II. LA PROPOSITION DE LOI : UNE SANCTION PLUS PROPORTIONNÉE ET PLUS EFFECTIVE

A. L'INSTITUTION D'UNE CONTRAVENTION DE TROISIÈME CLASSE

Selon la mission commune d'information, l'impunité du premier usage de stupéfiants est liée à l'inadaptation d'une sanction pénale qui, parce qu'elle est disproportionnée, n'est en pratique jamais appliquée.

Dans le souci d'une réponse plus adéquate, la mission a ainsi proposé l'institution d'une contravention de troisième classe sanctionnant le premier usage de stupéfiants. La proposition de loi s'inspire directement de cette recommandation.

La création d'une contravention de troisième classe présenterait quatre avantages.

D'une part, elle permettrait de fixer une sanction proportionnée à l'infraction . Sans doute le niveau de l'amende -450 euros- reste-t-il élevé. Il s'agit néanmoins d'un montant maximum . Surtout, et tel est bien l'esprit de la mission commune d'information et des auteurs de la proposition de loi, la contravention de 3 e classe -comme toutes les contraventions des quatre premières classes- peut donner lieu au paiement d'une amende forfaitaire d'un montant de 68 euros dès lors que cette possibilité a été prévue par un décret en Conseil d'Etat pour l'infraction concernée (article 529 du code de procédure pénale). Selon le régime commun aux amendes forfaitaires, l'amende doit être payée dans un délai de 45 jours à compter de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention (article 529-1 du code de procédure pénale). A défaut de paiement ou d'une requête présentée tendant à l'exonération du contrevenant dans ce délai, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit (article 529-2 du code de procédure pénale) -soit un taux de 180 euros (article R. 49 du code de procédure pénale). En cas de recours devant le tribunal de police et si la condamnation est confirmée, l'amende prononcée par le tribunal ne peut être inférieure au montant de l'amende forfaitaire (article 530-1 du code de procédure pénale). Le paiement de cette amende a pour effet, en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale, d'éteindre l'action publique.

D'autre part, la contraventionnalisation conduit à une simplification de la procédure. Les contraventions des quatre premières classes relèvent du tribunal de police constitué d'un juge de proximité -dont les compétences, supprimées en matière civile par la loi relative à la répartition du contentieux, ont été maintenues au niveau pénal. Ces contraventions ne requièrent pas d'instruction préalable au jugement, sauf à la requête du procureur de la République. Elles permettent la saisine de la juridiction par citation directe.

Ensuite, la condamnation ne sera pas inscrite dans le casier judiciaire (sauf si une mesure d'interdiction, de déchéance ou d'incapacité est prise à titre principal, ce qui est exclu dans l'hypothèse d'une amende forfaitaire). Ainsi tout risque de stigmatisation du premier usager serait conjuré.

Enfin, comme le rappelle la mission commune d'information sur les toxicomanies, « même fixée à un niveau modeste, on peut penser que la contravention alertera les parents des mineurs sur les pratiques de leurs enfants et la nécessité de s'impliquer dans la prévention ».

Le régime contraventionnel ne s'appliquerait que pour l'usage donnant lieu à la première interpellation . Votre commission a adopté en conséquence un amendement de son rapporteur tendant à compléter l'intitulé de la proposition de loi afin de viser comme le précise d'ailleurs l'article premier de la proposition de loi tendant à modifier l'article L. 3421-1 du code de la santé publique, le premier usage illicite « constaté » de stupéfiant.

Si l'infraction est réitérée , ou si elle s'accompagne d'une circonstance aggravante mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 3421-1 du code de la santé publique elle retrouve la qualification de délit.

Sur le plan normatif, la contraventionnalisation du premier usage constaté de stupéfiant implique une révision de l'article L. 3421-1 du code de la santé publique et la création d'une contravention de 3 e classe. Bien que la première modification relève du législateur et la seconde du pouvoir réglementaire, les auteurs de la proposition de loi ont souhaité les combiner : selon l'exposé des motifs, « une modification isolée (...) apparaîtrait en soi incompréhensible ».

Aussi le texte de l'article L. 3421-1 du code de la santé publique serait complété afin de prévoir que la première infraction constatée d'usage illicite est passible de l'amende prévue pour les contraventions de troisième classe. Il écarte explicitement de la contraventionnalisation l'usage aggravé de substances illicites dans les hypothèses mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 3421-1 lorsque l'infraction est commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ces fonctions par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par le personnel d'une entreprise de transport mettant en cause la sécurité. Il prévoit en outre les mesures de coordination nécessaires aux articles L.3421-2 et L.3421-4 du même code (de sorte, en particulier, que la provocation à la consommation, pour la première fois, de stupéfiant demeure un délit passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans).

Dans un deuxième temps, il appartiendra au pouvoir réglementaire d'instituer l'amende forfaitaire pour cette catégorie d'infraction comme le lui permet le cadre légal posé par la proposition de loi.

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