E. LA POLICE TECHNIQUE ET SCIENTIFIQUE (PTS) : UNE VIGILANCE NÉCESSAIRE

1. L'amélioration des taux d'élucidation à concilier avec la préservation des libertés

Dans son rapport d'information précité « Police, gendarmerie : quelle stratégie d'investissement ? », votre rapporteur spécial détaille la montée en puissance de la police technique et scientifique (PTS) ainsi que ses enjeux budgétaires. Il souhaite, à l'occasion de l'examen du présent projet de loi de finances, insister sur la vigilance nécessaire face à ce phénomène.

Certes, les avancées techniques et scientifiques permettent d'améliorer les taux d'élucidation des crimes et délits. Le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) sont dans ce but largement mis à contribution.

Cependant, la PTS présente aussi certaines limites. Les possibilités offertes par les nouvelles technologies doivent être conciliées avec la préservation des libertés individuelles et publiques en ne débouchant pas sur un « fichage » intrusif. Tel est notamment le sens de la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité 32 ( * ) . Pour votre rapporteur spécial, une attention particulière doit être porté à l'attention des militants politiques et syndicalistes, parfois fichés de façon abusive, qui doivent avoir un « droit à l'oubli ».

2. L'exemple des fichiers

Pour mémoire, votre rapporteur spécial rappelle que, dans son rapport d'activité pour 2011, la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) indiquait avoir procédé à 3 374 vérifications en 2011, dont « plus de 60 % (...) ont porté sur les fichiers de police judiciaire » .

Les résultats de ces vérifications sont recensés dans le tableau suivant.

Les vérifications de la CNIL sur les fichiers de police judiciaire en 2011

STIC

JUDEX

Nombre de vérifications effectuées

1 112

946

Fiches exactes

28 %

38 %

Fiches rectifiées (qualification des faits entraînant ou non une réduction du délai de conservation, ajout de mentions pour tenir compte des suites judiciaires réservées aux infractions enregistrées...)

44 %

30 %

Fiches supprimées

28 %

32 %

Source : d'après le rapport d'activité pour 2011 de la CNIL

Dans son rapport d'activité pour 2012, la CNIL indique qu'« au vu des enjeux pour les droits et libertés des citoyens , la Commission a souhaité inscrire au programme annuel des contrôles de l'année 2012 une nouvelle série de vérifications » sur le STIC.

Dans l'attente des résultats de ce nouveau contrôle, votre rapporteur spécial relève dans celui réalisé en 2011 un nombre important d'« anomalies » ou d'erreurs dans les fichiers STIC et JUDEX, seulement (respectivement) 28 % et 38 % des fiches vérifiées étant exactes. En conséquence, il estime impératif que des progrès soient réalisés dans ce domaine . L'interconnexion prévue entre la chaîne d'application pénale Cassiopée du ministère de la justice, d'une part, et les fichiers STIC et JUDEX (prochainement regroupés au sein de l'application « Traitement des procédures judiciaires »), d'autre part, doit être l'occasion d'obtenir des améliorations.

Votre rapporteur spécial rappelle sa proposition d'introduire dans le PAP des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » un indicateur mesurant le « taux d'exactitude » de ces fichiers (Cf. Partie I.D.4).


* 32 La loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité est parue au Journal officiel du 28 mars 2012 après une censure partielle de ses dispositions par le Conseil constitutionnel.

Dans sa décision DC n° 2012-652 du 22 mars 2012, celui-ci a notamment censuré l'article 5 qui prévoyait la mise en place d'un fichier commun aux CNIe et aux passeports, comportant des données biométriques. Ce fichier unique, principalement conçu pour garantir la fiabilité des documents délivrés et simplifier l'instruction des demandes, pouvait être consulté, à titre subsidiaire, à des fins policières ou judiciaires.

Le Conseil constitutionnel a considéré qu'eu égard à la nature des données enregistrées (données biométriques traçantes), à l'ampleur du traitement regroupant potentiellement la quasi totalité des nationaux, à ses caractéristiques techniques (identification possible à partir des seules empreintes) et aux conditions de sa consultation, la création de la base unique envisagée portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée par rapport au but poursuivi.

La loi promulguée ne comprend donc désormais que :

- l'insertion d'un composant dans la carte nationale d'identité, comportant notamment l'image de deux empreintes digitales du titulaire ;

- la transmission directe des données d'état civil de la commune de naissance à la commune qui a enregistré la demande de titre d'identité.

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