C. LA SCIENCE NE PEUT ÉTABLIR QU'UN LIEN DE PROBABILITÉ ENTRE DES MALADIES RADIO-INDUITES SANS SIGNATURE ET L'EXPOSITION AUX RADIATIONS

A partir des données relatives aux expositions, l'estimation du nombre de victimes dépend des relations complexes entre exposition et apparition de la maladie. Pour bien comprendre la complexité de cette relation, il faut avoir à l'esprit les caractéristiques des maladies radio-induites.

1. Les maladies radio-induites sont sans signature et multifactorielles

Les maladies radio-induites les plus fréquentes sont des cancers.

Il est établi qu'il existe des maladies non cancéreuses au-delà de seuils de doses élevés de l'ordre de 500 mSv qui apparaissent de façon rapide et sont d'une gravité proportionnelle aux doses reçues. Des études sont en cours sur l'existence de pathologies non cancéreuses pour des expositions à faibles doses.

En ce qui concerne les cancers, ils peuvent apparaître après des délais de plusieurs années. Il s'agit de leucémies, de cancers de la thyroïde, du poumon, du colon, de la peau sauf le mélanome, mais aussi cancers des glandes salivaires, de l'oesophage, de l'estomac, du foie, de l'intestin grêle, du rectum, du rein, de la vessie, du cerveau, de l'os et du tissu conjonctif, de l'utérus et de l'ovaire. La liste des cancers susceptibles d'être radio-induits établie par Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des rayonnements ionisants (UNSCEAR) figure en annexe du présent rapport.

Ces cancers comme tous les cancers sont des maladies dites « sans signature ». Cela signifie qu'aucune analyse histologique ne permet de déterminer l'agent causal qui est à l'origine de cette maladie. On ne peut jamais, face à une de ces maladies, affirmer avec certitude qu'il s'agit d'une maladie déclenchée par une irradiation ou par un facteur héréditaire ou comportemental.

La science ne peut établir qu'un lien de probabilité entre les contaminations et les maladies radio-induites et non un lien certain . Ce lien de probabilité est estimé à partir d'études épidémiologiques. Seules ces dernières permettent d'établir un lien de probabilité entre un degré d'exposition et le déclenchement d'une maladie radio-induite. Dans la pratique, ce lien probabiliste dépend de nombreux facteurs dont : l'âge de l'exposition, l'âge de survenue de la maladie, le degré d'exposition, la nature de la maladie.

Les études épidémiologiques sur lesquelles se fondent les connaissances scientifiques dans ce domaine sont rares.

Les populations irradiées sont en effet peu nombreuses au regard des échantillons de populations habituellement utilisés dans les enquêtes de santé publique. C'est notamment une des difficultés rencontrées en Polynésie pour établir des données statistiques fiables. Des études ont été réalisées à la suite des bombardements de Hiroshima et Nagasaki, à la suite des essais américains et français, un certain nombre à la suite de l'accident de Tchernobyl ou d'accidents de radiothérapie, mais le corpus existant est assez réduit. Ceci explique que les connaissances dans ce domaine ne soient pas fixées et évoluent rapidement en fonction des nouvelles études sur de nouvelles données ou revisitant des données existantes.

En l'état des connaissances, il existe des modélisations statistiques qui sur la base des études épidémiologiques permettent d'estimer à partir des caractéristiques d'une exposition à des rayonnements ionisants (doses d'exposition, âge de la personne, âge de survenue de la maladie) l'excès de probabilité de développer telle ou telle maladie à tel âge par rapport à une situation où la personne n'aurait pas été contaminée.

Sans signature certaine, ces cancers comme tous les cancers sont également multifactoriels. Ils peuvent avoir plusieurs causes. Le cancer du poumon qui figure sur la liste des maladies radio-induites peut avoir pour origine aussi bien une exposition à des rayonnements ionisants qu'une consommation régulière et intensive de tabac que d'autres facteurs ou que tous ces facteurs combinés. Il n'y a donc aucune particularité des maladies radio-induites qui permettrait de les distinguer.

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