II. OBSERVATIONS SUR LES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES DU PROGRAMME 112 EN 2016

1. 215 millions d'euros en AE et 254 millions d'euros en CP : la recherche d'une couverture en paiement des engagements

De manière générale, les dispositifs financés s'inscrivent dans une certaine continuité avec les actions conduites en 2015 . En termes de dotations budgétaires globales, le présent projet de loi de finances dote le PICPAT de 215 millions d'euros en AE et de 254 millions d'euros en CP , soit une stabilité des AE (hausse de 0,2 % ) et une baisse de 4 % des CP par rapport à la loi de finances pour 2015. Cette répartition des crédits, dans laquelle les CP excèdent les AE, confirme la fin du processus d'assainissement auquel a été soumis le programme , avec succès, au cours des dernières années. Depuis 2009, la dette exigible du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) a été résorbée. Et, en 2016, comme auparavant, le processus d'assainissement auquel a été soumis le PICPAT devrait continuer à porter ses fruits : la dette exigible sur le FNADT ne devrait pas se reconstituer l'année prochaine . Le volume de crédits de paiement restera en effet supérieur à celui des autorisations d'engagements, ce qui permettra au CGET de poursuivre sa politique de soutenabilité des engagements du FNADT . Il s'agit donc à nouveau de permettre le rattrapage de la couverture en paiement des engagements pris. Les engagements non couverts par des paiements sont, en effet, en diminution constante depuis sept ans : 621 millions d'euros fin 2010, 651 millions d'euros fin 2011, 590 millions d'euros fin 2012, 591 millions d'euros fin 2013, 549 millions d'euros fin 2014 et, d'après une estimation du CGET, 498 millions d'euros en fin d'exercice 2015. Le niveau des CP alloués en 2016 ne devrait donc pas induire de tensions sur le financement du programme .

Toutefois, votre rapporteur spécial observe que les prévisions d'engagements sur le PICPAT restent importantes. C'est pourquoi il souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité de ne pas relâcher l'effort de « soutenabilité » du programme .

Votre rapporteur spécial relève, par ailleurs, que le présent projet de loi de finances prévoit, au bénéfice du programme 112, l'affectation de 7,98 millions d'euros de fonds de concours , en AE comme en CP. 7,3 millions d'euros seront issus d'organismes chargés d'une mission de service public (Pôle Emploi, La Poste, GRDF ou des opérateurs sociaux tels que la CNAF, la CNAMTS, la CNAV, la MSA) afin de financer l'amélioration de l'accès des usagers aux services au public. Et un peu plus de 600 000 euros proviendront du FEDER (Fonds européen de développement économique et régional) et seront destinés à l'action 4, « Instruments de pilotage et d'étude », au titre des missions de suivi et d'expertise du programme national d'assistance technique.

2. Des dépenses de fonctionnement et de personnel en baisse (action 4, 20 % du programme)

Les dépenses de personnel (titre 2) retracées par le PICPAT correspondent aux effectifs rémunérés sur les crédits du CGET .

Le plafond d'emplois du programme pour 2016 représente 291 ETPT (- 15 par rapport à 2015 où il s'établissait à 306) et les dépenses afférentes s'élèvent ainsi, dans le présent projet de loi de finances, à 23 millions d'euros (charges sociales incluses), soit un million d'euros de moins que les 24 millions d'euros prévus en 2015.

L'ensemble des crédits de fonctionnement du CGET s'élèveront, en 2016, à 12,57 millions d'euros en AE comme en CP (contre 20 millions d'euros en 2015) . Hors dépenses de personnel, ces crédits (retracés dans l'action 4 « Instruments de pilotage et d'étude » du programme dont les dépenses de personnel) se rapportent (en AE et CP) :

- aux dépenses immobilières , pour 4,77 millions d'euros ;

- au fonctionnement courant , avec 4 , 33 millions d'euros ;

- aux dépenses d' études et évaluation , pour 2,87 millions d'euros ;

- aux crédits de fonctionnement des commissariats à l'aménagement des massifs (600 000 euros).

L'action 4 est, en outre, dotée de crédits d'intervention à hauteur de 7,77 millions d'euros en 2016, ce qui porte le total de l'action à 43,3 millions d'euros en AE et CP, soit 20 % des crédits du PICPAT . Ces dépenses d'intervention sont des transferts à des organismes payeurs pour assurer la contrepartie de l'assistance technique des programmes européens.

3. Les incertitudes entourant l'exécution des nouveaux contrats de plan État-régions (CPER)

Par l'intermédiaire de ses actions 1 et 2 11 ( * ) , qui représentent chacune 40 % des crédits du programme, le PICPAT consacre environ la moitié de ses crédits aux contrats de plan État-régions (CPER), soit 53,5 % des AE et 44,3 % des CP 12 ( * ) en 2016. Sur ces CP, près de 60 % serviront à couvrir des engagements de la précédente génération de CPER, plus de 25 % des engagements de 2015 et seulement 15 % des engagements qui seront pris au cours de l'année prochaine.

D'après le Gouvernement, la génération 2015-2020 des contrats 13 ( * ) devrait représenter, au total, un effort de 13,9 milliards d'euros pour la seule part État , soit un peu moins de 2,32 milliards d'euros par an (et 15,1 milliards d'euros pour les régions), répartis entre cinq ministères et différents opérateurs publics. Cette perspective contredit la tendance à la contraction des crédits budgétaires contractualisés au titre des CPER, tendance amorcée depuis la génération 2000-2006 de contrats. Pour mémoire, la génération 2007-2014 a représenté 11,4 milliards d'euros pour la part État et 14,3 milliards d'euros pour les régions. Votre rapporteur spécial souligne cependant les incertitudes qui entourent la nouvelle génération de CPER. Outre la mise en place de nouveaux exécutifs régionaux après les élections régionales de décembre 2015, c'est surtout la mise en oeuvre de la nouvelle carte des régions au 1 er janvier 2016 qui laisse planer un climat incertain sur les modalités d'exécution des contrats . Votre rapporteur spécial a interrogé le CGET et il apparaît que la clause de revoyure se fera au cas par cas et probablement en 2017, selon une méthode qui n'est pas encore connue . Pour l'heure, il rappelle que le rapport déjà cité sur l'exécution des CPER avait conduit votre commission des finances à formuler plusieurs recommandations en octobre 2014 14 ( * ) . Et il en appelle à la vigilance sur les révisions à mi-parcours qui seront conduites.

Les perspectives des contrats de plan État-régions

L'année 2016 représentera la première année pleine d'exécution des nouveaux contrats de plan . Elle sera marquée par un contexte national particulier : la mise en place des nouveaux exécutifs régionaux consécutive aux élections régionales de décembre 2015 et la mise en oeuvre de la nouvelle carte des régions au 1 er janvier 2016 .

Dans tous les contrats signés, une clause de révision du contrat a été introduite afin d'ajuster les priorités et les projets aux nouveaux périmètres régionaux et aux nouvelles compétences dévolues aux conseils régionaux. Des régions concernées par un regroupement ont anticipé cet exercice dès la préparation des CPER, par exemple par l'élaboration de volets communs.

Les éventuelles demandes d'ajustements des contrats seront inscrites dans le cadre de l' exercice de révision à mi-parcours en 2017 , qui constituera le cadre de la consolidation des contrats à l'échelle des nouvelles régions. Le cadre méthodologique de ces exercices est en cours de préparation .

Source : CGET

4. Des annonces en matière de ruralité qui contrastent avec la réduction des moyens affectés à différents dispositifs

Lors du second comité interministériel aux ruralités de l'année 2015, qui réunissait, le lundi 14 septembre 2015 à Vesoul, douze ministres autour du Président de la République et du Premier ministre, différentes mesures ont été annoncées pour améliorer le quotidien des habitants et l'attractivité des territoires ruraux parmi lesquelles une enveloppe d' un milliard d'euros pour soutenir l'investissement des communes et intercommunalités 15 ( * ) et la mise en service de 1 000 maisons de services au public (MSAP) d'ici 2017.

Votre rapporteur spécial se félicite de l'affichage d'une telle ambition et espère qu'elle se traduira dans les faits mais, à ce stade, il déplore que le PICPAT ne prévoit aucun engagement pour certains dispositifs dédiés à la ruralité . Pour le projet de revitalisation des centres-bourgs 16 ( * ) lancé en juin 2014, le présent projet de loi de finances n'ouvre ainsi que 6 millions d'euros de CP sur 2016, mais les annonces faites par le Gouvernement devraient conduire à 300 millions d'euros d'engagements nouveaux .

Par ailleurs, votre rapporteur spécial regrette l'abandon des maisons de santé 17 ( * ) (aucun engagement et seulement 2 millions d'euros de CP en 2016 selon le présent projet de loi de finances) et des pôles d'excellence rurale (PER). Instaurés en 2006 18 ( * ) , ces derniers bénéficieront en 2016 de seulement 16,6 millions d'euros de CP selon le présent projet de loi de finances 19 ( * ) .

Outre ces financements résiduels , pour lesquels les ouvertures en CP ne servent qu'à couvrir des engagements contractés précédemment, votre rapporteur spécial relève que le recentrage de la prime d'aménagement du territoire (PAT), outil d'aide à la localisation d'activités et d'emplois dans les zones prioritaires du territoire, conduit à une baisse des dotations de 17 % en AE et 10 % en CP entre 2015 et 2016 , sachant que les crédits enregistraient déjà une contraction les années précédentes.

La prime d'aménagement du territoire

Créée en 1982, la prime d'aménagement du territoire (PAT) est un outil en faveur de l'emploi, qui prend la forme d'une subvention d'investissement, accordée par le ministre chargé de l'aménagement du territoire, après consultation de la CIALA, aux entreprises situées dans certaines zones fragiles (les zones aides à finalité régionale ou AFR) et dont l'activité peut entraîner l'emploi permanent d'un nombre minimum de salariés. Aide d'État, la PAT est soumise à une double réglementation, au plan national et au plan communautaire .

La Commission européenne a engagé en 2005 une première réforme, afin de réorienter les aides publiques aux entreprises vers les objectifs de la stratégie de Lisbonne, qui s'est traduite en mars 2007 en France par l'adoption d'une carte des AFR pour la période 2007-2013. Une seconde réforme a été engagée en 2014, avec l'adoption d'une nouvelle carte pour la période 2014-2020. Cette carte définit les régions qui peuvent bénéficier d'aides et fixe le plafond des aides autorisées dans ces régions. Ce nouveau zonage des AFR, entré en vigueur le 1 er juillet 2014, recentre le dispositif de la PAT, dans la mesure où des conditions restrictives sont fixées pour les grandes entreprises. De même, le nouveau régime 2014-2020 des AFR conduit à recentrer la PAT sur des projets industriels et de service.

Source : CGET

Votre rapporteur spécial constate la tendance à la réduction des actions du PICPAT en faveur des territoires ruraux . Il souhaite que les mesures présentées lors du comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015 se traduisent sur un plan budgétaire et qu' une partie importante des crédits transitent par la mission « Politique des territoires », en particulier par le programme 112 .

Il se félicite tout de même que 7,2 millions d'euros en AE et 7,6 millions d'euros en CP soient demandés pour 2016 pour atteindre l'objectif de 1 000 maisons de service au public (MSAP) d'ici la fin de l'année prochaine . Ce plan décidé en 2013 doit donc atteindre son objectif un an plus tôt que prévu, le comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015 ayant décidé de ramener de la fin 2017 à la fin 2016 la date butoir de création des 1 000 MSAP.


* 11 L'action 4 « Instruments de pilotage et d'étude » du programme a été présentée ci-avant.

* 12 115,35 millions d'euros en AE et 112,6 millions d'euros en CP.

* 13 Cette génération se singularise par un périmètre remanié avec l'entrée du volet routier, la sortie du volet agricole et le caractère obligatoire du volet territorial, optionnel jusqu'en 2014.

* 14 Trois axes d'amélioration sont proposés dans ce rapport. Il s'agit, tout d'abord, de définir un cadrage stratégique des CPER. Ce premier axe appelle l'organisation d'un débat suivi le cas échéant d'un vote au Parlement, conduisant à fixer les orientations stratégiques de la politique nationale d'aménagement et de développement durable du territoire, dans lesquelles les CPER devraient s'inscrire. Le deuxième axe consiste à établir un ciblage rigoureux des CPER et à mieux les articuler avec les autres politiques publiques, en particulier avec les programmes nationaux sectoriels à vocation territoriale. Enfin, il convient d'améliorer le pilotage des CPER, ce qui implique que le comité national de suivi et les comités régionaux se réunissent au moins une fois par an, que les incertitudes liées à la mise au point du nouvel outil informatique Synergie soient levées (calendrier de déploiement, coûts, financement, engagement des partenaires à l'utiliser) et, enfin, que les résultats des évaluations soient pris en considération, lors de la révision des contrats à mi-parcours.

* 15 Sur cette somme, 300 millions d'euros devraient être fléchés vers les petites communes.

* 16 Axé sur l'offre de logements, d'équipements et de services, l'appel à manifestation d'intérêt a conduit à la sélection de 54 communes sur un total de 300 centres-bourgs identifiés pour lesquels les engagements ont été opérés sur l'exercice 2014.

* 17 Financées par les collectivités territoriales, l'État et les fonds européens, ces maisons de santé sont pluridisciplinaires puisqu'elles regroupent en moyenne 3,2 médecins pour 8,3 paramédicaux et pharmaciens. 82 % d'entre elles sont situées en zone rurale.

* 18 Il s'agit au total de 642 projets de développement économique créateurs d'emplois, situés le plus souvent en zone de revitalisation rurale (ZRR).

* 19 Les crédits du programme 112 dédiés aux PER représentaient 20 millions d'euros en AE et 26,5 millions d'euros en CP en 2013, 8 millions d'euros en AE et 22 millions d'euros en CP en 2014 et, enfin, 21 millions d'euros en CP en 2015. Aucun engagement n'était prévu pour les PER au titre de 2015, dans la mesure où les AE déléguées à l'ASP sur les exercices antérieurs étaient, d'après le CGET, suffisantes pour couvrir les opérations prévues. Cette extinction programmée des PER a été confirmée lors de l'audition des responsables du CGET et après 16,6 millions d'euros de CP en 2016, il s'agirait ainsi seulement de 9,9 millions d'euros de CP en 2017.

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