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Rapport n° 392 (2009-2010) de M. Jean-René LECERF , fait au nom de la commission des lois, déposé le 7 avril 2010

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N° 392

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 avril 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi organique , MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , relatif à l' application de l' article 65 de la Constitution ,

Par M. Jean-René LECERF,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest , président ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. François Zocchetto , vice-présidents ; MM. Laurent Béteille, Christian Cointat, Charles Gautier, Jacques Mahéas , secrétaires ; M. Alain Anziani, Mmes Éliane Assassi, Nicole Bonnefoy, Alima Boumediene-Thiery, MM. Elie Brun, François-Noël Buffet, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Yves Détraigne, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Pierre Fauchon, Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Christophe-André Frassa, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Mmes Jacqueline Gourault, Virginie Klès, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, François Pillet, Hugues Portelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Richard Tuheiava, Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir le(s) numéro(s) :

Première lecture : 460 rect. 635 , 636 (2008-2009) et T.A. 11 (2009-2010)

Deuxième lecture : 322 et 393 (2009-2010)

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

Première lecture : 1983 , 2163 et T.A. 425

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le 7 avril 2010 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président , la commission a examiné le rapport de M. Jean-René Lecerf et établi son texte pour la deuxième lecture du projet de loi organique n° 322 (2009-2010), modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution.

Le rapporteur a souligné que l'Assemblée nationale avait validé l'essentiel des modifications apportées par le Sénat en première lecture, qu'il s'agisse du dispositif garantissant que les formations siégeant en matière disciplinaire seront toujours composées à parité de membres magistrats et de membres non magistrats, de la compétence reconnue à la formation plénière pour se saisir proprio motu des questions relatives à la déontologie des magistrats, de l'abaissement du quorum requis pour l'adoption de sanctions ou de propositions de sanctions par les formations compétentes en matière disciplinaire, ou encore de la configuration retenue pour les commissions d'admission des requêtes.

Il a indiqué que, sur d'autres points, l'Assemblée nationale avait modifié de manière marginale les solutions adoptées par le Sénat, en prévoyant que la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans la nomination des personnalités qualifiées serait assurée par chaque autorité de nomination et non de manière globale, en portant de dix jours ouvrables à quinze jours le délai imparti à la formation compétente du Conseil supérieur pour se prononcer sur la mesure d'interdiction temporaire d'exercice applicable à un magistrat, et en prévoyant que le justiciable auteur de la plainte adressée contre un magistrat pourra être entendu par la commission d'admission des requêtes.

La commission des lois n'a pas souhaité revenir sur la suppression par l'Assemblée nationale de l'avis rendu par le CSM sur la proposition de nomination conjointe par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette cour, du secrétaire général de l'institution.

En revanche, elle a rétabli l'interdiction faite à l'avocat membre du CSM de plaider devant les juridictions judiciaires, en écartant toutefois, comme l'avait décidé l'Assemblée nationale, l'interdiction d'agir en conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure.

Elle a par ailleurs défini une nouvelle procédure permettant à la formation plénière de garantir le respect par les membres du CSM de leurs obligations déontologiques. Enfin, elle a rétabli l'article consacrant l'autonomie budgétaire du CSM que l'Assemblée nationale avait supprimé.

La commission des lois a adopté, en deuxième lecture, le projet de loi organique ainsi rédigé.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner, en deuxième lecture, le projet de loi organique relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture le 23 février 2010.

Plusieurs des modifications apportées par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 appelaient en effet une adaptation des textes organiques : la composition du Conseil supérieur de la magistrature a évolué, les membres non magistrats devenant majoritaires dans les formations siégeant en matière de nomination, les formations siégeant en matière disciplinaire étant composées à parité de membres magistrats et non magistrats. Une formation plénière a été instituée et la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet a vu ses attributions renforcées puisqu'elle rend un avis sur la nomination du procureur général près la Cour de cassation et des procureurs généraux près les cours d'appel. Enfin, un nouveau droit a été reconnu au justiciable, pour lui permettre de saisir directement le Conseil supérieur du comportement d'un magistrat susceptible de relever d'une poursuite disciplinaire.

L'examen de ce texte s'articule désormais avec celui d'un autre projet de loi organique, prorogeant le mandat des membres du Conseil supérieur de la magistrature, afin de permettre la désignation des membres de cet organe selon une composition conforme à l'article 65 de la Constitution issu de la révision du 23 juillet 2008 1 ( * ) .

Lors de l'examen du projet de loi organique relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution, le 16 décembre 2009, par sa commission des lois et le 23 février 2010 en séance publique, l'Assemblée nationale a validé l'essentiel des modifications apportées à ce texte par le Sénat en première lecture. Le texte déposé au Sénat en deuxième lecture comporte ainsi quinze articles conformes sur trente-trois, un article supprimé et trois articles additionnels de coordination. En outre, sept articles n'ont fait l'objet que de modifications rédactionnelles ou de coordination.

Les députés ont par conséquent tenu compte, dans une grande mesure, des apports du Sénat, en particulier s'agissant :

- des obligations déontologiques des membres du Conseil supérieur de la magistrature (article 6 bis du projet de loi organique) ;

- de la présence paritaire, au sein des formations siégeant en matière disciplinaire, des membres appartenant à l'ordre judiciaire et des membres n'y appartenant pas (article 11 bis du projet de loi organique) ;

- de la suppression de la procédure de référé du premier président de la Cour de cassation, ou du procureur général près cette cour, en matière d'interdiction temporaire d'exercice d'un magistrat (articles 17 et 24 du projet de loi organique) ;

- des conditions de saisine du Conseil supérieur de la magistrature par les justiciables (articles 18 et 25 du projet de loi organique).

Le présent rapport examine les rares points de divergence qui sont apparus entre l'Assemblée nationale et le Sénat à l'issue de la première lecture.

*

* *

I. LES POINTS D'ACCORD ENTRE LES DEUX ASSEMBLÉES

A. LES DISPOSITIONS ADOPTÉES EN PREMIÈRE LECTURE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ET PAR LE SÉNAT DANS LES MÊMES TERMES

En première lecture, l'Assemblée nationale a approuvé :

- l'abaissement du quorum nécessaire pour l'adoption de sanctions et de propositions de sanction par la formation compétente à l'égard des magistrats du siège et par la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet siégeant en matière disciplinaire. Ce quorum est ainsi réduit de huit membres plus le président à sept membres plus le président (article 9 du projet de loi organique). Les députés n'ont apporté à cette disposition qu'une modification purement rédactionnelle ;

- sous réserve de trois modifications rédactionnelles, l'organisation des commissions d'admission des requêtes chargées de filtrer les plaintes adressées par les justiciables au Conseil supérieur de la magistrature (article 11 du projet de loi organique) ;

- le principe de parité selon lequel, lorsqu'elle siège en matière disciplinaire, la formation compétente du Conseil supérieur comprend un nombre égal de membres appartenant à l'ordre judiciaire et de membres n'y appartenant pas (article 11 bis du projet de loi organique) ;

- l'affirmation, conformément à l'article 65 de la Constitution, de la compétence de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature pour se prononcer proprio motu sur les questions relatives à la déontologie des magistrats (article 12 du projet de loi organique) ;

- sous réserve d'une modification rédactionnelle, les compléments apportés à la définition de la faute disciplinaire , reprenant la décision du Conseil constitutionnel du 1 er mars 2007 (article 14 bis du projet de loi organique) ;

- l'harmonisation des conditions d'information des magistrats visés par une saisine disciplinaire, qu'ils appartiennent au siège ou au parquet (article 19 du projet de loi organique).

B. LES DISPOSITIONS COMPLÉTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, SANS REMISE EN CAUSE DES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

1. L'objectif de représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les personnalités qualifiées siégeant au Conseil supérieur de la magistrature

A l'inititative de votre rapporteur, le Sénat a précisé que les nominations des personnalités qualifiées par les autorités mentionnées à l'article 65 de la Constitution devraient concourir à une représentation équilibrée des hommes et des femmes (article 3 du projet de loi organique).

L'Assemblée nationale a complété cette disposition, à l'initiative de son rapporteur, M. Philippe Houillon, en prévoyant que l'objectif de représentation équilibrée des hommes et des femmes s'appliquerait à chaque autorité de nomination. Cette précision paraît en effet judicieuse, puisque le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun deux personnalités qualifiées. Elle permettra d'éviter qu'une autorité nomme deux personnalités du même sexe, obligeant ainsi une des deux autres autorités à corriger ce déséquilibre.

2. La procédure d'interdiction temporaire d'exercice applicable aux magistrats du siège et du parquet

L'Assemblée nationale a approuvé les modifications apportées au projet de loi organique en ce qui concerne les aménagements relatifs à la procédure d'interdiction temporaire d'exercice (art. 17 et 24 du projet de loi organique). Aussi n'est-elle pas revenue sur la suppression de la procédure de référé du premier président de la Cour de cassation ou du procureur général près cette cour, dans l'hypothèse où le Conseil supérieur de la magistrature n'aurait pu statuer dans les huit jours.

En revanche, les députés ont porté de dix jours ouvrables à quinze jours le délai au cours duquel la formation compétente du Conseil supérieur doit prendre une décision , ou rendre un avis, sur la demande d'interdiction temporaire d'exercice d'un magistrat, formulée par le ministre de la justice ou par un chef de cour. Ce délai correspond à celui que votre commission des lois avait retenu lors de l'examen du texte en première lecture.

3. La saisine disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature par les justiciables

L'Assemblée nationale a confirmé les améliorations apportées par le Sénat au dispositif de la saisine disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature par les justiciables (art. 18 et 25 du projet de loi organique). La plainte pourrait ainsi être dirigée, par exception, contre un magistrat qui demeure saisi de la procédure ou qui appartient à un parquet qui demeure chargé de la procédure si, compte tenu de la procédure et de la gravité du manquement évoqué, la commission d'admission des requêtes estime qu'elle doit être examinée au fond.

En première lecture, le Sénat a renforcé les garanties offertes au magistrat mis en cause, en prévoyant que ce dernier :

- devrait être informé dès que la commission d'admission des requêtes déclarait une plainte recevable et engageait l'examen d'une éventuelle qualification disciplinaire des faits ;

- pourrait être entendu par la commission d'admission des requêtes.

L'Assemblée nationale a complété ces dispositions en adoptant deux amendements de M. André Vallini, donnant à la commission d'admission des requêtes, lorsqu'elle déclare une plainte recevable, la possibilité d'entendre le justiciable auteur de la saisine.

II. LES POINTS DE DIVERGENCE ENTRE LES DEUX ASSEMBLÉES

1. Les conditions d'exercice professionnel de l'avocat membre du Conseil supérieur de la magistrature

En première lecture, le Sénat a souhaité écarter tout risque de suspicion quant à l'indépendance de l'avocat appelé à siéger au sein du Conseil supérieur de la magistrature. A cette fin, il avait prévu que, si l'avocat pouvait, par exception, exercer sa profession, il ne pouvait, pendant la durée de son mandat, plaider devant les tribunaux, ni agir en conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure (art. 4 du projet de loi organique).

Ce régime d'incompatibilité visait également à éviter toute mise en cause, par une partie à un procès, de magistrats dont la carrière aurait été, ou pourrait être un jour, examinée par un membre du Conseil supérieur de la magistrature qui serait par ailleurs l'avocat de la partie adverse.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois, a supprimé ces restrictions. Dans son rapport, M. Philippe Houillon juge « souhaitable que l'avocat désigné ès qualités puisse continuer à plaider devant les tribunaux et à conseiller des parties à un procès, la seule réserve étant le respect strict de la règle de déport qui est consacrée pour l'ensemble des membres du Conseil supérieur de la magistrature par l'article 6 bis du présent projet de loi organique » 2 ( * ) .

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adapté le dispositif relatif à la démission d'office d'un membre du Conseil supérieur de la magistrature qui resterait dans une situation d'incompatibilité à l'issue d'un délai d'un mois après son entrée en fonctions, afin de prendre en compte l'existence de trois formations distinctes au sein du Conseil supérieur. Il reviendrait par conséquent au président de la formation plénière de constater, après avis de cette formation, une telle démission d'office.

2. Les exigences déontologiques applicables aux membres du Conseil supérieur de la magistrature

Le Sénat, confirmant le texte adopté par la commission des lois a inséré dans le projet de loi organique un article 6 bis relatif aux obligations déontologiques applicables aux membres du Conseil supérieur de la magistrature. Cette disposition faisait référence aux exigences d'indépendance, d'impartialité et d'intégrité et confiait au président de chaque formation le soin de prendre les mesures appropriées pour en assurer le respect.

L'Assemblée nationale a complété en première lecture la liste des obligations déontologiques s'imposant aux membres du conseil supérieur de la magistrature, en mentionnant l'exigence de dignité.

Elle a en outre supprimé l'alinéa prévoyant que le président de chaque formation prendrait les mesures appropriées pour assurer le respect des obligations déontologiques.

3. L'avis du Conseil supérieur de la magistrature sur la nomination du secrétaire général

Le Sénat a souhaité, suivant la position de la commission des lois et de son rapporteur, que le secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature soit nommé par décret du Président de la République sur proposition conjointe du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette cour, après avis du Conseil supérieur (article 7 du projet de loi organique). Il s'agissait ainsi d'associer le Conseil supérieur à la désignation d'un responsable administratif dont le rôle est appelé à s'amplifier.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a supprimé, à l'initiative de son rapporteur, cet avis du Conseil supérieur de la magistrature sur la proposition de nomination émise par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette cour, considérant que la Constitution ne prévoyait pas de compétence de la réunion de l'ensemble des membres du Conseil supérieur. Son rapporteur a en outre observé que l'avis du Conseil supérieur de la magistrature risquerait de retarder la nomination du secrétaire général.

4. L'autonomie budgétaire du CSM

Le Sénat avait adopté en première lecture un amendement de votre rapporteur visant à affirmer l'autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature. En effet, depuis la première application de la loi organique du 1 er août 2001 (LOLF) lors du projet de loi de finances pour 2006, la commission des lois déplore que le CSM soit réduit à une simple action du programme « justice judiciaire » de la mission « Justice », ce qui le place sous la responsabilité de la direction des services judiciaires 3 ( * ) .

Aussi la commission des lois a-t-elle réitéré chaque année depuis 2005 sa demande de modification de l'architecture budgétaire, afin que les crédits alloués au CSM soient inscrits dans la mission « pouvoirs publics », qui comprend les crédits destinés au Conseil constitutionnel et à la Cour de justice de la République.

En cohérence avec cette position ancienne, le Sénat avait adopté en première lecture un article additionnel prévoyant que l'autonomie budgétaire du CSM serait assurée dans les conditions déterminées par une loi de finances (article 7 bis du projet de loi organique).

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur supprimant cet article.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : RENFORCER L'INDÉPENDANCE ET L'IMPARTIALITÉ DU CSM

Outre un amendement rédactionnel à l'article 22 du projet de loi organique, votre commission a adopté quatre amendements de son rapporteur visant à apporter au Conseil supérieur de la magistrature et à la justice les meilleures garanties d'indépendance, tout en prenant en compte les positions exprimées par l'Assemblée nationale.

1. Maintenir l'interdiction de plaider pour l'avocat membre du Conseil supérieur

La possibilité, rétablie par l'Assemblée nationale, pour l'avocat membre du CSM, de continuer à plaider alimentera, même sans fondement, le soupçon des justiciables sur l'impartialité des magistrats chargés de statuer dans l'affaire qui les opposent à une partie défendue par lui. Elle pourrait même mettre en péril la légalité des décisions rendues dans ces conditions.

Pour éviter que de telles situations puissent se produire, votre commission a rétabli l'interdiction de plaider de l'avocat devant les juridictions judiciaires (article 4 du projet de loi organique). Pour garantir à l'avocat un exercice suffisamment complet de sa profession, elle n'a toutefois pas repris l'interdiction de tenir lieu de conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure que le Sénat avait adoptée à son invitation en première lecture.

2. Donner au CSM les moyens d'assurer le respect des exigences déontologiques

Les obligations déontologiques des membres du Conseil supérieur ne seront effectives qu'à la condition que l'institution ait les moyens d'en imposer le respect aux intéressés.

C'est pourquoi votre commission a prévu, en substitution de la procédure initialement adoptée par le Sénat et supprimée par l'Assemblée nationale, que la formation plénière du CSM, saisie en ce sens par le président d'une des formations du Conseil supérieur, statuera, à la majorité simple des membres la composant, sur le manquement d'un membre à une de ses obligations déontologiques et prononcera, le cas échéant, sa suspension temporaire ou sa démission d'office (article 6 bis du projet de loi organique).

La formation saisie d'une affaire où la question du déport d'un membre se pose pourra assurer le respect de cette exigence au terme d'une procédure identique.

Enfin, votre commission a rendu la procédure de constat de démission d'office modifiée par l'Assemblée nationale applicable à l'empêchement permanent d'un membre qui ne serait plus en mesure, de manière définitive, d'exercer ses fonctions.

3. Réaffirmer la nécessaire autonomie budgétaire de l'institution

La mission constitutionnelle qui est celle du Conseil supérieur impose que l'indépendance de l'institution soit garantie dans tous ses aspects. Or, cette indépendance n'est pas acquise au plan budgétaire, quand le directeur des services judiciaires, responsable du programme qui inclut les crédits du Conseil supérieur, est aussi chargé de présenter les propositions de nominations sur lesquelles le CSM rend son avis.

Au nom de la nécessaire indépendance de l'institution votre commission a en conséquence rétabli l'article 7 bis du projet de loi organique, supprimé par que l'Assemblée nationale, qui consacre l'autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature.

*

* *

Votre commission a adopté le projet de loi organique ainsi modifié.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 3 (art. 5-1 et 5-2 nouveaux de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Modalités de désignation de l'avocat et des six personnalités qualifiées membres du Conseil supérieur de la magistrature

Cet article précise les conditions dans lesquelles l'avocat et les six personnalités membres du Conseil de la magistrature sont désignés.

Le projet de loi prévoyait à l'origine que l'avocat serait désigné par le président du Conseil national des barreaux, après avis simple de l'assemblée général de ce conseil. À l'initiative de votre rapporteur, le Sénat a transformé cet avis simple en avis conforme afin que l'avocat membre du CSM soit nommé dans des formes équivalentes à celles des autres membres nommés ès qualité .

Le Sénat a par ailleurs prévu que la désignation par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale des personnalités qualifiées membres du Conseil supérieur devra répondre à une représentation équilibrée des hommes et des femmes.

Afin de ménager le pouvoir d'appréciation des autorités de nomination, la commission des lois de l'Assemblée nationale a précisé que chacune d'entre elles n'aurait à tenir compte de l'objectif de parité que pour les seules nominations qu'elle prononce, sans que le choix des deux autres interfère avec le leur.

Elle a par ailleurs adopté un amendement rédactionnel.

Votre commission a adopté l'article 3 sans modification .

Article 4 (art. 6 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Incompatibilités applicables aux membres du Conseil supérieur de la magistrature

Cet article vise à autoriser l'avocat membre du Conseil supérieur à continuer d'exercer sa profession. À l'initiative de l'Assemblée nationale, il adapte à la nouvelle organisation du Conseil supérieur de la magistrature, la procédure de constat de la situation d'incompatibilité dans laquelle se trouve un membre de l'institution.

? La question du maintien ou non de l'interdiction pour un avocat de plaider

La règle générale est qu'aucun membre du CSM ne peut exercer la profession d'avocat. Le projet de loi initial du gouvernement en exceptait l'avocat désigné ès qualité . Cependant, en première lecture, suivant en cela la commission des lois, le Sénat a atténué cette exception, en précisant que l'avocat ne pouvait, pour toute la durée de son mandat, ni plaider ni tenir le rôle de conseil juridique pour une partie engagée dans une procédure devant une juridiction.

L'Assemblée nationale a supprimé la disposition adoptée par le Sénat et rétabli dans sa globalité l'exception dont bénéficie l'avocat. Ce dernier pourrait ainsi continuer à exercer sans réserve sa profession. Seul jouerait à son égard l'exigence de déport qui vaut pour tous les membres du Conseil supérieur.

Pour défendre cette position, M. Philippe Houillon, rapporteur à l'Assemblée nationale, a fait valoir que la mention d'un avocat dans la nouvelle rédaction de l'article 65 de la Constitution « traduit la volonté du Constituant que participe aux travaux du CSM un avocat inscrit au tableau de l'ordre et exerçant pleinement sa profession ».

Par ailleurs, il a considéré qu'il n'était pas possible de soumettre l'avocat à un régime d'incompatibilité plus rigoureux qu'un membre magistrat du parquet qui doit être considéré comme « une partie au procès, au même titre que l'avocat ».

Aucun de ces arguments ne paraît cependant décisif.

L'exigence constitutionnelle tendant à ce soit désigné un avocat est satisfaite dès lors que le titulaire du poste a bien cette qualité au jour de sa désignation et ne la perd pas au cours de son mandat. Les modalités particulières de son exercice professionnel n'entrent pas en ligne de compte. Un avocat honoraire pourrait tout à fait valablement siéger à ce titre, comme un avocat qui s'abstiendrait de plaider. À titre de comparaison, nul ne conteste la légitimité à siéger au sein du Conseil supérieur des membres magistrats qui ont demandé, en vertu de l'article 8 de la loi organique du 5 février 1994, leur détachement ou une décharge partielle d'activité. En outre, les auditions conduites par votre rapporteur ont établi que de nombreux avocats exerçaient leur profession sans plaider, en confiant ce soin à leurs collaborateurs, ou en ne plaidant que de manière très exceptionnelle.

Plus fondamentalement, la position de l'avocat ne peut se comparer à celle du ministère public, dont les réquisitions sont motivées par l'intérêt général, et non par celui d'une partie à l'instance, et qui bénéficie de garanties statuaires d'indépendance.

Les auditions auxquelles a procédé votre rapporteur ont confirmé dans leur très grande majorité les réserves que susciterait la poursuite de l'intégralité sa profession par l'avocat membre du Conseil supérieur de la magistrature.

Comme votre rapporteur a eu l'occasion de le souligner lors de la première lecture, il n'est pas suffisant que la justice soit rendue de manière impartiale, encore faut-il qu'elle ait toutes les apparences de l'impartialité. Or, sans que soit mise en cause la déontologie de l'avocat qui serait nommé ni celle du magistrat concerné, le simple fait que le premier défende une partie devant le second, alors qu'il aura, selon toute probabilité 4 ( * ) , à se prononcer sur son avenir pendant son mandat, suffira, aux yeux de la partie adverse, à jeter un doute sur l'impartialité du jugement qui sera rendu.

Le risque ne serait pas négligeable que, dans de telles situations, l'autre partie dépose une requête en récusation de son juge. Toute la procédure pourrait même se trouver fragilisée au regard du droit à un procès équitable et à un tribunal impartial posé par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Tant le souci de la sécurité juridique que celui de l'impartialité, aux yeux des citoyens, des décisions rendues par les juridictions justifient donc de restreindre l'exercice professionnel de l'avocat membre du Conseil supérieur, à la part de ses activités qui ne l'opposeront pas à un magistrat chargé de trancher le litige qu'il défend.

Une telle interdiction évitera de surcroît à l'avocat d'avoir à se déporter de trop nombreuses fois, ce qui risquerait de déséquilibrer durablement la composition des formations où il siège. Elle évitera aussi qu'il manque de se déporter faute de s'être souvenu que le juge sur lequel il doit statuer a fait partie d'une juridiction devant laquelle il a plaidé pendant son mandat.

En première lecture, le Sénat avait prévu d'interdire à l'avocat de plaider et de jouer le rôle de conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure. Pour faire droit à la préoccupation exprimée par M. Philippe Houillon, rapporteur de l'Assemblée nationale, que l'avocat soit en mesure d'avoir un exercice professionnel suffisant, votre commission a considéré que la seule interdiction de plaider devant les juridictions judiciaires serait suffisante à garantir le respect de l'exigence d'impartialité. Pour cette raison, tout en réaffirmant, à l'initiative de son rapporteur, l'interdiction de plaider, elle n'a pas proposé de rétablir l'interdiction de tenir lieu de conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure que le Sénat avait adopté en première lecture.

? La procédure de constat de la situation d'incompatibilité dans laquelle se trouve un membre du Conseil supérieur

L'Assemblée nationale a procédé à une réécriture de la disposition de l'article 6 de la loi organique du 5 février 1994 qui prévoit que le Conseil supérieur de la magistrature constate la démission d'office de celui de ses membres qui ne se serait pas démis, dans le mois suivant son entrée en fonction, d'une fonction incompatible avec sa qualité de membre du conseil supérieur.

Cette réécriture tient compte du fait que le Conseil supérieur est maintenant composé de trois formations. La démission d'office du membre en cause serait constatée par le président de la formation plénière, après avis de cette dernière. L'Assemblée nationale a par ailleurs étendu cette possibilité aux incompatibilités survenant en cours de mandat et auxquelles le membre concerné n'aurait pas remédié dans le délai d'un mois.

Votre commission vous propose d'autoriser le recours à la même procédure pour permettre au président de la formation plénière, sur avis de cette dernière, de constater la démission d'office du membre empêché de manière permanente d'exercer ses fonctions.

Votre commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 6 bis (art. 10-1 et 10-2 nouveaux de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Obligations déontologiques des membres du Conseil supérieur de la magistrature

Cet article, introduit par le Sénat en première lecture, définit les obligations déontologiques que doivent respecter les membres du Conseil supérieur ainsi que, sous leur contrôle, les personnes dont ils s'attachent les services. Il précise aussi l'obligation de déport qui est la leur lorsque leur participation à l'instruction ou au délibéré pourrait entacher d'un doute l'impartialité de la décision à rendre.

La commission des lois de l'Assemblée nationale, qui a marqué son accord avec l'ajout ainsi réalisé, a cependant modifié l'article sur deux points : elle a ajouté aux trois exigences d'indépendance, d'impartialité et d'intégrité celle de dignité, qui renvoie notamment au serment prêté par les magistrats de « se comporter en tout comme un digne et loyal magistrat ».

Par ailleurs, elle a retiré aux présidents de chacune des formations du Conseil supérieur la compétence que le Sénat leur avait reconnue de prendre les mesures appropriées pour assurer le respect des obligations ainsi définies. M. Philippe Houillon, rapporteur de l'Assemblée nationale, a en effet considéré que, compte tenu de l'imprécision des termes retenus, cette disposition « suscite plus de questions plus qu'elle n'en résout ».

Cependant, la création d'une obligation doit s'accompagner de la définition d'une procédure de sanction qui garantisse l'effectivité de l'exigence ainsi posée. Il convient en effet d'éviter les situations dans lesquelles le refus d'un membre de se conformer à une obligation qui lui échoit porterait atteinte tant au crédit de l'institution et de ses présidents qu'à la légalité de la décision qui serait rendue.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a donné compétence à la formation plénière du Conseil supérieur pour remédier aux désordres ainsi créés. Sur saisine du président d'une des formations, elle pourrait se prononcer, à la majorité simple, sur le manquement du membre concerné à ses obligations déontologiques et décider, selon la gravité du manquement, de sa suspension temporaire ou de sa démission d'office.

Au terme d'une procédure analogue, la formation saisie d'une affaire pourrait décider, lorsque la question se poserait, du déport d'un de ses membres.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a par ailleurs adopté un amendement rédactionnel réorganisant en deux articles 10-1 et 10-2 le contenu de l'article 10-1 de la loi du 5 février 1994.

Votre commission a adopté l'article 6 bis ainsi modifié .

Article 7 (art. 11 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Nomination du secrétaire général Conseil supérieur de la magistrature et de ses adjoints

Cet article définit la procédure de désignation du secrétaire général du Conseil supérieur.

Alors que le texte du gouvernement prévoyait que le secrétaire général soit nommé par décret du président de la République, sur proposition conjointe du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près cette même cour, votre commission des lois avait souhaité que le Conseil supérieur de la magistrature fasse connaître son avis sur cette proposition, afin que l'ensemble des membres de l'institution soient suffisamment associés à cette nomination.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a rétabli le texte du gouvernement sur ce point au motif que la co-direction est d'usage dans toutes les juridictions. Elle a par ailleurs considéré que la procédure d'avis proposée imposerait de faire siéger le CSM dans une formation qui n'est pas prévue par la Constitution et qu'elle retarderait inutilement la nomination du secrétaire général.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a en revanche conservé la coordination, proposée par votre commission en première lecture, du mandat du secrétaire général avec celui des membres de l'institution.

Elle a par ailleurs adopté un amendement rédactionnel.

Votre commission a adopté l'article 7 sans modification .

Article 7 bis (supprimé) (art. 12 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature

Cet article consacre l'exigence d'une autonomie budgétaire avérée du Conseil supérieur de la magistrature.

La nouvelle rédaction adoptée par le Sénat pour l'article 12 de la loi organique du 5 février 1994 a résulté d'un amendement de votre rapporteur en séance plénière, motivé par l'inadaptation de la précédente rédaction aux nouvelles règles applicables en matière budgétaire et par la nécessité de garantir à cette institution une autonomie budgétaire conforme à sa destination constitutionnelle.

Plusieurs fois par le passé et récemment dans l'avis qu'elle a rendue sur la mission « justice » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, votre commission des lois a prôné le transfert des crédits alloués au CSM du programme « justice judiciaire » de cette mission à la mission « pouvoirs publics », qui intègre d'ores et déjà les crédits alloués au Conseil constitutionnel et à la Cour de justice de la République 5 ( * ) . Déjà, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2008, notre collègue M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois des crédits de la mission « justice », regrettait que « le projet de loi de finances pour 2008, dans la continuité des exercices budgétaires précédents, ne confère pas au Conseil supérieur de la magistrature un statut lui assurant une véritable autonomie budgétaire », et il jugeait le rattachement auquel ses crédits donnaient lieu « pas satisfaisant au regard de l'importance de ses missions » 6 ( * ) .

Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux, s'est opposée à l'adoption de cet article au motif qu'il transformerait la nature juridique de l'institution en la consacrant comme un pouvoir constitutionnel au même titre que le Conseil constitutionnel.

Devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, elle a fait valoir que la disposition introduite par le Sénat l'obligerait à faire figurer les crédits du CSM dans la mission « Conseil et contrôle de l'État », ce qui ne permettrait plus à cette institution de bénéficier des arbitrages budgétaires favorables que lui autorise son inclusion actuelle dans un programme dont le poids budgétaire de plus de 2,8 milliards d'euros est considérablement plus important que celui de son propre budget (2,2 millions en projet de loi de finances pour 2010). En outre, l'enveloppe dont dispose le Conseil supérieur ne pourrait plus être abondée en gestion au moyen de la fongibilité des crédits du programme, ce qui imposerait, lorsqu'il s'agira de faire face à une dépense non prévue, de recourir à la procédure plus lourde des décrets d'avances.

M. Philippe Houillon, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, a considéré que la rédaction adoptée par le Sénat constituait « une fausse bonne idée, dans la mesure où elle garantirait moins bien l'autonomie du Conseil supérieur de la magistrature, qui risquerait de voir ses crédits cantonnés, sans possibilité d'évolution ni d'abondement en cas de nécessité, alors que le système actuel permet au contraire beaucoup de souplesse et donc, au bout du compte, plus d'indépendance pour le CSM ». L'Assemblée nationale a en conséquence supprimé l'article 7 bis .

À l'invitation de son rapporteur, votre commission a cependant jugé nécessaire de le rétablir. En effet, la fongibilité des crédits au sein d'un même programme joue à la hausse comme à la baisse et ce qui est présenté comme un avantage pour le Conseil supérieur peut aussi fonctionner à son détriment. L'autonomie budgétaire du Conseil supérieur présente le mérite de garantir une certaine pérennité de fonctionnement à l'institution.

Surtout, elle doit permettre d'assurer la pleine indépendance du Conseil supérieur. À l'heure actuelle, le responsable du programme « justice judiciaire » à l'intérieur duquel sont inclus les crédits de l'institution est le directeur des services judiciaires, par ailleurs chargé d'établir les propositions de nomination sur lesquelles le Conseil supérieur doit rendre un avis et qui représentaient en 2008 près de 96 % de son activité en matière de nomination 7 ( * ) .

La même autorité fixe ainsi les crédits du CSM et sollicite son avis sur les propositions de nomination qu'elle lui soumet. Comme cela a été souligné à plusieurs reprises au cours des auditions, notamment par M. Vincent Lamanda, premier président de la Cour de cassation et M. Jean-Louis Nadal, procureur général près la Cour de cassation, une telle situation est incompatible avec l'indépendance qui doit être reconnue au Conseil supérieur pour l'exercice de ses missions constitutionnelles. Votre commission a jugé nécessaire d'y remédier.

Votre commission a adopté l'article 7 bis ainsi rétabli .

Article 9 (art. 14 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Suppléance des présidents - Quorum

Cet article organise les règles de suppléance des présidents des formations du Conseil supérieur et détermine le quorum à partir duquel chacune de ces formations peut valablement délibérer.

En dehors d'un amendement rédactionnel, la commission des lois de l'Assemblée nationale a validé les modifications apportées par le Sénat sur l'adaptation du quorum aux exigences de la composition paritaire des formations siégeant en matière disciplinaire.

Votre commission a adopté l'article 9 sans modification .

Article 11 (art. 18 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Commission d'admission des requêtes

Cet article définit la composition et les conditions de vote de la ou des commissions d'admission des requêtes chargées du filtrage des plaintes dont les justiciables saisissent le Conseil supérieur de la magistrature.

L'Assemblée nationale a conservé, en première lecture, pour ces organes de filtrage, la dénomination adoptée par le Sénat. Elle a en outre validé le choix, auquel le Gouvernement était attaché, de commissions d'admission des requêtes mixtes, chargées d'examiner, selon leur formation de rattachement, les réclamations visant des magistrats du siège ou celles concernant des magistrats du parquet.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a apporté, à l'initiative de son rapporteur, M. Philippe Houillon, trois modifications rédactionnelles à l'article 11.

Votre commission a adopté l'article 11 sans modification .

Article 11 ter (art. 20-1 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) - Coordination

Cet article, introduit par la commission des lois de l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, effectue une coordination au sein de l'article 20-1 de la loi organique du 5 février 1994.

Cette disposition, introduite par l'article 19 de la loi organique du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, donne au Conseil supérieur de la magistrature une compétence d'avis sur les demandes de mise en position de détachement ou de disponibilité émises par les magistrats souhaitant exercer une activité libérale, ou une activité lucrative dans le secteur privé.

Cet avis est requis même si le détachement ou la disponibilité sont envisagés dans le cadre de la mobilité statutaire à laquelle sont soumis les magistrats pour accéder aux emplois placés hors hiérarchie (article 76-4 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature).

Le Conseil supérieur doit alors examiner si l'activité que le magistrat envisage d'exercer est compatible avec les fonctions qu'il a occupées au cours des trois années précédentes.

L'article 72 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précise les modalités selon lesquelles le Conseil supérieur de la magistrature rend son avis sur la mise en position de détachement ou de disponibilité d'un magistrat, qui est prononcée par décret du Président de la République, sur proposition du ministre de la justice. Ainsi, il revient à la formation du Conseil supérieur compétente à l'égard du magistrat, selon que celui-ci exerce des fonctions du siège ou du parquet, de rendre l'avis.

Dans un objectif de coordination, l'article 11 ter adopté par l'Assemblée nationale précise, au sein de l'article 20-1 de la loi organique du 5 février 1994, que l'avis est rendu par la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard du magistrat, selon qu'il s'agit d'un magistrat du siège ou du parquet. Cette modification renforce l'intelligibilité du texte.

Votre commission a adopté l'article11 ter sans modification .

CHAPITRE II - DISPOSITION MODIFIANT L'ORDONNANCE N° 58-1270 DU 22 DÉCEMBRE 1958 PORTANT LOI ORGANIQUE RELATIVE AU STATUT DE LA MAGISTRATURE

Article 14 bis (art. 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) - Faute disciplinaire

Cet article, introduit par votre commission, à l'initiative de son rapporteur, en première lecture, complète la définition de la faute disciplinaire.

Aux termes de l'article 43 de l'ordonnance statutaire, la faute disciplinaire d'un magistrat est constituée par « tout manquement aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité ».

Le présent article y ajoute une disposition marquant l'absence de responsabilité du juge à raison de ses décisions juridictionnelles, à l'exception d'une violation grave et délibérée d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement rédactionnel.

Votre commission a adopté l'article 14 bis sans modification .

Articles 17 et 24 (art. 50 et 58-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) - Procédure d'interdiction temporaire d'exercice applicable aux magistrats du siège et du parquet

Ces articles modifient la procédure permettant d'interdire temporairement à un magistrat d'exercer ses fonctions, jusqu'à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires, dans des situations d'urgence qui mettent en cause le bon fonctionnement de la justice.

En première lecture, le Sénat, à l'initiative de votre commission, a supprimé la procédure de référé, qui visait à permettre au premier président de la Cour de cassation ou au procureur général près cette cour de prononcer ou de rendre seuls une décision (magistrats du siège) ou un avis (magistrats du parquet) sur l'interdiction temporaire d'exercice.

Il avait en outre porté de huit jours à dix jours ouvrables le délai dans lequel le Conseil supérieur devait se prononcer, en rendant une décision sur la demande d'interdiction temporaire d'exercice formulée par le ministre de la justice, par le premier président d'une cour d'appel, ou par le procureur général près une cour d'appel.

Considérant que le délai de dix jours ouvrables pouvait entraîner un délai variable selon le nombre de dimanches figurant dans la période visée, la commission des lois de l'Assemblée nationale a, à l'initiative de son rapporteur, porté ce délai à quinze jours.

Ce délai est celui que votre commission avait initialement retenu lors de l'examen du projet de loi organique en première lecture, le délai finalement adopté par le Sénat résultant d'un amendement du gouvernement. Il donne au Conseil supérieur de la magistrature la possibilité de s'organiser pour rendre une décision ou un avis sur la demande d'interdiction temporaire d'exercice, les dispositifs pénaux ou administratifs permettant de régler les situations d'urgence absolue avant l'expiration de ce délai.

Votre commission a adopté sans modification les articles 17 et 24.

Articles 18 et 25 (art. 50-3 nouveau et 63 de l'ordonnance relative au statut de la magistrature) - Saisine disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature par tout justiciable

Ces articles organisent la nouvelle procédure de saisine du Conseil supérieur de la magistrature par tout justiciable estimant que le comportement adopté par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire.

En première lecture, votre commission et le Sénat ont apporté, à l'initiative de votre rapporteur, plusieurs modifications à ce dispositif, afin de :

- préciser que la plainte était examinée par une commission d'admission des requêtes composée de membres de la formation compétente, selon le cas, à l'égard des magistrats du siège ou à l'égard des magistrats du parquet ;

- prévoir que la plainte peut, par exception, être dirigée contre un magistrat du siège qui demeure saisi de la procédure, ou contre un magistrat du parquet dont le parquet reste en charge de la procédure, si la nature de la procédure et la gravité des manquements évoqués le justifient. Il revient alors à la commission d'admission des requêtes de déterminer si, au regard de ces deux critères, la plainte doit faire l'objet d'un examen au fond ;

- préciser que la plainte ne peut être présentée après l'expiration d'un délai d'un an suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure, ce qui permet de fixer un délai de saisine identique tant en matière pénale qu'en matière civile ;

- prévoir l'information du magistrat mis en cause lorsque la commission d'admission des requêtes ne déclare pas la plainte irrecevable ou manifestement infondée et engage l'examen de l'éventuelle qualification disciplinaire des faits évoqués par le justiciable ;

- permettre à la commission d'admission des requêtes d'entendre le magistrat mis en cause.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a validé ces modifications. Elle a adopté, à l'initiative de son rapporteur, dix amendements rédactionnels et de précision, cinq à l'article 18 et cinq à l'article 25, dont deux marquent clairement la distinction entre, d'une part, l'examen des plaintes par la commission d'admission des requêtes et, d'autre part, la procédure disciplinaire.

Ces amendements précisent en effet, à l'avant-dernier alinéa de l'article 18 et à l'alinéa 18 de l'article 25, que le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour et le garde des sceaux sont avisés du rejet de la plainte ou « de l'engagement de la procédure disciplinaire » et non de « la poursuite de la procédure disciplinaire ».

Votre rapporteur approuve cette clarification.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a en outre adopté des amendements de son rapporteur :

- mentionnant la gravité du « manquement évoqué », plutôt que la gravité « des manquements évoqués » parmi les critères que la commission d'admission des requêtes doit examiner pour apprécier, le cas échéant, la recevabilité d'une plainte dirigée contre un magistrat qui demeure saisi de la procédure ou contre un magistrat du parquet lorsque le parquet ou le parquet général auquel il appartient demeure chargé de la procédure. Le singulier paraît en effet plus cohérent, puisque la plainte peut évoquer un ou plusieurs manquements ;

- prévoyant que c'est lorsque la commission d'admission des requêtes déclare une plainte recevable, et non lorsqu'elle déclare une plainte irrecevable ou manifestement infondée, qu'elle informe le magistrat mis en cause.

Enfin, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté deux amendements de M. André Vallini permettant à la commission d'admission des requêtes d'entendre, le cas échéant, le justiciable auteur de la plainte. Cette faculté pourrait en effet permettre à la commission d'admission des requêtes d'approfondir son analyse de la saisine présentée par le justiciable et de déterminer s'il y a vraiment lieu d'engager une procédure disciplinaire.

Votre commission a adopté les articles 18 et 25 sans modification.

Article 20 (art. 52 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) - Désignation d'un expert par le rapporteur du Conseil supérieur de la magistrature au cours de l'enquête disciplinaire

Cet article permet au rapporteur de la formation disciplinaire du Conseil supérieur de désigner un expert dans le cadre d'une procédure disciplinaire visant un magistrat.

En première lecture, votre commission avait souhaité étendre les moyens d'enquête du Conseil supérieur de la magistrature en prévoyant que le rapporteur puisse déléguer à un magistrat d'un rang au moins égal à celui du magistrat mis en cause, ou à un ancien membre du Conseil supérieur, l'accomplissement d'auditions et d'actes d'investigation. Le Sénat était ensuite revenu sur cette modification, à l'initiative du Gouvernement.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté en première lecture deux amendements de précision de son rapporteur, reprenant une amélioration rédactionnelle apportée par la commission des lois du Sénat puis malencontreusement supprimée lors de l'examen du projet de loi organique en séance plénière. Il s'agit en particulier de mentionner le « magistrat mis en cause », et non « l'intéressé », et le « justiciable », au lieu du « plaignant ».

Votre commission a adopté l'article 20 sans modification.

Article 22 (art. 57-1 nouveau de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) - Règles de vote applicables aux décisions du conseil de discipline des magistrats du siège

Cet article précise les modalités de vote de la formation disciplinaire du CSM compétente à l'égard des magistrats du siège, lorsqu'elle se prononce sur l'existence d'une faute disciplinaire.

La rédaction initiale du projet de loi organique prévoyait qu'en cas de partage égal des voix, la formation compétente du Conseil supérieur renvoyait le magistrat concerné « des fins de la poursuite », selon la formule traditionnellement employée par le CSM.

La commission des lois de l'Assemblée nationale, peut-être pour clarifier cette formulation, a adopté un amendement de son rapporteur indiquant qu'en cas de partage égal des voix, la formation compétente du Conseil supérieur décide « qu'il n'y a pas lieu à sanction ».

Cette rédaction paraît plus intelligible, mais fait naître une ambiguïté. En effet, si le conseil de discipline décide qu'il n'y a pas lieu à sanction, on peut néanmoins se demander si le magistrat est absolument exempt de tout reproche.

Aussi votre commission a-t-elle adopté un amendement de son rapporteur rétablissant la rédaction initiale, selon laquelle une situation de partage égal des voix signifie tout simplement la fin des poursuites.

Votre commission a adopté l'article 22 ainsi modifié .

Article 28 bis (art. 77 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) - Coordination

Cet article, inséré par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, effectue une coordination au sein de l'article 77 de l'ordonnance statutaire.

Cet article dispose que tout magistrat admis à la retraite est autorisé à se prévaloir de l'honorariat de ses fonctions. Cependant, l'honorariat peut être refusé par décision motivée de l'autorité qui prononce la mise à la retraite -soit le ministre de la justice- après avis du Conseil supérieur de la magistrature.

L'article additionnel adopté par les députés précise que l'avis du Conseil supérieur sur le refus de l'honorariat est rendu par la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard du magistrat, selon que celui-ci exerce les fonctions du siège ou du parquet.

Votre rapporteur juge cette précision utile.

Votre commission a adopté l'article 28 bis sans modification.

CHAPITRE III - DISPOSITIONS FINALES

Article 29 A (art. 38 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) - Coordination

Cet article additionnel a été adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur.

Le second alinéa de l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse interdit de publier toute information relative aux travaux et délibérations du Conseil supérieur de la magistrature, à l'exception des informations concernant les audiences publiques et les décisions publiques rendues en matière disciplinaire à l'encontre des magistrats 8 ( * ) . Il prévoit que peuvent cependant être publiées les informations « communiquées par le président ou le vice-président » du Conseil supérieur.

Or, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a supprimé la présidence du Conseil supérieur de la magistrature par le Président de la République et sa vice-présidence par le ministre de la justice.

L'article 65 de la Constitution dispose désormais que la formation compétente à l'égard des magistrats du siège est présidée par le premier président de la Cour de cassation et la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet par le procureur général près cette cour. Le premier président de la Cour de cassation est en outre le président de la formation plénière et peut être suppléé dans cette mission par le procureur général près la Cour de cassation.

L'article additionnel adopté par l'Assemblée nationale précise par conséquent que peuvent, par exception à l'interdiction définie à l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881, être publiées les informations communiquées par le président d'une formation du Conseil supérieur. Cette disposition sera ainsi conforme à la nouvelle organisation du Conseil supérieur de la magistrature.

Votre commission a adopté l'article 29 A sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté le projet de loi organique ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

______

MERCREDI 7 AVRIL 2010

La commission a examiné le rapport, en deuxième lecture, de M. Jean-René Lecerf et établi le texte qu'elle propose pour le projet de loi organique n° 322 (2009-2010), modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution, relatif au Conseil supérieur de la magistrature (CSM).

M. Jean-René Lecerf , rapporteur, a indiqué que l'Assemblée nationale avait validé l'essentiel des modifications apportées par le Sénat en première lecture. En particulier, elle a marqué son accord avec le dispositif de parité de composition entre membres magistrats et membres non magistrats, applicable aux formations siégeant en matière disciplinaire, avec la compétence reconnue à la formation plénière pour se saisir des questions relatives à la déontologie des magistrats, avec l'abaissement du quorum nécessaire pour l'adoption de sanctions ou de propositions de sanctions par les formations compétentes en matière disciplinaire, et avec l'organisation retenue pour les commissions d'admission des requêtes.

Sur d'autres points, l'Assemblée nationale a modifié à la marge les solutions adoptées par le Sénat, en prévoyant que la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans la nomination des personnalités qualifiées serait assurée par chaque autorité de nomination et non de manière globale, en étendant à quinze jours plutôt que dix ouvrables le délai au cours duquel la formation compétente du Conseil supérieur devra se prononcer sur la mesure d'interdiction temporaire d'exercice applicable à un magistrat, et en prévoyant que le justiciable auteur de la plainte adressée contre un magistrat pourra être entendu par la commission d'admission des requêtes.

M. Jean-René Lecerf , rapporteur, a constaté que quatre points restaient en débat, l'Assemblée nationale ayant en effet supprimé quatre modifications adoptées par le Sénat en première lecture : l'interdiction de plaider et d'agir en qualité de conseil d'une partie pour l'avocat membre du CSM, la procédure qui vise à garantir le respect par les membres du Conseil supérieur de leurs obligations déontologiques, l'avis du CSM rendu sur la proposition de nomination conjointe par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette cour, du secrétaire général de l'institution, et la consécration de l'autonomie budgétaire du CSM.

Prenant acte des évolutions engagées par l'Assemblée nationale, M. Jean-René Lecerf , rapporteur, a néanmoins proposé de :

- maintenir l'interdiction de plaider devant les juridictions judiciaires pour l'avocat membre du CSM, en écartant toutefois l'interdiction d'agir en qualité de conseil juridique d'une partie engagée dans une procédure, adoptée par le Sénat en première lecture ;

- rétablir la consécration de l'autonomie budgétaire du CSM ;

- définir une nouvelle procédure permettant à la formation plénière de garantir le respect par les membres du CSM de leurs obligations déontologiques.

M. Jean-Jacques Hyest , président, s'étant interrogé sur l'opportunité d'imposer une interdiction générale et absolue de plaider à l'avocat membre du CSM, alors que l'essentiel est de garantir qu'il ne sera pas placé dans une situation de conflit d'intérêts, M. Jean-René Lecerf , rapporteur, a observé que, compte tenu du nombre de nominations sur lesquelles il sera appelé à se prononcer au cours de son mandat, la question du déport de l'avocat se posera de très nombreuses fois. Par ailleurs, il a souligné que les décisions rendues par les magistrats devant lesquels il aura plaidé seront fragilisées puisqu'elles pourront donner lieu soit à une procédure de récusation, soit à une contestation au regard du droit à un procès équitable, défini par la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

M. Jean-Jacques Hyest , président, a jugé la consécration de l'autonomie budgétaire du CSM d'autant plus nécessaire que, en retirant la présidence du Conseil supérieur de la magistrature au Président de la République, le Constituant a entendu affirmer l'autonomie de cette institution.

M. Jean-Pierre Michel a indiqué que, tout en soutenant la position du rapporteur, le groupe socialiste, apparentés et rattachés votera, comme en première lecture, contre le projet de loi organique en raison de l'absence de toute réforme du statut du parquet.

Le sort de l'ensemble des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article 4
Incompatibilités applicables aux membres
du Conseil supérieur de la magistrature

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Lecerf, rapporteur

1

Interdiction pour l'avocat membre du CSM de plaider pendant toute la durée de son mandat.

Extension de la procédure relative au constat de démission d'office au cas d'empêchement définitif d'un membre du Conseil supérieur

Adopté

Article 6 bis
Obligations déontologiques des membres
du Conseil supérieur de la magistrature

M. Lecerf, rapporteur

2

Obligation de déport systématique de l'avocat membre du Conseil supérieur dès qu'il pourrait avoir à connaître soit du sort d'un magistrat devant lequel il a plaidé pendant son mandat, soit de la nomination d'un magistrat appelé à intégrer une juridiction dans le ressort de laquelle son barreau est situé

Retiré

M. Lecerf, rapporteur

3

Modalités selon lesquelles le non-respect par un membre du CSM des obligations déontologiques pourra être sanctionné
par la formation plénière du Conseil supérieur, saisie par le président d'une des deux formations

Adopté

Article 7 bis
Autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature

M. Lecerf, rapporteur

4

Rétablissement de la rédaction retenue par le Sénat en première lecture afin de garantir l'autonomie budgétaire du Conseil supérieur

Adopté

Article 22
Règles de vote applicables aux décisions
du conseil de discipline des magistrats du siège

M. Lecerf, rapporteur

5

Rétablissement de la rédaction initiale de cet article, selon laquelle la formation Conseil supérieur compétente pour les magistrats du siège renvoie, en cas de partage égal des voix, le magistrat concerné des fins de la poursuite

Adopté

La commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi rédigé.

ANNEXE - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

_______

Conseil supérieur de la magistrature (CSM)

M. Jean-Claude BECANE, président de la réunion plénière

M. Luc BARBIER, président de la formation compétente pour les magistrats du siège

M. Jean-Claude VUILLEMIN, président de la formation compétente pour les magistrats du parquet

Cour de Cassation

M. Vincent LAMANDA, premier président

M. Jean-Louis NADAL, procureur général

FO Magistrats

M. Emmanuel POINAS , membre du bureau national

Syndicat de la Magistrature

M. Benoist HUREL , secrétaire général adjoint

M. Matthieu BONDUELLE, secrétaire général

Union syndicale des magistrats (USM)

M. Christophe REGNARD, président

Avocats

M. Denis LEQUAI , ancien bâtonnier de Lille, membre du Conseil national des barreaux

* 1 Voir le rapport n° 390 (2009-2010), fait au nom de la commission des lois par M. Jean-René Lecerf.

* 2 Voir le rapport de M. Philippe Houillon, n° 2163, décembre 2009, p. 43.

* 3 Voir les rapports pour avis n° 104 tome III (2005-2006) , n° 83 tome III (2006-2007) , n° 96 tome III (2007-2008) , n° 106 tome IV (2009-2010) , faits au nom de la commission des lois par MM. Yves Détraigne et Simon Sutour sur les crédits de la justice et de l'accès au droit.

* 4 Comme indiqué dans le précédent rapport, selon les chiffres présentés par le Conseil supérieur dans son rapport d'activité pour 2008, la formation compétente pour le siège a été appelée à se prononcer cette même année sur 2 256 nominations et celle du parquet sur 592 propositions de nominations. En quatre années d'exercice de mandat, c'est sur un volume équivalent à celui de tout le corps judiciaire qu'un membre de la formation plénière devra se prononcer.

* 5 Avis n° 106 tome IV (2009-2010) fait au nom de la commission des lois par MM. Yves Détraigne et Simon Sutour sur les crédits de la justice et de l'accès au droit, p. 16.

* 6 Avis n° 96 tome III (2007-2008) fait au nom de la commission des lois par MM. Yves Détraigne et Simon Sutour sur les crédits de la justice et de l'accès au droit, p. 13.

* 7 Soit 2 171 propositions sur 2 256 nominations selon les chiffres fournis par le Conseil supérieur dans son Rapport d'activité pour 2008 , La documentation française, 2009, p. 21.

* 8 Les violations de cette interdiction sont punies d'une amende de 3.500 euros.

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