EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 1 er octobre sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a examiné le rapport de M. Jean Germain, rapporteur, sur la proposition de loi n° 814 (2012-2013), de M. Gérard Le Cam et plusieurs de ses collègues, tendant au traitement équilibré des territoires par une réforme de la dotation globale de fonctionnement.

M. Philippe Marini, président . - Nous allons désormais entendre Jean Germain et examiner la proposition de loi du groupe communiste républicain et citoyen (CRC) qui traite de la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

M. Jean Germain, rapporteur . - La proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui a pour objet d'augmenter la dotation de base perçue par les communes rurales.

Certaines d'entre elles font face à des difficultés financières, qui résultent d'une part d'une paupérisation de leur population et, d'autre part, d'un poids parfois relativement important de ce que j'appellerais les « charges de ruralité ». Il s'agit notamment des coûts d'entretien de la voirie : je rappelle que les communes de moins de 2 000 habitants comptent à elles seules plus des deux tiers de la voirie communale. On peut également penser aux dépenses d'éducation, qui représentaient, avant l'entrée en vigueur de la réforme des rythmes scolaires, la moitié du budget de fonctionnement des communes rurales.

C'est dans ce contexte d'inquiétude des territoires ruraux qu'ont pu poindre des critiques du mode de calcul de la dotation de base.

La dotation de base est une composante de la dotation forfaitaire, au sein de la DGF des communes. C'est une dotation significative, puisque son montant total s'élève à 6,8 milliards d'euros en 2013 ; elle représente donc plus d'un quart de la DGF des communes.

Selon le code général des collectivités territoriales, la dotation de base est destinée à « tenir compte des charges liées à l'importance de la population ». Aussi, chaque commune bénéficie d'une dotation de base dont le montant par habitant est d'autant plus important que la commune est peuplée : les communes de moins de 500 habitants perçoivent 64 euros par habitant, tandis que les communes de plus de 200 000 habitants bénéficient du double, soit 128 euros par habitant.

Le montant par habitant exact dont bénéficie chaque commune est déterminé par un coefficient logarithmique, dont la valeur varie entre 1 et 2, en fonction de la population.

Le fait qu'il soit logarithmique permet au coefficient de croître d'abord très rapidement avec la population, puis de moins en moins vite.

Par conséquent, les écarts de dotation par habitant diminuent rapidement. Ainsi, l'écart entre une commune de 20 000 habitants et une commune de 200 000 habitants n'est pas de 2 mais de 1,2.

Si l'on raisonne en masses, on observe que la moitié de la population habitant dans les communes les moins peuplées se partage 43 % de la dotation de base.

La proposition de nos collègues du groupe CRC vise « à atténuer les inégalités de traitement » entre les collectivités, grâce à « la disparition progressive des écarts de dotation de base ».

L'article 1 er propose ainsi d'aligner à la hausse le montant de dotation de base par habitant pour toutes les communes de moins de 20 000 habitants sur celui actuellement perçu par les communes de 20 000 habitants. Cet alignement serait étalé sur cinq ans.

Par conséquent, entre 2013 et 2018, le montant minimum par habitant perçu par une commune de moins de 500 habitants passerait de 64 à 104 euros. Celui d'une commune de 10 000 habitants de 96 à 104 euros.

J'estime le coût de cette mesure à 150 millions d'euros la première année, avant une montée en charge progressive pour atteindre un coût annuel de 889 millions d'euros à partir de 2018. A titre de comparaison, cela équivaudrait à un doublement de la dotation de solidarité rurale (DSR).

Il faut souligner que la réforme bénéficierait essentiellement aux communes de moins de 3 500 habitants, qui percevraient près de 80 % de l'augmentation de la dotation.

Néanmoins, en termes d'augmentation moyenne par commune, l'impact serait assez faible pour les communes de moins de 500 habitants, avec une augmentation de l'ordre de 9 600 euros environ. Pour les communes dont le nombre d'habitants est compris entre 3 500 et 10 000, l'augmentation moyenne serait plus importante, de l'ordre de 70 000 euros.

Il est proposé, pour financer cette mesure, de relever le taux de l'impôt sur les sociétés ; les recettes ainsi procurées compenseraient à due concurrence la charge nouvelle ainsi créée. Il s'agit en quelque sorte « d'extraire » de la DGF et de l'enveloppe normée la hausse proposée de la dotation de base, afin d'éviter que les collectivités elles-mêmes ne la financent.

Or, le financement d'une telle mesure doit être compatible avec les objectifs en matière de prélèvements obligatoires, de dépense et de déficit publics, définis dans le cadre de notre trajectoire de redressement des comptes publics. Ainsi, en ce qui me concerne, je considère que le mode de financement proposé n'est pas envisageable.

D'autre part, un financement par l'État ne paraît pas envisageable dans un contexte de réduction des dépenses publiques, et alors qu'il a été demandé aux collectivités de participer à cet effort.

Enfin, la participation des collectivités elles-mêmes au financement de ce dispositif selon les modalités « traditionnelles » de compensation de la hausse des dotations de base paraît également inopportune. En effet, les collectivités doivent participer, en 2014, à un effort de maîtrise des dépenses publiques, qui se traduit notamment par une réduction de 1,5 milliard d'euros des concours de l'État aux collectivités. La répartition de cet effort a abouti à un accord au sein du comité des finances locales (CFL), concrétisé par le « Pacte de confiance et de responsabilité » présenté par le Premier ministre le 16 juillet 2013. Il serait inopportun de remettre en cause cet accord.

Outre l'épineuse question du financement, l'appréciation de la situation financière des communes rurales ne saurait se limiter à leur dotation de base.

En effet, la dotation de superficie et surtout la DSR prennent d'ores et déjà en compte certaines spécificités des communes rurales.

Ainsi, l'objectif de la DSR, énoncé par la loi, est de « tenir compte, d'une part, des charges qu'elles supportent pour contribuer au maintien de la vie sociale en milieu rural, d'autre part, de l'insuffisance de leurs ressources fiscales ». Les parts « péréquation » et « cible » de la DSR sont notamment réparties sur la base de critères de charges reconnues comme particulièrement importantes pour le monde rural : il s'agit de la longueur de voirie classée dans le domaine public communal et du nombre d'enfants âgés de 3 à 16 ans. Les autres critères utilisés pour répartir le montant de la DSR entre communes éligibles sont le potentiel financier et l'effort fiscal, ce qui permet de prendre également en compte les marges de manoeuvre fiscales et la richesse des communes.

Or, il faut noter que sur les dix dernières années, le montant de la DSR a plus que doublé puisqu'il a augmenté de plus de 130 %.

Malgré cette augmentation et la création de la fraction « cible » de la DSR, son efficacité est faible en raison de son saupoudrage. Ainsi, près de 95 % des communes bénéficient de la DSR, et 97 % des communes de moins de 10 000 habitants la perçoivent. La moitié des communes éligible à la DSR perçoivent une dotation de 9 600 euros ou moins.

En plus de la DSR, les communes rurales bénéficient de la dotation de superficie, dont le mode de calcul leur est favorable : celle-ci est égale à 3,22 euros par hectare et à 5,37 euros par hectare dans les communes situées en zone de montagne. D'un montant total de 225 millions d'euros, elle est répartie pour 99 % de son montant entre les communes de moins de 20 000 habitants.

La DSR et la dotation de superficie sont donc spécifiquement conçues pour tenir compte des particularités des communes rurales et leur sont favorables.

Par ailleurs, il faut reconnaître qu'il existe des charges liées à la population - les « charges de centralité ».

La prise en compte de ces charges est ancienne et dès la création, en 1985, d'une dotation calculée à partir du nombre d'habitants, un coefficient de pondération avait été mis en place.

Leur montant est en revanche difficile à évaluer. Le choix, en 2004, de retenir un écart de dotation de base par habitant compris entre 1 et 2 avait fait l'objet de débats importants au CFL. Il est difficile aujourd'hui de se prononcer sur la pertinence de ce rapport de 1 à 2 ; cependant, il me semble qu'il demeure indispensable de prendre en compte les charges de centralité.

Enfin, il faut reconnaître que l'effort fiscal des communes de moins de 500 habitants est inférieur à la moyenne nationale : celui-ci croît progressivement avec la population, jusqu'aux communes de 50 000 habitants, et il est maximal pour les communes dont le nombre d'habitants est compris entre 100 000 et 200 000. Il décroit ensuite dans les communes de plus de 200 000 habitants.

S'il convient de prendre en compte les spécificités du monde rural, il est également nécessaire de considérer son hétérogénéité.

En effet, « l'appellation » de territoire rural recouvre une grande diversité de situations, entre les communes touristiques, les communes situées à proximité de grands centres urbains ou encore les communes les plus isolées.

À ce titre, les communes les moins peuplées - et notamment celles de moins de 1 000 habitants - se caractérisent par une grande diversité en termes de revenu moyen par habitant. La situation économique de la population résidant dans ces petites communes est donc très variable.

En outre, s'agissant du potentiel financier, qui mesure la richesse de la collectivité elle-même, il apparaît que parmi les communes de moins de 2 000 habitants, le potentiel financier est lui aussi très variable.

Ainsi, augmenter la dotation de base aurait un impact aussi bien sur les communes « riches » que sur les communes « pauvres », aussi bien sur les communes dont les habitants connaissent une situation économique particulièrement précaire que sur celles dont la population est plus aisée.

Face à cette extrême diversité des situations des communes rurales, je pense que l'augmentation de la dotation de base n'est pas une réponse pertinente aux difficultés rencontrées par certaines d'entre elles. En d'autres termes, un effort financier sur la dotation de base n'aurait pas un effet suffisamment ciblé sur les communes vraiment en difficulté.

C'est pourquoi je considère que la réflexion sur les difficultés du monde rural doit s'inscrire dans le cadre plus global d'une réforme de la DGF. Je vous invite donc à poursuivre dans ce sens la réflexion lancée par le texte examiné aujourd'hui et d'adopter à ce stade une motion tendant au renvoi en commission de la proposition de loi.

Je rappelle par ailleurs que le Gouvernement a évoqué à plusieurs reprises l'ouverture d'un chantier sur la réforme de la DGF. La question de la dotation de base et des territoires ruraux sera l'une des questions à aborder. Nous aurons l'occasion d'interpeller en séance la ministre ou les ministres sur ce sujet.

M. François Marc, rapporteur général . - Je souhaite m'associer aux propos de Jean Germain et confirmer son analyse sur la situation vécue ici et là comme fortement inégalitaire. Il existe en effet une attente de la part des élus locaux qui souhaitent que l'on parvienne à plus d'égalité de traitement entre collectivités territoriales.

Lorsque j'ai été élu rapporteur général, j'ai indiqué qu'en matière de collectivités territoriales, il existait, selon moi, trois chantiers prioritaires qu'il était urgent de conduire ou de poursuivre. Tout d'abord, il me semblait nécessaire d'approfondir la péréquation horizontale et verticale. J'observe que, sur ce premier point, le Gouvernement respecte les engagements pris et poursuit l'effort en direction des territoires les plus modestes malgré les difficultés financières.

Le deuxième chantier concernait la révision des valeurs locatives. La commission des finances du Sénat a fortement insisté pour que le Gouvernement mette en oeuvre la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, qui va concerner 3,3 millions de locaux commerciaux et professionnels dès le 1 er janvier 2015 et qui est en cours de finalisation. En matière de locaux d'habitation, nous poursuivons le travail en collaboration avec Bercy et la direction générale des collectivités locales (DGCL). Ces efforts devraient se concrétiser d'ici la fin de l'année, par la définition des modalités concrètes et du calendrier de la réforme. La phase d'expérimentation et de mise au point définitive du processus nécessitera quatre années. J'insiste sur l'importance du travail de préparation et de simulation qui doit être réalisé au préalable pour de telles réformes.

Le troisième chantier, selon moi, est celui de la DGF. Je suis en accord avec l'idée d'une répartition de la DGF qui réponde mieux aux attentes, besoins et charges des collectivités. Mais je pense que deux années au moins sont nécessaires pour mener un travail de préparation et d'analyse satisfaisant, pour que le CFL soit saisi et que la concertation soit menée au sein des associations d'élus locaux. Ce n'est qu'à l'issue de ce travail que pourra être mise en oeuvre une nouvelle étape de « toilettage », voire de refondation de la DGF.

Nous avons suivi avec Jean Germain les travaux qui ont abouti à l'élaboration du « Pacte de confiance et de responsabilité ». Nous avons donc conscience de la situation complexe dans laquelle se trouvent les collectivités territoriales et en particulier des efforts financiers qui leur sont demandés suite à la diminution de leurs dotations de 1,5 milliard d'euros en 2014.

Pour toutes ces raisons, il me semble judicieux d'en rester à ce stade, pour l'instant, avant d'entamer une refondation de la DGF. Je soutiens par conséquent le rapporteur sur ce sujet.

Mme Marie-France Beaufils . - Notre proposition de loi vise à tenir compte des « petites » communes. Cette appellation est à privilégier par rapport à celle de communes « rurales ». Cette dernière n'est pas toujours la plus juste en raison de la diversité des situations qu'elle recouvre. Nous souhaitons qu'il soit possible de définir un « minimum à vivre » pour ces petites communes, qui leur permette de répondre aux obligations auxquelles elles doivent faire face. Ces obligations ont fortement évolué depuis la mise en place de la DGF. Les évolutions de la population, les conséquences de décisions nationales ont créé de nouvelles responsabilités pour ces collectivités. Il leur manque souvent les moyens financiers pour les assumer ainsi que l'accompagnement des services de l'État en matière d'équipement pour y répondre.

Ces petites communes sont également confrontées à l'ampleur de la voirie, à la difficulté de l'entretenir, avec aujourd'hui des matériels agricoles très différents de ceux qui existaient il y a dix ou quinze ans...

Nous aurions souhaité que notre proposition de loi soit discutée et amendée. Nous reconnaissons que notre texte n'est pas parfaitement au point, mais l'adoption d'une motion tendant au renvoi en commission ressemble à un « enterrement », à l'image d'expériences précédentes. Malgré l'existence de « niches » parlementaires, il est parfois difficile de créer le débat autour de sujets qui nous semblent importants.

À l'approche des élections municipales, beaucoup de maires de petites communes éprouvent des difficultés à s'entourer d'élus qui souhaitent certes s'investir, mais qui sont conscients de disposer de peu de moyens. Il faut souligner que ce sont ces élus de terrain qui permettent de maintenir la qualité du lien social.

J'ai entendu la remarque sur la DSR. En effet, elle n'est plus très efficace car son périmètre est trop large. Il y a du travail à faire en ce domaine. Nous comprenons que la question de la réforme de la DGF puisse éventuellement être abordée en deux temps. Cependant, la DGF des petites communes est véritablement un problème à prendre en considération. Or le choix du rapporteur, je le regrette, ne le permettra peut-être pas. Je suis favorable à ce que l'on poursuive la discussion.

M. Philippe Dallier . - En réalité, il existe deux sujets. D'une part, le texte propose de gager la hausse de la DGF par l'augmentation de l'impôt sur les sociétés (IS). Chacun doit avoir conscience que cela nuit à la compétitivité de notre pays.

D'autre part, il y a la question de la péréquation elle-même. Notre rapporteur a rappelé que le montant de la DSR a été doublé tout comme celui de la dotation de solidarité urbaine (DSU). La DSR présente les mêmes défauts que la DSU, dans la mesure où ses critères sont trop larges et que cela nuit à son efficacité. Il ne faut pas non plus oublier qu'il existe un autre mécanisme de péréquation : le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC). Ce dispositif n'a pas encore produit tous ses effets. Alors que son montant progresse d'année en année, la réflexion se poursuit sur les critères de sa répartition.

Plutôt que d'empiler les dispositifs de péréquation, je pense qu'il faut reprendre le travail à la base. Dans cette logique, il faudrait revoir la DGF de manière globale et dans un second temps seulement, imaginer de nouveaux mécanismes de péréquation. À envisager la hausse de la DGF pour les petites communes, nous allons au-devant de graves difficultés, en particulier dans le contexte économique actuel. Je suis par conséquent favorable à la motion présentée par le rapporteur.

M. Charles Guené . - Le problème soulevé par le groupe communiste républicain et citoyen est réel. Ainsi, les élus au CFL ont parfaitement conscience qu'une refondation du financement des collectivités territoriales sera nécessaire d'ici quelques années. Face aux besoins des communes urbaines qui exigent des moyens supplémentaires pour faire face aux charges de centralité, l'idée d'un « minimum vital » pour les petites communes me semble tout à fait intéressante dans la mesure où elle correspondrait à une sorte de SMIC pour celles-ci. Cependant, l'approche retenue dans ce texte ne tient pas compte des évolutions actuelles avec, d'une part, les dispositifs de péréquation mis en place aujourd'hui dont les effets ne sont que partiellement connus et, d'autre part, la territorialisation qui anime la fiscalité locale : aujourd'hui, on apprécie la richesse des communes à l'échelle d'un territoire, avec l'intercommunalité, il est absurde de raisonner au niveau des petites communes. En effet, les mécanismes de solidarité sont appliqués à l'échelle de territoires plus vastes.

Je pense qu'il faut du recul pour apprécier correctement ces différentes étapes de la fiscalité locale, notamment à la suite de la réforme de la taxe professionnelle, et ce d'autant plus que la crise actuelle a un impact important sur les finances locales. En ce qui me concerne, je souscris globalement à l'analyse du rapporteur. L'idée d'un renvoi en commission permettra de travailler sereinement sur ces sujets.

M. Joël Bourdin . - Je ne pense pas que ce soit la dotation de base qui pose problème pour les petites communes mais la dotation d'intercommunalité. L'intercommunalité se développe à l'image des communautés d'agglomérations, des « métropoles », etc. Dans l'enveloppe de répartition de la DGF, à l'inverse des dotations d'intercommunalité, on observe une diminution des dotations dévolues aux communes quelle que soit leur taille. C'est la raison pour laquelle on a inventé des systèmes d'abondements au niveau des petites communes. La DSR n'est plus dans le système créé à l'origine : on attribuait des dotations aux diverses communes, puis la dotation d'aménagement au sein de laquelle on soustrayait la dotation d'intercommunalité, et finalement il restait la DSR et la DSU. Lorsque l'on a constaté qu'il ne restait plus rien pour la DSR et la DSU, on a alors décidé de créer des dotations latérales supplémentaires. J'évoque cela pour montrer la nécessité d'une révision d'ensemble et non de la seule dotation de base au sein des communes.

En ce qui me concerne, il ne me semble pas non plus opportun de faire supporter la charge de l'augmentation de la dotation de base par l'IS. En faisant peser sur les entreprises une nouvelle charge, ce serait en réalité les épargnants qui seraient victimes du dispositif.

Je suis donc favorable à la proposition du rapporteur.

M. Aymeri de Montesquiou . - Tout d'abord, je souhaiterais souligner que la réforme de la taxe professionnelle a eu peu d'incidences sur les finances des petites communes rurales dont les ressources sont avant tout foncières. En second lieu, il me semble nécessaire d'adresser un message aux différents gouvernements en matière de normes. Ainsi, les dépenses en matière d'accessibilité exigées des communes sont beaucoup trop importantes. Enfin, les maires connaissent de plus en plus de difficultés à comprendre la fiscalité qui s'applique à leur commune. À force d'ajouter des oripeaux, on construit un épouvantail.

Même si je salue la proposition du groupe communiste, républicain et citoyen qui soulève le problème des ressources des petites communes rurales, je rejoins les conclusions du rapporteur et du rapporteur général. Il me semble indispensable de tout remettre à plat.

M. Vincent Delahaye . - Il est sage de suivre les conclusions du rapporteur. Marie-France Beaufils l'a dit, la proposition de loi que nous examinons est imparfaite. L'augmentation de la DGF des « petites » communes qui résulte de ce texte n'est pas anodine. Il existe aujourd'hui un processus de transfert de compétences qui n'est pas négligeable et une péréquation qui monte en puissance. Certes, les critères de la DSR et de la DSU sont perfectibles, car ces dotations bénéficient à trop de collectivités, mais je pense qu'il faut se donner du temps pour examiner les effets de la péréquation. Plutôt que d'augmenter le taux déjà élevé de l'IS, je préconise le renvoi en commission de cette proposition de loi.

M. Philippe Adnot . - Ce texte m'est sympathique. Je pense qu'il serait intéressant pour les collectivités et les citoyens que cette proposition de loi soit débattue. Il faudrait simplement supprimer l'article 3 qui gage le dispositif d'une hausse de la dotation de base des petites communes par une augmentation de l'IS.

En France, il a été décidé de mettre en oeuvre une intercommunalité « idéologique », en octroyant aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) des dotations de 2,5 milliards à 3 milliards d'euros, alors que l'intercommunalité devrait se financer toute seule, à travers les économies de fonctionnement qu'elle permet. Le texte que nous examinons est imparfait, mais nous pourrions l'améliorer pour mettre en oeuvre un système plus équilibré. Je suis donc très favorable à son examen.

M. Philippe Marini, président . - Je rappelle à nos collègues qu'en supprimant les recettes prévues dans ce texte mais en conservant les dépenses, nous nous exposerions à des conséquences fâcheuses...

M. Philippe Adnot . - Je pense que nous pourrions trouver des ressources du côté des intercommunalités.

M. François Patriat . - Je pense qu'il est nécessaire de revenir aux « fondamentaux ». Nous sommes en période de crise, chacun semble conscient des efforts à réaliser et favorable à un partage de ces efforts. Il ne me semble par conséquent pas très judicieux de demander à ce que les petites communes - qu'on affirme être moins bien traitées - échappent à cet effort. D'une part, parce que parmi ces petites communes, toutes ne sont pas à plaindre, je dispose d'exemples dans ma région... D'autre part, parce que le problème n'est pas de savoir si les petites communes sont pauvres - c'est une réalité incontestable pour certaines d'entre elles - mais de décider si l'on souhaite continuer de tolérer cette « exception française » qui consiste en l'existence de 36 000 communes avec chacune leur identité, leur souveraineté et leur féodalité. Le débat est beaucoup plus large que la seule augmentation de la DGF. Je voterai la motion de renvoi en commission.

M. Gérard Miquel . - Je suis très favorable à la proposition du rapporteur. On ne peut pas opposer une collectivité à une autre. Nous avons besoin de simplifier et de clarifier les dotations aux collectivités territoriales. Les intercommunalités ont été créées pour corriger certains déséquilibres entre communes « centre » et communes périphériques et pour assumer les dépenses de fonctionnement. Une remise à plat générale est aujourd'hui nécessaire. Je voterai pour la motion proposée par le rapporteur.

M. François Fortassin . - Je voudrais rappeler que certains économistes et démographes annonçaient il y a 30 ans la mort du monde rural. En réalité, les communes rurales ont prospéré, avec peut-être quelques difficultés, et rares sont les communes qui n'ont pas vu leur population augmenter. Elles ont également évolué : les communes rurales essentiellement agricoles ont vu la majorité de leur population avoir une activité à dominante non agricole, et c'est un élément que nous devons prendre en compte. Certes, en zone urbaine, il existe des besoins considérables liés à des problèmes de sécurité, etc. Mais en zone rurale, les communes ont des besoins croissants en matière d'équipement, ne serait-ce que parce que leur population a augmenté. Ces équipements sont en outre plus chers, car la superficie à couvrir rapportée aux nombre d'habitants est automatiquement plus importante... Si on ne veut pas que ces communes, qui ont, malgré tout, vécu avec des difficultés, périssent alors que leurs besoins sont plus importants que ceux qu'ils étaient il y a quelques années, il faut en tenir compte et c'est pour cela que moi aussi je défendrai le texte de monsieur le rapporteur.

M. Jean Germain, rapporteur . - Je n'ai pas senti de divergences majeures sur le choix que j'ai exprimé précédemment. C'est le rôle du Sénat et de la commission des finances d'examiner la question de la DGF et du monde rural. Ce monde est certainement exaspéré, mais il est divers et sa population s'urbanise. Il faut le prendre en compte. Les maires font face à de nouvelles interrogations : le financement de leur commune, la dotation de solidarité communautaire, les modalités de mise en place des plans locaux d'urbanisme (PLU) intercommunaux...

Peut-on accepter de financer la hausse de la DGF par une augmentation de l'IS ? La réponse est « non ». Il est préférable d'opter pour une réaffectation des ressources locales par la péréquation, comme l'a rappelé notamment Philippe Dallier.

Il faudra poursuivre ce débat ultérieurement dans le cadre plus général de la réforme de la DGF.

M. Philippe Marini, président . - Nous allons pouvoir passer au vote sur la motion tendant au renvoi en commission de la proposition de loi n° 814 (2012-2013), de Gérard Le Cam, tendant au traitement équilibré des territoires par une réforme de la dotation globale de fonctionnement.

La commission a voté la motion tendant au renvoi en commission de la proposition de loi tendant au traitement équilibré des territoires par une réforme de la dotation globale de fonctionnement.

En conséquence, elle n'a pas adopté de texte.

En application de l'article 42, alinéa premier, de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte initial de la proposition de loi.

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