LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mme Dominique BERTINOTTI, ministre déléguée chargée de la famille

Mme George PAU-LANGEVIN, ministre déléguée chargée de la réussite éducative

Direction générale de la cohésion sociale du ministère des affaires sociales : Mmes Sabine FOURCADE, directrice générale de la cohésion sociale, Hélène PAOLETTI, chef du bureau familles et parentalité, et Catherine BRIAND, adjointe au chef de bureau protection de l'enfance et de l'adolescence

Académie de Créteil : M. William MAROIS, recteur

Assemblée des Départements de France (ADF) : M. Mathieu HANOTIN, député, vice-président du conseil général de la Seine-Saint-Denis

Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) : MM. de CHALUP, responsable du département « Enfance et parentalité », et Jean-Louis DEROUSSEN, président du conseil d'administration

Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques (FCPE) : Mme Valérie MERCH-POPELIER, secrétaire générale, et M. Antoine EVENNOU, chargé de mission

Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) : Mme Valérie MARTY, présidente

Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN) : Mme Isabelle BOURHIS, secrétaire nationale, MM. Michel RICHARD, secrétaire national adjoint, Éric KROP, secrétaire national commission Pédagogie, et Cédric CARRARO, secrétaire permanent Siège

Contributions écrites

Union nationale des associations familiales (UNAF)

Union nationale des associations autonomes de parents d'élèves (UNAAPE)

ANNEXE

Synthèse du rapport du Conseil d'analyse stratégique Aider les parents à être parents

Rapport coordonné par Marie-Pierre Hamel et Sylvain Lemoine

Septembre 2012

Les politiques de soutien à la parentalité répondent à trois principes généraux : s'adresser aux parents et non pas aux enfants ; améliorer le bien-être de l'enfant ou des parents ; agir sur les compétences parentales .

La France, comme la majorité des pays occidentaux, n'échappe pas à la croissance de l'attention accordée au soutien à la parentalité : il existe ainsi de nombreuses initiatives portées par le secteur associatif, les collectivités locales ou la branche famille de la sécurité sociale. Les dispositifs qui entrent réglementairement dans ce champ visent à :

- accroître la confiance des parents dans leurs compétences parentales , notamment au travers des Réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement (Réaap) ;

- apaiser les conflits intrafamiliaux (médiation familiale et espaces de rencontre) ;

- accompagner les enfants et leur famille dans le parcours scolaire (Contrat local d'accompagnement à la scolarité - CLAS) ;

- informer les parents sur les dispositifs (Points Info Familles - PIF) ;

- informer les couples , notamment autour des questions de sexualité et de vie familiale (conseil conjugal et familial).

La Cour des Comptes a ainsi consacré une partie de son rapport annuel 2009 à l'évaluation des dispositifs de soutien à la parentalité ; ses principales critiques portent sur :

- l'empilement de dispositifs dispersés géographiquement et mal articulés entre eux ;

- le défaut de réflexion relatif à l'accès des parents à l'information ;

- le manque d'évaluation des dispositifs ;

- la question du pilotage ;

- le caractère épars de financements par ailleurs mal connus et souvent incertains .

Les initiatives de soutien à la parentalité ouvrent un vaste champ d'interventions auprès des parents. Elles impliquent différents acteurs (publics, privés, professionnels, bénévoles), peuvent prendre plusieurs formes (rencontres en groupe, individuelles, dans une structure, à domicile, ponctuelles, sur le long terme, séminaires) et reposent sur des instruments variés (CD-Rom, vidéos, Internet, téléphone, manuels, fiches).

I - Les finalités des programmes d'aide à la parentalité : une pluralité d'objectifs

Agir sur les troubles émotionnels et comportementaux des enfants : The Incredible Years Program (États-Unis) s'adresse aux personnes en charge d'enfants de 12 ans et moins. Il comporte deux dimensions principales : un versant intervention auprès des parents d'enfants chez qui on a diagnostiqué un problème de comportement et un autre, préventif et universel, cherchant à éviter que des enfants développent des troubles comportementaux. Les interventions se déclinent ainsi en cinq programmes selon le besoin : des composantes du programme global sont ainsi mises en oeuvre à l'école ou dans les services de garde pour les 4-6 ans. Deux à trois fois par semaine, les professeurs qui appliquent le programme proposent des discussions et des activités aux enfants, dans le but de leur apprendre à mieux gérer les conflits, à interagir avec les autres et à se contrôler. Un programme de soutien basique s'adresse par ailleurs à tous les parents d'enfants de 3 à 6 ans afin d'encourager les comportements positifs de leurs enfants et d'imposer une discipline positive. Pour les parents d'enfants âgés d'1 an et moins, un programme vise plutôt à leur apprendre à bien s'occuper de leurs enfants et à bien identifier ce dont il a besoin, alors qu'un programme destiné aux parents d'enfants de 1 à 3 ans cherche à développer une parentalité positive. Pour les enfants présentant des problèmes de comportement, un programme de 20 à 22 semaines existe aussi. Il est suivi par les enfants tandis qu'un programme est destiné en parallèle aux parents pour renforcer les comportements positifs à la maison. Des interventions sont aussi proposées en milieu scolaire aux professeurs en charge de ces enfants.

Améliorer les habilités scolaires des enfants : The Parent Academy Programs (États-Unis) a pour objectif d'amener les parents à jouer un rôle plus actif dans la scolarité de leurs enfants sous la forme de cours, souvent offerts dans les écoles mêmes, ce qui permet aux parents de mieux connaitre l'environnement dans lequel leur enfant évolue. L'Académie des parents de Philadelphie, financée principalement par des fonds fédéraux, offre par exemple aux parents une mise à niveau de 10 sessions en mathématiques et en anglais, une classe sur la bienséance et la politesse, une session d'une journée sur le fonctionnement du système éducatif qui insiste sur l'obligation de présence des enfants. Des cours abordent aussi des questions relatives au développement des enfants et aux compétences parentales proprement dites. Dans d'autres villes, comme Miami, l'Académie des parents est financée par des fonds privés (fondations, entreprises) et les programmes sont conçus pour aider les parents qui parlent peu ou mal l'anglais. Des guides peuvent aussi être mis à disposition comme dans les programmes The Parent Tool Kit (Canada) ou Bullying Prevention : A Guide for Parents and Carers (Royaume-Uni). Ceux-ci expliquent aux parents comment s'impliquer pour aider les enfants à réussir à l'école et quels conseils privilégier lorsqu'ils sont victimes ou coupables d'intimidation scolaire.

Développer les compétences parentales : le Positive Parenting Program (Australie) entend améliorer les compétences des parents, leurs connaissances et la confiance en leurs capacités, afin de favoriser le bon développement des enfants de 0 à 16 ans. Ce programme est ouvert à tous, mais selon un modèle en cascade, c'est-à-dire qu'à partir d'un accès universel, des interventions plus spécifiques et intensives sont proposées aux parents qui font face à des difficultés particulières. Le développement d'une émission de télévision, Parenting in Action à Boston, est aussi particulièrement intéressant car il s'adresse de facto à un public élargi. Des services d'écoute téléphonique ont aussi été mis en place, notamment Parents Helpline (Irlande du Nord) qui permet aux parents qui ont besoin de soutien ou d'écoute de parler de façon confidentielle et gratuite. Un site Internet, « Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants » (Canada), a aussi été utilisé comme outil de médiation. Celui-ci regroupe des articles, écrits par des experts de renommée internationale, sur des thèmes traitant du développement psychosocial des jeunes enfants, de leur conception jusqu'à l'âge de 5 ans.

II - Les cibles des programmes d'aide à la parentalité : des situations variées

Parents souffrant de différences socioéconomiques : Harlem Children's Zone ( États-Unis) constitue une approche intégrée qui implique toute la communauté dans la réussite des enfants (cours de soutien à la parentalité, services de garde, école, soins de santé, soutien scolaire).

Parents en situation de conflit ou de rupture : pouvant être imposé à des parents en instance de divorce par un tribunal des affaires familiales, le Positive Parenting Through Divorce (Floride, États-Unis) est un cours certifié conçu spécialement pour aider ces parents à faire les meilleurs choix pour leurs enfants.

Familles monoparentales : l'association Gingerbread (Royaume-Uni) inclut une ligne de conseils téléphoniques, des groupes locaux d'entre-aide et des activités de loisirs auxquelles les parents et les enfants peuvent participer.

Beaux-parents : le National Stepfamily Resource Center (États-Unis) procure aux beaux-parents des informations et des formations sur la meilleure façon d'assurer leur rôle en offrant des groupes de discussion, des conférences et des programmes de huit séances pour informer les participants de leurs droits et leur apprendre à exercer au mieux leur rôle.

Pères : le Comité régional pour la promotion de la paternité (Québec, Canada) poursuit plusieurs objectifs dont celui de soutenir et d'encourager les initiatives locales pour la valorisation du rôle du père.

Parents d'origine étrangère : le programme Helping Youth Succeed in Southeast Asian Families (États-Unis) s'adresse aux parents originaires d'Asie du Sud-Est, et plus particulièrement aux parents d'adolescents. Il a été conçu en tenant compte dès le départ de leurs spécificités culturelles et chercher à prévenir et à limiter les conflits par le truchement d'un programme éducatif et d'un soutien vidéo.

Parents d'adolescents : le Parenting Wisely (American Teen) (États-Unis) est un programme pour aider les parents d'adolescents ou pré-adolescents (8-18 ans) sous forme de CD-Rom ou d'un cours en ligne.

Parents adolescents : le Teen Parents Support Program (Irlande) regroupe des centres où des adolescents qui sont parents ou qui attendent un enfant peuvent se renseigner sur les services dont ils peuvent bénéficier dans leur localité (services de soutien à la parentalité, de santé, sociaux, de garde, aides monétaires, à la poursuite d'études).

III - L'efficience des programmes d'aide à la parentalité : les améliorations envisagées

Améliorer l'information sur l'offre de services : un répertoire en ligne de programmes d'éducation parentale (Canada) permet aux parents et aux professionnels d'identifier et de mieux connaître les programmes de soutien à la parentalité disponibles.

Offrir un soutien dans les lieux de travail : le programme Talking Parents, Healthy Teens (Californie, États-Unis) utilisent des vidéos, des jeux de rôle et des discussions orchestrés par un intervenant professionnel pour permettre aux parents d'acquérir des compétences qui les aideront à mieux communiquer avec leurs enfants à propos de sexualité, de contraception et de maladies sexuellement transmissibles.

Accéder au soutien par le biais d'autres services : dans les pays scandinaves, ce sont les services publics universels comme l'école, les services d'accueil du jeune enfant ou le système de santé qui jouent le premier rôle pour conseiller les parents dans leur fonction. Que ce soit, comme au Danemark, dans des Unités de conseils en pédagogie et psychologie ou, comme en Finlande, dans des Child Guidance and Family Counselling Centers , c'est la visée préventive qui est d'abord mise en exergue mais ils peuvent aussi référer les parents ou proposer des services plus spécialisés.

Regrouper les services de soutien : les Centres de la jeunesse et de la famille (Pays-Bas) sont chargés de coordonner et de renforcer les services à destination des familles. Ils sont obligatoires dans chaque municipalité et doivent offrir des services, de santé pour les enfants, de soutien à la parentalité et être un lien vers les services d'éducation.

IV - Sanctions et incitations financières : les propositions mises en oeuvre

En marge des programmes de soutien à la parentalité, on peut noter le développement de dispositifs d'une nature très spécifique ayant recours à la sanction ou à l'incitation financière . Ces programmes destinés à responsabiliser les parents recouvrent une grande diversité de modalités de mise en oeuvre, selon qu'ils sont facultatifs ou obligatoires, qu'ils empruntent au registre juridique ou financier. Ils ont pour point commun de définir précisément les objectifs à atteindre afin d'éviter une sanction ou de bénéficier d'un soutien.

Les programmes de soutien assortis de contraintes explicites ou implicites étaient historiquement destinés à prévenir la délinquance juvénile. A l'instar des stages parentaux obligatoires en Belgique, issus de la loi de protection de la jeunesse instituée en 2006, les Parenting Orders (Royaume-Uni) - ou leurs pendants volontaires et théoriquement non contraignants, les Parenting Contracts - sont des décisions de justice qui enjoignent les parents à entrer dans des dispositifs de suivi et de soutien à la fonction parentale . Ils reposent clairement sur la contrainte en cas d'absentéisme scolaire, d'incivilités ou de comportements antisociaux des enfants. Ces programmes ont deux versants :

- la participation à des séances visant à développer leurs compétences parentales ;

- des obligations de surveillance de l'enfant déterminée en lien avec la situation familiale et les comportements déviants ou délinquants du mineur.

Ces programmes peuvent aussi s'inscrire dans le cadre de politiques aux ambitions plus larges. C'est le cas des Family Intervention Projects (Royaume-Uni) qui ciblent les familles identifiées comme étant les plus en difficulté à travers deux indicateurs principaux : les comportements antisociaux et le risque de perdre son logement . Ils reposent sur une action concernant l'ensemble des problématiques auxquelles font face les membres de la famille. Le but est d'identifier un interlocuteur unique pour la famille appartenant à une structure ad hoc afin de déjudiciariser l'image du dispositif.

En France, ces dispositifs sont encore très peu utilisés. Trois dispositifs principaux ont néanmoins été mis en place :

- les contrats de responsabilité parentale (depuis la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006) : destinés aux parents d'enfants de 6 à 18 ans en cas de trouble porté au fonctionnement d'un établissement scolaire, de prise en charge d'un mineur au titre de l'article 43 de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure ou de toute autre difficulté liée à une carence de l'autorité parentale. Ce sont des contrats d'engagement réciproque entre les parents et le représentant du conseil général. Les sanctions peuvent être administratives (suspension du versement de tout ou partie des prestations afférentes à l'enfant, en application de l'article L. 552-3 du code de la sécurité sociale) ou pénales (deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende selon l'article L. 227-17 du code pénal) ;

- les conseils pour les droits et les devoirs des familles - CDDF (depuis la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance) : du ressort du maire, ils ont pour but de permettre un dialogue entre les institutions et les parents dont les enfants présentent un risque ou un manque d'assiduité scolaire. La loi du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure les rend obligatoires pour les communes de plus de 50 000 habitants. Partout où ils sont d'ores et déjà en place, les CDDF fournissent un cadre collégial aux maires notamment pour l'audition des familles, qui est précieuse pour engager un accompagnement et l'éclairer dans l'exercice de ses responsabilités ;

- les stages parentaux (depuis la fin des années 1990) : alternatives aux sanctions de l'article L. 227-17 du code pénal, ils sont d'une durée variable et sont constitués d'un mélange d'information et de formation.

Les programmes de soutien aux parents reposant sur des incitations financières peuvent aussi faire figure d'alternatives crédibles aux sanctions. Les plus intéressants d'entre eux sont les transferts monétaires conditionnels : l'exemple du programme Bolsa Familia (Brésil) en constitue une véritable vitrine. Les parents, en effet, peuvent bénéficier d'une aide mensuelle pouvant atteindre 200 réals (pour des familles dont les revenus ne dépassent pas 120 réals) si les enfants sont scolarisés (pas plus de 15 % de jours d'absentéisme non justifié) et suivent des programmes de vaccination obligatoires. Des évaluations par la Banque mondiale et le Programme des Nations unis pour le développement concluent à l'exemplarité du dispositif : ils visent bien à impliquer les parents lorsque ces derniers ne mesurent pas l'impact de leur accompagnement sur le devenir de leurs enfants.

Dans les pays anglo-saxons, le programme expérimental le plus intéressant a été mis en place entre 2007 et 2010 à New York sous l'appellation Opportunity New York City/Family Rewards . Il visait à inciter financièrement 5 000 familles pour atteindre un certain nombre d'objectifs en matière de santé, d'éducation et d'emploi par le versement de 22 primes différentes variant de 20 à 600 dollars. Le choix était explicitement, à l'origine, de ne pas agir sur l'accompagnement mais uniquement sur ces incitations financières de manière à en mesurer les effets. Les résultats de l'évaluation ont fait apparaitre un bilan en demi-teinte qui a conduit à l'abandon du programme : son fort potentiel a néanmoins été souligné, à condition d'investir aussi dans l'accompagnement des familles , ce qui, dans le cadre de cette expérience, a fait défaut.

La porosité des limites entre les programmes de soutien reposant sur la contrainte et ceux reposant sur l'incitation financière force une double conclusion, à la fois touchant à leur éthique et à leur efficience.

Sur le plan éthique, la légitimité de ces programmes est fortement questionnée , notamment quant à la trop forte ingérence de la puissance publique dans les affaires familiales : plus le programme est accepté, plus, souvent, la logique de contrepartie est évidente en ce qu'elle s'intègre dans les différents modèles sociaux.

A ce titre, leur succès est proportionnel à l'intensité et à la qualité des services d'accompagnement . Quatre éléments sont alors particulièrement importants : le choix des bénéficiaires ; la capacité à limiter la stigmatisation ; l'adoption d'une approche globale ; l'évocation et l'utilisation avec justesse et parcimonie des sanctions. La nature de l'accompagnement proposé est ce qui apporte la plus importante plus-value. Les meilleurs se caractérisent par une intervention intensive et sur la durée autour de professionnels particulièrement qualifiés et expérimentés.

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