Article 4 ter (nouveau)
(art. L. 2233-27 du code général des collectivités territoriales)
Affectation des taxes de séjour

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur proposition de M. Michel Bouvard avec l'avis favorable de sa commission des Lois mais après un avis défavorable du Gouvernement, a pour objet de modifier l'article L. 2333-27 du code général des collectivités territoriales afin de préciser l'affectation des taxes de séjour.

1. Le droit en vigueur

Le développement du tourisme exige des communes des moyens financiers considérables qu'il peut sembler inéquitable de faire supporter, par le biais des impôts locaux, à la seule population permanente, puisque les touristes ne sont pas soumis à la taxe d'habitation.

Les taxes de séjour (taxe de séjour et taxe de séjour forfaitaire) permettent ainsi aux collectivités locales, en complément du produit de l'imposition locale, de disposer de ressources destinées à améliorer les conditions d'accueil des touristes.

Elles peuvent être perçues par les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités locales. Le département a la faculté d'instituer une taxe additionnelle de 10 % à la taxe de séjour ou à la taxe de séjour forfaitaire perçue par les communes ainsi que par les établissements publics de coopération intercommunale.

Selon l'inventaire général des impôts locaux établi par la direction générale des collectivités locales, en 2000, les taxes de séjour ont été perçues par 1.918 communes et leur produit total a été de 106,84 millions d'euros, dont 73,98 millions d'euros pour la taxe perçue à la nuitée et 32,86 millions d'euros pour la taxe forfaitaire. Onze départements ont par ailleurs perçu la taxe additionnelle, pour un produit total de 2,13 millions d'euros.

Le secrétariat d'Etat au tourisme a conduit en 2001, avec le ministère de l'intérieur, une réflexion sur la modernisation du régime des taxes de séjour dans le cadre d'une mission conjointe des inspections générales du tourisme et de l'administration. De plus, un rapport d'information de M. Michel Bouvard au nom de la commission des Finances de l'Assemblée nationale a conduit le Parlement à apporter des modifications à ce régime à l'occasion de l'examen de la loi de finances initiale pour 2002.

Les articles 101 à 107 de la loi de finances pour 2002 ont ainsi modifié le régime des taxes de séjour sur plusieurs points, en particulier les tarifs, les exemptions et les modalités de perception de ces taxes. Ces nouveaux tarifs, fixés par le décret n° 2002-1549 du 24 décembre 2002, ont été appliqués à compter du 1 er janvier 2003.

Toutefois, les dispositions de la loi de finances pour 2002 n'ont pas, de l'avis général des partenaires concernés, associations d'élus et fédérations professionnelles, épuisé la question de la modernisation du régime des taxes de séjour.

2. Le dispositif proposé

Le dispositif proposé par cet article consiste à restreindre les possibilités d'utilisation des taxes de séjour en indiquant qu'elles doivent être affectées à des dépenses destinées à favoriser l'accueil et l'information des touristes ainsi que l'animation et la promotion touristiques.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 2333-27 prévoit qu'en l'absence d'office du tourisme, le produit de la taxe est affecté à des dépenses destinées à favoriser la fréquentation touristique de la commune. Peuvent ainsi être pris en compte, notamment :

- en dépenses de fonctionnement, le soutien financier à des associations de tourisme, les éditions, publicité et propagande diverses, les frais de gestion des bureaux de renseignements et les subventions au syndicat d'initiative, les financements de fêtes publiques, l'adhésion à des organismes locaux de tourisme, les recrutements supplémentaires de personnel pour la saison touristique, l'entretien des plages ou des installations à vocation touristique, le fonctionnement du service de police des plages, ou du service médical et de secours en montagne ;

- en dépenses d'équipement, les dépenses d'embellissement de la commune, les travaux d'assainissement, les travaux thermaux, la création ou l'agrandissement d'une station d'épuration, l'aménagement des voies de desserte des communes, la construction de parcs de stationnement supplémentaires.

Lorsqu'il existe un office du tourisme ayant le statut d'un établissement public industriel et commercial (qui serait dénommé office de tourisme en application de l'article 4 du présent projet de loi), le produit de la taxe de séjour doit lui être affecté.

3. La position de la commission des Lois

Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale avait déjà été adopté, contre l'avis du Sénat, dans le cadre de la loi de finances pour 2002. Il avait toutefois été censuré par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, au motif qu'il constituait un « cavalier budgétaire ».

Lors de l'examen de ce texte en première lecture, notre collègue M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des Finances, s'était opposé à cette restriction supplémentaire de l'autonomie financière des collectivités territoriales, contraire à la règle générale de la non affectation des impôts. Il avait également exprimé la crainte que les redevables d'autres taxes ne fussent tentés « de demander à leur tour à la collectivité de figer dans son budget la contrepartie financière précise de leur contribution . » Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, s'en était d'ailleurs remis, au nom du précédent Gouvernement, à la sagesse des assemblées.

Ces objections revêtent d'autant plus de poids que le premier alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, issu de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, prévoit que : « Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi . »

Comme le soulignait M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, lors de l'examen en première lecture par l'Assemblée nationale du présent projet de loi, il n'est pas souhaitable de retreindre la liberté de gestion des collectivités territoriales.

En tout état de cause, la réforme des taxes de séjour mérite d'être examinée dans un cadre spécifique, après une étude plus approfondie des conclusions du groupe de travail constitué à cet effet par le ministère délégué au tourisme.

Votre commission vous soumet en conséquence un amendement de suppression de l'article 4 ter .

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