EXAMEN EN COMMISSION

Mercredi 2 mars 2016

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M. François Grosdidier , rapporteur . - Nous avons fait passer le seuil des élections municipales au scrutin de liste à la représentation proportionnelle de 3 500 à 1 000 habitants. Aux dernières élections de mars 2014, une seule liste de candidats a été recensée dans 7,75 % des communes de plus de 3 500 habitants et dans 41 % des communes appartenant à la strate démographique comprise entre 1 000 et 3 500 habitants, c'est-à-dire les communes auparavant soumises au scrutin majoritaire. Dans ces dernières communes, tous les membres de la liste unique sont élus, ce qui prive de réserves de conseillers pour remplacer un membre démissionnaire ou décédé. Or pour fonctionner, un conseil municipal doit compter les deux tiers de ses effectifs ; pour élire son maire, il doit être au complet. S'il manque un conseiller municipal dans une commune de plus de 1 000 habitants pour procéder à l'élection du maire, il faut organiser une nouvelle élection générale. Personne ne comprend cette dépense supplémentaire, puisque c'est la même liste qui se présente à la différence d'un nom ou deux, alors que pour d'autres élections au scrutin de liste à la représentation proportionnelle - élections régionales ou désignation de conseillers communautaires, etc - le législateur a prévu des suppléants. C'est pourquoi cette proposition de loi de M. Cardoux propose d'augmenter de deux noms les listes de candidats du conseil municipal, qui ne siègeraient qu'en cas de décès du maire. M. Cardoux a déposé un amendement pour élargir le recours aux deux conseillers municipaux suppléants en cas de décès d'un conseiller municipal ou après démission liée à une incompatibilité sur la base du cumul des mandats. Je préfèrerais que cette faculté soit élargie à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal : les causes peuvent en être nombreuses. Pour autant, inutile de prévoir davantage de suppléants, car cela accroitra la difficulté à monter les listes.

M. Philippe Bas , président . - Votre amendement COM-1 prévoit que la liste comporte un nombre de noms égal au nombre de sièges à pourvoir, augmenté de deux. L'amendement COM-2 de M. Cardoux prévoit que le conseil municipal n'est pas entièrement réélu à la suite d'un décès ou d'une démission d'un conseiller municipal résultant de l'application de la loi organique du 14 février 2014. Je comprends que votre avis sur ce dernier amendement est défavorable.

Les démissions peuvent avoir des causes diverses : déménagement, mutation professionnelle, mésentente.... Qu'elles obligent à réélire tout le conseil municipal est très lourd. Dans de nombreuses communes, tous les membres de la liste étant élus, il n'y a pas de réserve disponible pour nommer des suppléants.

M. Alain Richard . - Cette proposition de loi est justifiée. L'unicité de la liste peut aussi résulter d'un accident de dépôt de liste. Mais pourquoi limiter les recours aux suppléants ? La loi organique ne limite les cas de remplacement que pour les suppléants des députés ou sénateurs élus au scrutin majoritaire, en excluant la démission. Pour une élection au scrutin de liste, il n'y a pas de sélection des cas de succession, quel que soit le motif de la vacance - ce qui laisse aussi place à des manoeuvres.

M. François Pillet . - Cette proposition de loi a un objectif bien particulier : régler les problèmes posés par les décès. Or l'amendement COM-2 limite à deux cas, qui ne dépendent pas d'une arrière-pensée, la possibilité de faire monter un suppléant : le décès et l'application de la loi organique de 2014. Il me parait plus conforme à l'esprit de la proposition de loi. Aller plus loin interdirait d'organiser une élection générale dans les cas où la démission résulte d'une crise démocratique, par exemple si le maire est mis en minorité.

M. Alain Marc . - Je suis d'accord avec le rapporteur, pour avoir vécu la situation dans mon département. Les élections où une seule liste se présente posent un problème d'expression démocratique. Notre commission des lois s'honorerait à proposer que l'on autorise le dépôt de listes incomplètes. Avoir abaissé le seuil du scrutin de liste à la représentation proportionnelle à 1 000 habitants a augmenté le nombre de communes où une seule liste est présente aux élections municipales.

M. Philippe Bas , président . - Je n'ai pas voté ce changement de seuil, car dans les communes rurales, la démocratie consiste à pouvoir choisir des noms : c'est le système du panachage.

M. Pierre-Yves Collombat . - Du tir aux pigeons !

M. Philippe Bas , président . - La démocratie n'y est pas épuisée par le dialogue entre gauche et droite. L'abaissement du seuil a représenté une régression démocratique. Il vous appartient d'élaborer une telle proposition de loi, monsieur Marc : nul doute qu'elle rencontrerait un large écho.

Mme Jacqueline Gourault . - Le problème se pose en cas de décès du maire. Il y a d'autres cas : dans mon département, des conseillers municipaux ont démissionné massivement pour manifester leur désaccord avec le maire. Je soutiens l'amendement COM-2.

M. André Reichardt . - J'ai cosigné cet amendement ainsi que la proposition de loi, mais après avoir entendu les arguments juridiques de M. Richard, je me rallie à l'amendement COM-1, par souci de cohérence.

M. Philippe Bas , président . - Nous avons donc trois solutions : faire appel aux suppléants uniquement en cas de décès du maire, c'est l'objet de la proposition de loi initiale ; pour combler toute vacance de siège, comme le propose le rapporteur ou, comme le propose l'amendement COM-2, uniquement en cas de décès ou de démission résultant de l'application de la loi organique de 2014.

M. François Grosdidier , rapporteur . - Mon amendement est antérieur à l'amendement COM-2. Un conseil municipal doit compter les deux tiers de ses membres pour fonctionner. En cas de crise, si le maire est devenu minoritaire, deux suppléants ne suffiraient pas à renverser la tendance. D'autant qu'il est plus difficile pour les opposants internes à la majorité d'obtenir la défection d'un tiers du conseil lorsque l'opposition siège.

M. Alain Vasselle . - On voit la gymnastique législative où conduit l'abaissement du seuil du scrutin de liste à la représentation proportionnelle ! Pour réélire un maire, le conseil municipal doit être au complet. Si un élu décède, pourquoi ne pas organiser une élection partielle ? Prévoir des suppléants à tout hasard, c'est une usine à gaz !

M. Philippe Bas , président . - Il est vrai que dans une petite commune, il n'est pas toujours facile de trouver deux personnes supplémentaires.

M. Jean-Pierre Sueur . - Ce texte résulte du décès de Mme Nicole Pinsard, maire de Boulay-les-Barres : il a fallu organiser une élection générale, qui a abouti à la reconduction de tous les conseillers municipaux, ce qui a paru étrange aux électeurs. De même, à Bazoches-sur-le-Betz, le maire a contre lui l'ensemble des conseillers municipaux, mais refuse de démissionner. La situation peut durer longtemps...

M. Pierre-Yves Collombat . - Un classique !

M. Jean-Pierre Sueur . - Cette proposition de loi est assez simple. Adoptons les propositions de notre rapporteur.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article unique

L'amendement COM-1 est adopté. L'amendement COM-2 devient sans objet.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort
de l'amendement

Article unique

M. GROSDIDIER, rapporteur

1

Élargissement du recours aux conseillers municipaux suppléants à l'ensemble des vacances d'un siège au conseil municipal

Adopté

M. CARDOUX

2

Limitation du recours aux conseillers municipaux suppléants en cas de décès d'un conseiller municipal et de cumul des mandats

Rejeté

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