VI. VERS LA PLEINE APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOÛT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES

Rappel succinct des principaux instruments mis en place par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances

La loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) s'appliquera pleinement dès la préparation du budget pour 2006. L'article 66 de la loi organique prévoit qu' à titre indicatif, les crédits du budget pour 2005 devront être présentés selon les nouveaux principes en annexe du projet de loi de finances.

La LOLF renverse la perspective qui prévalait en matière de dépense publique : à une logique de moyens succèdera une logique de résultat .

Les crédits seront désormais présentés par programmes regroupés au sein de missions .

Au sein de chaque programme, les crédits seront fongibles , c'est à dire qu'ils pourront être redéployés entre les lignes budgétaires qui le composent : « La présentation des crédits par titre est indicative » (article 7 de la LOLF). Il s'agira cependant d'une fongibilité asymétrique : les gestionnaires ne pourront pas abonder les crédits de dépenses de personnels. A cette limitation s'ajoutera celle d'un plafond du nombre d'emplois par ministère (l'autorisation actuelle porte sur un flux d'emplois), et il s'agira d'emplois réels (et non plus d'emplois budgétaires théoriques).

Les implications du passage à une logique de résultat se trouvent résumées dans le dernier paragraphe du I de l'article 7 de la LOLF : « Un programme regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation ».

Concrètement, il est déjà prévu que chaque programme sera décliné en « budgets opérationnels de programmes » (BOP) , qui regroupent la part des crédits d'un programme mise à la disposition d'un responsable identifié pour un périmètre d'activité (par exemple un action ou une partie d'action) ou pour un territoire (par exemple une région ou un département), afin de rapprocher la gestion des crédits du terrain.

Ainsi, lors de la présentation des lois de finances, les ministères gestionnaires produiront en annexe un projet annuel de performance (PAP) pour chaque programme. Ce projet annuel comprendra « la présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir mesurés au moyen d'indicateurs précis dont le choix est justifié » (article 51 de la LOLF). Au projet de loi de règlement sera joint un rapport annuel de performance (RAP) qui permettra de confronter les résultats aux objectifs (article 54 de la LOLF).

A. LA POURSUITE DE LA DÉMARCHE DE GLOBALISATION DES CRÉDITS DANS LA PERSPECTIVE DE LA MISE EN oeUVRE DE LA LOLF

1. Les premières expériences de globalisation des crédits préfigurant la LOLF

Le projet de budget de la section travail pour 2004 a traduit de nouvelles avancées dans le sens d'une globalisation des crédits, démarche initiée par le comité interministériel pour la réforme de l'Etat (CIRE) du 12 octobre 2000, qui avait notamment décidé que : « chaque ministère engagera, au cours de l'année 2001, une démarche de contractualisation assortie de globalisation des moyens de fonctionnement et de rémunération avec certains services déconcentrés » . En conséquence, deux démarches budgétaires de globalisation ont été entreprises : la mise en place d'une dotation globale des moyens de fonctionnement destinés aux services déconcentrés, et celle d'une globalisation des crédits concernant la région Centre.

a) La dotation globale des moyens de fonctionnement destinés aux services déconcentrés

La dotation globale des moyens de fonctionnement destinés aux services est maintenue pour 2005. Après avoir, pour 2003, absorbé les crédits de communication, de formation, d'informatique, de modernisation et certains crédits de certification professionnelle, elle s'est notamment enrichie, pour 2004, des crédits de statistiques.

b) La globalisation des crédits concernant la région Centre

La mesure expérimentale de globalisation des crédits concernant la région Centre lancée au cours de l'année 2002 s'est poursuivie en 2004.

(1) La globalisation des crédits de fonctionnement dès 2002 (premier volet de l'expérimentation)

Une convention triennale (2002-2004) liant l'administration centrale et la direction régionale du travail (DRTEFP) a défini les orientations et les priorités d'action assignées à la région, ainsi que les résultats attendus assortis d'indicateurs. Un nouveau chapitre budgétaire 37-63 a été créé, qui rassemble l'ensemble des crédits afférents aux dépenses de fonctionnement de la région Centre. Il regroupe un article portant les dépenses de personnel, et un article destiné aux dépenses de fonctionnement hors personnel. Un principe de fongibilité asymétrique 32 ( * ) a été instauré entre ces deux lignes, préfigurant la pleine application de la LOLF.

Dès 2002, la globalisation des crédits concernant la région Centre a porté ses fruits.


La mise en oeuvre d'un principe de fongibilité asymétrique des crédits en région Centre
au travers de l'exécution du budget du travail en 2002 et en 2003

Les crédits disponibles apparus en gestion 2002 sur l'article regroupant les crédits de rémunération ont fait l'objet d'une « requalification », c'est à dire qu'ils ont été basculés sur l'article regroupant les crédits de fonctionnement. Les crédits disponibles apparus au titre des rémunérations se justifient notamment par un niveau de postes vacants supérieur aux hypothèses retenues pour l'élaboration du budget prévisionnel.

Ainsi, en 2002 et en 2003, 669.857 euros et 437.258 euros ont été respectivement « requalifiés ». Après un an d'expérimentation, il apparaît que la mise en oeuvre de la fongibilité asymétrique ne s'est pas traduite par une augmentation des dépenses de fonctionnement courant des services en région Centre. L'analyse des ratios annuels de fonctionnement des services déconcentrés montre en effet que la structure des dépenses de fonctionnement dans cette région ne diffère pas sensiblement de celles des autres, et même que la dépense moyenne par agent en 2002 et en 2003 y est inférieure à la moyenne nationale.

Les crédits supplémentaires liés à la requalification sont affectés au financement de projets lourds d'aménagement de locaux ou d'équipements des services, comme la restructuration intégrale sur 3 ans de la DDTEFP du Loiret.

La mise en oeuvre concrète de la fongibilité est toutefois alourdie par la nécessité de faire « remonter » à l'administration centrale les crédits sans emploi, le basculement des crédits de la rémunération vers le fonctionnement ne pouvant être réalisé que par l'administration Centrale.

(2) La globalisation de certains crédits d'intervention dès 2003 (second volet de l'expérimentation)

Pour 2003 , la démarche de globalisation a été élargie à certains crédits d'intervention , la région Centre étant chargée de mettre en oeuvre un programme dénommé « accès à l'emploi », pour lequel une dotation globalisée a été mise en place avec la création de l'article 44-80-10 « Dotation globalisée expérimentale de la région Centre ».

Dans le cadre de ce programme, la région Centre a élaboré un plan d'action destiné aux jeunes dont l'objectif final est la suppression en deux ans du différentiel entre la région Centre et l'ensemble national concernant la part des jeunes dans le chômage .

L'élaboration d'un plan d'action « jeunes »

A partir de 2003, l'objectif retenu sur la base d'un diagnostic territorial de la situation de l'emploi concerne l'emploi des jeunes : il s'agit de diminuer le différentiel entre la part des jeunes demandeurs d'emploi à l'échelon régional et celle constatée à l'échelon national. Pour autant, l'élaboration d'un plan d'action pour l'insertion des jeunes ne signifie pas qu'une priorité soit donnée aux jeunes au détriment des autres publics.

Le choix de cet objectif, confirmé par l'administration centrale, se justifie par :

- le niveau du différentiel constaté fin décembre 2002 : 1,6 point ;

- la lisibilité de cet objectif, qui facilite la mobilisation de services dans un contexte d'apprentissage de nouveaux modes de gestion publique ;

- la pertinence de cet objectif dans une optique de meilleure articulation des actions des différents acteurs (y compris les collectivités locales) à l'échelon territorial.

Il s'agit bien évidemment d'un objectif d'impact qui doit être apprécié en tendance, sur la base duquel un véritable plan d'action opérationnel a été élaboré. Ce plan d'action identifie quatre priorités, les dispositifs et actions concourant à ces priorités et les indicateurs d'activité et de résultats associés :

- améliorer l'insertion des jeunes qui passent par les structures d'accueil, d'information et d'orientation ;

- améliorer l'insertion des jeunes bénéficiaires de contrats aidés (contrat emploi solidarité, contrat emploi consolidé, insertion par l'activité économique) ;

- améliorer l'insertion des jeunes par la formation ;

- améliorer l'insertion des jeunes par l'accès à l'emploi marchand et à l'emploi durable.

Source : réponses au questionnaire budgétaire

(3) Indicateurs et résultats : un premier bilan

Le « contrat d'expérimentation » pose le principe d'un engagement des services et des opérateurs associés aux plans d'action (régionaux ou inter départementaux) sur des « objectifs de résultats mesurables par des indicateurs », ces indicateurs devant être « repris de la directive nationale d'orientation, lorsqu'ils existent, ou élaborés spécifiquement avec l'aide des services centraux et des opérateurs concernés ».

Un récent rapport 33 ( * ) de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), intitulé « Evaluation de l'expérimentation de globalisation de crédits en région Centre dans le services déconcentrés du secteur travail », porte des appréciations nuancées.

L'IGAS remarque que les indicateurs mis en place pour les crédits de rémunération de fonctionnement (premier volet de l'expérimentation) ont été de simples indicateurs de suivi, permettant toutefois le rapprochement des ratios de fonctionnement observés en région Centre avec les données nationales et la fixation d'objectifs pour 2004. Les indicateurs de résultats proprement dits n'apparaissent qu'avec la globalisation de crédits d'intervention (second volet de l'expérimentation), à partir de 2003.

Le rapport de l'IGAS reconnaît l'existence de « résultats tangibles » pour le premier volet, avec une analyse comparée des ratios locaux et nationaux ayant favorisé une maîtrise accrue des dépenses de personnel et de fonctionnement, ainsi que la « requalification » de crédits ( supra ). D'une façon générale, il constate « des effets d'apprentissage très positifs ».

Il observe cependant que la diversité des objectifs des différents partenaires a fait obstacle à la formalisation des objectifs dans le contrat, les objectifs de départ apparaissant trop ambitieux par rapport aux moyens mobilisables .

Ainsi, « le choix d'un plan d'action ciblé sur le public jeune avec un objectif de résultat ambitieux [cf. supra ] (...) était en fort décalage avec l'enveloppe fongible d'intervention », et, d'une façon générale, « avec les leviers d'action réellement mobilisables par les services déconcentrés ». En outre, le système d'information ad hoc s'est montré insuffisant .

L'IGAS a tiré les leçons de cette expérimentation pour la mise en place des objectifs et des indicateurs associés aux programmes au sein de la LOLF.

Les enseignements devant être tirés des difficultés rencontrées dans la perspective de la mise en oeuvre de la LOLF

1. Généraliser les démarches de préfiguration concrète de la LOLF

En ce qui concerne la région Centre, la mission de l'IGAS préconise de clarifier dès 2004 le volet 2 de l'expérimentation, et de poursuivre celle-ci en 2005, mais en recalant le contenu des deux lignes fongibles sur le périmètre des futurs budgets opérationnels de programme (BOP) correspondants.

D'autre part, elle estime aujourd'hui crucial de faire en sorte que les services déconcentrés puissent se préparer de manière concrète à l'ensemble des changements que représentera la gestion, dès 2006, de cinq budgets de programme, dans une logique de responsabilité sur des objectifs opérationnels . C'est pourquoi la mission de l'IGAS préconise d'associer des représentants des services déconcentrés aux groupes projets nationaux chargés d'élaborer les projets annuels de performance (PAP), et de présenter à la direction du budget à l'été 2004 un schéma de gestion 2005 permettant à chaque CTRI d'expérimenter concrètement, dès 2005, la gestion d'au moins une ligne fongible correspondant au périmètre d'un futur BOP.

2. Clarifier à court terme des questions difficiles

La mission de l'IGAS plaide pour que le principe d'un positionnement régional des BOP déconcentrés soit retenu explicitement ; cela suppose que l'ensemble des CTRI évolue vers un fonctionnement plus structuré et plus solidaire, et que la responsabilité propre des directeurs régionaux soit affirmée.

L'expérimentation conduite en région Centre éclaire également les difficultés qui devront être surmontées pour avancer vers la logique de responsabilisation des gestionnaires portée par la LOLF. Trois points sont particulièrement soulignés :

- l' importance du lien entre responsabilisation et visibilité sur les moyens , qui devrait conduire à une réflexion interministérielle sur les conditions dans lesquelles seront renégociés les objectifs en cas de gel de crédits ;

- l'importance d'une plus forte implication des managers opérationnels dans la gestion des ressources humaines ;

- l' importance du lien entre responsabilité et réalisme des objectifs , dont la définition doit se rapporter à la réalité de l'action et des moyens mis en oeuvre.

Source : rapport n° 2004 030 de l'IGAS (mai 2004) précité

Pour 2004, le ministère a poursuivi l'expérimentation engagée avec la région Centre. Il a également décidé d'associer d'autres régions aux travaux de modernisation de la gestion publique et de préparation du ministère à la mise en oeuvre de la loi organique. Sept autres régions sont donc engagées dans des expérimentations qui complèteront les conclusions tirées du travail réalisé en région Centre.

2. L'expérimentation des budgets opérationnels de programmes en 2005

Pour 2005, l'expérimentation se rapproche singulièrement d'une mise en oeuvre effective de la LOLF, puisqu'elle vise à inscrire l'action des huit régions expérimentatrices précédentes dans la déclinaison en budgets opérationnels de programme (BOP) 34 ( * ) des programmes composant la mission « travail ».

Cette démarche se déploie à deux niveaux. Au premier niveau , les huit régions s'engagent à élaborer un projet de budget opérationnel de programme (BOP) sur la base des crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2005.

A l'exception du programme 1 « Développement de l'emploi » (cf. infra le récapitulatif des programmes composant la mission « travail ») dont la quasi-totalité des crédits porte sur les allègements de cotisations sociales, chacun des quatre autres programmes est décliné en BOP par deux régions (sauf le programme 3 « Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques », décliné par trois régions), la région Centre déclinant à elle seule deux programmes en autant de BOP.

Cinq des huit régions se sont engagées dans le second niveau , constitué par la gestion globalisée des crédits correspondant au périmètre de leur BOP.

Il est précisé que les projets seront élaborés sur la base d'un périmètre principalement défini par les crédits pour lesquels les services concernés sont déjà ordonnateurs secondaires.

Des chapitres seront spécifiquement créés et dotés pour permettre la gestion globalisée à l'échelon des CTRI 35 ( * ) concernés, sans « remontée » de crédits en administration centrale (sauf pour les crédits de personnel) afin de remédier à certaines difficultés rencontrées dans l'expérimentation de globalisation en région Centre.

Les projets de BOP en cours d'élaboration comporteront des objectifs et des indicateurs de performance , qui pourront être directement calqués sur ceux des programmes. Cette première déclinaison des projets annuels de performance (PAP) au niveau des BOP constitue sans doute l' « expérimentation LOLF » la plus avancée du ministère .

3. Dans les services centraux : la poursuite de la globalisation partielle des moyens de fonctionnement

Dans la perspective de la mise en oeuvre de la LOLF, le ministère du travail a entamé en 2003 un processus de globalisation partielle des moyens de fonctionnement de l'administration centrale calqué sur la globalisation des moyens de fonctionnement des services déconcentrés.

Ce processus a été poursuivi et achevé en 2004. Les crédits de fonctionnement hors personnel de l'administration centrale, à l'exception de ceux concernant les ministres et secrétaires d'Etat (article 10), sont entièrement globalisés, au sein du chapitre 34-98, dans l'article 20 « administration centrale », cette ligne intégrant désormais les crédits de l'article 91 « Comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue » et ceux de l'article 92 « Commission nationale de la certification professionnelle ».

Les avantages attendus de la globalisation des crédits en cours
dans les services centraux du ministère du travail

La globalisation des crédits de fonctionnement doit permettre de modifier en profondeur les modes de gestion des services et les modes d'allocation des crédits disponibles . L'objectif poursuivi est d'optimiser l'utilisation des crédits mis à la disposition du ministère dans un contexte budgétaire de réduction des moyens de fonctionnement des services.

Pour cela, les services gestionnaires des crédits de fonctionnement de l'administration centrale du ministère du travail doivent établir en début d'année un budget prévisionnel par projet, par action, par programme et par niveau de priorité.

Parallèlement, les administrations centrales du ministère disposent d'une enveloppe de crédits de fonctionnement globalisée qu'elles pourront utiliser avec une large autonomie, mais évidemment dans la limite du plafond de l'enveloppe.

Les crédits de la loi de finances sont répartis en fonction des priorités arrêtées par le ministère. Un suivi précis de l'exécution de ces projets est mené tout au long de l'année afin de permettre, au regard des niveaux d'exécution, des crédits disponibles et des aléas budgétaires, une réallocation vers des actions prioritaires par ailleurs ré ajustables en cours d'année.

* 32 Les crédits de dépenses de personnel ne peuvent abonder les crédits se rapportant aux autres dépenses de fonctionnement, alors que la réciproque est possible.

* 33 Rapport n° 2004 030 de mai 2004.

* 34 Cf. encadré supra intitulé « Rappel succinct des principaux instruments mis en place par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances ».

* 35 Comité technique régional interdépartemental ; cette instance est chargée de répartir au sein de chaque région les dotations entre la direction régionale et les directions départementale, sur la base des budgets prévisionnels présentés par chaque service.

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