CHAPITRE III
MESURES DE MODERNISATION
DE L'ADMINISTRATION

Article 38
Harmonisation du cadre législatif
des groupements d'intérêt public

Les groupements d'intérêt public (GIP) ont été créés en grand nombre à partir de 1982, à l'origine dans le secteur de la recherche, pour servir de cadre à la coopération entre personnes publiques et privées.

Le présent article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à donner par ordonnance un cadre législatif général aux GIP.

L'ordonnance prise sur le fondement de l'habilitation prévue par cet article devra être publiée dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi.

1. Une catégorie de personnes publiques originale à la cohérence incertaine

A partir de la fin des années 1960, se sont développés les groupements d'intérêt économique (GIE), créés par l'ordonnance n° 67-821 du 23 septembre 1967. La structure du GIE, entre la société et l'association, a pour objet de permettre aux administrations de coopérer entre elles ou avec des organismes de droit privé. Créés par convention, avec ou sans capital, les GIE ont proliféré dans le domaine de la recherche.

Alors que leur but est de « faciliter ou de développer l'activité économique de leurs membres, d'améliorer ou d'accroître les résultats de cette activité » (article L. 251-1 du code de commerce), les GIE ont été utilisés pour gérer de véritables missions de service public administratif.

Les réflexions suscitées par cette évolution et les besoins spécifiques des organismes de recherche ont amené à la création d'une forme originale de personne morale , le groupement d'intérêt public, par l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

L'objet initial de cette structure était de permettre la mise en commun de moyens relevant de laboratoires publics et privés pour réaliser des programmes d'intérêt général. Le GIP apparaît ainsi comme une nouvelle catégorie de personnes morales de droit public créées par convention pour éviter les rigidités de la formule de l'établissement public.

Dès juin 1996, le Conseil d'Etat relevait, dans une étude qui leur était consacrée 128 ( * ) , le succès des groupements d'intérêt public, dont près de 50 avaient alors été créés dans le domaine de la recherche et « un engouement de la part du législateur, qui a étendu la formule à de très nombreux domaines, tout en modifiant, plus ou moins profondément, les caractéristiques de l'institution ».

Aux termes de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982, repris aux articles L. 341-1 à L. 341-4 du code de la recherche depuis l'ordonnance n° 004-545 du 11 juin 2004 relative à la partie législative de ce code, le GIP devait remplir six critères :

- une durée indéterminée ;

- une majorité de participants publics ;

- l'absence de réalisation et de partage de bénéfice ;

- la nomination, par le conseil d'administration, d'un directeur qui assure sous l'autorité du conseil et de son président, le fonctionnement du groupement ;

- un contrôle de l'Etat, par un commissaire du Gouvernement nommé auprès du groupement et par le contrôle de la Cour des comptes ;

- un mode de création original, par une concertation entre les membres, qui détermine les modalités de participation des membres, les conditions dans lesquelles ils sont tenus des dettes du groupement et les conditions dans lesquelles ils mettent à sa disposition des personnels qu'ils rémunèrent.

Le décret n° 83-204 du 15 mars 1983 a précisé que le groupement d'intérêt public était doté de la personnalité morale dès la publication au journal officiel de l'approbation de sa convention constitutive par l'Etat.

Dans son étude de 1996, le Conseil d'Etat relève d'abord que les GIP créés dans le domaine de la recherche et du développement technologique l'ont été pour une durée moyenne de cinq ans et ont associé, en moyenne, sept partenaires, tels que le CNRS, l'INRA, l'INRIA, le CNES, des établissements universitaires, des écoles d'ingénieurs et l'Etat, ainsi que des sociétés ou associations. Mais il indique également que cette structure innovante a été utilisée dans d'autres secteurs, « au prix de transformations du modèle initial ».

Il dénombrait alors vingt six textes législatifs instaurant autant de catégories de GIP, dans des secteurs très divers.

La formule du groupement d'intérêt public, qui permettait de concilier la souplesse de fonctionnement avec les garanties de l'intérêt général et du service public , s'est multipliée, débordant progressivement son champ initial.

Le législateur a ainsi permis la création de GIP dans les domaines de l'enseignement supérieur (loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur) ; de la montagne (loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne) ; de la formation et de l'orientation professionnelle (loi du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail), ou encore, comme le propose le présent projet de loi à son article 3, pour le développement de l'administration électronique.

Le Conseil d'Etat estime, par conséquent, que « des groupements d'intérêt public peuvent se constituer dans presque tous les domaines de l'action administrative, à l'exception sans doute de la sécurité et de la défense ».

Les GIP apparaissent aujourd'hui comme une catégorie protéiforme , notamment quant à leur durée et à leur objet.

On distingue ainsi les groupements transitoires, disparaissant au terme prévu par la convention constitutive, les groupements provisoires renouvelés, à défaut d'évolution du programme ou de structure permanente adéquate, et les groupements pérennes, dès leur création. La plupart des lois prévoyant la création de nouvelles catégories de GIP renvoient, pour leurs règles de fonctionnement, aux dispositions de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982.

Les GIP ont perdu leur cohérence initiale et ne satisfont plus les critères de référence énoncés par ce texte, comme l'illustre le groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire, créé par l'article 9 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Cette structure ne semble avoir avec les GIP originaux qu'un rattachement nominal, puisque lui est confiée une mission permanente de service public, sans mise en commun de moyens et pour une durée indéterminée.

Issues de la sédimentation de dispositions législatives recourant à cette structure pour sa souplesse, les règles encadrant les GIP sont aujourd'hui dépourvues d'unité et les incertitudes qui en résultent doivent être levées.

2. La nécessité d'un cadre juridique clair et uniforme des groupements d'intérêt public

Dans son étude de 1996, le Conseil d'Etat rappelle que chaque structure juridique correspond à un objectif défini : le groupement d'intérêt public vise le développement économique de ses membres, l'association tend à des activités ayant un but autre que le partage de bénéfices et la société commerciale a pour objet la réalisation de bénéfices.

Outre la nécessité de fixer un cadre législatif général aux GIP pour leur donner davantage de cohérence, la définition d'un statut législatif des groupements d'intérêt public offre l'occasion de préciser certaines questions qui sont aujourd'hui source d'insécurité.

- Les incertitudes quant à la nature publique ou privée des groupements d'intérêt public

À maints égards les GIP peuvent être considérés comme des personnes morales de droit public. Le Conseil d'Etat, dans son avis du 15 octobre 1985, va jusqu'à en déduire qu'ils sont assujettis aux mêmes règles que les établissements publics proprement dits.

Néanmoins, dans sa décision du 14 février 2000 GIP et Verdier, le tribunal des conflits a estimé, en se fondant sur les travaux préparatoire de la loi du 15 juillet 1982, que le législateur avait entendu faire des groupements d'intérêt public « des personnes publiques soumises à un régime spécifique » qui se caractérise « par une absence de soumission de plein droit de ces groupements aux lois et règlements régissant les établissements publics ».

Les avantages recherchés lors de la création des GIP pourraient en effet disparaître s'ils devaient être assimilés à des établissements publics. Mais la nature publique des GIP ne leur enlève pas pour autant leur attractivité, qui tient davantage à leur possibilité de faire appel au droit privé dans leur activité. Il est même concevable, dans un objectif de cohérence, de distinguer des GIP à caractère administratif, qui ne rassembleraient que des personnes morales de droit public, et des GIP à caractère industriel et commercial, associant des personnes privées.

- Le renforcement de la sécurité juridique des GIP

La sécurité juridique du GIP serait renforcée par une définition plus précise du contenu de la convention constitutive , qui se concentrerait sur les règles d'organisation et de fonctionnement du GIP.

Le statut législatif des groupements pourrait également fixer un délai maximal d'approbation de la convention par l'autorité administrative. Cette approbation, qui confère au groupement la personnalité morale, ne peut intervenir après un délai raisonnable sans amoindrir l'intérêt de la structure du GIP, qui tient largement à sa souplesse.

La publicité systématique de la convention approuvée au Journal officiel garantirait par ailleurs l'opposabilité aux tiers de la création d'un GIP.

- Préciser le régime juridique des activités des GIP

Les règles du code des marchés publics ne sont plus applicables aux GIP depuis la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF).

L'article 8 de cette loi soumet en effet les GIP aux règles de publicité et de mise en concurrence définie par l'article 9 de la loi no 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence.

On peut s'interroger sur la nécessité d'appliquer aux GIP les règles du nouveau code des marchés publics, ce qui conduirait sans doute à rigidifier les procédures. Il pourrait s'agir d'une faculté et, le cas échéant, d'une obligation pour les GIP exclusivement composés de personnes publiques.

Le régime de la comptabilité applicable à un groupement, comme celui des biens qu'il possède, doivent également pouvoir être déterminés aisément, grâce à des critères simples et précis.

- La définition du statut du personnel des GIP

Un GIP peut employer des catégories de personnel très différentes : un personnel propre, des fonctionnaires détachés ou un personnel de droit privé mis à disposition.

Le statut législatif devrait en particulier répondre à la question du statut de droit public ou de droit privé du personnel directement recruté par le GIP. En effet, le personnel mis à disposition par les personnes constituant le GIP doit conserver son statut juridique, public pour les personnels issus des personnes publiques, privé pour les personnels venant des organismes de droit privé et des entreprises.

Le tribunal des conflits, amené à se prononcer à plusieurs reprises sur la situation du personnel des GIP, a jugé en 1998 129 ( * ) que « les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public quel que soit leur emploi ». Ces décisions ne faisaient que reprendre la jurisprudence Berkani du 25 mars 1996, selon laquelle les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'une personne publique gérant un service public à caractère administratif sont soumis à un régime de droit public. La juridiction administrative peut ainsi procéder à des requalifications du personnel des GIP du droit privé vers le régime de droit public.

Dans ses jurisprudences postérieures, le tribunal des conflits a confirmé cette analyse 130 ( * ) . A l'inverse, lorsque le GIP gère un service public à caractère industriel et commercial, son personnel propre est régi par le code du travail. Dans cette hypothèse, peut se poser la question de la durée des contrats de travail par rapport à la durée de vie du GIP.

L'ordonnance devra par conséquent préserver la souplesse structurelle qui fait le prix de GIP tout en harmonisant et précisant leurs règles de constitution, de fonctionnement et de contrôle , pour corriger les incertitudes suscitées par un foisonnement des règles.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 38 sans modification.

Article 39
Possibilité d'audience à huis clos dans les juridictions administratives
et de recours aux moyens de communication audiovisuels
dans les juridictions administratives d'outre-mer

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code de justice administrative afin de permettre, d'une part, la tenue de l'audience hors la présence du public dans certains cas et, d'autre part, le recours, le cas échéant, à un moyen de communication audiovisuelle pour faire participer les magistrats à une audience outre-mer.

Le Gouvernement disposerait d'un délai de six mois pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article.

1. Les audiences à huis clos devant le juge administratif : une faculté respectueuse des droits fondamentaux

Cet article a d'abord pour objet d'habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code de justice administrative afin de permettre la tenue de l'audience hors la présence du public pour trois motifs distincts :

- la sauvegarde de l'ordre public ;

- le respect de l'intimité des personnes ;

- le respect de secrets protégés par la loi.

L'article L. 6 du code de la justice administrative dispose que « les débats ont lieu en audience publique ». Au regard des dispositions applicables à la publicité des audiences devant les autres juridictions, l'absence totale d'exception devant le juge administratif paraît appeler une adaptation, dans le respect des droits fondamentaux.

Ainsi, s'agissant des juridictions civiles, le législateur a reconnu, dès la loi du 9 juillet 1975 portant diverses dispositions relatives à la réforme de la procédure civile, la possibilité pour le juge de décider que les débats aient lieu en chambre du conseil, c'est-à-dire hors la présence du public, « s'il doit résulter de leur publicité une atteinte à l'intimité de la vie privée, ou si toutes les parties le demandent, ou s'il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice » 131 ( * ) .

L'article 435 du code de procédure civile prévoit la possibilité d'une audience à huis clos dans des termes semblables. Le code de procédure pénale autorise également des exceptions précises à la publicité des débats : à la cour d'assises en cas de danger « pour l'ordre ou les moeurs » (article 306) et au tribunal correctionnel « pour l'ordre, la sérénité des débats, la dignité de la personne ou les intérêts d'un tiers 132 ( * ) » (article 400). Enfin, dans les juridictions ayant à connaître d'infractions militaires, l'article 698-9 du même code permet des débats à huis clos lorsque « la publicité risque d'entraîner la divulgation d'un secret de la défense nationale ».

L'ordonnance devra respecter les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable, dont l'habilitation reprend d'ailleurs les principaux critères.

Aux termes de cet article, « le jugement doit être rendu publiquement » mais l'audience peut se dérouler hors la présence de la presse et du public « pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ».

La possibilité de tenir des audiences hors la présence du public dans les juridictions administratives devrait en fait rendre leur fonctionnement plus respectueux encore des droits fondamentaux de la personne.

En effet, s'agissant de la sauvegarde de l'ordre public, le recours au huis clos peut assurer, le cas échéant, les conditions d'une justice plus sereine , alors que l'audience publique peut dans certains cas susciter un trouble à l'ordre public (décisions d'internement psychiatrique...).

Le motif de respect de l'intimité des personnes trouvera directement à s'appliquer au sujet de contentieux concernant, par exemple, les refus d'agrément en matière d'adoption.

Enfin, le critère des secrets protégés par la loi vise en particulier le secret médical et le secret fiscal. Dans de nombreux cas, le huis clos pourra ainsi faciliter la libre expression des parties.

2. L'utilisation de moyens de visioconférence pour répondre aux nécessités des juridictions administratives d'outre-mer

Le code de justice administrative prévoit que les tribunaux administratifs de Basse-Terre (Guadeloupe), Cayenne (Guyane), Fort-de-France (Martinique) et Saint-Pierre (Saint-Pierre-et-Miquelon) ont un même président et peuvent avoir des membres communs (article R-223-1).

Les fonctions de commissaire du Gouvernement auprès de ces tribunaux comme auprès des tribunaux administratifs de Mamoudzou (Mayotte) et Saint-Denis (la Réunion) sont assurées par le ou les mêmes magistrats (article R-223-2). Enfin, le président du nouveau tribunal administratif de Mata-Utu (Wallis et Futuna) est le même que celui du tribunal de Nouvelle-Calédonie.

Ces dispositions adaptées au volume du contentieux administratif dans les départements et collectivités d'outre-mer, contraignent les magistrats concernés à des déplacements sur des distances importantes avec des délais qui peuvent ne pas toujours respecter ceux qu'impose la loi, notamment pour les procédures d'urgence. Ainsi, le juge des référés doit se prononcer dans un délai de quarante-huit heures dans le cadre de la procédure de « référé liberté » définie à l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

Il semble donc pertinent, comme le propose le 2° de l'article 39 du présent projet de loi, d'habiliter le Gouvernement à modifier le code de justice administrative pour permettre aux membres des formations de jugement et au commissaire du gouvernement affectés dans au moins deux juridictions, de siéger ou de prononcer leurs conclusions au moyen d'une visioconférence, lorsque leur venue à l'audience n'est pas matériellement possible dans les délais exigés par la loi ou par la nature de l'affaire.

Le recours à un moyen de communication audiovisuelle pour permettre la tenue d'une audience dans les juridictions d'outre-mer a déjà été prévu par l'article premier de l'ordonnance du 20 août 1998 relative à l'organisation juridictionnelle dans les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour le remplacement du président du tribunal supérieur d'appel de cette dernière (article L. 952-7 du code de l'organisation judiciaire).

L'utilisation de la visioconférence est par ailleurs prévue par l'article 706-71 du code de procédure pénale notamment pour l'audition ou l'interrogatoire d'une personne. Elle a été étendue à l'audition à distance des témoins dans le cadre de l'entraide judiciaire internationale, par l'article 17 de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Votre commission des Lois vous invite à adopter un amendement tendant à remplacer l'habilitation prévue à cet article par des dispositions d'application directe .

Deux nouveaux articles seront ainsi insérés dans le code de justice administrative afin de permettre, d'une part, les audiences à huis clos et, d'autre part, le recours à des moyens de communication audiovisuelle.

Votre commission des lois vous propose d'adopter l'article 39 ainsi modifié.

Article 40
(art. L. 511-1 du code du travail)
Suppression de la révision annuelle du taux de compétence
en dernier ressort des conseils de prud'hommes

Cet article tend à simplifier le fonctionnement des conseils de prud'hommes en supprimant la révision annuelle du taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes .

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification en première lecture.

En effet, l'avant-dernier alinéa de l'actuel article L. 511-1 du code du travail dispose que « le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes est fixé par décret ; il est révisé annuellement ».

Cette disposition avait été introduite dans le code du travail par la loi n° 82-372 du 6 mai 1982 portant modification de certaines dispositions du titre premier du livre V du code du travail relatives aux conseils de prud'hommes dans le but de pouvoir adapter chaque année ce taux de compétence en dernier ressort à l'évolution des salaires.

Alors qu'en principe un décret devait préciser les critères fondant cette révision annuelle, celui-ci n'a jamais été pris et l'administration fixe chaque année le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes en fonction de la moyenne entre l'évolution du SMIC et le taux de salaire ouvrier de l'année précédente.

Si la révision annuelle de ce taux paraissait souhaitable en ce qu'elle devait permettre de le faire évoluer au regard de la situation salariale , elle semble toutefois créer également des difficultés importantes, en particulier pour les justiciables .

Tout d'abord, cette révision annuelle engendre régulièrement une variation d'une des conditions essentielles pour l'exercice de la voie d'appel .

Ensuite, elle crée une différenciation entre le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes et le taux, fixe et unique, établi pour l'ensemble des autres juridictions d'exception du premier degré (tribunal d'instance, tribunal de commerce, tribunal paritaire des baux ruraux, et tribunaux des affaires sociales). Le gouvernement craint que, dans le contexte économique actuel, la disparité entre ces deux taux soit sans cesse croissante.

Le taux de compétence de dernier ressort des conseils de prud'hommes est fixé pour 2004 à 3.980 euros par l'article 2 du décret n° 2003-1287 du 26 décembre 2003. Le taux de compétence de dernier ressort se situe à 3.800 euros pour les autres juridictions d'exception.

Le présent article propose donc de substituer un taux fixe déterminé par décret à l'actuel taux indexé de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes .

Cette suppression de la révision annuelle aurait, d'après l'exposé des motifs et les informations fournies à votre rapporteur, été acceptée par les syndicats au sein du groupe de travail mis en place dans le cadre du Conseil supérieur de la prud'homie et le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité aurait évoqué le principe d'une révision quinquennale. Toutefois, cette possibilité n'est pas forcément souhaitable dans la mesure où elle créerait de nouveau un système particulier pour les conseils des prud'hommes par rapport aux autres juridictions d'exception alors que certaines d'entre elles traitent aussi de contentieux indexés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 40 sans modification .

Article 41
Simplification des règles de gestion
des établissements publics à caractère scientifique et technologique

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions permettant aux établissements publics à caractère scientifique et technologique de déroger au régime budgétaire et comptable leur étant applicable et de présenter leur comptabilité selon les usages du commerce.

Cette disposition fera l'objet d'un examen par délégation par la commission des Finances 133 ( * ) .

Article 42
Harmonisation des règles relatives aux enquêtes publiques

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à simplifier et harmoniser par ordonnance les règles relatives aux enquêtes publiques.

Le Gouvernement disposera d'un délai de douze mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de cet article.

Ces enquêtes, prévues par des textes parfois anciens, tels que la loi du 26 mars 1897 concernant les clôtures et barrières de chemins de fer et la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, permettent d'informer le public sur les dossiers relatifs à des travaux, aménagements ou ouvrages qui requièrent une expropriation ou qui sont susceptibles d'affecter l'environnement, en raison de leur nature même ou du caractère des zones concernées.

Si la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a réformé les modalités d'appréciation de l'utilité publique pour assurer notamment une plus grande participation du public, la phase de l'enquête publique même doit être améliorée.

En effet, l'hétérogénéité des régimes d'enquête publique apparaît aujourd'hui comme un obstacle à la lisibilité du droit dans ce domaine.

L'harmonisation des modalités communes aux enquêtes publiques pourrait s'accompagner de mesures de principe susceptibles d'éviter la répétition ou la multiplication des procédures.

L'habilitation prévue par cet article recouvre donc à la fois l'oeuvre de simplification et d'harmonisation, mais aussi une rationalisation qui consisterait à permettre, en cas de pluralité de maîtres de l'ouvrage, le dépôt d'un dossier unique et l'organisation d'une procédure commune d'enquête. Elle conduira le Gouvernement à modifier les codes de l'environnement et de l'expropriation.

Cette réforme devrait ainsi concilier des objectifs de lisibilité et d'économie avec la nécessité de garantir l'information du public et la transparence administrative.

1. L'hétérogénéité des procédures d'enquête publique

Dans le rapport annuel du Conseil d'État de 2003, la section des travaux publics incite le Gouvernement à « remettre de l'ordre » dans les régimes d'enquêtes publiques afin de mieux satisfaire les objectifs de qualité des procédures administratives 134 ( * ) . Elle souligne la nécessité d'unifier les modalités communes à plusieurs catégories d'enquêtes publiques prévues dans les codes de l'environnement et de l'expropriation, et celles relatives à la désignation du commissaire enquêteur, à son paiement ou encore au versement de provisions par le maître de l'ouvrage.

Dans son étude de 1999 sur l'utilité publique 135 ( * ) , le Conseil d'Etat identifie en effet sept catégories d'enquêtes publiques, régies par des textes différents :

- l'enquête dite Bouchardeau , régie par la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 et son décret d'application n° 85-453 du 23 avril 1985, qui est la plus courante. Près de quarante catégories d'aménagements, d'ouvrages et de travaux, en matière de voirie routière, de voies ferrées, d'aérodromes, d'oléoducs ou d'installations nucléaires, sont soumises à ce type d'enquête, et cinq à sept mille projets requièrent une enquête de ce type chaque année ;

- une série d'enquêtes renvoyant au régime établi par la loi du 12 juillet 1983 , telles que l'enquête préalable à la réalisation d'un plan d'exposition au bruit du voisinage des aérodromes (art. L. 1473 du code de l'urbanisme), l'enquête préalable à la réalisation de constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau dans la bande littorale de 100 mètres (art. L. 146-4 du code de l'urbanisme) ou l'enquête préalable à l'institution de servitudes d'utilité publique à l'intérieur d'un périmètre délimité autour d'une installation classée (art. 7-2 de la loi du 9 juillet 1976 relative aux installations classées) ;

- l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun , régie par les articles L. 11-4 et R. 11-4 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- les enquêtes renvoyant à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun , telles que l'enquête préalable à l'établissement du plan de servitudes aéronautiques de dégagement (article R-242-1 du code de l'aviation civile) ;

- les enquêtes renvoyant selon le cas à l'enquête prévue par la loi du 12 juillet 1983 ou à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun , comme l'enquête préalable aux autorisations au titre de la loi sur l'eau (art. 4 du décret du 29 mars 1993 pris pour l'application de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992) ;

- les enquêtes régies par une réglementation propre ; comme, par exemple, l'enquête publique préalable au classement et au déclassement des routes départementales (art. L. 131-4 du code de la voirie routière). Certaines de ces enquêtes, comme celle préalable aux opérations d'immersion en mer (art. 9 du décret du 29 septembre 1982) se déroulent sans commissaire enquêteur ;

- les enquêtes de commodo et incommodo qui, sans être régies par un texte le prévoyant , donnent lieu, en général, à la désignation d'un commissaire enquêteur, comme l'enquête publique préalable à la création et à l'agrandissement de cimetières (art. R-361-3 du code des communes) ou celle préalable à l'homologation des terrains devant abriter des épreuves, manifestations et compétitions comportant la participation de véhicules à moteur (art. 10 de l'arrêté du 17 février 1961).

La coexistence de réglementations différentes pour l'élaboration des dossiers d'enquêtes publiques est une source potentielle d'erreurs , dont la sanction peut aller jusqu'à l'annulation de toute la procédure. L'obligation de recommencer la procédure retarde alors le projet de plusieurs mois. Le foisonnement des régimes d'enquêtes peut également aboutir à la répétition de procédures sur le même projet .

La quantité d'enquêtes publiques conduites chaque année en France peut apparaître démesurée en comparaison avec les pays voisins 136 ( * ) . Par ailleurs, la complexité de ces procédures et leur intervention en aval des projets ne sont pas de nature à susciter l'intérêt des citoyens.

2. L'harmonisation des procédures et le regroupement des enquêtes publiques prévus par l'habilitation

Les enquêtes publiques suivent dix-sept procédures différentes et interviennent dans près de soixante-dix régimes d'autorisation de projets .

Il convient de simplifier ces règles pour en faciliter la compréhension par le public et par les élus locaux et garantir la sécurité juridique des projets. Cette simplification pourrait amener au regroupement des procédures d'enquête, pour les concentrer sur quelques points, tels que l'origine de la propriété, l'information et l'avis du public, et le respect de certaines réglementations (eau, bruit, carrières...). Elle serait complétée par une harmonisation des règles.

- L'harmonisation des procédures d'enquête

L'harmonisation du contenu des dossiers exigés au titre de chaque procédure apparaît comme une simplification préalable au regroupement éventuel des enquêtes publiques successives sur les mêmes projets.

Ainsi, nombre de projets importants requièrent à la fois une enquête préalable à la déclaration d'utilité publique (art. L. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique) et une enquête hydraulique préalable à l'autorisation de travaux au titre de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau (art. L. 214-1 et suivants du code de l'environnement). Le public est ainsi amené à consulter des dossiers distincts alors qu'ils contiennent des informations portant sur les mêmes thèmes.

L'ordonnance devrait par conséquent harmoniser le contenu et la présentation des enquêtes publiques , même lorsqu'elles ne sont pas simultanées. Cette unification permettrait en outre de limiter les risques d'erreurs de composition des dossiers pour les petits maîtres d'ouvrage.

La directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement prévoit, à ses articles 4 et 5, que les États organisent cette évaluation en évitant des répétitions.

L'ordonnance n° 2004-489 du 3 juin 2004 portant transposition de cette directive 137 ( * ) modifie respectivement les codes de l'environnement et de l'urbanisme pour soumettre à une évaluation environnementale les plans, schémas, programmes et documents de planification adoptés par l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements et les établissements publics en dépendant, relatifs à l'agriculture, à la sylviculture, à la pêche, à l'énergie, à l'industrie, aux transports, à la gestion des déchets ou de l'eau, aux télécommunications, au tourisme ou encore à l'aménagement du territoire.

Ainsi, les nouveaux articles L. 122-6 du code de l'environnement et L. 121-11 du code de l'urbanisme prévoient que le rapport environnemental contient les informations « qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu [...] de procédures d'évaluation environnementale prévues à un stade ultérieur ».

La même logique devrait inspirer le regroupement des enquêtes et l'harmonisation des dossiers exigés au titre de chaque procédure. L'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique pourrait ainsi anticiper sur tout ou partie des procédures ultérieures.

- Le recours à des enquêtes publiques conjointes sur certains projets

L'ordonnance pourrait ouvrir la possibilité de conduire des enquêtes conjointes en application de réglementations différentes. Il ne s'agirait toutefois que d'une option et non d'une obligation.

En effet, le rassemblement d'enquêtes prévues par des réglementations différentes en une seule ne paraît pas pertinent pour les très grandes opérations, où le dossier relatif à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, qui intervient en amont pour permettre la suite des opérations, ne saurait être suffisamment détaillé pour l'enquête au titre de la loi sur l'eau.

Ainsi, dans le cas d'un projet d'autoroute, alors que l'enquête hydraulique peut supposer un dossier assez détaillé afin de déterminer, par exemple, le diamètre des tuyaux nécessaires pour rétablir la continuité de l'écoulement des eaux, l'enquête sur la déclaration d'utilité publique de l'opération intervient avant cette étude approfondie. En revanche, la réalisation d'enquêtes conjointes paraît adaptée à des projets localisés et d'une ampleur réduite : crèches, centres culturels, zones d'activité.

Par conséquent, les différences d'échelle entre projets devraient justifier le maintien de dossiers d'enquête différents et conduire à donner à l'enquête conjointe un caractère facultatif .

- Le regroupement des enquêtes publiques en cas de pluralité des maîtres de l'ouvrage

Le regroupement des procédures d'enquête interviendrait lorsqu'un projet unique concerne des maîtres d'ouvrage différents.

Des opérations complexes peuvent aujourd'hui aboutir à la situation, difficilement compréhensible pour le public, où les collectivités territoriales participant à la même opération présentent chacune un dossier d'enquête distinct portant sur des parties d'ouvrage différentes. Il s'agit pourtant du même projet, sur lequel le public devrait porter une appréciation globale. Tel peut être le cas pour la modification du tracé d'une route départementale à l'occasion de la réalisation d'une zone industrielle, par exemple.

La pluralité de maîtres de l'ouvrage entraîne, en l'état actuel du droit, des dossiers distincts, afin de permettre à chaque collectivité maître d'ouvrage de faire valoir ses préoccupations.

L'ordonnance devrait faciliter l'utilisation, dans de telles situations et de façon facultative, d'un dossier unique, plus clair pour le public. Cette option pourra être conditionnée, le cas échéant, en fonction des contraintes propres à chaque maître de l'ouvrage.

3. La recherche d'une meilleure articulation entre les enquêtes publiques et la concertation

L'enquête publique a été instaurée à une époque où la concertation avec les citoyens sur les projets de travaux et d'aménagement n'existait pas.

Si l'enquête est aujourd'hui devenue une étape obligatoire pour le droit de l'expropriation, elle apparaît surtout comme un temps de procédure , qui intervient à la fin de l'élaboration du projet déjà pratiquement abouti.

La simplification du régime des enquêtes publiques devrait assurer une meilleure prise en compte des observations du public et s'accompagner d'une amélioration de la concertation.

- Le remplacement ou l'articulation de certaines enquêtes publiques par des procédures de concertation avec les citoyens

Afin de simplifier les procédures d'enquêtes publiques, l'ordonnance pourrait supprimer certaines d'entre elles, à condition de leur substituer une procédure de concertation avec le public.

Plus généralement, les procédures d'enquête devraient être davantage coordonnées avec les concertations que peuvent conduire les élus locaux sur les projets. Ces procédures sont en effet susceptibles d'assurer une plus grande adhésion des citoyens aux projets, en les associant davantage, au moyen d'un processus démocratique, à leur élaboration.

L'article L. 300-2 du code l'urbanisme prévoit ainsi que le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les modalités de concertation associant notamment, pendant toute la durée du projet, les habitants et les associations locales avant toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme, toute création, à son initiative, d'une zone d'aménagement concerté, ou toute opération d'aménagement réalisée par la commune lorsqu'elle modifie de façon substantielle le cadre de vie ou l'activité économique de la commune.

Le public devrait être davantage informé des possibilités de prise en compte des résultats d'une telle concertation dans l'évolution du projet, alors même qu'elle peut être conduite dans un temps très rapproché de l'enquête publique.

En outre, en améliorant la concertation avec le public sur les projets, l'ordonnance rapprocherait notre droit des exigences du droit communautaire et de la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement 138 ( * ) , auxquelles l'étape formaliste de l'enquête publique ne répond que très partiellement.

La convention d'Aarhus signée le 25 juin 1998 au Danemark, ratifiée par la France en février 2002 et entrée en vigueur le 6 octobre 2002 prévoit en effet que le public participe au processus décisionnel par sa consultation très en amont de la décision sur les projets ayant des incidences sur l'environnement, selon une procédure qui n'existe en France que pour les projets soumis à la commission nationale du débat public. Elle prévoit également que le résultat de la participation du public doit être pris en considération dans la décision finale, laquelle doit faire également l'objet d'une information.

Ainsi, la participation du public en France devrait en particulier être mieux répartie dans le temps, afin d'accompagner l'élaboration des projets. Cette nouvelle articulation entre enquête et concertation supposerait par ailleurs une redéfinition du rôle du commissaire enquêteur . Plutôt qu'un avis sur le projet, celui-ci émettrait alors une appréciation sur le déroulement de la concertation, dont il serait le garant.

- L'amélioration de la prise en compte des résultats de l'enquête dans l'élaboration des projets

L'ordonnance devrait permettre la modification du projet après enquête publique, sans toutefois obliger à ouvrir une nouvelle enquête. En effet, dans le cas de projets dont la déclaration d'utilité publique est ancienne, les évolutions de la réglementation ou les résultats des enquêtes sectorielles peuvent faire apparaître la nécessité de revenir sur le projet initial. De telles modifications devraient répondre à des observations du public et ne pas bouleverser l'économie générale du projet.

Cette ordonnance sera élaborée à partir des résultats des travaux de trois instances : une commission consultative sur les enquêtes publiques présidée par le ministre de l'écologie et du développement durable et deux groupes de travail, l'un sous l'égide du Conseil d'État, l'autre animé par l'inspection générale de l'environnement et le conseil général des ponts et chaussées, qui devraient rendre leurs rapports définitifs au printemps 2005.

Votre commission des Lois vous invite, en accord avec la commission des Affaires économiques saisie pour avis de cet article et dont les travaux ont abouti à la même conclusion, à adopter un amendement tendant à mieux définir l'habilitation prévue par l'article 42, en lui assignant trois objectifs :

- regrouper les différentes procédures d'enquête et en simplifier et harmoniser les règles ;

- autoriser le recours à une procédure d'enquête unique ou conjointe en cas de pluralité des maîtres de l'ouvrage ou de réglementations distinctes ;

- coordonner les procédures d'enquête publique avec celles relatives à la concertation avec le public ou à la participation du public au processus de décision.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 42 ainsi modifié .

Article 43
Simplification des procédures de classement
et de déclassement dans le domaine de la voirie routière et ferroviaire
et allègement des procédures d'adoption et de révision
des schémas de services collectifs

Le présent article tend à autoriser le gouvernement à prendre une ordonnance pour alléger certaines procédures administratives particulièrement lourdes et complexes , à savoir :

- des procédures de classement et de déclassement de la voirie routière communale et départementale (1°) et des lignes du réseau ferré national (2°) ;

- des procédures d'adoption et de révision des schémas de services collectifs (3°).

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

Le Gouvernement dispose d'un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance en vertu de l'habilitation prévue par cet article.

1° L'habilitation à alléger les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales

Les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales sont régies par les articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière.

En vertu de ces articles, le classement et le déclassement des voies d'une collectivité territoriale sont prononcés par l'assemblée délibérante de ladite collectivité. La délibération du conseil municipal ou du conseil général ne peut intervenir qu'après enquête publique.

La présente habilitation tend à alléger ces procédures de classement et de déclassement de la voirie routière communale et départementale . Elle devrait permettre de supprimer l'obligation de procéder à une enquête publique avant tout nouveau classement ou déclassement d'une route par un conseil municipal ou général . En effet l'apport de ces enquêtes est très faible, dans la mesure où, d'une part, comme l'explique l'exposé des motifs, les classement et déclassement d'une voie procèdent uniquement à un « échange patrimonial entre collectivités territoriales » et, d'autre part, elles se superposent souvent avec d'autres enquêtes publiques.

Les enjeux soulevés par ces enquêtes ne semblent pas mériter leur maintien dans le cadre des procédures de classement et de déclassement. Toutefois, d'après les informations obtenues par votre rapporteur, certaines exceptions à ce principe d'absence d'enquêtes publiques devraient être retenues lorsque l'opération envisagée serait susceptible de créer des risques importants d'opposition voire de conflits sur le territoire de la collectivité concernée. Ainsi, l'enquête publique préalable pourrait être maintenue dans les cas où le classement ou déclassement d'une voie aurait pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurée par ladite voie (transformation d'une voie de circulation en promenade, déclassement portant atteinte au droit d'accès des propriétaires riverains...).

Cet allègement des procédures de classement et déclassement semble d'autant plus justifié que les même opérations effectuées par l'État sont encadrées par des règles beaucoup plus souples. Aucune enquête préalable n'est exigée, seul l'accord de la collectivité territoriale concernée étant requis.

Dans la mesure où l'allègement de ces procédures nécessite uniquement de modifier deux articles du code de la voirie routière, votre commission vous propose un amendement tendant à supprimer la présente habilitation et à procéder directement à la modification des articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière dans un article additionnel après l'article 43 .

2° L'habilitation à simplifier les procédures de classement et de déclassement des lignes du réseau ferré national

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition (3° du présent article) à la commission des Affaires économiques saisie pour avis 139 ( * ) .

3° L'habilitation à alléger les procédures d'adoption et de révision des schémas de services collectifs

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition (3° du présent article) à la commission des Affaires économiques saisie pour avis 140 ( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 43 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 43
(art. L. 131-4 et art. L. 141-3 du code de la voirie routière)
Allègement par une disposition d'application directe des procédures
de classement et déclassement des voies des collectivités territoriales

Par coordination avec l'amendement de suppression présenté à l'article 43 141 ( * ) , votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 43 du projet de loi afin d'alléger directement, par une disposition d'application immédiate, les procédures de classement et déclassement des voies des collectivités territoriales.

Le présent amendement prévoit ainsi de modifier les articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière respectivement relatifs à la procédure de classement et déclassement des voies des communes et des départements, pour supprimer l'obligation d'enquête publique, sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte et de circulation assurée par la voie .

Tel est l'objet de l' article additionnel que votre commission vous propose d'insérer après l'article 43 .

Article 44
Simplification et amélioration des règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements
et établissements publics locaux

Cet article tend à habiliter le gouvernement à simplifier et améliorer les règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements et aux établissements publics locaux qui leur sont rattachés . Il s'agirait ainsi, quelques années après la rénovation de la comptabilité communale par la mise en place de l'instruction budgétaire et comptable « M14 », de prendre quelques mesures de simplification et d'amélioration attendues par les élus et qui seraient notamment issues des propositions d'un groupe de travail constitué au sein du Comité des finances locales .

L'ordonnance devra être prise dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification en première lecture.

I. La modernisation de la comptabilité nationale : la généralisation de l'instruction budgétaire et comptable « M14 »

D'abord expérimentée dans quelques collectivités puis généralisée le 1er janvier 1997 à toutes les communes, la nouvelle instruction budgétaire et comptable dite « M14 » issue de la loi n° 94-504 du 22 juin 1994 portant dispositions budgétaires et comptables relatives aux collectivités locales avait pour objectif d'offrir aux communes un nouveau cadre budgétaire et comptable qui leur permettrait d'améliorer l'information budgétaire et financière les concernant, en particulier à propos de leur patrimoine. Cette modernisation de la comptabilité communale a mis fin aux instructions M11 et M12, respectivement applicables aux communes de moins et plus de 10.000 habitants, qui dataient de 1957.

Une meilleure information sur la situation financière et patrimoniale des communes est désormais offerte par les annexes des documents budgétaires qui détaillent notamment la répartition des charges, les engagements donnés et reçus, les immobilisations...

Ce souci de transparence et de meilleure connaissance de l'impact financier des collectivités territoriales s'est développé après l'adoption des premières lois de décentralisation et l'accroissement considérable des compétences des collectivités territoriales.

La modernisation de la comptabilité communale a été plus limitée pour les communes de moins de 3.500 habitants. Trois niveaux différents de règles budgétaires et comptables ont en effet été établis afin de tenir compte de la taille des communes.

Ainsi, un système simplifié a été prévu pour les communes de moins 500 habitants, avec une présentation par nature de leurs documents budgétaires qui sont par ailleurs simplifiés. La nomenclature est également abrégée.

Les communes de 500 à 3.500 habitants se voient également appliquer un système de base avec présentation par nature de leurs documents budgétaires.

Pour les communes de plus de 3.500 habitants, une présentation fonctionnelle des documents budgétaires est prévue. Les communes de plus de 10.000 habitants peuvent décider de faire voter leur budget sous une présentation par nature ou par fonction. Un état complémentaire doit en outre proposer une présentation croisée en fonction de celle qui n'aura pas été retenue pour le vote du budget.

II. Le projet de loi : l'habilitation à simplifier les règles budgétaires et comptables afin de renforcer l'efficacité de la M14 et améliorer la lisibilité des documents budgétaires

Plusieurs années après la généralisation de la nouvelle instruction budgétaire et comptable « M14 », une réflexion est actuellement engagée afin d'y apporter quelques améliorations et mesures de simplifications.

Un groupe de travail présidé par notre excellent collègue Jean-Claude Frécon a été constitué au sein du Comité des finances locales le 27 mars 2003. Il a dégagé deux axes de réflexion pour parvenir à une simplification des règles budgétaires et comptables applicables aux communes, à leurs groupements et à leurs établissements publics :

- harmonisation de ces règles avec celles relatives aux autres niveaux de collectivités territoriales en réduisant les contraintes pesant sur eux et en simplifiant les mécanismes budgétaires et comptables ;

- simplification et meilleure lisibilité des documents budgétaires.

Travaillant en collaboration avec les administrations centrales et les associations d'élus, ce groupe de travail s'est déjà réuni le 4 décembre 2003, les 29 janvier, 2 mars et 8 avril 2004 et devrait bientôt achever ses travaux, le rapport devant être rendu à la fin de cette année. Les modifications opérées en fonctions de leurs conclusions ne devraient pas avoir lieu avant le 1er janvier 2006.

En outre, d'autres mesures de simplification devraient également être proposées par le groupe de travail institué depuis décembre 2003 par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, composé d'élus et de représentants d'associations d'élus.

Au regard des dernières informations obtenues par votre rapporteur, un certains nombre de mesures de simplification auraient déjà été acceptées par ces différents groupes de travail, nécessitant ainsi de modifier certaines dispositions législatives du code général des collectivités territoriales.

Tout d'abord, le principe de pluriannualité , déjà prévu pour les départements, pourrait être introduit pour certaines dépenses de fonctionnement . Le recours aux autorisations de paiement et aux autorisations d'engagement devrait être étendu à toutes les communes, le seuil démographique de 3.500 habitants étant supprimé pour la pluriannualité en section d'investissement (modification des articles L. 2311-3 et L. 2512-21 du code général des collectivités territoriales).

Afin de lever une ambiguïté textuelle, la rédaction de l'article L. 2312-1 du code général des collectivités territoriales devrait être modifiée afin de préciser qu'une autorisation de programme ou d'engagement peut être votée lors de chaque étape budgétaire , même sans avoir été présentée lors du débat d'orientation budgétaire.

Ensuite, les règles de provisionnement posées à l'article L. 2252-3 du code général des collectivités territoriales devraient être modifiées . En effet, les provisions de droit commun déjà prévues pour les régions ou les départements, devraient être substituées aux provisions réglementées. Cette disposition libèrerait les communes d'une procédure lourde et excessivement contraignante. La suppression des provisions réglementées rendrait également inutile le cautionnement obligatoire qui devrait dès lors être supprimé.

En outre, il serait offert, dans certains cas, la possibilité de reprendre un excédent d'investissement en fonctionnement , ce qui confèrerait aux communes une certaine souplesse dans l'utilisation de leur budget (modification de l'article L. 2311-5 du code général des collectivités territoriales).

S'agissant de la simplification et de la meilleure lisibilité des documents budgétaires, les annexes prévues à l'article L. 2313-1 du code général des collectivités territoriales devraient être allégées . Les maquettes budgétaires devraient notamment être standardisées.

Il pourrait également être prévu de créer des régies municipales simplifiées pour les communes de moins de 3.500 habitants , qui seraient gérées en budget annexe. Cela permettrait aux communes de développer une gestion directe de certains services sans avoir à constituer de nouvelle structure.

En outre, certains établissements publics seraient autorisés, du fait de leur toute petite taille et qu'ils n'utilisent pas la section d'investissement, à prendre une délibération d'affectation du résultat .

Cette évolution législative du cadre budgétaire et comptable des communes devrait également s'accompagner de l'adoption de nombreuses mesures de simplification et d'amélioration de nature réglementaire. Ainsi en serait-il par exemple pour la simplification de la présentation des documents budgétaires. Les subventions d'équipement devraient en outre être inscrites directement en section d'investissement alors que jusqu'à présent elles étaient imputées en section de fonctionnement et réapparaissaient en investissement par une opération d'étalement de la charge.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 44 sans modification .

Article 45
Modifications du code des juridictions financières

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code des juridictions financières afin de permettre la création de formations conjointes de délibéré rassemblant les juridictions ayant pris part à un contrôle commun (1°), de transférer aux chambres régionales des comptes le contrôle des groupements d'intérêt public majoritairement composés de personnes morales de droit public relevant de leur compétence (2°), d'étendre aux chambres territoriales des comptes la possibilité de recevoir de la Cour les mêmes délégations que les chambres régionales (3°) et de mettre à jour le code pour :

- étendre les pouvoirs d'instruction des magistrats de la Cour à toutes les catégories de rapporteurs (4° a) ;

- compléter la liste des rapports que publie la Cour par des rapports thématiques (4° b) ;

- y inscrire les relations de la Cour avec le Parlement telles que les détermine la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (4° c).

Le Gouvernement disposera d'un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article.

L'ensemble des textes législatifs relatifs aux juridictions financières a fait l'objet d'une codification, intervenue en 1995 142 ( * ) .

Les mesures que le Gouvernement serait habilité à prendre par ordonnance en vertu de l'article 45 visent à simplifier et rendre plus efficace le fonctionnement de ces juridictions.

1. Les délibérés conjoints

Les juridictions financières sont progressivement conduites à réaliser des contrôles parallèles, afin de s'adapter aux évolutions de l'organisation de l'État et d'examiner de façon plus complète certains thèmes.

Ainsi, la décentralisation ayant entraîné le développement de politiques communes associant l'État et les collectivités territoriales, la Cour et les chambres régionales ont multiplié les contrôles simultanés , dans une perspective de synthèse. Les chambres territoriales peuvent aussi mener des enquêtes conjointes sur certains thèmes, comme le prévoit l'article R. 136-3 du code des juridictions financières. Le contrôle de gestion est effectué par chaque juridiction dans son ressort territorial .

En revanche, pour orienter les travaux simultanés, pour la globalisation de l'évaluation et, le cas échéant, les suites à donner sous forme de publication, la formation de délibéré devrait être adaptée.

En effet, les travaux simultanés aboutissent généralement à une publication des observations des juridictions financières, dans un souci d'évaluation des politiques publiques. Les dernières publications issues de travaux communs ont porté, en 2003, sur la gestion du système éducatif et sur la gestion des services publics d'eau et d'assainissement.

Toutefois, le code des juridictions financières n'organise pas ce type de contrôles. Cette déficience est particulièrement dommageable en ce qui concerne l'adoption des observations des juridictions. En effet, le code ne prévoit pas de formation de délibéré permettant aux juridictions ayant participé à un contrôle commun d'adopter conjointement une synthèse.

Le comité du rapport public et des programmes, devant lequel est présentée la synthèse des travaux communs des chambres, ne comprend que des magistrats de la Cour des comptes qui n'ont pas participé aux travaux présentés par les chambres.

L'ordonnance permettrait donc la création de formations conjointes, rassemblant les juridictions prenant part à un des contrôles simultanés. Ces formations interjuridictions seraient amenées à statuer sur l'orientation des travaux, leur synthèse et leurs suites. Un décret devrait fixer leur composition et leur fonctionnement.

Le comité du rapport public pourrait également accueillir des magistrats issus des chambres régionales des comptes.

2. Le transfert du contrôle des groupements d'intérêt public aux chambres compétentes pour contrôler les personnes morales qui y participent

La charge des contrôles juridictionnels de la Cour des comptes s'est considérablement accrue du fait de la multiplication des groupements d'intérêt public (GIP).

Le nombre de GIP que la Cour doit obligatoirement contrôler est ainsi passé de 96 en 1996 à 323 en 2003 143 ( * ) , alors qu'une grande partie d'entre eux rassemble essentiellement des collectivités locales, ou vise à mener à bien des politiques d'intérêt local, dans des domaines tels que la politique de la ville, le développement social urbain, l'accès à l'emploi ou l'enseignement.

Actuellement, seuls les GIP hospitaliers sont soumis au contrôle des chambres régionales, en application de l'article L. 211-9 du code des juridictions financières, issu de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle. Les chambres régionales contrôlent par ailleurs les comptes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics (art. L. 211-1 du code des juridictions financières).

Par cohérence, l'ordonnance confierait aux chambres régionales des comptes le contrôle des comptes de tous les GIP dotés d'un comptable public et majoritairement composés de personnes morales de droit public relevant de leur compétence.

S'il n'est pas possible aujourd'hui, avant qu'ils ne déposent les dossiers relatifs à leurs comptes annuels et que leurs statuts soient analysés, de connaître le nombre de GIP dont le contrôle sera ainsi transféré aux chambres régionales, on peut estimer qu'une grande partie d'entre eux devrait échapper au contrôle de la Cour après cette réforme.

3. Les délégations de la Cour aux chambres territoriales des comptes

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française sont toutes deux dotées d'une chambre territoriale des comptes (art. L. 262-1 et 272-1 du code des juridictions financières).

L'habilitation prévue au 3° de l'article 45 a pour objet d'étendre aux chambres territoriales des comptes la faculté reconnue à la Cour de déléguer aux chambres régionales le contrôle des comptes et de la gestion des établissements publics nationaux (art. L. 111-9 du code des juridictions financières).

Cette délégation est donnée par arrêté du premier président de la Cour, après avis de son procureur général et des présidents des chambres régionales concernées. Les catégories d'établissements publics intéressés et la durée de la délégation sont définis à l'article R. 111-1 du code. Peut ainsi être délégué par la Cour le contrôle :

- des établissements publics à caractère scientifique ;

- des établissements d'enseignement supérieur à caractère administratif placés sous la tutelle du ministre chargé de l'enseignement supérieur ;

- des écoles d'architecture ;

- des établissements d'enseignement supérieur agricole et vétérinaire ;

- des instituts universitaires de formation des maîtres ;

- des centres régionaux des oeuvres universitaires ;

- des centres régionaux d'éducation populaire et de sports ;

- des centres régionaux de documentation pédagogique ;

- des établissements d'enseignement mentionnés à l'article L. 211-4 et L. 162-3 du code de l'éducation et du lycée Comte de Foix, à Andorre, assimilé à cette catégorie ;

- des établissements créés en application de l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme ;

- des chambres de commerce et d'industrie et de leurs groupements ;

- des chambres des métiers et de leurs groupements ;

- des chambres d'agriculture et de leurs groupements.

S'agissant de la Polynésie française , la possibilité de délégation a été prévue par l'article 21 de la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française, qui a complété à cet effet l'article L. 111-9 du code des juridictions financières. Ainsi « le jugement des comptes et l'examen de la gestion de tout ou partie des établissements publics nationaux relevant d'une même catégorie et ayant leur siège en Polynésie française peuvent être délégués à la chambre territoriale des comptes par arrêté du premier président de la Cour des comptes pris après avis du procureur général près la Cour des comptes et du président de la chambre territoriale des comptes ».

Plus récemment encore, les compétences de la chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie ont été élargies par une possibilité de délégation prévue dans les mêmes conditions, à l'article 1er (1°) de l'ordonnance n° 2004-728 du 22 juillet 2004 portant actualisation des dispositions du code des juridictions financières applicables en Nouvelle-Calédonie 144 ( * ) .

Votre commission estime par conséquent que ce point de l'habilitation prévue à l'article 45 est devenu caduc. Aussi vous propose-t-elle d'adopter un amendement tendant à supprimer le 3° du présent article.

4. L'actualisation du code des juridictions financières.

Le 4° de l'article 45 tend à habiliter le Gouvernement à mettre à jour le code des juridictions financières sur trois points.

- L'extension à tous les rapporteurs des pouvoirs d'instruction réservés aux magistrats de la Cour

Le régime juridique applicable, au sein de la Cour des comptes, aux rapporteurs extérieurs à temps plein -au nombre de soixante environ- et aux conseillers maîtres en service extraordinaire -au nombre d'une dizaine- diffère de celui des membres du corps de la Cour, qui ont le statut de magistrats. En effet, les rapporteurs extérieurs et les conseillers maîtres, qui ne prêtent pas serment tout en étant soumis aux secrets professionnel et de l'instruction, ne peuvent signer les arrêts relatifs aux comptes des comptables publics, puisque toute activité juridictionnelle leur est interdite.

Il résulte par ailleurs de l'évolution des textes et du fonctionnement de la Cour qu'ils ne peuvent, dans le cadre de l'instruction, encadrer les experts privés auxquels la Cour peut recourir aux termes de l'article L. 140-3 du code des juridictions financières, ni bénéficier du droit de communication des agents des services financiers prévu par l'article L. 140-4 du même code, ni prendre connaissance des documents comptables des contractants pour contrôler l'exécution d'une délégation de service public (art. L. 140-4-1 du code précité).

Toutes ces limitations sont dues à la rédaction des textes en vigueur, qui fait référence aux « magistrats » plutôt qu'aux « rapporteurs ». L'ordonnance devrait par conséquent unifier les compétences d'instruction de l'ensemble des rapporteurs, qu'ils appartiennent ou non au corps des magistrats de la Cour des comptes, en procédant, en l'espèce, à une simple substitution des deux termes.

Les pouvoirs d'instruction des magistrats et rapporteurs des chambres régionales des comptes étant définis par renvoi aux articles concernant la Cour 145 ( * ) , une démarche d'unification similaire devrait être mise en oeuvre à l'égard des compétences des rapporteurs extérieurs de ces chambres.

- Les rapports thématiques de la Cour des comptes

Depuis une douzaine d'années, la Cour des comptes publie des rapports dits « particuliers », consacrés aux résultats de ses contrôles et de ceux des chambres régionales, dont le rapport public annuel ne permettrait pas de rendre compte dans toute leur ampleur et toute leur complexité. Ces rapports ont porté, par exemple, sur :

- les organismes d'habitation à loyer modéré (1994) ;

- le dispositif de lutte contre la toxicomanie (1998) ;

- la fonction publique de l'État (2000) ;

- les communautés urbaines (2001) ;

- la politique de la ville (2002) ;

- la Poste (2003).

L'intégration de ces rapports dans la liste des rapports que doit publier la Cour apparaît aujourd'hui nécessaire face au développement de recours contentieux à l'encontre de ses décisions, même non juridictionnelles. Seul le rapport public annuel, prévu aux articles L. 136-1 à L. 136-5 du code des juridictions financières, et les rapports sur chaque projet de loi de règlement (art. L.O. 132-1) et sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale (art. L.O. 132-3) ont aujourd'hui une existence reconnue par la loi.

L'ordonnance devrait donc compléter le code par la liste des rapports particuliers, afin d'éviter toute mise en cause des compétences de la Cour en ce domaine.

- Les relations de la Cour des comptes avec le Parlement

L'article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances a redéfini les relations de la Cour et du Parlement, en prévoyant que « la mission d'assistance du Parlement confiée à la Cour des comptes par le dernier alinéa de l'article 47 de la Constitution comporte notamment :

« 1° L'obligation de répondre aux demandes d'assistance formulées par le président et le rapporteur général de la commission chargée des finances de chaque assemblée dans le cadre des missions de contrôle et d'évaluation [...] ;

« La réalisation de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle. [...] ;

« 3° Le dépôt d'un rapport préliminaire conjoint au dépôt du rapport mentionné à l'article 48 relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur ;

« 4° Le dépôt d'un rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement, relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur et aux comptes associés, qui, en particulier, analyse par mission et par programme l'exécution des crédits ;

« 5° La certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'État. Cette certification est annexée au projet de loi de règlement et accompagnée du compte rendu des vérifications opérées ;

« 6° Le dépôt d'un rapport conjoint au dépôt de tout projet de loi de finances sur les mouvements de crédits opérés par voie administrative dont la ratification est demandée dans ledit projet de loi de finances. [...] »

Le texte initial du projet de loi habilitait le Gouvernement, d'une part, à reprendre dans le code des juridictions financières cet article, afin de compléter la codification en la matière et, d'autre part, à procéder à des aménagements connexes.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Etienne Blanc, rapporteur de la commission des Lois, qui limite le champ de l'habilitation, s'agissant des relations de la Cour et du Parlement, à la seule transposition dans le code des juridictions financières de l'article 58 de la loi organique du 1er août 2001. Le Parlement conserverait ainsi l'initiative de proposer, le cas échéant, les mesures d'application de l'article 58.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 45 ainsi modifié .

Article 46
Nouvelle habilitation à clarifier le droit de la commande publique

Cet article tend à habiliter le Gouvernement pour six nouveaux mois à clarifier par ordonnance le droit de la commande publique . En effet, l'ordonnance prévue par l'article 5 de la loi précitée du 2 juillet 2003 n'a pu l'être dans les délais impartis 146 ( * ) .

L'adoption de cette ordonnance était tributaire de l'entrée en vigueur des nouvelles directives communautaires relatives à la commande publique . Or, la directive n° 2004/18/CE relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services et la directive n° 2004/17/CE portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux n'ont été publiées que le 31 avril 2004 et n'ont par conséquent pas pu être transposées à temps.

Le champ de l'habilitation permettrait au Gouvernement de prendre par ordonnance, dans le respect de la transparence et de la bonne information du public :

- les mesures nécessaires pour rendre compatibles avec le droit communautaire les dispositions législatives relatives à la passation des marchés publics. Avant même l'adoption de ces deux plus récentes directives précitées, certaines lois n'ont pas été adaptées à l'évolution des normes communautaires ;

- les mesures permettant de clarifier les règles applicables aux marchés passés par certains organismes non soumis au code des marchés publics.

Cette habilitation devrait concerner les lois régissant les marchés passés par les organismes non soumis au nouveau code des marchés publics, ce dernier, issu du décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004, ne couvrant pas l'ensemble du droit de la commande publique.

Par conséquent, l'ordonnance devrait avoir en particulier pour objet de modifier les lois n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence, n° 92-1282 du 11 décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications, n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques et n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ainsi que certaines disposition législative du code de la santé publique, du code de la sécurité sociale et du code de la construction et de l'habitat 147 ( * ) .

Comme votre rapporteur l'avait déjà indiqué l'an dernier lors de l'examen de la première habilitation, il est indispensable que l'ordonnance prise en application de cet article prenne en compte l'évolution la plus récente du droit communautaire de la commande publique . Il avait en effet affirmé qu' « il serait regrettable que, quelques mois après l'adoption des ordonnances, les dispositions législatives nouvellement modifiées ne soient de nouveau plus compatibles avec les règles communautaires » 148 ( * ) .

Par conséquent, il convient d'habiliter de nouveau le gouvernement afin qu'il puisse prendre cette ordonnance rendant notamment compatible le droit national de la commande publique avec les règles posées par les deux directives communautaires précitées.

En vertu de l'article 61, l'ordonnance devra être prise dans un délai de six mois suivant la publication de la présente loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 46 sans modification .

Article 47
Diminution des cas de consultation cumulative
du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat
et des comités techniques paritaires

Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, a pour objet d'habiliter le gouvernement à diminuer le nombre de procédures décisionnelles dans lesquelles à la fois le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires doivent être consultés .

En effet, les procédures de décision de l'Etat peuvent se trouver alourdies et retardées par ces multiples consultations, bien souvent redondantes et inutiles.

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture.

L'ordonnance devra être prise dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi.

Sans remettre en cause l'importance du dialogue, de la participation et de la concertation au sein de l'administration, il convient de parvenir à un équilibre prenant davantage en compte la sécurité juridique et la nécessité d'avoir une administration réactive et efficace.

La participation des fonctionnaires s'exerce par l'intermédiaire de leurs délégués, qui siègent dans des organismes consultatifs dans les trois domaines suivants (article 9 de la loi n° 83-634 portant statut général de la fonction publique) :

- organisation et fonctionnement des services publics ;

- élaboration des règles statutaires ;

- examen des décisions individuelles relatives à leurs carrières.

S'agissant des fonctionnaires de l'Etat, leur participation s'exerce notamment au sein du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, des commissions administratives paritaires, des comités techniques paritaires et des comités d'hygiène et de sécurité en vertu de l'article 12 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat.

Si les comités techniques paritaires sont spécialisés dans l'élaboration des règles statutaires et les commissions administratives paritaires pour l'examen des décisions individuelles relatives aux carrières des fonctionnaires, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est en revanche susceptible d'intervenir dans les trois domaines précédemment cités.

Par conséquent, disposant d'un champ de compétences se recouvrant en partie, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires sont souvent amenés à donner chacun leur avis à propos d'une même décision administrative.

Les compétences du Conseil supérieur
de la fonction publique de l'Etat

Institué dès la création du statut général de la fonction publique de l'Etat par la loi du 19 octobre 1946, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est présidé par le Premier ministre et comprend en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires (article  13 de la loi précitée du 11 janvier 1984).

L'article 81 peut connaître de « toute question d'ordre général intéressant les fonctionnaires de l'Etat ou la fonction publique de l'Etat, dont il est saisi soit par le Premier ministre, soit à la demande écrite du tiers de ses membres titulaires » en vertu de l'article 1 er du décret n° 82-450 du 28 mai 1982 qui fixe les compétences, la composition, l'organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.

Aux termes de l'article 2 du décret précité, il doit être consulté sur :

- les projets de loi modifiant les lois précitées du 13 juillet 1983 et 11 janvier 1984 ainsi que ceux dérogeant à ces lois et relatifs à un ou plusieurs corps de l'Etat ;

- les projet de décret comportant des dispositions communes à plusieurs corps de fonctionnaires de l'Etat, sauf lorsque ces projets relèvent d'un seul comité technique paritaire du fait qu'ils concernent une question relative à l'élaboration ou la modification des règles régissant les personnels soit affectés dans les services placés sous l'autorité du ministre auprès duquel il est institué, soit d'un établissement public, ou du fait qu'ils concernent des problèmes de formation intéressant ces personnels ;

- les projets de décret concernant les corps interministériels ou à vocation interministérielle relevant du Premier ministre ou régissant des emplois communs à l'ensemble des administrations. Dans ce domaine, l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat remplace la consultation des comités techniques paritaires ;

- les orientations de la politique de formation professionnelle continue dans la fonction publique de l'Etat. Il examine le rapport du directeur général de l'administration et de la fonction publique de l'Etat sur les programmes de formation des départements ministériels ainsi que sur le bilan des actions entreprises et il est consulté sur les principales questions relatives à l'élaboration et la mise en oeuvre des actions de formation professionnelle dans l'administration ;

- les problèmes relatifs à l'hygiène, la sécurité du travail et la médecine de prévention ;

- les questions d'ordre général relatives à l'élaboration, à la mise en oeuvre et au bilan des actions liées à la modernisation du service public, aux restructurations administratives, à la déconcentration et aux implantations des administrations publiques sur le territoire.

Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut également, dans certains cas, être une commission de recours.

Les compétences des comités techniques paritaires

En vertu de l'article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la formation publique de l'Etat, les comités techniques paritaires sont institués dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère économique et commercial.

Composés d'un nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel, les CTP « connaissent des problèmes relatifs à l'organisation et au fonctionnement des services, au recrutement des personnels et des projets de statuts particuliers ».

L'article 12 du décret n° 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires prévoit que ces derniers sont saisis pour avis pour tous les projets de textes et questions relatifs :

- aux problèmes généraux d'organisation des administrations, établissements ou services ;

- aux conditions générales de fonctionnement des administrations et services ;

- aux programmes de modernisation des méthodes et techniques de travail et à leur incidence sur la situation du personnel ;

- aux règles statutaires ;

- à l'examen des grandes orientations à définir pour l'accomplissement des tâches de l'administration concernée ;

- aux problèmes d'hygiène et de sécurité ;

- aux critères de répartition des primes de rendement ;

- aux plans fixant des objectifs pluriannuels d'amélioration de l'accès des femmes aux emplois d'encadrement supérieur ;

- à l'évolution des effectifs et des qualifications.

Les comités techniques paritaires ministériels, placés auprès de chaque ministre concerné, examinent les questions intéressant l'ensemble des services centraux et déconcentrés du département ministériel considéré.

Les comités techniques paritaires centraux institués auprès des directeurs du personnel de l'administration centrale, connaissent des questions intéressant l'ensemble des services centraux du département ministériel concerné.

Comme l'explique l'exposé des motifs, ces procédures de consultation cumulative se sont en partie développées du fait de la jurisprudence du Conseil d'Etat qui interprète le droit actuel comme imposant dans de nombreuses hypothèses l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ainsi que celui d'un, voire plusieurs comités techniques paritaires ministériels.

Ainsi en est-il par exemple lorsqu'un texte législatif ou réglementaire a une incidence sur l'ensemble de la fonction publique de l'Etat. Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut alors donner son avis en tant qu'organisme interministériel tandis que tous les comités techniques paritaires sont consultés pour représenter chacun des ministères.

Dans son rapport annuel de 2003 dont l'étude était consacrée aux « perspectives de la fonction publique », le Conseil d'Etat avait lui-même indiqué que, du fait des textes législatifs et réglementaires en vigueur, il était « amené, de son côté, à plusieurs reprises, à refuser d'examiner un texte ou à l'annuler, faute de consultation nécessaire en droit, ou encore à devoir expliciter précisément la conduite à tenir par l'administration devant tel ou tel type de textes, par exemple en cas d'élaboration d'un statut d'emplois ou d'un statut de fonctions » 149 ( * ) .

Parmi les exemples cités par le Conseil d'Etat figure notamment un arrêt du 25 avril 1986 dans lequel il a jugé que le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat devait être consulté sur un projet de texte relatif aux obligations de service des enseignants de plusieurs corps de fonctionnaires 150 ( * ) .

La présente habilitation pourrait par conséquent permettre au gouvernement de limiter par ordonnance les cas dans lesquels le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires doivent être cumulativement consultés , en particulier pour les décisions mineures, et éviter ainsi les lourdeurs inutiles dans les procédures décisionnelles de l'administration.

L'exposé des motifs indique que l'ordonnance pourrait en particulier prévoir la possibilité de substituer l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat à celui des comités techniques paritaires dans des cas fixés par décret.

L'allègement des procédures de consultation au sein de l'administration est indispensable. Dans son étude précitée consacrée aux « Perspectives pour la fonction publique » 151 ( * ) , le Conseil d'Etat a également mis en évidence « la lourdeur et la complexité du régime de consultation des organismes paritaires, dont l'intervention s'impose de plus en plus systématiquement ».

Votre commission vous propose un amendement tendant à substituer à cette habilitation une mesure d'application immédiate . L'article 17 de la loi précitée du 11 janvier 1984 serait ainsi modifié afin de prévoir que le décret déterminant la compétence, la composition, l'organisation et le fonctionnement de ces organismes consultatifs devrait également préciser les cas dans lesquels la consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut dispenser de celle des comités techniques paritaires et la consultation de ces derniers dispenser de celle du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.

Il semble en effet inutile d'habiliter le gouvernement à prendre une ordonnance alors qu'il suffit de modifier un seul article de la loi du 11 janvier 1984 pour que le décret puisse ensuite déterminer dans quels cas la consultation cumulative du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires serait nécessaire.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 47 ainsi modifié .

Article 47 bis (nouveau)
Rapport au Parlement sur la mise en application des lois

L'article 47 bis du projet de loi, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, avec un avis favorable de la commission des Lois, tend à prévoir que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en application de chaque loi, six mois après sa publication .

Lors de la présentation de son amendement 152 ( * ) , le Gouvernement a indiqué vouloir donner une force supplémentaire au dispositif de la résolution de M. Jean-Luc Warsmann, adopté par l'Assemblée nationale le 12 février 2004 153 ( * ) .

Cette résolution complète l'article 86 du Règlement de l'Assemblée nationale et prévoit, sans préjudice de la possibilité pour les commissions de conduire des missions sur l'application d'une législation, qu'« à l'issue d'un délai de six mois suivant l'entrée en vigueur d'une loi dont la mise en oeuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire, le député qui en a été le rapporteur ou, à défaut, un autre député désigné à cet effet par la commission compétente, présente à celle-ci un rapport sur la mise en application de cette loi ».

Si aucun bilan ne peut encore être tiré de cette réforme récente, la démarche du Gouvernement peut néanmoins s'appuyer sur le contrôle de l'application des lois réalisé chaque année par le Sénat, depuis 1972.

1. L'expertise du Sénat en matière de contrôle de l'application des lois

Le rapport du Sénat sur le contrôle de l'application des lois met chaque année en évidence les insuffisances du suivi réglementaire exercé par le pouvoir exécutif pour assurer l'application des prescriptions du législateur. Il se fonde sur le recensement par chaque commission des textes réglementaires publiés pour assurer l'application de chacune des lois qu'elle a été chargée de rapporter au fond.

L'évaluation de l'applicabilité de chaque loi se fonde sur le rapport entre le nombre de mesures d'application publiées et le nombre de textes d'application qu'elle prévoit.

Ces travaux permettent aujourd'hui d'apprécier sur le long terme l'évolution de l'application des lois votées. Ainsi, au cours de la XIème législature, s'est amplifiée une tendance à voter moins de lois, mais d'une particulière densité et multipliant les renvois à des décrets d'application.

Alors que les 27 lois promulguées en 2000-2001 (hors les traités et accords internationaux et les lois d'application directe) appelaient 425 décrets ou arrêtés, les 27 lois adoptées en 2001-2002 en appelaient 617 154 ( * ) . Cette tendance a cependant connu une atténuation en 2002-2003. En effet, au cours de cette session, si le nombre de lois votées a augmenté (41) 155 ( * ) , le nombre de dispositions renvoyant à des textes réglementaires a considérablement diminué: 559, soit une baisse de 9,4 % par rapport à la session précédente.

Outre cette évolution en tendance, le rapport annuel du Sénat sur le contrôle de l'application des lois indique le stock des lois qui demeurent, depuis juin 1981, partiellement ou totalement inapplicables, en raison des carences du suivi réglementaire. On dénombrait ainsi 193 textes en attente en 2002-2003 (contre 169 en 2001-2002), soit 15,2 % des lois adoptées depuis juin 1981.

Une amélioration peut être relevée au cours des dernières années, s'agissant des délais de publication des mesures expressément prévues par les lois adoptées au cours de chaque session. Ainsi, 83 % des mesures publiées l'ont été moins de six mois après la promulgation de la loi en 2002-2003 156 ( * ) (contre 86 % en 2001-2002, 75 % en 2000-2001 et 66 % en 1999-2000).

Application des lois : évolution de 1999-2000 à 2002-2003
(en % des lois appelant des mesures réglementaires d'application) 157 ( * )

 

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

Lois non applicables

Près de 60 %

Près de 60 %

Un tiers

Près de 60 %

Lois partiellement applicables

Près de 30 %

Plus de 30 %

Près de 60 %

Près de 25 %

Lois applicables

Plus de 12 %

Plus de 7 %

Plus de 10 %

Près de 20 %

En revanche, le taux d'application des dispositions réglementaires prévues par les lois adoptées au cours de chaque année parlementaire s'est effondré, passant d'une moyenne supérieure à 20 % au cours de la XIème législature, à 9,7 % en 2002-2003, ce qui s'explique par l'adoption au cours de la session extraordinaire des textes appelant le plus grand nombre de mesures d'application (projet de loi portant réforme des retraites, projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine).

Évolution du taux d'application des dispositions réglementaires prévues
(au 30 septembre de chaque année parlementaire) 2

 

Nombre de lois votées
(1)
(à l'exclusion des lois d'application directe)

Nombre
de dispositions réglementaires prévues
(2)

Nombre
de dispositions réglementaires prises
(3)

(3)/(2)

1997-1998

33

358

76

21,2 %

1998-1999

32

392

74

18,9 %

1999-2000

32

331

115

34,7 %

2000-2001

27

425

95

22,3 %

2001-2002

27

617

141

22,8 %

2002-2003

41

559

54

9,7 %

Si le contrôle de l'application des lois effectué par le Sénat apparaît à la fois exhaustif et pertinent, il ne permet pas toujours d'obtenir du Gouvernement les raisons du retard de la mise en application des lois. C'est en particulier sur ce point que le dialogue avec le Gouvernement pourrait se révéler fructueux.

L'Assemblée nationale, quant à elle, ne s'est dotée que récemment d'une procédure de contrôle dans ce domaine.

2. Le choix de l'Assemblée nationale : le contrôle de l'application de chaque loi par son rapporteur

En modifiant son règlement par la résolution adoptée le 12 février 2004, l'Assemblée nationale a fait le choix d'une méthode de contrôle plus personnalisée, où le rapporteur du texte est amené à rapporter, six mois après son entrée en vigueur, sur sa mise en application. Avant cette réforme, l'Assemblée nationale ne réalisait de suivi de l'application des textes que dans le domaine fiscal 158 ( * ) .

Le rapport désormais prévu par le dernier alinéa de l'article 86 du Règlement de l'Assemblée nationale a pour objet de faire le bilan des textes pris pour assurer l'entrée en vigueur de la loi et des dispositions qui n'ont pas été suivies des textes réglementaires nécessaires à leur mise en oeuvre. Le rapporteur est entendu par la commission à l'issue d'un nouveau délai de six mois en cas d'inapplicabilité persistante.

Très récente, cette réforme ne devrait connaître ses premières applications que dans la seconde moitié de l'année 2004.

3. Le rapport systématique du Gouvernement : une démarche ambitieuse qui reprend les initiatives du Parlement

Dans le prolongement des initiatives du Premier ministre en la matière, le Gouvernement a choisi de s'imposer une démarche symétrique à celle du Parlement.

Dans sa circulaire du 30 septembre 2003 relative à la qualité de la réglementation, le Premier ministre a défini une nouvelle procédure visant les décrets d'application des lois nouvelles. Une réunion interministérielle doit être organisée dans les jours suivant la promulgation de la loi, afin de recenser les décrets nécessaires à son application et d'arrêter un échéancier prévisionnel , « communiqué aux deux assemblées afin d'assurer l'information des parlementaires ».

Dans le cadre plus général du plan stratégique de l'administration électronique (PSAE) pour 2004-2007, un système d'organisation en ligne des opérations normatives (SOLON) doit être mis en place 159 ( * ) . Il s'agit de développer un outil permettant la dématérialisation de l'ensemble de la chaîne normative.

Ce système concerne environ trois cent cinquante personnes au sein des cabinets ministériels et de certaines directions, qui interviennent lors de la production des textes normatifs. À terme, il devrait permettre au secrétariat général du Gouvernement de disposer d'un outil fiable de suivi de la production normative, qui pourra être utilisé pour évaluer l'applicabilité des lois et réaliser les rapports prévus à l'article 47 bis.

Le nouveau dispositif de contrôle de l'application des lois adopté en première lecture par l'Assemblée nationale apparaît ainsi comme le complément naturel des initiatives gouvernementales, sur lesquelles le suivi réglementaire pourra se fonder.

a) Le champ des textes réglementaires d'application

L'article 47 bis du présent projet de loi reprend le champ de contrôle adopté par l'Assemblée nationale, en considérant comme textes d'application non seulement les décrets et les arrêtés, mais aussi les circulaires. En effet, si la loi ne renvoie pas, pour son application, à des circulaires, les services chargés de l'application d'un texte se fondent souvent sur la norme la plus directement applicable et la plus proche. Le critère ainsi retenu pour la prise en compte des circulaires n'est pas l'obligation prévue par la loi de prendre un texte d'application, mais l'impact du texte réglementaire, quelle que soit sa nature, dans l'application de la loi par l'administration.

Dans la mesure où, comme l'a établi la jurisprudence du Conseil d'État, les circulaires peuvent contenir des « dispositions impératives à caractère général » 160 ( * ) , il paraîtrait justifié que le législateur en prenne connaissance lorsqu'il souhaite contrôler l'application des lois.

b) Un rapport unique, à échéance fixe

Le délai de présentation du rapport par le Gouvernement, fixé à six mois après la publication de la loi, reprend celui fixé par l'Assemblée nationale pour son propre dispositif de contrôle.

Ce délai, ambitieux au regard du délai moyen de publication des mesures d'application des textes législatifs, peut appeler des ajustements. En effet, le délai de six mois pourrait revêtir un caractère incitatif à l'égard du Gouvernement. Toutefois, il ne pourra s'appliquer aux lois qui prévoyaient explicitement un délai supérieur à six mois pour la parution des textes d'application.

L'article 61 du présent projet de loi prévoit ainsi que certaines ordonnances ne soient prises que dans un délai de neuf, douze voire dix-huit mois. En outre, l'entrée en vigueur de la loi ne coïncide pas nécessairement avec sa promulgation, puisqu'elle peut fixer une entrée en application différée, globale ou partielle.

La loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce prévoit ainsi, en son article 33, qu'elle n'entrera en vigueur, sous certaines exceptions, que le 1er janvier 2005. De même, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ne prévoit pas moins de cinq délais d'entrée en vigueur différents pour ses différentes dispositions.

Aussi votre commission des Lois vous propose-t-elle d'adopter un amendement tendant à fixer le délai de dépôt du rapport au Parlement à neuf mois à compter de la publication de la loi ou, le cas échéant, à compter de la date d'entrée en vigueur qu'elle fixe.

Par ailleurs, le dispositif prévu par l'article 47 bis diffère de celui que s'est fixé l'Assemblée nationale en ce qu'il ne prévoit pas de poursuite du dialogue entre le Parlement et le pouvoir législatif dans l'hypothèse où toutes les dispositions de la loi n'auraient pas fait l'objet des mesures d'application nécessaires.

Votre commission des Lois vous invite par conséquent à adopter un amendement afin de prévoir le dépôt par le Gouvernement d'un rapport complémentaire, six mois après le rapport initial, lorsque plus d'un tiers des mesures d'application nécessaires à l'entrée en vigueur de la loi n'ont pas été prises à la date de publication du premier rapport.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 47 bis ainsi modifié .

* 128 Conseil d'État, Les groupements d'intérêt public , juin 1996, La documentation française.

* 129 Tribunal des conflits, 25 mars 1996, préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône.

* 130 Arrêts du 14 février 2000 GIP « habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans-abris » contre Mme Verdier, et du 15 décembre 2003, préfet du Val d'Oise.

* 131 Article 2 de la loi n° 75-596 du 9 juillet 1975.

* 132 Critères récemment précisés par l'article 132 de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 133 Voir le rapport de notre collègue M. Philippe Marini au nom de la commission des Finances.

* 134 Rapport public 2003, page 88.

* 135 Conseil d'Etat, L'utilité publique aujourd'hui, La documentation française, 1999.

* 136 L'Allemagne ne réalise que cinq cents enquêtes publiques par an.

* 137 Habilitation donnée au Gouvernement par la loi n° 2004-237 du 18 mars 2004 portant habilitation du Gouvernement à transposer par ordonnance des directives communautaires.

* 138 Cf loi n° 2002-285 du 28 février 2002 autorisant l'approbation de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement .

* 139 Voir le rapport pour avis de notre collègue Christian Gaudin au nom de la commission des Affaires économiques.

* 140 Voir le rapport pour avis de notre collègue Christian Gaudin au nom de la commission des Affaires économiques.

* 141 Voir le commentaire de cet article.

* 142 Loi n °94-1040 du 2 décembre 1994, loi organique n°94-1132 du 27 décembre 1994 et loi n°95-851 du 24 juillet 1995

* 143 Les GIP représentent ainsi plus d'un quart des comptes publics produits devant la Cour des comptes en 2003, soit 323 sur un total de 1146.

* 144 Votre commission vous propose de ratifier cette ordonnance par un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 51. Voir le commentaire de cet article additionnel.

* 145 Art. L. 241-2 du code des juridictions financières.

* 146 Voir le commentaire de l'article 5 de la loi précitée du 3 juillet 2003 dans le rapport précité n° 266 (Sénat, session 2002-2003) de M. Bernard Saugey fait au nom de la commission des Lois pp. 72-78 (article 3 du projet de loi).

* 147 Voir le commentaire précité pp. 76-77.

* 148 Voir le commentaire précité p. 78.

* 149 Voir p. 265-266 du rapport public 2003 du Conseil d'Etat, « Perspectives pour la fonction publique », La Documentation Française, Paris, 2003, 448 p.

* 150 Arrêt du Conseil d'Etat n° 54 407, 25 avril 1986, Association des professeurs d'université dans les disciplines juridiques, économiques, politiques et de gestion.

* 151 Voir le rapport annuel de 2003 précité du Conseil d'Etat p. 265-266.

* 152 Cf. JO débats Assemblée nationale, séance du jeudi 10 juin 2004, p. 4794.

* 153 Cf. rapport AN n° 1409 (2003-2004) de M. Jean-Luc Warsmann sur la proposition de résolution modifiant le Règlement en vue d'informer l'Assemblée nationale sur la mise en application des lois.

* 154 Voir le 54 ème rapport sur le contrôle de l'application des lois, publié en supplément au bulletin des commissions du Sénat du 7 décembre 2002.

* 155 Il s'agit toujours du nombre de lois hors conventions et lois d'application directe.

* 156 Il s'agit de la part relative, dans le total des mesures publiées expressément prévues par des dispositions législatives, des mesures prises en moins de six mois.

* 157 Source : 55 ème rapport sur le contrôle de l'application des lois, supplément au bulletin des commissions du Sénat du 6 décembre 2003.

* 158 Cf rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur la proposition de résolution modifiant le Règlement en vue d'informer l'Assemblée nationale sur la mise en application des lois (n° 1409, 2003-2004).

* 159 Le projet SOLON s'inscrit dans, le programme gouvernemental ADministration ELEctronique 2004/2007 (ADELE) lancé, par le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, le 9 février 2004. Il s'agit du projet ADELE 81.

* 160 Cf. la décision Mme Duvignères , CE Sect., 18 décembre 2002.

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