B. LE PILOTAGE DU SYSTÈME DE RETRAITE

Résultat d'une construction historique et sociale, le système de retraite français forme aujourd'hui un ensemble complexe et diversifié , caractérisé par une multiplicité de régimes.

Cet éclatement institutionnel ne permet pas un pilotage commun des régimes de retraite, autour de grands enjeux tels la pérennité financière du système par répartition, l'équité du système et le niveau de vie des retraités.

Le projet de loi tend à remédier à ces lacunes en créant une instance spécifiquement dédiée au pilotage stratégique des régimes de retraite.

1. Le morcellement institutionnel

Au moment de la mise en place de l'organisation générale du système de sécurité sociale en France et du choix d'un financement par répartition, l'un des objectifs était de construire un régime d'assurance vieillesse généralisé et unique. Cette unification s'étant révélée impossible, les régimes de retraite ont été de fait organisés sur une base socioprofessionnelle .

Trois étages composent le système français de retraite actuel : les vingt et un régimes de base légalement obligatoires, qui en constituent le socle, les régimes complémentaires légalement obligatoires et les dispositifs d'épargne retraite collective et individuelle.

La répartition des prestations est la suivante : le régime général verse 49 % des prestations de retraite de base, les caisses de la fonction publique 31 %, les régimes spéciaux 8 %, la Mutualité sociale agricole (MSA) 8 % et le régime social des indépendants (RSI) 4 % 2 ( * ) . En 2010, les régimes complémentaires ont versé 80,8 milliards d'euros de prestations vieillesse ; 108 milliards l'ont été par la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), 45 milliards par les caisses de la fonction publique et 41,7 milliards par les autres régimes. De ce fait, un assuré liquide aujourd'hui sa retraite auprès de 2,9 organismes en moyenne .

A la fragmentation des régimes s'ajoutent des règles d'acquisition et de valorisation des droits à la retraite différentes, principalement entre régimes de base et régimes complémentaires, et une diversité encore plus grande des paramètres de calcul des pensions.

Cette complexité est d'abord préjudiciable à la bonne compréhension par les assurés du cadre juridique de la retraite et ce d'autant plus qu'en raison de l'instabilité croissante des parcours professionnels, ils sont de plus en plus nombreux à relever de plusieurs régimes de retraite. Aujourd'hui, quatre retraités sur dix sont polypensionnés et cette proportion tend à augmenter au fil du temps. Pour un assuré, se retrouver dans le maquis de réglementations est un véritable parcours du combattant.

En outre, elle ne facilite pas une approche transversale des grandes problématiques comme la solidarité intergénérationnelle, le financement de la répartition ou le niveau de vie des retraités.

2. Un pilotage certes amélioré, mais encore insuffisant

Le pilotage du système de retraite a été renforcé avec la création en 2000 du conseil d'orientation des retraites (Cor), lieu d'expertise et de concertation réunissant tous les acteurs du champ des retraites. Le Cor suit l'évolution des régimes et fait des propositions pour assurer leur viabilité financière ainsi que leur fonctionnement solidaire.

La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a marqué une nouvelle étape dans le pilotage du système de retraite en fixant quatre grandes orientations générales :

- assurer un haut niveau de retraite, par l'allongement de la durée d'activité et de la durée d'assurance ;

- préserver l'équité et l'esprit de justice sociale des régimes de retraite ;

- permettre à chacun de construire sa retraite, en donnant davantage de souplesse et de liberté de choix ;

- garantir le financement des retraites d'ici 2020 ;

et en proposant une méthode de pilotage reposant sur le principe de rendez-vous quadriennaux destinés à examiner les différents paramètres des régimes de retraite au regard des évolutions démographiques, économiques et sociales afin de procéder ensuite aux ajustements nécessaires. Plus précisément, elle a fait de la durée d'assurance tous régimes, requise pour bénéficier d'une retraite à taux plein, la principale variable de pilotage du système de retraite, en posant le principe de son évolution au fil des générations jusqu'en 2020.

Or, bien que doté d'objectifs et d'une méthode, le pilotage du système manque encore d'une structure facilitant la coordination entre les régimes.

Aujourd'hui, seuls deux organismes ont une compétence transversale en matière de retraite : le Cor et le groupement d'intérêt public (Gip) Info Retraite, dont la mission est d'assurer le droit à l'information des assurés en matière de retraite.

3. La création d'une nouvelle structure dédiée au pilotage du système

Le projet de loi répond au souci de mettre en place un pilotage du système assuré conjointement par l'ensemble des acteurs en créant, dans son article premier , une enceinte commune : le comité de pilotage des régimes de retraite .

Cet organisme, qui sera présidé par le ministre chargé de la sécurité sociale, associera les représentants de l'ensemble des régimes obligatoires de base, les partenaires sociaux, des parlementaires des deux assemblées et des personnalités qualifiées.

Sa mission consistera à veiller au respect des objectifs du système de retraite (pérennité financière, équité, niveau de vie des retraités, etc.) et à proposer , en cas de besoin, les mesures d'ajustement nécessaires.

Le comité jouera également un rôle important dans le rendez-vous de 2018 puisqu'il sera consulté par le Gouvernement sur un futur projet de réforme visant à garantir l'équilibre du système de retraite au-delà de 2020.

Pour l'exercice de ses missions, ce comité s'appuiera sur les travaux du Cor, dont les prérogatives demeurent inchangées.

4. Les propositions de la commission : le renforcement du comité de pilotage

Afin de mieux distinguer les compétences de ces deux structures, votre commission a souhaité renforcer le caractère opérationnel et stratégique des missions du comité de pilotage , en lui confiant un rôle d'alerte sur la situation financière des régimes de retraite .

La procédure pourrait en être la suivante : chaque année, au plus tard le 1 er juillet, le comité rendrait un avis sur la situation financière des régimes de retraite, sur les conditions dans lesquelles s'effectue le retour à l'équilibre du système de retraite à l'horizon 2018 et sur les perspectives financières au-delà de cette date.

Lorsque le comité considèrera qu'il existe un risque sérieux d'atteinte à la pérennité financière du système de retraite, il proposera au Gouvernement et au Parlement les mesures de redressement qu'il estime nécessaires.

Par ailleurs, la commission a souhaité inscrire au sein même du code de la sécurité sociale :

- les principes essentiels gouvernant l'assurance vieillesse qui figurent au début de la loi du 21 août 2003 et dont l'Assemblée nationale a repris une partie en tête du projet de loi (choix de la retraite par répartition au coeur du pacte social qui unit les générations, droit de chaque retraité à une pension en rapport avec les revenus qu'il a tirés de son activité) ;

- les objectifs poursuivis par le système de retraite, à savoir la pérennité financière, la lisibilité, la transparence, l'équité intergénérationnelle, la solidarité intragénérationnelle et le maintien d'un niveau de vie satisfaisant des retraités.


* 2 Ces chiffres sont tirés du programme de qualité et d'efficience annexé à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

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