés et l'ambulatoire), si l'on veut bien considérer également qu'il faut rassembler ces trois parties dans une seule structure, nous sommes alors obligés soit d'abandonner les prérogatives de l'État en matière de sécurité sanitaire, soit de mettre la main sur l'ambulatoire et le libéral : ces deux possibilités, de toute façon, sont impensables. Il va donc nous falloir trouver un processus original. C'est la raison pour laquelle la construction des ARS est un peu difficile, et nous devrons, à tout le moins, avoir recours à deux étapes pour cela.

La première permettra de rapprocher l'hôpital et la médecine ambulatoire ; nous verrons, avec le temps, s'il faut ajouter dans les ARS les questions relatives à la santé publique et à la sécurité sanitaire. Je pense de toute façon que l'État ne peut pas abandonner les champs de la santé publique et de la sécurité sanitaire ; nous devons peut-être mieux travailler un autre point, sur lequel je me suis longuement entretenu ce matin même avec le ministre de l'intérieur : le préfet n'ayant pas été informé suffisamment de ce qui se passait dans les services d'urgences et dans les maisons de retraite, il n'a pas pu prendre les décisions nécessaires. Au final, je crois que nous sommes au milieu du gué concernant les ARH : nous devons trouver la meilleure solution nous permettant de marier le libéral et l'État, dans une seule et même structure, en confiant la responsabilité à une personne étant un Janus aux deux visages : je veux dire par là que son profil doit à la fois être libéral, et étatique. Pour autant, cette personne ne doit pas être le préfet, nos partenaires n'accepteraient pas de se trouver, dans leurs missions de proximité, sous son autorité.

L'un de vos questionnements était relatif à la santé mentale. Manifestement, j'ai une part de responsabilité involontaire dans l'amendement Accoyer. En effet, en ce qui concerne la santé mentale, je me suis engagé, et j'ai demandé un rapport à trois psychiatres. J'ai reçu ce rapport, avec une certaine méfiance. Je l'ai donc diffusé à d'autres psychiatres, y compris universitaires, et tous m'ont dit qu'il contenait d'excellentes choses, qu'il faudrait retenir. M. Bernard Accoyer, étant intéressé par cette question, a consulté l'un des trois experts, pour essayer de dégager une porte de sortie sur la psychothérapie : le lien est donc bien là. J'ai aujourd'hui entre les mains le rapport sur la santé mentale, mon cabinet l'a pris à bras-le-corps. J'espère que nous pourrons vous présenter un plan Santé mentale au printemps. Nous pourrons ensuite lancer une concertation pour une mise en oeuvre dans le cadre du prochain PLFSS. Je le redis clairement : la santé mentale est une préoccupation majeure, nous devons donc avoir une réflexion sur le plan de la santé mentale, et sur le plan de la santé publique.

M. le Président a bien montré que, lorsque l'on parlait d'objectifs sanitaires, l'on parlait toujours d'ONDAM. En l'occurrence, nous parlons d'objectifs de santé publique, ils s'apprécient sans doute de manière différente. Nous verrons comment nous pouvons les chiffrer à l'intérieur du projet de loi de finances du ministère de la santé.

Je voudrais vous redire que la santé a besoin de ses deux jambes pour marcher : il s'agit de la santé publique et du soin. Ces deux jambes sont reliées en permanence. Prenons l'exemple du cancer du sein : lorsque nous faisons du dépistage, nous sommes dans une approche « populationnelle », c'est une approche de santé publique. Dès lors que nous avons dépisté un cancer du sein, nous passons alors dans la filière de soins. Vous avez clairement un continuum, la démarche de santé publique vous conduisant à la démarche curative. Inversement, lorsque nous faisons le dépistage du cancer du sein chez une femme, et que nous nous apercevons que ce cancer est directement lié à un gène de prédisposition du cancer du sein, nous faisons ensuite des dépistages dans sa famille : nous passons alors de la démarche curative à la démarche de santé publique intrafamiliale. Nous voyons donc bien que les deux démarches sont intimement liées. Présentant ce projet de loi avec beaucoup d'enthousiasme devant la Haute Assemblée, j'ai vraiment le sentiment que nous posons un pilier fondateur qui faisait défaut à notre système de santé.

M. le PRÉSIDENT - Monsieur le ministre, je vous remercie vivement pour le temps que vous nous avez consacré.

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