B. LES AMÉLIORATIONS PROPOSÉES

1. Les dispositions adoptées à l'Assemblée nationale

La proposition de loi adoptée à l'Assemblée nationale procède à plusieurs adaptations utiles du congé d'accompagnement d'un proche en fin de vie.

• L'élargissement des bénéficiaires

Son article 2 élargit aux frères et soeurs le bénéfice du congé, qu'ils relèvent du secteur privé ou de la fonction publique.

• L'unification de la dénomination

Son article 3 substitue l'expression « congé de solidarité familiale », aujourd'hui utilisée dans le seul code du travail, à celle de « congé d'accompagnement d'une personne en fin de vie » applicable aux fonctionnaires et militaires.

Ce type de congé porterait donc désormais un nom unique , quel que soit le statut professionnel de l'accompagnant, celui de congé de solidarité familiale .

• La précision rédactionnelle du domicile partagé

Dans le droit actuel, tout salarié ou fonctionnaire, dont « une personne partageant son domicile » souffre d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital (salariés) ou fait l'objet de soins palliatifs (militaires et fonctionnaires), est éligible au droit au congé. Cette rédaction, approximative, est ici remplacée par celle de « personne partageant le même domicile ».

• La situation de la personne en fin de vie

Le code du travail prévoit aujourd'hui que la personne accompagnée doit souffrir « d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ». Or, la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie 5 ( * ) a retenu l'expression plus complète de « pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou qui est en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause ».

La proposition de loi a fait le choix de la cohérence et intègre cette définition dans le code du travail ; ce faisant, elle ne supprime pas la différence avec les statuts de la fonction publique.

• La possibilité de fractionner le congé

A l'initiative de plusieurs députés, l'Assemblée nationale a ouvert la possibilité, pour les salariés relevant du code du travail, de fractionner le congé de solidarité familiale en plusieurs périodes, à condition de prévenir l'employeur au moins soixante-douze heures avant la date de chaque période de congé. Cette mesure n'a pas non plus été transposée pour les fonctionnaires et militaires.

2. Les propositions de votre commission

a) Gommer les différences entre les secteurs privé et public

On l'a vu, la situation n'est pas la même selon que la personne qui choisit d'accompagner un proche relève du code du travail ou d'un statut de la fonction publique.

L'examen de cette proposition de loi offre donc l'occasion d' uniformiser les modalités du congé de solidarité familiale , ce qui suppose d'amender les statuts de la fonction publique, afin :

- de prévoir une définition identique de l'état de santé de la personne accompagnée , calquée sur celle du code du travail, c'est-à-dire celle de la loi de 2005 : il s'agit d'une personne qui « souffre d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou qui est en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause ».

Cette définition recouvre le cas des personnes qui font l'objet de soins palliatifs. L'article L. 1111-10 du code de la santé publique prévoit en effet que ceux-ci sont dispensés lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, décide de limiter ou d'arrêter son traitement ;

- de permettre une fois le renouvellement du congé , lequel reste non rémunéré ;

- d'y inclure la possibilité de fractionnement , introduite pour les salariés à l'Assemblée nationale.

b) Sécuriser la couverture sociale de la personne qui s'arrête de travailler pour accompagner un proche en fin de vie

Juridiquement, le congé de solidarité familiale ou d'accompagnement se formule d'une manière plutôt simple : une personne peut s'arrêter de travailler pour accompagner un proche en fin de vie, tout en retrouvant ses droits à l'identique à la fin du congé.

Cette parenthèse dans sa carrière professionnelle comporte pour autant de grandes incertitudes , notamment sur la protection sociale qu'elle conserve durant cette période. Le trimestre du congé, deux au maximum, sont-ils décomptés dans le calcul des droits à pension ? Comment s'organise la couverture maladie ou maternité ? Ces questions essentielles ne trouvent aucune réponse explicite, positive ou négative, ni dans le droit existant ni dans la proposition de loi. Or, l'absence de base juridique fragilise la situation des accompagnants , notamment au moment de la reprise d'activité, c'est-à-dire dans les faits juste après le décès de leur proche.

Depuis 2007, les assurés conservent leurs droits au remboursement des soins (prestations en nature) pendant un an, à partir du moment où ils cessent de remplir les conditions requises. Pour les indemnités journalières (prestations en espèces), il est nécessaire d'avoir perçu un certain niveau de salaire durant les six mois précédents ou avoir travaillé un certain nombre d'heures durant les trois mois précédents. On peut donc considérer que, grâce au maintien des droits antérieurement acquis, la période du congé devrait être à peu près couverte pour le risque maladie . Mais quels sont les droits des personnes à l'issue du congé ?

Rappelant que ce congé existe depuis dix ans maintenant, votre rapporteur a interrogé le ministère de la santé et la caisse nationale d'assurance maladie sur les pratiques en cours. Il semblerait que personne ne puisse s'appuyer sur une expérience précise, ce qui confirme que très peu de Français ont demandé à exercer leur droit à ce congé.

Or, il faut noter que tous les autres congés ou allocations existants définissent les conséquences qui en résultent en termes de protection sociale . Par exemple, l'article R. 313-8 du code de la sécurité sociale prévoit que, pour l'ouverture des droits 6 ( * ) , chaque journée de perception de l'allocation journalière de présence parentale est considérée comme équivalant à quatre fois la valeur du Smic ou à quatre heures de travail salarié.

Plus protecteur encore, l'article L. 161-9 du même code concerne les allocataires du complément de libre choix d'activité de la prestation d'accueil du jeune enfant ou du congé parental d'éducation. Ceux-ci conservent leurs droits aux prestations en nature de l'assurance maladie et maternité aussi longtemps qu'ils bénéficient de ce complément ou de ce congé. Surtout, cet article élargit la couverture sociale à la période après le congé, qu'il y ait ou non reprise de l'activité. Ainsi, en cas de reprise du travail, ces personnes retrouvent leurs droits aux prestations en nature et en espèce de l'assurance maladie, maternité, invalidité et décès, pendant une période fixée par décret. En cas de non-reprise du travail, en raison d'une maladie ou d'une nouvelle maternité, elles retrouvent leurs droits aux prestations en nature et en espèces du régime antérieur, pendant la durée de l'arrêt de travail pour cause de maladie ou du congé légal de maternité ; puis, lors de la reprise du travail, elles retrouvent leurs droits aux prestations pendant une durée fixée par décret.

Les articles suivants précisent dans le même esprit les droits ouverts aux personnes qui accomplissent leur service national, aux détenus libérés, aux ayants droit d'un assuré décédé ou encore aux enfants, ayants droit d'un assuré social, qui atteignent l'âge de seize ans.

Dans ces conditions, votre commission a souhaité sécuriser la protection sociale des accompagnants, pour éviter que le congé de solidarité familiale ne vienne fragiliser leur situation.

* 5 Loi n° 2005-370, dite loi Leonetti.

* 6 Notamment pour les prestations en nature des assurances maladie et maternité, les indemnités journalières de l'assurance maladie, l'indemnité journalière de repos (lors d'une adoption), l'assurance invalidité et l'assurance décès.

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