TITRE III - -SÉCURISER LES PARCOURS ET CONSTRUIRE LES BASES D'UN NOUVEAU MODÈLE SOCIAL À L'ÈRE DU NUMÉRIQUE
CHAPITRE IER - MISE EN PLACE DU COMPTE PERSONNEL D'ACTIVITÉ

Article 21 (art. L. 5151-1 à L. 5151-12 [nouveaux], L. 6111-6, L. 6323-1, L. 6323-2, L. 6323-4, L. 6323-6, L. 6323-7, L. 6323-11-1 [nouveau] et L. 6323-24 à L. 6323-31 [nouveaux] du code du travail) - Mise en place du compte personnel d'activité

Objet : Cet article définit le régime juridique du compte personnel d'activité, outil de sécurisation des parcours professionnels des actifs destiné à regrouper le compte personnel de formation, le compte personnel de prévention de la pénibilité et le compte d'engagement citoyen ainsi que les droits qui leur sont attachés.

I - Le dispositif proposé

Pour répondre aux évolutions du marché du travail, dans une logique d'individualisation des droits sociaux et d'amélioration de leur effectivité, les pouvoirs publics ont mis en place depuis 2013 deux dispositifs offrant des droits en matière de formation professionnelle afin de faciliter les transitions professionnelles et de développer les possibilités de reconversion pour les actifs. Entrés en vigueur le 1 er janvier 2015, le compte personnel de formation (CPF), créé par les lois des 14 juin 2013 247 ( * ) et 5 mars 2014 248 ( * ) , et le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), institué par la loi du 20 janvier 2014 249 ( * ) , permettent à toutes les personnes présentes sur le marché du travail, quel que soit leur statut professionnel, d'acquérir des droits en matière de formation et d'amélioration des conditions de travail qu'ils conservent tout au long de leur carrière, en emploi ou au chômage, et qui ne sont pas gérés par leur employeur.

Le CPF a succédé au droit individuel à la formation (DIF), qui était plafonné à 120 heures, reposait sur l'exercice d'une activité salariée et dont la transférabilité, en cas de changement d'employeur, était limitée. Désormais, un CPF est ouvert pour toute personne d'au moins 16 ans en emploi ou cherchant à s'insérer sur le marché du travail . Il est alimenté, pour les salariés à temps plein, à hauteur de 24 heures par an pendant 5 ans, jusqu'à 120 heures , puis de 12 heures par an jusqu'à atteindre son plafond de 150 heures . Son financement est assuré, dans le cadre de l'obligation légale de financement des dispositifs mutualisés de formation professionnelle par les entreprises, par une cotisation de 0,2 % assise sur la masse salariale des entreprises d'au moins 10 salariés collectée par les organismes collecteurs paritaires agréés (Opca).

Pour financer des formations d'une durée supérieure à 150 heures, le CPF peut faire l'objet d' abondements complémentaires qui peuvent provenir, pour les personnes en emploi, de leur employeur ou, pour les demandeurs d'emploi, des régions, de Pôle emploi ou encore de l'Etat. Outil à la disposition de son titulaire, il ne peut être mobilisé qu'avec son accord exprès pour suivre l'une des formations qui y sont éligibles . Outre celles permettant d'acquérir le socle commun de connaissances et de compétences 250 ( * ) ainsi que l'accompagnement à la validation des acquis de l'expérience (VAE), il s'agit de formations certifiantes ou qualifiantes inscrites, pour les salariés, sur une liste établie par les partenaires sociaux de la branche, et deux listes élaborées au niveau interprofessionnel, l'une nationale 251 ( * ) et l'autre régionale 252 ( * ) . Les demandeurs d'emploi peuvent bénéficier des formations inscrites sur la liste nationale ainsi que sur une autre liste régionale tenant compte du programme régional de formation professionnelle des personnes à la recherche d'un emploi.

Le C3P est quant à lui destiné à compenser l'exposition des salariés , au cours de leur carrière, à des facteurs de pénibilité . Ouvert dès lors que des droits sont acquis, c'est-à-dire qu'une exposition à l'un des dix facteurs concernés 253 ( * ) , au-delà de seuils déterminés par décret, est déclarée par l'employeur à l'organisme gestionnaire 254 ( * ) , il permet à un salarié d'acquérir des droits à la formation , pour accéder à un poste moins exposé à ces facteurs de risques professionnels, de réduire son temps de travail sans diminution de salaire ou d'obtenir un départ anticipé à la retraite .

Plafonné à 100 points sur l'ensemble de la carrière , le C3P est alimenté de 4 points par an ou de 8 points en cas d'exposition à plusieurs facteurs de risques. Les 20 premiers points sont réservés au financement d'une action de formation et viennent abonder le CPF. Ensuite, 10 points permettent de financer un trimestre de travail à mi-temps ou, à partir de 55 ans, un trimestre de cotisations retraite. Il est financé par un fonds dont les recettes sont issues d'une cotisation dont une première part, acquittée par toutes les entreprises, nulle en 2015 et 2016, sera de 0,01 % de la masse salariale à compter de 2017, et une seconde part, versée par les entreprises dont les salariés sont exposés à la pénibilité, verra son taux passer de 0,1 % à 0,2 % en 2017 et, en cas de polyexposition, de 0,2 % à 0,4 % .

Nouvelle étape de l'approfondissement des mécanismes de sécurisation des parcours et de responsabilisation des individus dans leurs choix professionnels, la création du compte personnel d'activité (CPA) au 1 er janvier 2017 est inscrite à l'article 38 de la loi du 17 août 2015 255 ( * ) . Il en fixe les contours : rassembler les « droits sociaux utiles pour sécuriser [le] parcours professionnel » de son titulaire, et ce de son entrée sur le marché du travail jusqu'au terme de sa vie professionnelle. Cet article prévoyait l'engagement d'une concertation avec les organisations représentatives des salariés et des employeurs au niveau interprofessionnel avant le 1 er décembre 2015 et invitait ces dernières à ouvrir une négociation sur la mise en oeuvre du CPA. Si ces derniers sont parvenus à élaborer une position commune sur le sujet 256 ( * ) , seules quatre organisations représentatives des salariés (CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC) l'ont à ce jour signée, la CGT ainsi que, côté patronal, la CGPME et l'UPA ont refusé de le faire. Le Medef n'a pas encore fait part de sa position sur le sujet.

Dans ce contexte, l'article 21 du projet de loi vise à assurer la mise en oeuvre effective du CPA au 1 er janvier 2017 en définissant son cadre juridique et son périmètre. Il apporte également plusieurs modifications aux règles relatives au CPF et garantit l'universalité de ce dernier en l'étendant aux travailleurs indépendants, aux professions libérales, aux non-salariés ainsi qu'à leurs conjoints collaborateurs.

A. Le cadre juridique du compte personnel d'activité

La première partie du paragraphe I de l'article 21 complète le livre 1 er de la cinquième partie du code du travail, consacré aux dispositifs en faveur de l'emploi, par un cinquième titre portant sur le CPA, composé des articles L. 5151-1 à L. 5151-12 nouveaux.

Il fixe tout d'abord les objectifs de ce nouvel outil (art. L. 5151-1 nouveau) : renforcer l'autonomie et la liberté d'action de son titulaire et sécuriser son parcours professionnel en levant les freins à la mobilité. Il précise que le CPA s'inscrit dans le cadre du droit à la qualification professionnelle selon lequel, au cours de sa vie active, toute personne doit pouvoir, à son initiative et grâce à la formation, progresser d'au moins un niveau de qualification. Il établit également le droit, pour le titulaire du CPA, de bénéficier d'un « accompagnement global » afin d'exercer ses droits et mettre en oeuvre son projet professionnel, qui peut être réalisé dans le cadre du conseil en évolution professionnelle (CEP) actuellement assuré, à l'échelle nationale, par Pôle emploi, les missions locales, l'association pour l'emploi des cadres (Apec), les Fongecif ainsi que les Cap emploi pour les personnes handicapées.

S'inspirant des règles en vigueur pour le CPF, l'article L. 5151-2 nouveau détermine les conditions d'ouverture du CPA. A partir de 16 ans , cette ouverture sera automatique pour toute personne en emploi , en cours d'insertion professionnelle ou accueillie dans un établissement et service d'aide par le travail (Esat). Elle le sera dès 15 ans pour les jeunes ayant conclu un contrat d'apprentissage . Le compte sera clôturé au moment de la liquidation de l'ensemble des droits à la retraite (art. L. 5151-2 nouveau).

Le principe d'un maintien des droits acquis jusqu'à leur utilisation ou la fermeture du compte est rappelé, sauf disposition contraire (art. L. 5151-3 nouveau). Comme pour le CPF, le CPA ne peut être mobilisé sans l'accord exprès de son titulaire qui, en cas de refus, ne commet pas de faute (art. L. 5151-4 nouveau).

L'article L. 5151-5 nouveau en délimite le périmètre : le CPA doit accueillir le CPF, le C3P ainsi que le compte d'engagement citoyen institué par le présent article, le recours à chacun d'eux restant régi par leurs règles propres.

Enfin, la création du CPA s'accompagne de la mise en place d'un service en ligne gratuit pour que chaque personne puisse avoir connaissance des droits qui y sont inscrits et les utiliser. Sa gestion est confiée à la Caisse des dépôts et consignation (CDC), déjà chargée, en application de l'article L. 6323-8, de la mise en oeuvre du service dématérialisé permettant à chacun de connaître le solde de son CPF et du système d'information du CPF. Toutefois, la Cnav conserve la gestion du C3P.

Une plateforme de services en ligne doit également être offerte aux titulaires du CPF. Elle doit lui permettre d'obtenir des informations sur ses droits sociaux, d'accéder à ses bulletins de paie sous forme électronique, leur dématérialisation pouvant être, en application de l'article 24 du projet de loi, décidée par l'employeur sauf opposition du salarié, et lui permettre de faire appel à des « services utiles à la sécurisation des parcours professionnels ».

Il revient au gestionnaire de cette plateforme de permettre à des tiers de développer ces services pour les y intégrer. Par ailleurs, un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), doit venir encadrer l'utilisation des données à caractère personnel contenues dans les systèmes d'information du CPF, du C3P et dans la déclaration sociale nominative (DSN) au profit de ces deux services (art. L. 5151-6 nouveau).

B. Le compte d'engagement citoyen

La création du CPA s'accompagne de celle d'un compte d'engagement citoyen (CEC), qui y est intégré. Il doit recenser les activités bénévoles ou de volontariat de son titulaire et lui permettre d'acquérir des heures de formation supplémentaires , qui seront inscrites sur son CPF, ou des jours de congés pour lui permettre d'exercer ces activités (art. L. 5151-7 nouveau).

Les activités bénévoles ou de volontariat concernées seront recensées, selon la volonté du titulaire du compte, au sein du système d'information du CPF (art. L. 5151-8 nouveau). L'article L. 5151-9 nouveau dresse la liste de celles qui y sont éligibles. Il s'agit tout d'abord de quatre activités qui s'exercent dans un cadre défini par la loi : le service civique , la réserve militaire , la réserve communale de sécurité civile et la réserve sanitaire . Une activité en entreprise est également prise en compte : celle de maître d'apprentissage .

Enfin, sous certaines conditions, le bénévolat associatif peut également être retenu . Il est toutefois restreint aux associations qui figureront sur une liste définie par arrêté, et pour les seules activités qui, en l'état actuel de la réglementation fiscale, ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % du don effectué 257 ( * ) , soit les « oeuvres ou organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, [...], à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ». Seule la participation à l'organe d'administration ou de direction d'une telle association ouvrira des droits au titre du CEC (art. L. 5151-9 nouveau).

Un décret doit déterminer la durée nécessaire, selon l'activité bénévole ou de volontariat exercée, pour acquérir 20 heures de formation inscrites sur le CPF (art. L. 5151-10 nouveau). Le financement de ces heures de formation relèvera de l'Etat lorsqu'elles ont été obtenues dans le cadre du service civique, de la réserve militaire, du tutorat d'un apprenti ou d'activités associatives.

La commune concernée prendra en charge les heures découlant de la participation à la réserve communale de sécurité civile et l'établissement public chargé de la gestion de la réserve sanitaire, c'est-à-dire depuis le 1 er mai 2016 l'Agence nationale de santé publique (ANSP), celles acquises lors de la mobilisation de la réserve sanitaire (art. L. 5151-11 nouveau).

L'article L. 5151-12 nouveau inscrit enfin dans la loi la possibilité , pour un employeur, d'accorder à ses salariés des jours de congés payés destinés à l'exercice d'activités bénévoles ou de volontariat . Ils devront figurer dans le CEC.

C. La modernisation du compte personnel de formation

Le paragraphe II de l'article 21 fait évoluer plusieurs des règles de fonctionnement du CPF pour tenir compte de son extension aux non-salariés, de la création du CPA et des premières difficultés identifiées dans sa mise en oeuvre.

Il procède tout d'abord, quant aux conditions d'ouverture et de fermeture du CPF, à un renvoi aux dispositions relatives au CPA (art. L. 6323-1), ce qui n'apporte aucune modification de fond puisque l'article L. 5151-2 nouveau, créé par le paragraphe I du présent article, reprend à l'identique la rédaction de l'article L. 6323-1 actuel concernant le CPF.

Il tire ensuite les conséquences de l'extension du CPF aux travailleurs indépendants, professionnels libéraux, non-salariés ainsi qu'à leurs conjoints (cf. infra ), en les mentionnant explicitement parmi les personnes pouvant le mobiliser (art. L. 6323-2). Il étend ensuite le champ des organismes pouvant assurer son financement , incluant les fonds d'assurance formation (FAF) des non-salariés et les structures consulaires régionales de l'artisanat 258 ( * ) . Il prévoit également, au titre du CEC, la participation des communes et de l'établissement public chargé de la gestion de la réserve sanitaire (art. L. 6323-4).

Le paragraphe II de l'article 21 modifie ensuite le périmètre des formations pouvant être financées par le biais du CPF. Sans remettre en cause le principe des listes de formations éligibles dressées par les partenaires sociaux parmi les formations certifiantes ou qualifiantes, il complète le champ des formations pouvant être par nature prise en charge par le CPF. Les actions permettant l'évaluation préalable des compétences d'une personne, avant d'engager une formation visant à l'acquisition du socle de connaissances et de compétences, y sont ajoutées. De même, le CPF est étendu à la formation, à la création d'entreprises et au bilan de compétences , dans les mêmes conditions que l'accompagnement à la VAE (art. L. 6323-6).

Les conditions de mise en oeuvre du droit à une durée complémentaire de formation qualifiante sont ensuite précisées. Reconnu par l'article L. 122-2 du code de l'éducation à tout jeune sorti du système éducatif sans diplôme par la loi du 8 juillet 2013 259 ( * ) , il se traduit, lorsque la personne concernée bénéficie dans le cadre de sa formation du statut de stagiaire de la formation professionnelle 260 ( * ) , par un abondement supplémentaire du CPF à hauteur du nombre d'heures requises. Son financement est assuré par la région , compétente en matière d'accès à la formation des personnes non qualifiées. Ces heures supplémentaires peuvent venir en complément des droits à la formation inscrits sur le CPF de la personne en formation, mais ne sont pas décomptées de l'alimentation annuelle du compte ou prises en compte dans le calcul de son plafond. Toutefois, seules les formations inscrites au programme régional de formation professionnelle peuvent être financées dans ce cadre (art. L. 6323-7).

Enfin, le présent article apporte une modification importante au CPF des salariés les moins qualifiés . Pour ceux d'entre eux n'ayant aucun diplôme ou certification de niveau V ou supérieur, le plafond du compte est porté de 150 à 400 heures . 40 heures par an y sont inscrites, contre 24 pendant cinq ans puis 12 durant deux ans et demi pour atteindre 150 heures en sept ans et demi dans le droit commun.

E. L'extension du compte personnel de formation aux travailleurs indépendants, aux professions libérales, aux non-salariés et à leurs conjoints collaborateurs

Le paragraphe II de l'article 21 complète ensuite le chapitre 261 ( * ) du code du travail consacré au CPF par une section supplémentaire consacrée aux modalités spécifiques de mise en oeuvre de celui-ci en faveur des travailleurs indépendants , des professions libérales , des non-salariés ainsi que de leurs conjoints collaborateurs .

Il prévoit tout d'abord que son financement ne fait pas l'objet d'une cotisation supplémentaire mais s'inscrit dans le cadre de la contribution obligatoire dont s'acquittent déjà les chefs d'exploitation et d'entreprise agricoles, les travailleurs indépendants, les professionnels libéraux et les non-salariés (art. L. 6323-24 nouveau). Il rappelle que l'alimentation du compte est annuelle , à chaque fin d'année, et qu'il peut faire l'objet d' abondements supplémentaires (art. L. 6323-25 nouveau).

Le rythme d'alimentation et le plafond du CPF de ces nouveaux bénéficiaires sont identiques à celui des salariés et des demandeurs d'emploi. Une condition supplémentaire est toutefois imposée : il faut que la contribution au financement de la formation professionnelle ait été effectivement acquittée par le professionnel concerné pour que les heures soient créditées sur son CPF (art. L. 6323-26 nouveau). Toute absence liée à l'un des congés familiaux reconnus par le code du travail, à une maladie professionnelle ou à un accident du travail est considérée comme du travail effectif pour le calcul des droits au CPF (art. L. 6323-27 nouveau).

Les abondements complémentaires au CPF des travailleurs indépendants, des professionnels libéraux et des non-salariés peuvent provenir soit du FAF dont dépend leur profession, soit des structures consulaires régionales de l'artisanat , grâce aux ressources qu'elles doivent déjà consacrer à la formation de leurs ressortissants (art. L. 6323-28 nouveau). Comme pour les salariés et les demandeurs d'emploi, ces abondements sont exclus du calcul de l'alimentation annuelle du compte et de son plafond (art. L. 6323-29 nouveau).

L'article L. 6323-30 nouveau rend éligibles au CPF de ce public spécifique les formations que la loi mentionne explicitement pour les salariés et les demandeurs d'emploi (acquisition du socle de connaissances et de compétences, accompagnement à la VAE, compléments apportés par le présent article). Toutefois, il en exclut les listes dressées par les partenaires sociaux . Il confie aux FAF ainsi que, pour les artisans, aux chambres consulaires régionales, le soin de définir les autres formations éligibles, dont la liste doit être communiquée à la Caisse des dépôts.

Sur le modèle des articles L. 6323-20 pour les salariés et L. 6323-23 pour les demandeurs d'emploi, l'article L. 6323-31 nouveau dispose qu'il revient au FAF, pour les non-salariés, ou à la structure consulaire régionale de l'artisanat de prendre en charge les frais pédagogiques et les frais annexes liés à la formation suivie par le titulaire du CPF.

Le paragraphe III de l'article 21 apporte une modification au régime juridique du conseil en évolution professionnelle en prévoyant que son offre de service pourra être proposée à distance . Le cahier des charges national devra être modifié en ce sens pour en définir les conditions de mise en oeuvre (art. L. 6111-6).

Enfin, le paragraphe IV de l'article définit la date d'entrée en vigueur de ses dispositions. Il la fixe au 1 er janvier 2017 , à l'exception de l'extension du CPF aux travailleurs indépendants, aux professionnels libéraux, aux non-salariés et à leurs conjoints collaborateurs, qui est reportée au 1 er janvier 2018 .

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires sociales a adopté 32 amendements à cet article, dont 26 de son rapporteur. Outre 20 amendements rédactionnels , elle a souhaité inscrire dans le code du travail le principe de la fongibilité des droits inscrits dans le CPA, en garantir une utilisation simplifiée par le biais d'une meilleure coordination entre la Caisse des dépôts et la Cnav, et exclure les abondements du CPF réalisés grâce au CEC pour l'application du plafond de 150 heures du CPF.

A l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, notre collègue député Yves Blein, elle a étendu le bénéfice du CPA aux retraités . Elle a ainsi précisé qu'il serait clos non au moment de la liquidation des droits à la retraite de son titulaire mais à son décès. Elle a également modifié le champ des associations prises en compte dans le cadre du CEC. Plutôt qu'une liste établie par arrêté, elle a préféré retenir, outre la qualification fiscale d'association d'intérêt général, une ancienneté d'au moins trois ans .

Pas moins de 21 amendements supplémentaires ont été retenus dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution . Sept d'entre eux émanaient du Gouvernement, et ont notamment eu pour conséquence de permettre à tous les jeunes d'au moins 16 ans, même s'ils poursuivent des études, d'ouvrir leur CPA afin de bénéficier du CEC , d'étendre les activités éligibles à ce dernier au volontariat dans les armées , ou encore d'exclure les activités réalisées dans le cadre de l'enseignement secondaire de celles permettant d'acquérir des heures de formation. La prise en compte des activités de bénévolat associatif dans le cadre du CEC a été modifiée : si le critère d'ancienneté de l'association a été maintenu, la personne peut non seulement siéger dans l'organe d'administration de la structure mais également encadrer d'autres bénévoles , selon des critères , notamment de durée , qu'un décret devra définir.

Le financement des formations suivies , dans le cadre de leur compte personnel de formation, par des salariés de droit privé de personnes publiques devra être pris en charge par celles-ci . Les collectivités territoriales et les établissements hospitaliers pourront faire le choix d'une prise en charge par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) dans le premier cas et l'association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) dans le second, auquel cas la contribution obligatoire versée à ces organismes sera majorée de 0,2 % . Le bénéfice du CPF a par ailleurs été étendu à deux catégories supplémentaires de travailleurs indépendants : ceux relevant des secteurs de la pêche maritime et des cultures marines ainsi que les artistes auteurs.

Sur proposition du rapporteur, les droits à la formation pouvant être acquis au titre du CEC ont été plafonnés à 60 heures . L'arrêt de l'alimentation du CPF au moment de la liquidation de la retraite a également été décidé, à l'exception d'éventuelles heures acquises en raison d'une activité bénévole. Le développement du conseil en évolution professionnelle a également fait l'objet d'un amendement qui prévoit que les organismes qui en ont la charge devront assurer sa promotion et l'information directe des personnes sur ce droit et son contenu.

Une série d'amendements concernant l' utilisation du CPA à l'étranger ont également modifié le texte adopté par la commission. Désormais, il est précisé que tout titulaire d'un contrat de travail de droit français exerçant son activité à l'étranger bénéficiera du CPA et que les droits inscrits sur celui-ci demeureront acquis même en cas d'expatriation . Le CPF pourrait être utilisé par les personnes à la recherche d'un emploi à l'étranger, sous réserve de la conclusion d'une convention entre Pôle emploi et l'organisme de placement des demandeurs du pays concerné pour en assurer le financement. De même, il pourrait financer une formation réalisée dans un autre Etat membre de l'Union européenne.

Enfin, les contours du CPF des salariés les moins qualifiés ont été modifiés . Ce régime spécifique a été étendu aux personnes n'ayant pas acquis de certification de branche et son rythme d'alimentation annuelle a été porté de 40 à 48 heures . De même, la mention explicite dans la loi, parmi les formations éligibles au CPF, des actions d'évaluation préalable des compétences a été supprimée et renvoyée au décret.

III - La position de votre commission

Annoncée en avril 2015 par le Président de la République, la création d'un compte personnel d'activité, pour chaque actif, au 1 er janvier 2017 a été consacrée par l'article 38 de la loi du 17 août 2015 262 ( * ) . Ce dernier tenait toutefois davantage de la déclaration de principe que du dispositif normatif, c'est pourquoi d'importants travaux ont été conduits depuis un an pour essayer de définir les contours et le régime juridique de cet outil présenté par ses promoteurs comme le « socle d'un nouveau modèle social » 263 ( * ) et surtout d'en garantir la pertinence .

Après que le Premier ministre a chargé France Stratégie , par une lettre de mission du 6 juillet 2015, d'animer une réflexion visant à proposer les options envisageables pour la mise en place du CPA, cet organisme a esquissé, dans un rapport 264 ( * ) remis au mois d'octobre suivant, trois scénarios : un CPA orienté vers la formation et la capacité de l'individu à évoluer professionnellement ; un CPA orienté vers la liberté de l'usage des temps tout au long de la vie ; un CPA orienté vers l'accès aux droits à la sécurité des transitions.

Sur la base de ce document, les travaux de la quatrième conférence sociale pour l'emploi , en octobre 2015, ont notamment porté sur la sécurisation des parcours professionnels et du CPA. La feuille de route qui en est issue souligne que la création du CPA au 1 er janvier 2017 ne constitue que la première étape d'une réforme d'ampleur qui doit « apporter des droits nouveaux et des améliorations concrètes dans la vie des Français » 265 ( * ) . Elle en fixe les orientations : s'appuyer sur les comptes personnels existants (CPF ; C3P ; éventuellement compte épargne-temps) et offrir des droits nouveaux , comme un portail numérique permettant l'accès à l'ensemble des droits sociaux individuels, ou un abondement spécifique en faveur des jeunes sortis du système scolaire sans qualification.

En conséquence, le Gouvernement a adressé aux partenaires sociaux en novembre 2015 un document d'orientation les invitant à ouvrir une négociation nationale interprofessionnelle sur le CPA et la sécurisation des parcours professionnels. Il leur recommande notamment de préciser les objectifs poursuivis par le CPA et de définir l'articulation entre « capacités d'action de l'individu, responsabilité de l'employeur et solidarité » 266 ( * ) . Il les enjoint de tenir compte des enjeux de compétitivité des entreprises et de maîtrise des comptes publics s'ils souhaitent enrichir le CPA par des droits complémentaires et leur propose de contribuer à la définition du contenu du portail numérique qui doit accompagner le CPA.

Au terme de quatre réunions de négociation , les partenaires sociaux ont élaboré le 8 février 2016 une position commune sur le CPA, la sécurisation des parcours et la mobilité professionnelle. Ils perçoivent le CPA comme un outil destiné, dans un contexte de mutation du modèle économique et social, à « mieux protéger les actifs, renforcer leur autonomie, favoriser les mobilités professionnelles, sécuriser les parcours professionnels et de vie et améliorer la compétitivité des entreprises » 267 ( * ) . Il s'agit toutefois d'un compromis a minima , circonscrit aux mécanismes - tout particulièrement le CPF - dont bénéficient les salariés, dont le financement et la gestion sont paritaires et dont les règles n'ont pas vocation à être modifiées par la création du CPA. Il reconnaît la nécessité de mettre en place un accompagnement global des titulaires du CPA, allant au-delà de la simple question de l'emploi. Toutefois, aucune organisation représentative des employeurs n'a à ce jour signé cette position commune, la CGPME et l'UPA ayant même exprimé leur refus de le faire (cf. supra ).

Il semblerait toutefois que le Gouvernement n'ait pas attendu l'aboutissement de la négociation entre partenaires sociaux pour préparer cet article : alors que la position commune a été validée le lundi 8 février, le Conseil d'Etat a été saisi de l'ensemble du projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs le vendredi 12 février suivant, soit un délai bien trop court pour rédiger l'ensemble de l'article 21 et apporter d'éventuelles modifications aux arbitrages interministériels ont déjà été rendus.

Aux yeux de vos rapporteurs, cet article soulève plus d'interrogations sur la pertinence du dispositif proposé qu'il n'apporte de réponses aux difficultés que peuvent rencontrer les actifs lorsqu'ils sont confrontés à une rupture de leur trajectoire professionnelle. Dans l'étude d'impact annexée au projet de loi, le Gouvernement présente sa démarche comme étant « pragmatique et ambitieuse » 268 ( * ) . Il n'évite pas certaines formules convenues mais peu consistantes telles que la « co-construction » du CPA avec ses futurs utilisateurs afin d'adopter une démarche « ancrée sur » leurs parcours. Si l'association des bénéficiaires d'un dispositif à son élaboration doit être recherchée, il aurait été souhaitable, avant d'envisager la création d'un nouveau mécanisme de sécurité sociale professionnelle, dont le principe en lui-même n'est pas critiquable, d'examiner les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre du CPF et du C3P et d'en tirer les leçons.

Ces deux comptes ont en effet rencontré des débuts chaotiques . Le CPF a connu une montée en charge bien plus lente qu'anticipé , en particulier pour les salariés. Sur l'année 2015, environ 176 000 dossiers de formation ont été validés par le biais de ce dispositif, dont environ 22 % concernait des salariés 269 ( * ) . Les experts auditionnés par vos rapporteurs ont dressé un constat d'échec à son sujet : corseté par les quelque 200 listes de formations éligibles, qui dressent un obstacle à l'entrée et ne sont pas adaptées aux besoins et souhaits des personnes voulant se former. Dans leur rapport 270 ( * ) sur l'application de la loi du 5 mars 2014, nos collègues députés Gérard Cherpion et Jean-Patrick Gille se sont interrogés sur la pertinence de ces listes et leur adéquation avec les objectifs que le législateur avait fixés. Ils les ont identifiées comme un facteur de rigidité du système de formation , allant à l'encontre de l'objectif d'autonomisation des actifs qui est au coeur du CPF.

Vos rapporteurs partagent cette analyse. A ce jour, à peine 60 000 salariés auraient fait usage de leur CPF , quand le DIF, auquel il a succédé, avait été mobilisé par 530 563 personnes en 2014 271 ( * ) . Lors des auditions réalisées, le CPF a été qualifié de « monstre bureaucratique dépourvu d'effet ». Il est évident que l'article 21 du projet de loi n'apporte aucune réponse aux difficultés du système actuel et risque au contraire de les aggraver . Si une partie d'entre elles peuvent être mises sur le compte de l'adaptation à de nouvelles règles et à de nouveaux mécanismes, des insuffisances structurelles , liées notamment à la structuration de l'offre de formation et au manque de modularité des diplômes proposés, sont également en cause.

De même, la mise en place du C3P constitue l'exemple à ne pas suivre en matière de réforme administrative tant elle s'est révélée catastrophique. Archétype du dispositif pensé, sans concertation préalable , par un appareil administratif manifestement peu au fait du fonctionnement concret des entreprises, il était pourtant évident, dès les débats parlementaires ayant précédé son adoption, que le mécanisme retenu ne pourrait être mis en place qu'au prix de très importantes difficultés et qu'il représenterait une charge bureaucratique insurmontable pour l'écrasante majorité des entreprises concernées. Malgré les mises en garde répétées des représentants des employeurs mais aussi de parlementaires de tous bords politiques, le Gouvernement a longtemps refusé de reconnaître que le cadre initialement prévu ne pouvait être appliqué.

Il a fallu attendre le mois de mai 2015, soit cinq mois après l'entrée en vigueur des quatre premiers facteurs de pénibilité 272 ( * ) et sept mois avant celle des six derniers, pour que le Premier ministre consente à reporter jusqu'au 1 er juillet 2016 la prise en compte de ces six facteurs puis à revoir leurs modalités de mesure et qu'à la suite des travaux d'une mission composée de notre collègue député Christophe Sirugue et de MM. Gérard Huot et Michel de Virville plusieurs mesures de simplifications soient adoptées. Ainsi, la loi du 17 août 2015 273 ( * ) a notamment supprimé le fiche individuelle de prévention des expositions , à laquelle s'est substituée une déclaration directe des expositions via le logiciel de paye, et permis de déterminer, à travers des référentiels de branche , des situations types d'exposition liées par exemple aux postes de travail.

Plus de deux ans après son adoption par le Parlement, le C3P n'est donc toujours pas pleinement opérationnel . Vos rapporteurs considèrent qu'il s'agit d'un mécanisme inadapté à la prévention et à la compensation de la pénibilité au travail , en raison tout particulièrement de l'absence d'une quelconque appréciation médicale de l'impact de son activité professionnelle sur la santé du salarié. Néanmoins, en prenant acte de son intégration dans le CPA, il convient d'apprendre des erreurs commises en chaîne sur ce dossier depuis l'automne 2013 pour éviter de les reproduire aujourd'hui.

Il semblerait pourtant que tous les enseignements n'en n'aient pas été tirés . C'est tout particulièrement le cas avec le compte d'engagement citoyen , qui n e figurait pas dans la version initiale du projet de loi soumise au Conseil d'Etat . Il n'apparaît que dans la deuxième saisine rectificative au projet de loi, qui a eu lieu le 15 mars, soit 48 heures avant que l'Assemblée générale du Conseil d'Etat n'examine l'ensemble du texte, et semble avoir été élaboré dans la précipitation pour répondre à la contestation sociale suscitée par l'avant-projet de loi.

En conséquence, l'évaluation de son impact apparaît lacunaire et même parfois quelque peu hasardeuse . Si vos rapporteurs partagent l'idée d'assurer une meilleure valorisation sociale et professionnelle de l'engagement bénévole de nos concitoyens, ils estiment toutefois qu'une réflexion plus large aurait dû être engagée sur le sujet, car le lien direct qui est fait entre volontariat associatif et heures de formation supplémentaires est contestable . Récompenser par ce biais des jeunes en service civique, qui n'ont pas encore fait leur entrée sur le marché du travail, peut être un moyen de les aider à surmonter les obstacles qu'ils sont susceptibles de rencontrer à cette occasion. En revanche, permettre à un salarié de suivre une formation plus longue qu'un de ses collègues qui occupe un poste identique pour la seule raison qu'il est actif dans une association pourrait être interprété comme une rupture du principe d'égalité , ces deux personnes étant traitées différemment alors qu'elles sont dans la même situation au regard de l'emploi.

De plus, son périmètre est très large et le nombre de bénéficiaires potentiels n'est pas connu avec précision . On sait qu'il y avait 44 000 jeunes en service civique en 2015 et que l'objectif pour 2017 est de 150 000 , qu'il y a environ 200 000 maîtres d'apprentissage, que la réserve militaire regroupe 60 000 personnes et la réserve sanitaire 1 700 . Le nombre de bénévoles participant à l'organe d'administration ou de direction d'une association d'intérêt général fondée depuis au moins 3 ans ou y encadrant d'autres bénévoles, selon les conditions retenues par le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale, est quant à lui impossible à établir . Dans son étude d'impact, réalisée sur la base du critère initial 274 ( * ) , le Gouvernement anticipait un surcoût de 10 millions d'euros , qui viendraient compléter le fonds de développement de la vie associative, déjà doté d'une telle somme, pour financer 20 heures de CPF à 113 000 personnes par an, en partant de l'hypothèse d'un taux de recours de 20 % et d'un coût horaire de 22 euros . Ce CEC concernerait au total 525 000 personnes , pour un coût total de 46 millions d'euros . La fragilité de cette estimation laisse craindre que le coût final sera en réalité bien plus élevé pour l'Etat.

D'autres aspects de cet article 21 risquent quant à eux de rester purement virtuels . C'est tout particulièrement le cas du CPF en faveur des indépendants, des professionnels libéraux, des non-salariés et de leurs conjoints collaborateurs . Les sept FAF couvrant ces publics 275 ( * ) comptaient en 2014 2,59 millions d'adhérents , pour des ressources s'élevant à 248 millions d'euros 276 ( * ) . Sur ce total, environ 410 000 stagiaires ( 16 % ) ont bénéficié d'actions de formation , pour un coût de 163 millions d'euros . Les contributions qu'ils perçoivent sont d'un montant bien plus faible que celles dues par les entreprises pour leurs salariés : alors que pour un salarié à temps complet rémunéré au Smic son employeur verse chaque année à son Opca 176 euros , soit 1 % de la rémunération totale , un travailleur indépendant ou un professionnel libéral, hors agriculture et pêche, doit s'acquitter d'une contribution égale à 0,25 % du plafond de la sécurité sociale, soit 96,54 euros en 2016, auxquels viennent s'ajouter 0,09 % , soit 34,75 euros , au titre du conjoint collaborateur. L'accès à la formation de ces derniers reste très limité. Ainsi, dans l'artisanat, ils représentent à peine 1 % des stagiaires.

Cet article propose donc d'offrir à ces personnes un nouveau droit à la formation qui n'apparaît pas financé , malgré les marges financières dont semblent disposer les FAF. Ces organismes seront les seuls, avec les chambres de métiers pour les artisans, à pouvoir fournir des abondements complémentaires afin de financer des formations plus longues. Quand bien même la durée moyenne des formations des indépendants et des non-salariés est parfois inférieure à celle des salariés ( 19 heures dans l'agriculture ou 29 heures dans le commerce contre 27 heures pour les salariés dans le cadre du plan de formation, mais 188 heures chez ces derniers pour une période de professionnalisation et 752 heures pour un congé individuel de formation), ils sont indispensables pour financer des formations qualifiantes plus longues , qui peuvent avoir un intérêt dans le cadre d'un projet d'évolution ou de reconversion professionnelle. En partant de l'hypothèse d'un taux de recours annuel de 16 % , qui est le taux de formation actuel de ce public, et d'un coût horaire de formation de 22 euros , ce qui est inférieur à la situation actuelle, le coût annuel de 20 heures de formation est de 180,4 millions d'euros pour les financeurs. Les FAF ne disposent de toute évidence pas des ressources pour y faire face.

Plus généralement, le coût des mesures nouvelles proposées par cet article a fait l'objet de peu de débats à l'Assemblée nationale alors qu'il pourrait être selon l'étude d'impact conséquent pour les principaux financeurs de la formation professionnelle, les entreprises et les régions. Au titre de l'année 2015 277 ( * ) , les entreprises devraient verser environ 885 millions d'euros pour financer le CPF, et le Gouvernement estime que les dépenses liées à celui-ci devraient s'élever à 631 millions d'euros, sa montée en charge n'étant pas encore achevée.

L'étude d'impact évalue la dépense supplémentaire liée à l'ouverture du CPF aux bilans de compétences à 15 millions d'euros et aux formations à la création et à la reprise d'entreprise à 82,5 millions d'euros , soit un total proche de 100 millions d'euros par an . Les mesures en faveur des salariés sans diplôme , qui voient le plafond de leur CPF porté à 400 heures, pourraient coûter entre 165 et 275 millions d'euros par an en moyenne sur la période 2018-2027 selon les différentes hypothèses étudiées. Pour les demandeurs d'emploi sans diplôme, le coût supplémentaire serait de 121 millions d'euros .

Comme seul axe de travail pour assurer le financement de ces dispositions, le Gouvernement annonce qu'il faudra procéder à des « redéploiements au sein des fonds de la formation professionnelle » 278 ( * ) , sans plus de précision. Cette explication est tout à fait insuffisante pour vos rapporteurs : quels mécanismes de formation verront leur financement amputé pour répondre à ces nouvelles priorités ? Alors que la contrainte budgétaire qui pèse sur la France ne devrait pas se desserrer dans un futur proche et que les fonds de la formation professionnelle, dont une part importante est soumise à une gestion paritaire, ne sont pas extensibles, il appartient au Gouvernement d'annoncer dès maintenant les modalités précises de financement des mesures qu'il soumet au Parlement . De même, l'inscription du droit au retour en formation initiale dans le CPA devrait représenter un coût compris entre 33 et 66 millions d'euros par an pour les régions. Alors que la baisse des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales se poursuit, vont-elles être en mesure de prendre en charge cette dépense ?

De toute évidence, le CPA constitue un ambitieux projet sociétal de long terme , qui ne connait d'équivalent dans aucun autre pays de l'Union européenne ou de l'OCDE . Il reste toutefois à ce stade très inabouti , et tous ses aspects n'ont manifestement pas encore été mûrement réfléchis. C'est par exemple le cas de l'interface qui doit être créée avec l'ensemble de la sécurité sociale, comme l'annonce l'étude d'impact 279 ( * ) . Un travail à ce sujet a-t-il déjà été engagé avec les caisses concernées ? Comment créer une interface entre l'ensemble de ces données personnelles tout en garantissant leur inviolabilité ?

Pour vos rapporteurs, le CPA n'est pour l'instant qu'une coquille vide qu'il faut certes créer, mais dont la viabilité n'est pas garantie . S'il ne parvient pas à éviter les écueils de la complexité administrative et répète le scénario du C3P, alors il est condamné à l'échec. Dans sa version actuelle, on peut légitimement s'interroger sur sa valeur ajoutée par rapport aux dispositifs existants : il n'ouvre aucun droit nouveau et repose entièrement sur le CPF et le C3P. Le compte d'engagement citoyen aurait pu être mis en place indépendamment du CPA . Enfin, vos rapporteurs soulignent que si le principal atout du CPA est son offre de services numériques, alors il n'était pas nécessaire de passer par la loi pour la créer .

Votre commission a adopté cinq amendements à cet article dont un amendement de coordination (COM-409). A l'initiative de ses rapporteurs, elle a rendu au CPA son périmètre initialement envisagé , et celui sur lequel les partenaires sociaux s'étaient entendus, en supprimant le CEC et prévoyant que le CPA serait clos au départ à la retraite de son titulaire . Elle a également simplifié le C3P en le limitant aux quatre facteurs de pénibilité actuellement en vigueur, la mesure des six autres étant, dans certains secteurs ou certaines entreprises, inapplicable. Elle a enfin invité les partenaires sociaux à engager avant le 1 er octobre 2016, une concertation sur l'amélioration des modalités de prévention de la pénibilité (amendement COM-157).

Sur proposition de notre collègue Loïc Hervé, elle a majoré de 25 % les droits des salariés saisonniers au titre du CPF (amendement COM-308). Elle a également corrigé deux malfaçons du texte de l'Assemblée nationale afin de prévoir la prise en charge , au titre du CPF, des actions d'évaluation préalable des compétences des personnes souhaitant acquérir le socle de connaissances et de compétences (amendement COM-191) et de rendre éligibles à ce même dispositif les actions de formation à destination des créateurs d'entreprise (amendement COM-408).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 21 bis A (art. L. 6321-1 et L. 6324-1 du code du travail) - Acquisition des titres et diplômes professionnels par blocs de compétences

Objet : Cet article, issu d'un amendement de notre collègue député
Jean-Patrick Gille retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, vise à permettre l'acquisition de blocs de compétences dans le cadre de la préparation de titres et diplômes professionnels par le biais du plan de formation ou d'une période de professionnalisation.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Selon l'exposé sommaire accompagnant l'amendement dont cet article 21 bis A est issu, ce dernier a pour objet de transposer au plan de formation et à la période de professionnalisation une des caractéristiques du compte personnel de formation (CPF) : la possibilité d'acquérir, grâce à cet outil, un ou plusieurs blocs de compétences composant un diplôme ou titre à finalité professionnelle.

En l'état actuel du droit, l'article L. 6323-6 du code du travail dispose en effet que les formations éligibles au CPF doivent notamment être choisies parmi celles sanctionnées par une certification inscrite au répertoire national des certifications professionnelles ou permettant d'obtenir « une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire, visant à l'acquisition d'un bloc de compétences ».

La nature des formations pouvant être suivies dans le cadre du plan de formation, établi à l'initiative de l'employeur, n'est pas définie par la loi , tandis que la période de professionnalisation, qui a pour objet de « favoriser par des actions de formation le maintien dans l'emploi » des salariés (art. L. 6324-1), doit conduire à l'acquisition :

- d'une formation qualifiante inscrite au RNCP, reconnue dans les classifications d'une branche ou faisant l'objet d'un certificat de qualification professionnelle ;

- du socle de connaissances et de compétences ;

- d'une certification inscrite à l'inventaire des certifications transversales établi par la commission nationale de la certification professionnelle (CNCP).

Par ailleurs, le présent article vise également à rendre applicables aux deux dispositifs de formation précités le régime juridique du CPF relatif au « financement de l'évaluation » du socle de connaissances et de compétences , faisant sans doute référence ici aux dispositions de l'article 21 du projet de loi qui, dans sa version initiale, rendait éligibles de droit au CPF les actions « permettant d'évaluer les compétences d'une personne préalablement à l'acquisition » du socle de connaissances et de compétences.

II - La position de votre commission

Concernant le plan de formation , cet article 21 bis A semble avant tout être destiné à attirer l'attention du Gouvernement sur une difficulté ponctuelle rencontrée dans le système de formation qu'il n'appartient pas forcément à la loi de régler. En effet, il appartient à l'entreprise, éventuellement en lien avec son Opca, de définir les actions de formation qu'elle souhaite voir figurer dans son plan de formation . La loi n'impose aucune contrainte en la matière, seul l'article D. 6321-1 du code du travail disposant que les actions de formation financées par l'employeur « se déroulent conformément à un programme établi en fonction d'objectifs préalablement déterminés » et que les moyens pédagogiques et d'encadrement mis en oeuvre doivent être précisés.

S'agissant de la période de professionnalisation , vos rapporteurs tiennent à souligner qu'un amendement de notre collègue député Gérard Cherpion et de plusieurs membres du groupe Les Républicains, retenu par le Gouvernement à l'article 34 du projet de loi, vient modifier l'article L. 6324-1 pour permettre l'acquisition de blocs de compétences . Sur ce point, le présent article 21 bis A est donc déjà satisfait .

Vos rapporteurs tiennent toutefois à souligner que le concept de bloc de compétences reste très embryonnaire dans le système de formation français, puisque sa consécration législative remonte à la loi du 5 mars 2014 280 ( * ) et à la création du CPF. Depuis lors, seule la loi du 17 août 2015 281 ( * ) , en instituant une certification visant à rassembler les compétences acquises dans l'exercice d'un mandat de représentation du personnel, a prévu que celle-ci serait enregistrée en blocs de compétence au sein de l'inventaire des certifications transversales établi par la CNCP (art. L. 6112-4).

La définition même du bloc de compétences n'est à ce jour pas arrêtée . Dans un rapport de novembre 2015 282 ( * ) consacré à l'introduction de blocs de compétences dans les diplômes professionnels, l'inspection générale de l'éducation nationale (Igen) et l'inspection générale de l'enseignement supérieur et de la recherche (Igaenr) le définissait comme un « ensemble de compétences attachées à un ensemble (bloc) cohérent d'activités professionnelles connexes » 283 ( * ) . Les inspecteurs ne recommandaient pas que ces blocs constituent la totalité d'un diplôme mais qu'ils soient accompagnés de blocs de culture générale et de blocs de culture professionnelle.

Il faut toutefois souligner que ces blocs de compétences ne sont pas « hors sol » et que leur acquisition ne constitue pas une finalité en soi , mais bien une étape vers un diplôme ou un titre à finalité professionnelle. Ils sont un atout pour faciliter et diversifier les modalités d'accès à ceux-ci, en particulier à travers la validation des acquis de l'expérience. Toutefois, comme le souligne le rapport, l'introduction de blocs de compétences dans les diplômes professionnels nécessite « un repérage au sein du RNCP de ces blocs de compétences et de leur rattachement à un diplôme » 284 ( * ) . A ce jour, ce travail n'a pas été réalisé . Selon les informations communiquées à vos rapporteurs lors des auditions qu'ils ont réalisées, 90 % des diplômes ne sont actuellement pas modularisés et sont caractérisés par leur très grande rigidité pédagogique , se déroulant notamment sur une session annuelle unique.

Par ailleurs, concernant le second volet du présent article, il est étonnant de constater que son auteur est également celui de l'amendement qui, à l'article 21, a retiré de la loi l'éligibilité de droit, au titre du CPF, des actions d'évaluation préalable des personnes souhaitant obtenir le socle de connaissances et de compétences, estimant qu'une telle précision relevait du domaine réglementaire. Il y a donc une contradiction entre la volonté d'inscrire dans la loi que les modalités de financement de cette évaluation par le CPF sont applicables à la période de professionnalisation et au plan de formation et supprimer celles-ci du projet de loi. Plus généralement, la réflexion sur cet article semble inaboutie .

Toutefois, afin que la réflexion sur cet article se poursuivre et que des précisions supplémentaires soient obtenus du Gouvernement, vos rapporteurs ont proposé à la commission d'apporter des corrections juridiques à cet article afin notamment d'insérer son contenu dans le code du travail (amendement COM-192 ).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 21 bis B (art. L. 6331-48, L. 6331-48-1, L. 6331-50, L. 6331-51, L. 6331-54 et L. 6331-54-1 du code du travail ; article 8 de l'ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003 relative aux mesures de simplification des formalités concernant les entreprises, les travailleurs indépendants, les associations et les particuliers employeurs ; art. 1601, 1601 B et 1609 quatervicies B du code général des impôts) - Recouvrement de la contribution à la formation professionnelle des travailleurs indépendants

Objet : Cet article, issu d'un amendement de nos collègues députés Fabrice Verdier et Sylviane Bulteau retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, vise à simplifier le recouvrement de la contribution à la formation professionnelle des travailleurs indépendants et des artisans en le confiant dans son intégralité aux Urssaf.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Les travailleurs indépendants , membres des professions libérales ou non-salariés, qu'ils soient inscrits au registre du commerce et des sociétés (RCS) ou au répertoire des métiers, doivent s'acquitter chaque année d'une contribution à la formation professionnelle (CFP). Le taux de la CFP est, en application de l'article L. 6331-48 du code du travail, de 0,25 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 96,54 euros en 2016. Ceux qui reçoivent le concours de leur conjoint collaborateur voient ce taux porté à 0,34 % , soit 131,29 euros . La CFP est versée à l'un des fonds d'assurance-formation (FAF) des non-salariés. Ceux-ci ont un champ professionnel défini : l'Agefice pour le commerce, l'industrie et les services, le Fafcea pour l'artisanat, le FIF-PL pour les professions libérales et le FAF-PM pour les professions médicales. Deux Opca gèrent également la CFP de certains non-salariés : l'Afdas pour les artistes-auteurs et Agefos-PME pour le secteur de la pêche.

Dans le domaine agricole , Vivea est le FAF des chefs d'exploitation et d'entreprise. Leur CFP répond à un régime spécifique et s'élève à 0,3 % des revenus qui servent d'assiette au calcul des cotisations sociales, dans une fourchette comprise entre 0,17 % (65,65 euros) et 0,89 % (343,68 euros) du plafond annuel de la sécurité sociale 285 ( * ) .

La CFP des chefs d'entreprise artisanale est soumise à des règles dérogatoires . Elle s'élève à 0,29 % du plafond de la sécurité sociale (111,99 euros) et se décompose en deux fractions : la plus importante ( 0,17 % ) est affectée au Fafcea 286 ( * ) et la seconde ( 0,12 % ) est versée aux chambres régionales de métiers et de l'artisanat, aux chambres de métiers et de l'artisanat de région et à l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA) pour financer des actions de formation de leurs ressortissants à la gestion et au développement de leur entreprise 287 ( * ) .

Par ailleurs, la CFP des travailleurs indépendants de la pêche maritime s'élève à 0,15 % (57,92 euros) du plafond de la sécurité sociale 288 ( * ) .

Il faut enfin noter que les travailleurs indépendants bénéficiaires du régime micro-social doivent s'acquitter en sus d'une contribution égale à 0,1 % de leur chiffre d'affaires annuel lorsqu'ils exercent une activité commerciale ou 0,2 % lorsqu'ils réalisent des prestations de services ou font partie des professions libérales. Dans l'artisanat, ce taux est porté à 0,3 % 289 ( * ) .

Le recouvrement de la CFP est assuré par plusieurs organismes , en fonction du statut de celui qui l'acquitte. Le régime social des indépendants (RSI) la collecte pour les commerçants, le Trésor public s'en charge pour les artisans, tout comme l' Urssaf pour les professions libérales. Pour les exploitants agricoles, le recouvrement relève des caisses de la mutualité sociale agricole (MSA).

Le présent article 21 bis B cherche à apporter des clarifications au régime juridique de la CFP pour le rendre plus intelligible et à unifier son recouvrement, hors agriculture et pêche, sous l'égide de l'Urssaf.

Le paragraphe I de l'article modifie les dispositions du code du travail relatives à la CFP. Il réécrit son article L. 6331-48 pour y faire figurer l'ensemble des règles relatives à la CFP des indépendants, des professionnels libéraux et des non-salariés, artisans compris. Dans sa nouvelle rédaction, cet article rappelle donc que les indépendants relevant des groupes des professions industrielles et commerciales et des professions libérales au sens des règles d'affiliation obligatoire au RSI doivent verser chaque année une CFP s'élevant à 0,25 % du plafond de la sécurité sociale ou 0,34 % lorsque leur conjoint collaborateur participe à leur activité.

Il rassemble pour la première fois au sein du code du travail le cadre juridique de la CFP des artisans , qui était jusqu'à présent dispersé entre plusieurs articles du code du travail et du code général des impôts. Il fait notamment figurer dans la loi le taux global de 0,29 %, qui devait aujourd'hui être obtenu en additionnant le montant de chacune des deux fractions. Ces dernières restent inchangées : 0,12 % en faveur des chambres des métiers et 0,17 % au profit du Fafcea.

Les règles spécifiques applicables aux bénéficiaires du régime micro-social ne connaissent qu'une légère évolution formelle . Le champ de la contribution de 0,1 % ou de 0,2 % reste inchangé, bien que les références juridiques visant à les définir, en particulier en se référant, pour le commerce, à la « première catégorie définie au dernier alinéa du 1 de l'article 50-0 du code général des impôts », c'est-à-dire aux indépendants dont le commerce principal est de vendre « des marchandises, objets, fournitures, et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, à l'exclusion de la location, directe ou indirecte, de locaux d'habitation meublés ou destinés à être loués meublés, autres que ceux mentionnés aux 2° et 3° du III de l'article 1407 290 ( * ) », soient modifiées , sans améliorer la clarté de l'article. Le taux de 0,3 % applicable aux artisans est inséré dans le code du travail.

L'article procède ensuite à une coordination à l'article L. 6331-48-1 puis réécrit l'article L. 6331-50 afin de déterminer les modalités d'affectation de la CFP. Elle a vocation à être versée à un FAF , à l'exception de la fraction de 0,12 point des 0,29 % dus par les artisans et destinée aux chambres des métiers. Cette contribution doit bénéficier aux structures régionales de l'artisanat et est soumise à un plafond individuel pour chacune d'entre elles. Ce dernier répond à des modalités de calcul complexes , sur la base de celles retenues à l'heure actuelle pour la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises, qui fait partie de la taxe pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat. Le plafond individuel , pour chaque structure, est décomposé en deux sous-plafonds , dont le second est lié au droit additionnel de 0,12 % qui fait partie de la CFP des artisans (cf. supra ). La valeur de ce second sous-plafond est répartie au prorata des sommes recouvrées par l'Urssaf et les caisses générales de sécurité sociale des départements d'outre-mer au profit de chacune des chambres.

La part de 0,17 % de la CFP des artisans est quant à elle destinée au Fafcea, dans la limite d'un plafond de 54 millions d'euros par an . Les sommes excédant ce montant , ainsi que celles dépassant les plafonds individuels applicables chaque chambre pour la première fraction, sont reversées au budget de l'Etat .

Le recouvrement de la CFP est abordé à l'article L. 6331-51. L'intervention du RSI dans cette procédure est supprimée, au profit de l'Urssaf . De même, le Trésor public perd le rôle qu'il occupait jusqu'à présent pour les artisans par la suppression des dispositions relatives à la CFP dans le code général des impôts (cf. infra ). La temporalité de la collecte est modifiée : alors que le versement avait jusqu'à présent lieu au mois de février de l'année suivant celle au titre de laquelle la contribution était due, il intervient désormais au mois de décembre de l'année en cours .

Les chambres régionales de métiers, de métiers de région et l'APCMA sont ajoutées à la liste des organismes auxquels une partie du montant de la CFP est reversée par l'Urssaf. Enfin, deux articles renvoyant au code général des impôts pour déterminer le régime de la CFP des artisans sont abrogés.

L'article 21 bis B modifie ensuite l'article 8 de l'ordonnance du 18 décembre 2003 291 ( * ) , qui détermine les règles de mise en oeuvre du droit à la formation professionnelle des chefs d'entreprise artisanale . Il procède à une coordination juridique pour tenir compte des modifications effectuées au code du travail et supprime la mention selon laquelle la CFP est recouvrée dans les mêmes conditions que la taxe pour les frais de chambre.

Il tire enfin les conséquences, au sein du code général des impôts, du regroupement dans le code du travail des dispositions relatives à la CFP des artisans en allégeant l'article 1601 de son contenu transféré et en abrogeant deux articles rendus obsolètes, qui traitent aujourd'hui respectivement de la part de la contribution destinée au Fafcea (art. 1601 B) et du montant de celle des artisans soumis au régime micro-social (art. 1609 quatervicies B).

Le paragraphe IV de l'article détermine ses conditions d'entrée en vigueur . Il s'appliquera à compter du 1 er janvier 2018 : la CFP devra donc être acquittée deux fois cette année-là, la première au mois de février au titre de l'année 2017 et la seconde au mois de décembre l'activité de 2018.

II - La position de votre commission

Le présent article constitue la traduction de l'une des recommandations que les députés auteurs de l'amendement dont il est issu avaient formulées dans le rapport qu'ils ont remis au Premier ministre en septembre 2015 sur le fonctionnement du RSI 292 ( * ) . Ils préconisaient de confier à un opérateur unique le recouvrement de la CFP 293 ( * ) , en soulignant que la situation actuelle, qui fait cohabiter aux moins trois organismes, crée un risque de double appel de cotisation pour les artisans également inscrits au RCS. Ils suggéraient toutefois de confier cette tâche à la direction générale des finances publiques (DGFiP), ce qui n'est le choix fait aujourd'hui.

Vos rapporteurs approuvent , sur le principe, cette mesure de simplification et la décision prise d'unifier le recouvrement de cette contribution auprès de l'Urssaf.

Il est toutefois regrettable qu'un tel article, d'une grande complexité juridique , ait été inséré dans le projet de loi sans débat à la faveur du recours à la procédure prévue à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution et qu'il n'ait donc été accompagné d'aucune étude d'impact permettant de connaître le nombre de professionnels concernés ou encore les conditions précises dans lesquels ce transfert va être effectué.

Il en résulte d'importantes incohérences juridiques dans son dispositif, avec notamment des renvois erronés à des dispositions obsolètes, qui ont pu laisser craindre aux principaux intéressés, les artisans et leurs structures consulaires, une remise en cause de leur droit à la formation et de son financement.

Alors que les dysfonctionnements liés aux procédures actuelles avaient été mis en lumière plusieurs mois avant le dépôt du projet de loi à l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait tout à fait la possibilité de soumettre cette disposition au Conseil d'Etat et l'intégrer à son texte initial, dans un souci de rigueur juridique et de clarté de la loi.

Vos rapporteurs ont souhaité corriger les principales incohérences juridiques de cet article. Votre commission a donc, sur leur proposition, rétabli la définition actuelle des artisans redevables de la CFP , c'est-à-dire les personnes inscrites au répertoire des métiers , car il s'avère que certaines professions considérées comme artisanales par le RSI ne relèvent pas des chambres de métiers et de l'artisanat tandis que d'autres, qui entrent pourtant dans le champ de l'artisanat, dépendent du groupe des commerçants (amendement COM-193). Elle a également supprimé une disposition faisant perdre toute cohérence juridique à l'article 1601 du code général des impôts (amendement COM-195) et a adopté trois amendements de coordination ou corrigeant une erreur de référence (amendements COM-194, COM-410 et COM-411).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 21 bis (supprimé) - Concertation sur le périmètre du compte personnel d'activité

Objet : Cet article, inséré dans le projet de loi par la commission des affaires sociales à l'initiative de son rapporteur, demande à ce qu'une concertation soit ouverte avec les partenaires sociaux sur les dispositifs pouvant être intégrés dans le compte personnel d'activité.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Sur proposition de son rapporteur, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a complété le projet de loi par cet article 21 bis afin que des travaux paritaires soient engagés dès l'automne 2016 sur le périmètre du compte personnel d'activité.

Il invite les pouvoirs publics à engager avec les partenaires sociaux représentatifs au niveau national et interprofessionnel, c'est à dire la CGT, la CFDT, FO, la CFE-CGC et la CFTC côté salariés et le Medef, la CGPME et l'UPA côté employeurs, une concertation sur les dispositifs pouvant être intégrés au CPA . Ces organisations seraient libres, le cas échéant, d'ouvrir une négociation sur le sujet.

Aucun amendement à cet article n'a été retenu dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution.

II - La position de votre commission

Le CPA doit voir le jour le 1 er janvier 2017 et comprendre dans un premier temps, en application de l'article 21 du présent projet de loi, le compte personnel de formation (CPF), le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) et le compte d'engagement citoyen. Alors que d'importantes difficultés sont apparues dans les premières années qui ont suivi la création du CPF et du C3P, certaines n'ayant toujours pas trouvé de réponse satisfaisante, il semble quelque peu prématuré à vos rapporteurs d'engager dès aujourd'hui une réflexion sur l'élargissement du CPA .

De plus, alors que le CPF et le C3P sont des dispositifs universels faisant l'objet d'un financement mutualisé et gérés en dehors de l'entreprise, d'autres mécanismes souvent cités parmi ceux susceptibles de venir compléter le CPA ne le sont pas. Il en va ainsi du compte épargne-temps (CET), dont seuls 12 % des salariés et 26 % des cadres, mais seulement 7 % des ouvriers, étaient titulaires en 2010 294 ( * ) . Un salarié peut ainsi alimenter son CET en temps ou en argent et, s'il n'a pas fait usage de ses droits à son départ de l'entreprise, obtenir une indemnité correspondant à la valeur monétaire de ceux-ci ou les faire consigner à la Caisse des dépôts en vue d'un déblocage ultérieur. Il est toutefois difficilement envisageable de voir un salarié ayant accumulé des jours de congé sur son CPA demander à en bénéficier chez un nouvel employeur .

La ministre a elle-même soulevé, lors de son audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, les « très nombreuses questions en termes d'opérationnalité » soulevées par l'intégration du CET au CPA. Dans l'attente qu'une réponse satisfaisante et ne faisant pas peser de charges supplémentaires sur les entreprises y soit apportée, il apparaît à vos rapporteurs qu' il convient de surseoir à toute concertation concernant l'élargissement du CPA. Votre commission a adopté leur amendement COM-196 en ce sens.

Votre commission a supprimé cet article.

Article 22 - Création par ordonnance du compte personnel d'activité pour les agents publics

Objet : Cet article vise à habiliter le Gouvernement à procéder, par ordonnance, à l'adaptation du compte personnel d'activité à la situation et aux besoins particuliers des agents publics.

I - Le dispositif proposé

En application de l'article 38 de la Constitution, selon lequel le Gouvernement peut, « pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi », l'article 22 du projet de loi habilite celui-ci à mettre en place par ce biais le compte personnel d'activité (CPA) dans la fonction publique .

Le paragraphe I de cet article précise les spécificités de ce CPA par rapport à celui des salariés du secteur privé : il ne comprendra pas le compte personnel de formation (CPF) et le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), dont ne bénéficient pas les fonctionnaires, mais est destiné à informer son titulaire sur ses « droits à formation et ses droits sociaux liés à sa carrière professionnelle » et à permettre leur utilisation. L'ordonnance doit également définir les modalités d'utilisation et de gestion du compte, ainsi que les règles de portabilité applicables en cas de changement d'employeur public, le cas échéant de statut, et de maintien des droits éventuellement acquis sur le CPA durant une période d'activité salariée antérieure l'entrée dans la fonction publique. Elle doit enfin prévoir les adaptations nécessaires pour ce public à la plateforme numérique de services associée au CPA et instituée par l'article 21 du projet de loi.

Le champ de l'habilitation est toutefois plus large que la seule question du CPA pour les agents publics. Avec cet article 22, le Gouvernement est autorisé à renforcer les garanties en matière de formation dont ces derniers bénéficient, notamment les droits et congés qui y sont liés.

L'ordonnance traitera également de la santé des agents publics , puisque le Gouvernement envisage d'améliorer, en leur faveur, la prévention et l'accompagnement de l'inaptitude physique, les droits et congés pour raisons de santé ainsi que le régime des accidents de service et des maladies professionnelles.

Le paragraphe II fixe à neuf mois le délai d'habilitation dans lequel le Gouvernement devra prendre l'ordonnance prévue au présent article. Il lui impose ensuite de déposer devant le Parlement un projet de loi de ratification de cette ordonnance dans un délai de six mois suivant sa publication.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires sociales a, sur proposition de son rapporteur, adopté trois amendements rédactionnels à cet article.

Aucun amendement supplémentaire n'a été retenu dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

III - La position de votre commission

Le caractère universel du CPA implique son extension à tous les agents publics . Toutefois, les très importantes différences en matière de statuts, de droits à la formation, d'évolution de carrière ou encore de retraite entre les salariés du secteur privé et les agents publics et, parmi ces derniers, entre les trois fonctions publiques (d'Etat, territoriale et hospitalière), rendent nécessaires de nombreuses adaptations par rapport au cadre général établi par l'article 21 du projet de loi.

Les défis à relever sont nombreux, et le Gouvernement reste très imprécis, aux yeux de vos rapporteurs, sur le résultat qu'il souhaite atteindre. Plusieurs facteurs parfois contradictoires doivent être pris en compte pour refléter la diversité des trois fonctions publiques. En matière de formation tout d'abord, les agents publics, hormis ceux employés sous contrat de droit privé, ne bénéficient pas du CPF. Ils ont un taux d'accès annuel à la formation qui est supérieur à des salariés du secteur privé ( 63 % contre 48 % ) 295 ( * ) . Toutefois, si un droit individuel à la formation (DIF) leur est reconnu 296 ( * ) , il reste, comme le souligne l'étude d'impact annexée au projet de loi, peu utilisé : environ 26 000 journées de formation ont eu lieu à ce titre dans la fonction publique d'Etat (hors éducation nationale) en 2013 et, en 2012, parmi les agents ayant suivi au moins une formation non diplômante, seuls 11 % ont fait usage de leur DIF 297 ( * ) .

Des inégalités d'accès perdurent selon le niveau de formation initiale ( 33 % des agents n'ayant aucun diplôme ont bénéficié d'une formation en 2012, contre 72 % de ceux ayant un diplôme de niveau supérieur à bac+2) et la catégorie hiérarchique ( 53 % des agents de catégorie C ont pu suivre une formation en 2012, contre 72 % de ceux de catégorie A) 298 ( * ) .

De plus, les ressources disponibles pour financer des actions de formation varient fortement entre les trois fonctions publiques . Alors que le taux de la cotisation des employeurs territoriaux au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) a été abaissé de 1 % à 0,9 % de leur masse salariale par la loi de finances pour 2016 299 ( * ) , les structures relevant du champ de la fonction publique hospitalière doivent consacrer au financement de leur plan de formation, dont relève le DIF, au moins 2,1 % de leur masse salariale. Elles ont ainsi versé à ce titre en 2014 531,6 millions d'euros à l'association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH), qui est l'Opca de la fonction publique hospitalière, alors que le montant de la cotisation perçue par le CNFPT s'élevait en 2013 à 339 millions d'euros 300 ( * ) . L'Etat assure quant à lui directement le financement de la formation de ses agents.

Au vu de cette hétérogénéité, il convient de s'interroger sur la portée que pourrait avoir le CPA pour les agents publics et la mesure dans laquelle les règles qui leur sont applicables en matière de formation pourraient être davantage harmonisées, sans ressources supplémentaires que leurs employeurs, en particulier territoriaux, seraient aujourd'hui dans l'incapacité de fournir. Le Gouvernement est resté très flou sur ses intentions en la matière , mais on peut raisonnablement supposer qu'une meilleure information des personnes sur leurs droits à la formation se traduira par un recours accru à ceux-ci, et donc à une augmentation soit des besoins financiers pour y répondre, soit des refus opposés aux demandes. De même, le Gouvernement n'a pas fait part de ses hypothèses de travail concernant la portabilité des droits inscrits sur le CPA d'un agent et l'impact financier de cette règle, en particulier dans le cas de personnes intégrant la fonction publique après avoir acquis des droits au titre du CPF ou du C3P dans le privé.

En effet, tout comme le CPF , le C3P ne s'applique pas aux fonctionnaires . Dans la fonction publique, la pénibilité est compensée par un départ anticipé à la retraite pour les agents qui occupent un emploi classé dans la catégorie active , par opposition à la catégorie sédentaire, dont le principe remonte au XIX e siècle. Il s'agit des emplois « présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » 301 ( * ) dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat pour la fonction publique d'Etat, et par arrêté interministériel pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Après 17 ans de service dans la catégorie active, un agent peut partir à la retraite à 57 ans. Cette approche collective n'est pas conciliable avec la logique individuelle du C3P , qui a pourtant l'avantage d'offrir aux salariés, avant que les effets de l'exposition prolongée aux facteurs de pénibilité ne soient irréversibles, une possibilité de reconversion par la formation. Dans ces conditions, il appartient au Gouvernement et aux employeurs publics de prendre les mesures appropriées pour développer la prévention et améliorer la connaissance des risques professionnels parmi les emplois qu'ils offrent. C'est en ce sens qu'il faut comprendre, aux yeux de vos rapporteurs, l'habilitation demandée par le présent article pour « renforcer les garanties applicables aux agents publics en matière de prévention et d'accompagnement de l'inaptitude physique ».

Le principe même du CPA se heurte à l'un des fondements du droit de la fonction publique, le caractère statutaire et non individuel des droits des agents . C'est à ce titre que plusieurs organisations syndicales de fonctionnaires ont rejeté cet article lorsqu'il leur a été soumis pour avis. Vos rapporteurs ne partagent pas ce point de vue et ne voient pas d'incompatibilité entre la mise en place du CPA et le statut de la fonction publique , même si celui-ci fait peser des contraintes absentes dans le secteur privé. Cela ne signifie pas pour autant que les représentants des agents publics ne doivent pas être associés à l'élaboration de l'ordonnance. L'étude d'impact annexée au projet de loi annonce d'ailleurs que le Gouvernement conduira deux cycles de concertation avec eux à cette fin. Toutefois, il est à craindre qu'au final ce ne soit qu'une coquille vide qui soit mise en place, dont la portée sera encore plus restreinte que celle du CPA pour les salariés et qui n'en aura que le nom, sans rompre avec les limites du modèle de formation, de prévention de la pénibilité et de construction des parcours professionnels dans les trois fonctions publiques.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 22 bis - Création par ordonnance du compte personnel d'activité pour les agents des chambres consulaires

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, habilite celui-ci à définir par ordonnance le régime juridique du compte personnel d'activité des agents des chambres consulaires.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Sur le modèle de l'article 22 en faveur des agents publics, le présent article 22 bis habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance, en vertu de l'article 38 de la Constitution, le compte personnel d'activité (CPA) en faveur des agents des chambres consulaires . Ceux-ci ont en effet un statut spécifique , défini en application de la loi du 10 décembre 1952 302 ( * ) par une commission paritaire nationale (CNP) et distinct de celui de la fonction publique sans toutefois relever du droit privé , qu'il s'agisse des agents des chambres de commerce et d'industrie 303 ( * ) , des chambres d'agriculture 304 ( * ) ou des chambres de métiers et de l'artisanat 305 ( * ) .

Le champ de l'habilitation est identique à celui retenu par l'article 22 : le CPA des agents des chambres consulaires a pour objectif principal de les informer sur leurs droits à formation et droits sociaux liés à leur carrière professionnelle , et permettre l'utilisation de ceux qui y sont inscrits (1°). L'ordonnance doit également définir les modalités d'utilisation et de gestion du compte (2°), ainsi que les règles de portabilité des droits en cas de changement d'employeur ou de statut mais également de ceux éventuellement obtenus antérieurement à l'acquisition de la qualité d'agent des chambres consulaires, au cours d'une période d'activité professionnelle dans le secteur privé (3°). Enfin, comme pour les fonctionnaires, la plateforme de services en ligne doit être adaptée à la situation spécifique de cette catégorie de bénéficiaires (4°).

La durée de l'habilitation est identique à celle prévue à l'article 22, c'est-à-dire neuf mois à compter de la publication du présent projet de loi. Ensuite, un délai de six mois est ouvert à compter de la publication de l'ordonnance pour déposer devant le Parlement un projet de loi de ratification.

II - La position de votre commission

L'universalité du CPA implique que tous les actifs, quel que soit le statut ou régime juridique spécial sous l'empire duquel ils exercent leur activité professionnelle, aient accès à ce dispositif. Aucune raison objective ne justifie d'en exclure les agents des chambres consulaires , auxquels ni le code du travail, ni le statut de la fonction publique ne s'appliquent.

L'exposé sommaire accompagnant l'amendement dont est issu le présent article fait état de 43 000 salariés concernés . Il est regrettable qu'il s'agisse là du seul élément disponible sur l'impact de cet article, alors qu'il était prévisible qu'une telle adaptation du CPA serait nécessaire dès le stade préliminaire de l'élaboration du projet de loi. Les éléments concernant la fonction publique étant déjà lacunaires (cf. supra ), il aurait été opportun que le Gouvernement puisse présenter au Parlement des pistes de travail sur le périmètre qu'il est envisagé de donner à ce compte et sur les points qui le distingueront du CPA des salariés du secteur privé ou des agents de l'une des trois fonctions publiques.

Vos rapporteurs tiennent par ailleurs à souligner que la question du statut des personnels des chambres consulaires n'est pas une problématique nouvelle pour votre commission des affaires sociales . Consciente des inégalités qu'il peut susciter avec les salariés du secteur privé et les fonctionnaires, elle avait demandé au Gouvernement, dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi 306 ( * ) et à l'initiative de son rapporteur, notre ancien collègue Claude Jeannerot, de réaliser un rapport sur l'articulation entre le code du travail et les statuts des personnels consulaires . Force est de constater que ce rapport n'a jamais été remis , seul un rapport thématique sur l'articulation entre le code du travail et le statut des personnels des chambres d'agriculture ayant été réalisé par le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) en janvier 2014 307 ( * ) , qui avait conclu au caractère « plutôt avantageux » 308 ( * ) de ce statut au regard de la législation sociale générale.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 23 (art. L. 5131-3 à L. 5131-8 et L. 5134-54 du code du travail et art. 244 quater G du code général des impôts) - Parcours contractualisé d'accompagnement et généralisation de la garantie jeunes

Objet : Cet article crée un parcours contractualisé d'accompagnement vers l'autonomie et l'emploi et vise à généraliser la garantie jeunes.

I - Le dispositif proposé

Le titre III du livre I er de la cinquième partie du code du travail porte sur des aides à l'insertion, à l'accès et au retour à l'emploi. Au sein de ce titre, la section 3 du chapitre I er est relative à l'accompagnement des jeunes vers l'emploi et comporte deux sous-sections.

L'article unique de la première sous-section (art. L. 5131-3 ) énonce le droit, pour tout jeune de 16 à 25 ans « en difficulté et confronté à un risque d'exclusion professionnelle », à un accompagnement visant à son insertion professionnelle.

Au sein de la seconde sous-section, l'article L. 5131-4 permet lui, à tout jeune « rencontrant des difficultés particulières d'insertion sociale et professionnelle », de bénéficier d'un accompagnement personnalisé sous la forme d'un contrat d'insertion dans la vie sociale ( Civis ), conclu avec l'Etat. L'article L. 5131-5 prévoit l'affiliation au régime général de la sécurité sociale des jeunes ayant conclu un contrat de ce type.

Enfin, l'article L. 5131-6 prévoit une allocation versée par l'Etat au jeune titulaire d'un Civis.

Le présent article renomme la section 3 « Droit à l'accompagnement des jeunes vers l'emploi et l'autonomie » et supprime la subdivision en deux sous-sections. Par ailleurs, l'ensemble des articles de cette section sont modifiés.

L'accompagnement mentionné à l'article L. 5131-3 devient un accompagnement « vers l'autonomie et l'emploi ».

L'article L. 5131-4 ne prévoit plus un accompagnement spécifique mais précise que l'accompagnement prévu à l'article L. 5131-3 « peut prendre la forme d'un parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (...) élaboré avec le jeune et adapté à ses besoins ».

L'article L. 5131-5 prévoit le versement d'une allocation modulable au bénéfice des jeunes qui s'engagent dans un tel parcours. Comme pour l'allocation prévue par l'article L. 5131-6 actuel, il est précisé que cette allocation est incessible et insaisissable et qu'elle peut être suspendue ou supprimée en cas de non-respect par le jeune de ses engagements.

Le nouvel article L. 5131-6 est relatif à la garantie jeunes , qui est présentée comme une modalité spécifique du parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie.

Cette garantie comporte un « accompagnement intensif » du jeune ainsi qu'une allocation dégressive . Cette garantie constitue un droit ouvert, sous condition de ressources, aux jeunes de 16 à 25 ans ne bénéficiant d'aucun soutien financier de leurs parents ou vivant en dehors de leur foyer et qui ne sont ni étudiants, ni en formation, ni en emploi.

Les modifications apportées aux articles L. 5131-3 à L. 5131-6 rendent nécessaire une modification de l'article L. 5131-7 relatif aux conditions d'application de ces dispositions. Le décret prévu par cet article devient un décret en Conseil d'Etat.

Les dispositions du présent article doivent entrer en vigueur au 1 er janvier 2017 et sont sans incidence sur les Civis conclus jusqu'à cette date.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements rédactionnels. A l'initiative du rapporteur, elle a également adopté un amendement précisant que l'allocation versée dans le cadre de la garantie jeunes est, comme l'allocation prévue par l'article L. 5131-5, incessible, insaisissable et qu'elle peut être modifiée ou supprimée en cas de non-respect par le jeune de ses engagements.

Par ailleurs, il est précisé que la liste des modalités qui doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat, prévue par l'article L. 5131-7, n'est pas exhaustive, et l'article L. 5131-8 qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat fixant les autres conditions d'application des dispositions du chapitre est abrogé.

Enfin, l'article L. 5134-54 du code du travail et l'article 244 quater G du code général des impôts sont modifiés par coordination avec les modifications apportées respectivement à l'article L. 5131-4 et à l'article L. 5131-7.

Dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale après l'engagement par le Gouvernement de sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, le présent article a été modifié par un amendement rédactionnel du rapporteur et par trois amendements du Gouvernement. Il est ainsi précisé que le contrat doit être signé préalablement à l'entrée dans le parcours contractualisé d'accompagnement et que la garantie jeunes est mise en oeuvre par les missions locales, sauf lorsque le préfet désigne un autre organisme. Par ailleurs, la détermination des modalités d'attribution, de modulation, de suppression et de versement de l'allocation correspondant à la garantie jeunes est renvoyée au décret mentionné à l'article L. 5131-7 dans sa rédaction issue du présent article.

III - La position de votre commission

Le présent article vise à rationaliser les différents dispositifs existants en créant un parcours contractualisé d'accompagnement , dont la garantie jeunes constituera une modalité spécifique et intensive .

A. Les dispositifs en faveur de l'insertion des jeunes sont nombreux sans que les résultats soient à le hauteur des investissements consentis

On estime à 1,9 million le nombre de jeunes (de 15 à 29 ans) en France qui ne sont ni scolarisés, ni en emploi, ni en formation ( NEET 309 ( * ) ). Ces derniers font bien souvent partie des plus de 100 000 jeunes qui quittent le système éducatif sans qualification chaque année. Leur insertion sociale et professionnelle constitue donc un enjeu important.

La loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale 310 ( * ) a institué un droit à l'accompagnement , codifié depuis à l'article L. 5131-3 du code du travail. Ce droit à l'accompagnement s'est traduit par plusieurs dispositifs, mis en oeuvre et financés par une profusion d'acteurs (régions, partenaires sociaux et, au sein de l'Etat, ministère de l'éducation nationale, ministère du travail ainsi que diverses structures interministérielles). Le schéma ci-après illustre la pluralité et la complexité des dispositifs en faveur des jeunes décrocheurs.

Les principaux dispositifs mobilisables en faveur des jeunes
sortis sans qualification du système scolaire (source : Cour des comptes)

La multiplicité des dispositifs d'aide aux jeunes en difficulté d'insertion, qui concernent aujourd'hui 500 000 jeunes , nuit à leur lisibilité par les jeunes concernés et par les organismes chargés de les mettre en oeuvre. Dans un référé établi à la demande de la commission des finances de l'Assemblée nationale et publié en décembre 2015 311 ( * ) , la Cour des comptes relève ainsi que malgré des moyens substantiels alloués à l'accompagnement des jeunes sans qualification (près de 1,4 milliard d'euros), « l'architecture d'ensemble de ce système et la dispersion des dispositifs ne permettent pas d'atteindre les objectifs affichés ».

Dans ces conditions, vos rapporteurs sont favorables à la rationalisation des dispositifs au travers du parcours contractualisé, socle adaptable à la situation de chaque jeune.

B. La garantie jeunes constitue une expérimentation qui n'est pas dénuée d'intérêt

L'expérimentation de la garantie jeunes s'inscrit dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale adopté le 21 janvier 2013 par le Comité interministériel de lutte contre l'exclusion (Cile). Son cadre a été fixé par un décret du 1 er octobre 2013 312 ( * ) .

Le dispositif expérimental de la garantie jeunes

Conformément à l'article 1 er du décret du 1 er octobre 2013, a pour objet « d'amener les jeunes en situation de grande précarité vers l'autonomie par l'organisation d'un parcours d'accompagnement global, social et professionnel, vers l'emploi et dans la formation ».

Ce dispositif expérimental comporte deux volets :

- un accompagnement individuel et collectif par les missions locales, qui passe par des séances de formation et des périodes d'immersion dans le monde du travail sous différentes formes (stages, emplois aidés, etc. ) ;

- une allocation forfaitaire équivalente au revenu de solidarité active (RSA) 313 ( * ) , qui est cumulable avec les revenus d'activité du jeune qui n'excèdent pas 300 euros. Au-delà, l'allocation est dégressive et s'annule lorsque les revenus d'activité atteignent 80 % du Smic brut. Elle est financée par l'Etat.

Sont éligibles à ce dispositif les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans qui ne reçoivent pas de soutien financier de la part de leurs parents, qui ne sont ni étudiant, ni en formation ni en emploi et dont le niveau de ressources est inférieur au plafond de ressources qui ouvre droit au RSA.

Dans chaque territoire, une commission d'attribution et de suivi de la garantie jeunes, présidée par le préfet, a pour fonction le repérage des jeunes, les décisions d'admission, de renouvellement et le cas échéant de suspension ou de sortie du jeune du dispositif.

La garantie jeunes fait l'objet d'un contrat entre la mission locale et le jeune qui définit leurs obligations et engagements réciproques. Ce contrat est conclu pour une durée d'un an renouvelable sur décision de la commission d'attribution et de suivi.

Enfin, un comité de pilotage national et un comité scientifique sont mis en place pour le suivi de l'expérimentation.

L'expérimentation était initialement autorisée jusqu'au 31 décembre 2015 mais a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2017 par un décret du 30 décembre2015 314 ( * ) .

Le dispositif français s'inscrit dans la perspective plus large d'une Initiative pour l'emploi des jeunes ( IEJ ), lancée par le Conseil européen de février 2013. L'Union européenne participe ainsi au financement de la garantie jeunes à hauteur de près de 58 millions d'euros pour les années 2015 et 2016.

Au 31 décembre 2015, 46 000 jeunes étaient entrés dans ce dispositif et 60 000 jeunes supplémentaires pourraient le faire en 2016.

La Cour des comptes indique que ce dispositif pourrait « devenir un dispositif de droit commun pertinent, en mesure de répondre aux besoins des jeunes en difficulté d'insertion ».

C. La généralisation de la garantie jeunes semble toutefois prématurée

1° Un dispositif dont la mise en oeuvre doit encore s'affiner

L'expérimentation de la garantie jeunes portait initialement sur dix territoires 315 ( * ) définis par un arrêté du 1 er octobre 2013. Elle a ensuite été étendue successivement par des arrêtés des 11 décembre 2014, 1 er avril 2015 et 29 février 2016 pour inclure 87 départements de métropole, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion 316 ( * ) . Le dispositif est donc encore très récent dans la plupart des départements participant à l'expérimentation et il est par conséquent trop tôt pour en dresser le bilan. De plus, l'abaissement de 18 à 16 ans de la condition d'âge pose la question de la prise en charge de mineurs, par exemple pour ce qui est du versement de l'allocation. Cette question n'est certainement pas insurmontable mais n'a pas encore été réglée.

2° Un besoin et des modalités de financement qui restent flous

Par ailleurs, la généralisation pose la question du financement . La dépense que représente pour l'Etat l'allocation versée au jeune varie selon la durée effective de l'accompagnement et des revenus d'activité dont le jeune peut bénéficier durant son parcours 317 ( * ) .

Les missions locales qui accompagnent des jeunes dans le cadre de ce dispositif bénéficient d'une aide de l'Etat d'un montant maximal de 1 600 euros par jeune, qui est modulé en fonction de critères quantitatifs (nombre de jeunes pris en charge) et qualitatifs (débouchés pour le jeunes sortant du dispositif). Le montant réel de cette participation ne peut donc être évalué que ex post , et nous ne disposons pas encore de retours suffisants . De plus, il est probable que les missions locales fassent appel aux collectivités territoriales pour compléter la participation de l'Etat .

Le coût du dispositif pour l'Etat est donc mal connu, alors même que sa généralisation conduira à augmenter fortement le besoin de financement.

En effet, le Gouvernement estime, peut-être avec optimisme, que 150 000 jeunes pourraient être pris en charge en 2017. Sur la base de cette hypothèse, le besoin de financement à prévoir dans la prochaine loi de finances serait de 600 millions d'euros , ce qui représente une augmentation substantielle par rapport au montant budgétisé pour 2016 (280 millions d'euros).

Cet effort financier supplémentaire s'inscrit dans un contexte de grande incertitude quant à la pérennité des financements européens , l'IEJ devant pour le moment s'achever à la fin de l'année 2016.

Compte tenu de ces éléments, vos rapporteurs estiment qu'il est prématuré de généraliser la garantie jeunes en l'inscrivant dans la loi. L'expérimentation est aujourd'hui permise jusqu'au 31 décembre 2017, et peut le cas échéant être prolongée par décret. Il n'y a donc aucune urgence à légiférer.

Au demeurant, le Gouvernement semble bien conscient de la nécessité de ne pas précipiter les choses, puisque le présent article ne doit entrer en vigueur que le 1 er janvier 2017. Il est donc préférable de maintenir les dispositions encadrant la garantie jeunes dans le domaine règlementaire et de poursuivre l'expérimentation avant de la généraliser, le cas échéant, lorsque le recul nécessaire aura été pris. Le Gouvernement pourra d'ici là, par décret, l'étendre progressivement aux départements qui ne sont pas encore couverts.

Sur proposition de vos rapporteurs, votre commission a donc supprimé les dispositions du présent article relatives à la garantie jeunes (amendement COM-29 ). Elle a également adopté un amendement ( COM-330 ) de notre collègue Stéphanie Riocreux visant à préciser que ce sont les missions locales qui ont vocation à mettre en oeuvre le parcours contractualisé . Enfin, sur proposition de notre collègue Agnès Canayer, votre commission a adopté sept amendements ( COM-177 , COM-178 , COM-179 , COM-180 , COM-186 , COM-187 et COM-188 ) visant à changer la désignation de l'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie en lui préférant la notion d'accompagnement « vers l'autonomie par l'emploi ».

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 23 bis A (art. L. 822-1 du code de l'éducation) - Extension des missions du réseau Cnous/Crous à la gestion des aides pour les personnes non étudiantes à la recherche d'un emploi

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, modifie les missions du réseau Cnous/Crous en cohérence avec l'instauration de l'aide à la recherche du premier emploi.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

En cohérence avec l'article 23 bis D du projet de loi, également inséré par un amendement du Gouvernement, l'article 23 bis A, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, adapte les missions du réseau du centre national et des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous/Crous) au nouveau dispositif de l'aide à la recherche du premier emploi (Arpe).

Le droit actuel prévoit une limitation stricte des missions du réseau des oeuvres universitaires (accueil, aide sociale, mobilité) au public étudiant. Or l'Arpe, dont les bénéficiaires seront les jeunes diplômés à la recherche d'un emploi arrivés au terme de leur parcours universitaire, s'inscrit dans la continuité des dispositifs boursiers qui étaient accordés à ces derniers et dont le réseau Cnous/Crous assure la gestion.

Afin d'assurer cette continuité et que la collation de cette aide soit la plus efficace et rapide possible, l'article 23 bis A confie sa gestion au réseau Cnous/Crous, ce qui nécessite un élargissement de son périmètre d'action au public non étudiant.

II - La position de votre commission

Votre commission s'est étonnée que la rédaction de l'article semble inclure tant les jeunes sortis de l'enseignement supérieur que ceux sortis de l'enseignement secondaire, alors que le réseau Cnous/Crous a davantage vocation à prendre en charge le suivi des premiers. Élargir les missions du réseau Cnous/Crous à des publics dont il n'a pas la gestion habituelle pourrait engendrer une élévation de ses charges humaines et financières, surtout lorsque d'autres organismes gestionnaires (établissements scolaires pour les boursiers, centres de formation d'apprentis pour les apprentis) paraissent plus désignés.

La rédaction de l'article ne fait néanmoins pas de la gestion de cette aide nouvelle une obligation pour le réseau Cnous/Crous, ce qui lui laissera une marge de manoeuvre suffisante dans l'appréciation des demandes qu'il recevra.

Votre commission sera donc particulièrement attentive aux modalités d'application de cet article fixées par voie réglementaire, et qui définiront plus précisément les bénéficiaires de l'Arpe dont la gestion sera assurée par le réseau Cnous/Crous.

A cet article, votre commission a adopté un amendement ( COM-422 ) de ses rapporteurs reprenant l'article 25 de la proposition de loi n° 394 (2015-2016) visant à développer l'apprentissage comme voie de réussite afin de confier au pouvoir réglementaire le soin de définir les conditions d'accès des apprentis titulaires de la carte d'étudiant des métiers 318 ( * ) aux prestations et services des Crous .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 23 bis B (art. L. 130-3 et L. 130-4 du code du service national et art. L. 136-2 du code de la sécurité sociale) - Régime social des volontaires pour l'insertion de l'établissement public d'insertion de la défense (Epide)

Objet : Cet article, inséré par un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, tire les conséquences, pour les volontaires de l'Epide, de la mise en place de la protection universelle maladie.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Créé en 2005, l'établissement public d'insertion de la défense accueille des jeunes de 16 à 25 ans pour des parcours d'insertion associant enseignements scolaires et formation professionnelle pour une durée maximale de deux ans. Le nombre de volontaires ainsi accueillis en 2015 était de 3 170.

En application de l'article L. 130-3 du code du service national, l'accomplissement du volontariat en Epide ouvre droit à une allocation mensuelle et à une prime calculée au prorata du nombre de mois de volontariat effectivement accomplis.

Ces sommes, qui n'ont pas le caractère de rémunération, ne sont soumises ni aux cotisations et contributions sociales, ni à l'impôt sur le revenu. Leur montant total mensuel ne peut excéder 300 euros. En 2015, elles s'élevaient globalement à 5,53 millions d'euros, dont 4,43 millions pour les allocations et 1,1 million d'euros pour la prime.

La couverture des volontaires à l'égard des risques maladie, maternité et invalidité, d'une part, et accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), d'autre part, est assurée par le versement aux Urssaf régionales de cotisations forfaitaires annuelles à la charge de l'établissement, dues pour douze mois consécutifs quelle que soit la durée effective du volontariat au cours de cette période et dont les montants, fixés par décret, sont respectivement de :

- 18,5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 586 euros pour 2015 et 595,33 euros pour l'année 2016 ;

- et de 0,45 % du salaire minimum pris en compte pour le calcul des rentes AT-MP, soit 82 euros par volontaire.

Ainsi que le fait observer l'exposé sommaire de l'amendement présenté par le Gouvernement, il s'agit de montants importants rapportés au maximum des sommes annuellement perçues par les volontaires (3 600 euros potentiellement et 2 500 euros en moyenne). Ainsi, pour un montant total d'allocations et de primes de 5,5 millions d'euros en 2015, l'Epide a-t-il dû verser quelque 2,25 millions d'euros de cotisations pour 3 534 volontaires (277 834 euros pour le risque AT-MP et 1,9 million d'euros pour les risques maladie-maternité-invalidité).

Le présent article tire les conséquences de l'entrée en vigueur, à compter du 1 er janvier 2016, en application de l'article 59 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 319 ( * ) , de la protection universelle maladie (Puma) qui, se substituant à la couverture maladie universelle pour les personnes sans activité professionnelle, ouvre un droit à la prise en charge des frais de santé sous la seule condition d'une résidence stable et régulière en France.

Les volontaires pour l'insertion en Epide seront donc affiliés à l'assurance-maladie dans les conditions de droit commun de la Puma pour les personnes sans activité professionnelle.

En conséquence, la cotisation forfaitaire annuelle maladie est supprimée par le présent article qui prévoit, en contrepartie, un assujettissement à la CSG et à la CRDS de l'allocation mensuelle et de la prime versées aux volontaires. Le 3° du III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, qui liste les exemptions d'assiette de la CSG, est ainsi modifié.

Il est précisé que le montant de l'allocation et de la prime, fixé par décret, est net de contributions.

La cotisation AT-MP est maintenue dans sa forme actuelle.

L'article actualise les références au code du travail, recodifié en 2009.

Il fixe enfin une date d'entrée en vigueur rétroactive au 1 er janvier 2016, date d'entrée en vigueur de la Puma. Les cotisations versées au titre de l'année 2016 devront donc être remboursées à l'Epide.

II - La position de votre commission

D'autres conséquences resteront encore sans doute à tirer de la mise en place de la Puma qui induit des changements considérables dans l'univers de la protection maladie.

Il est ainsi légitime que les mécanismes spécifiques mis en place pour assurer la protection maladie de certains publics n'exerçant pas d'activité professionnelle soient remplacés par la Puma.

On peut noter que l'adoption de cet article se traduit par une baisse des montants versés par l'Epide pour la protection sociale de ses volontaires qui passerait de plus de 2 millions à 442 000 euros pour le même montant d'allocations.

L'assujettissement à la CSG et à la CRDS sur la base d'un montant net suscite également des interrogations dans la mesure où ces contributions, qui sont des contributions « salariales » déduites de sommes brutes, pourraient être calculées sur des allocations et des primes définies en brut et majorées à cette occasion à due concurrence.

Il semble cependant que cet article ait peu à voir avec l'objet du texte, même si la charge financière de la protection sociale des volontaires en Epide incombe au ministère du travail.

La question aurait plutôt mérité d'être traitée lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.

Votre commission a adopté un amendement ( COM-232 ) de ses rapporteurs corrigeant une erreur de référence .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 23 bis C (art. L. 324-1, L. 324-2, L. 324-3, L. 324-4, L. 324-5 et L. 324-6 du code du travail applicable à Mayotte) - Droit à l'accompagnement vers l'autonomie et l'emploi des jeunes à Mayotte

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, transpose le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie au code du travail applicable à Mayotte.

I - Le dispositif proposé

Cet article vise à transposer à Mayotte la refonte de l'accompagnement vers l'autonomie et l'emploi opérées par le présent projet de loi. En effet, malgré son passage depuis 2010 au rang des départements d'outre-mer soumis au principe de l'identité législative prévu à l'article 73 de la Constitution, Mayotte reste jusqu'au 1 er janvier 2018 régie par un code du travail spécifique. Il est donc souhaitable de préciser les adaptations ou d'abroger explicitement le droit spécifique antérieur.

Ainsi, l'article 23 bis C, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, abroge la sous-section du code du travail applicable à Mayotte relative au contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis) pour y substituer le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie. Y sont transposés tous ses éléments constitutifs :

- le nouvel article L. 324-2 du code du travail applicable à Mayotte mentionne la dimension contractuelle et individualisée du nouveau dispositif, par opposition au Civis dont il n'était que spécifié qu'il était « conclu avec l'État » ;

- le nouvel article L. 324-3 modifie les conditions de versement de l'allocation dont le jeune pourra bénéficier. Cette dernière est désormais cumulable avec un revenu annexe et modulable selon la situation de chacun ;

- le nouvel article L. 324-4 intègre la garantie jeunes et rappelle ses deux composantes essentielles : accompagnement intensif du jeune et versement d'une allocation dégressive. Sont également mentionnées les conditions d'âge, de statut et de ressources ;

- enfin, le nouvel article L. 324-5 définit les matières que devra aborder le décret d'application, avec la modification importante, par rapport au Civis que le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi ne comporte plus de durée maximale.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 23 bis D - Aide à la recherche du premier emploi

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, instaure une aide à la recherche du premier emploi à destination de jeunes diplômés qui entrent sur le marché du travail en situation d'inactivité.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le dispositif prévu par le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, s'inscrit dans le sillage du plan priorité jeunesse mis en place par le Gouvernement. Il s'agit d'une aide à la recherche du premier emploi (Arpe), destinée aux jeunes diplômés de l'enseignement scolaire ou supérieur et qui cherchent à s'insérer sur le marché du travail.

A. L'Arpe s'inscrit dans la continuité des dispositifs visant les jeunes diplômés à la recherche du premier emploi

Dans le cadre du contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis), le constat d'un accompagnement peu mobilisateur et d'aides financières trop limitées et irrégulières avait conduit le ministère de la jeunesse à expérimenter sur la période 2011-2013 un nouveau dispositif dénommé « revenu contractualisé d'autonomie » (RCA). Prévu comme mesure d'expérimentation par la loi de finances pour 2010 320 ( * ) puis précisé par décret 321 ( * ) , le RCA est destiné, d'une part, à lever les freins financiers à l'insertion professionnelle des jeunes (liés à la nécessité de se déplacer, de se vêtir, d'effectuer des démarches etc.), et, d'autre part, à leur permettre d'inscrire la construction de leur projet professionnel dans la durée. Contrairement au Civis, qui laissait au référent individuel la capacité de décider lui-même du versement d'une allocation, il repose sur une allocation mensuelle garantie pendant deux ans, d'un montant maximum de 250 euros la première année, puis dégressif au cours des 12 mois suivants, couplée à un accompagnement mensuel et assortie d'une obligation pour les jeunes de remplir une déclaration mensuelle de ressources.

En outre, le nouveau dispositif a souhaité prendre acte d'un effet de seuil préjudiciable aux jeunes diplômés du supérieur en insertion professionnelle, limitant le bénéfice du Civis aux seuls titulaires au plus d'un baccalauréat. C'est pourquoi l'expérimentation s'est doublée d'une déclinaison à destination des jeunes diplômés, le RCA-JD. Concernant ce public particulier, le versement de l'allocation est inchangé, mais les conditions d'éligibilité sont plus strictement définies : être titulaire d'au moins une licence, être inscrit depuis plus de 6 mois à Pôle emploi, ne pas recevoir d'indemnités de chômage et avoir moins de 25 ans.

Les innovations portées par le RCA sont nombreuses : conservation de l'accompagnement individuel, caractère systématique de l'allocation, dégressivité afin d'augmenter son caractère incitatif, responsabilisation du jeune par la signature de la déclaration mensuelle, ouverture sur les jeunes diplômés de l'enseignement supérieur. Malgré ces apports, l'évaluation qualitative du RCA a montré que les objectifs n'étaient que partiellement remplis. De façon générale, les opérateurs ont déploré le caractère automatique de l'aide, qui a ainsi perdu son caractère incitatif à la réinsertion. Son montant, indifférencié en fonction des publics, n'établit pas de distinction suffisante entre les jeunes en situation précaire, pour lesquels le montant reste insuffisant, et les jeunes bénéficiant d'un soutien familial. De plus, concernant le RCA-JD, les critères d'éligibilité ont été dénoncés comme trop restrictifs : la limite d'âge de 25 ans, définie pour empêcher le cumul de l'aide avec le revenu de solidarité active, exclut tous les jeunes achevant leurs études à un âge plus avancé ; l'inscription à Pôle emploi et l'ancienneté requise concernent un public fort restreint ; et la condition stricte d'absence de ressources évince du dispositif tous les jeunes titulaires d'emplois d'appoint.

B. L'Arpe s'efforce de pallier, par des critères renouvelés d'éligibilité et de durée, les défauts des dispositifs précédents

1. Des conditions renouvelées

La philosophie de l'Arpe s'apparente à celle des différents dispositifs qui l'ont précédée tout en présentant certaines spécificités. Contrairement au Civis ou au RCA, elle ne comporte pas de volet dédié à l'accompagnement du jeune (qui se retrouve davantage dans la garantie jeunes), et se limite au versement d'une aide financière explicitement dédiée à la recherche immédiate du premier emploi. Par des critères renouvelés d'éligibilité et de durée, l'Arpe se propose d'éviter les écueils précédemment évoqués.

Cette aide est versée sous conditions de ressources. Elle est avant tout perçue comme un prolongement des bourses dont le jeune diplômé a bénéficié au cours de son parcours scolaire ou universitaire et qu'il perd au moment de l'entrée sur le marché du travail.

Contrairement aux autres dispositifs, il sera possible, selon des modalités définies par décret, de cumuler l'Arpe avec des revenus annexes, sous réserve que ceux-ci ne dépassent pas un certain plafond.

L'Arpe est versée durant quatre mois. Cette durée, délibérément courte, a été déterminée en fonction de statistiques établies par le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) sur la durée moyenne de recherche du premier emploi et de façon à ne pas substituer l'Arpe à d'autres dispositifs visant à assurer l'insertion sociale et professionnelle du jeune à plus long terme (garantie jeunes, revenu de solidarité active). En outre, afin d'éviter tout effet d'aubaine qui détournerait l'aide de sa vocation première, l'Arpe ne peut être demandée que dans un délai maximal de trois mois à compter de l'obtention du diplôme.

Enfin, la condition d'âge est redéfinie. L'Arpe est ouverte aux jeunes de moins de 28 ans. Cet élargissement du périmètre des bénéficiaires tranche avec la philosophie des dispositifs précédents, qui visaient à éviter le cumul entre aide à la réinsertion et versement du revenu minimum. Il s'agit essentiellement de prendre en compte l'allongement global de la durée des études et de ne pas pénaliser les jeunes diplômés de plus de 25 ans en situation d'inactivité.

2. Deux circuits distincts

L'Arpe ne comprenant pas de dimension spécifique d'accompagnement individualisé, il a paru logique de charger les organismes scolaires ou universitaires de son instruction et de son paiement. L'Arpe échappe donc au circuit ordinaire des aides à la réinsertion (qui sont allouées dans le cadre des missions locales) et relève de la compétence de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur.

Afin d'éviter les surcoûts liés à l'instruction et au paiement de ces nouvelles demandes, le dispositif prévoit l'intervention possible de l'Agence de services et de paiement (ASP).

Enseignement secondaire

Enseignement supérieur

Boursiers

L'instruction comportera deux phases : la composition du dossier au niveau de l'établissement et l'instruction par l'autorité académique.

L'instruction et le paiement sera pris en charge par le réseau Cnous/Crous. La mise en oeuvre du dispositif reposera sur les mêmes démarches que les demandes de bourses et impliquera par conséquent un surcoût très réduit.

Apprentis

Dans les deux cas, les apprentis poseront une difficulté particulière car le travail d'instruction de telles demandes n'est pas une tâche habituelle des centres de formation d'apprentis (CFA).

II - La position de votre commission

Votre commission s'étonne des modalités de versement de l'Arpe qui seront ultérieurement définies par décret, plus particulièrement concernant les publics universitaires. L'âge maximal d'éligibilité à l'Arpe étant de 28 ans, elle s'adressera en partie à un public également éligible au revenu de solidarité active (RSA), qu'il est possible de toucher à partir de 25 ans. Or, il n'est pas prévu que le jeune âgé de plus de 25 ans et de moins de 28 ans puisse cumuler le RSA et l'Arpe, ce qui le conduira à arbitrer entre les deux prestations et, in fine , à privilégier la première dont le niveau sera dans la plupart des cas plus élevé. Le dispositif introduit par l'article 23 bis D exclura donc de fait les jeunes diplômés universitaires qui ne voudront pas perdre le bénéfice du RSA.

De plus, votre commission constate une inquiétude des agents comptables des établissements scolaires quant à la charge supplémentaire que le paiement de l'Arpe engendrera.

A l'initiative des rapporteurs, votre commission a adopté un amendement ( COM-24 ) élargissant les tâches qui pourront être confiées , sur délégation des autorités académiques ou du réseau Cnous/Crous à l'Agence de services et de paiement (ASP). Pour le cas particulier des apprentis (essentiellement dans le cas de l'enseignement secondaire), les CFA ne disposent que faiblement des outils nécessaires à l'instruction et au paiement des demandes d'Arpe qui leur seront adressées. La rédaction initiale de l'article limitait la délégation possible à l'ASP aux tâches de paiement ; la commission l'a étendue aux tâches d'instruction .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 23 bis (supprimé) - Demande de rapport relatif à la mise en oeuvre des emplois d'avenir

Objet : Cet article, introduit en commission à l'Assemblée nationale sur proposition de notre collègue député Jean-Louis Bricout, prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement sur la mise en oeuvre des emplois d'avenir.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, inséré par l'Assemblée nationale au stade de l'examen en commission à l'initiative de notre collègue député Jean-Louis Bricout, prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement relatif à la mise en oeuvre de la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d'avenir . Ce rapport doit être remis dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.

Il est précisé que ce rapport doit étudier l'opportunité d'une prolongation du dispositif.

Dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, quatre amendements rédactionnels du rapporteur ont été intégrés visant à modifier cet article.

II - La position de votre commission

Les emplois d'avenir sont un dispositif d'emplois aidés en faveur des jeunes de 16 à 25 ans peu ou pas diplômés. Ils concernent principalement des emplois dans le secteur non-marchand. Or, il est désormais bien documenté que les emplois aidés dans le secteur non-marchand ont un effet peu significatif sur l'insertion professionnelle. Au cours des débats sur le projet de loi de finances pour 2016, votre commission avait soutenu l'amendement de la commission des finances visant à ce que les crédits en la matière soient redirigés vers l'emploi marchand.

Concernant plus précisément le présent article, vos rapporteurs sont défavorables à la multiplication des demandes de rapport au sein des textes législatifs. Votre commission a donc adopté un amendement de suppression ( COM-6 ).

Votre commission a supprimé cet article.

Article 23 ter (art. L. 243-1 [nouveau] du code de l'action sociale et des familles et L. 5213-2-1 [nouveau] du code du travail) - Dispositif d'emploi accompagné spécifique pour les personnes handicapées

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, instaure un dispositif d'emploi accompagné à destination des personnes handicapées engagées dans un parcours d'insertion professionnelle en milieu ordinaire.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le dispositif de l'article 23 ter , issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, s'inscrit dans la ligne des préconisations formulées par le rapport de notre collège députée Annie Le Houérou sur l'emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire 322 ( * ) ainsi que des arbitrages rendus par le président de la République à l'issue de la Conférence nationale sur le handicap du 19 mai 2016.

A. Des dispositifs insuffisants et trop peu lisibles

1. Une porosité entre milieu protégé et milieu ordinaire encouragée par le législateur mais encore insuffisante

a) Les personnes handicapées peuvent exercer une activité professionnelle en milieu protégé

Le milieu protégé regroupe les établissements et services d'aide par le travail (Esat) et les entreprises adaptées (EA).

Les Esat proposent aux personnes handicapées des activités à caractère professionnel dans divers secteurs tels que l'industrie (montage-cablage, conditionnement etc.) et les services (blanchisserie, espaces verts, restauration etc.). Ils proposent leurs services notamment aux employeurs assujettis à l'obligation légale d'emploi de travailleurs handicapés sous la forme de contrat de sous-traitance ou de mises à disposition de personnel. Ces employeurs ont ainsi la possibilité de répondre partiellement à leur obligation d'emploi. Les travailleurs handicapés qui exercent des activités à caractère professionnel au sein d'un Esat ont le statut d'usagers de cet établissement ou service et non le statut de salariés. Ils ne sont pas liés à l'Esat qui les accueille par un contrat de travail mais par un contrat de soutien et d'aide par le travail.

Les EA sont des unités économiques qui offrent une activité professionnelle adaptée aux possibilités des travailleurs handicapés. Ces entreprises fonctionnent comme les entreprises du milieu ordinaire, elles emploient des travailleurs handicapés dont la capacité de travail est égale ou inférieure aux deux tiers de celle d'un travailleur valide et emploient au minimum 80 % de travailleurs handicapés dans les postes de production. Comme les Esat, les EA proposent leurs services notamment aux employeurs assujettis à l'obligation d'emploi sous la forme de contrats de sous-traitance ou de mises à disposition de personnel.

b) La loi favorise des passerelles vers le milieu ordinaire

La mission première du milieu professionnel protégé est d'apporter à la personne handicapée un accompagnement médico-social adapté à sa condition . Il a pu donc paraître contradictoire de les doter également d'une vocation à faciliter le passage de la personne handicapée, quand c'est possible, dans le milieu ordinaire. Le législateur a clairement souhaité mettre l'accent sur cet objectif par la loi du 11 février 2005 323 ( * ) et s'est essentiellement attaché à renforcer le dispositif de sanction pour les entreprises ne remplissant pas leurs obligations d'emploi et à l'étendre aux employeurs publics. La loi du 28 juillet 2011 324 ( * ) s'est davantage préoccupée du financement des dispositifs d'aménagement en milieu ordinaire de travail.

Dans le secteur privé, l'association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph) conçoit et finance les aménagements à mettre en oeuvre en entreprise. Et depuis la loi de 2005, le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (Fiphfp) assume - sous statut d'établissement public dont la gestion est confiée à la Caisse des dépôts et consignations - des responsabilités comparables pour les fonctions publiques. Sur le terrain, les Cap emploi , organismes de placement spécialisé, pour les recrutements, et les services d'aide au maintien en emploi des travailleurs handicapés (Sameth) pour le maintien en emploi sont les interlocuteurs des employeurs et des personnes handicapées.

L'Esat s'est vu prioritairement identifié comme tremplin principal du milieu protégé vers le milieu ordinaire. Une première modalité de sortie des Esat vers le milieu ordinaire passe par l'intégration directe de la personne handicapée en entreprise à travers la signature d'un contrat de travail, CDD ou contrat unique d'insertion (Cui). Une alternative à l'intégration pure et simple en entreprise est la mise à disposition par les établissements de travailleurs handicapés. Ce dispositif est prévu par l'article L. 344-2-4 du code de l'action sociale et des familles qui prévoit que : « Les personnes handicapées admises dans un [Esat] peuvent [...] être mises à disposition d'une entreprise afin d'exercer une activité à l'extérieur de l'établissement ou du service auquel elles demeurent rattachées ». Ce dispositif permet de développer la capacité d'emploi des travailleurs handicapés, sans remettre en cause l'accompagnement médico-social dont ils bénéficient et qui demeure assuré par l'Esat auquel ils sont rattachés. Un contrat écrit doit obligatoirement être passé entre l'Esat de référence et l'entreprise auprès de laquelle la mise à disposition est réalisée.

c) Les sorties d'Esat vers le milieu ordinaire demeurent marginales

Malgré les possibilités prévues, les orientations de personnes travaillant en Esat vers l'emploi en milieu ordinaire restent quantitativement peu nombreuses. Ainsi, la fluidité des parcours entre milieu protégé et milieu ordinaire est faible et la vision des Esat comme institutions de transition ne résiste pas à l'analyse de la réalité. Les départs vers le milieu ordinaire représentent annuellement environ 1 à 2 % de l'effectif des Esat.

Les dispositifs d'insertion sont peu utilisés du fait du risque auquel ils exposent les personnes handicapées comme les entreprises. Du côté des travailleurs en ESAT qui sont concernés par une sortie, la signature d'un contrat de travail dans une entreprise ordinaire est souvent associée à une prise de risque pouvant être jugée trop importante par rapport à la sécurité que confère le milieu protégé.

Du côté des employeurs potentiels, la crainte de ne pas être suffisamment appuyés lors de l'intégration d'un travailleur handicapé puis tout au long de l'exercice de son activité professionnelle les pousse à délaisser l'emploi direct au profit d'autres réponses. Ils préfèrent ainsi conclure des contrats de sous-traitance avec des Esat, qui leur permettent de remplir leurs obligations légales et apparaissent moins contraignants.

2. Des prestations peu lisibles qui n'assurent pas un suivi durable de la personne handicapée dans l'emploi

a) Un suivi ponctuel qui n'accompagne pas assez les entreprises du milieu ordinaire

Des outils conçus puis mis en oeuvre par l'Agefiph et les Sameth pour améliorer l'ergonomie des postes de travail ont indéniablement facilité l'adaptation de personnes en situation de handicap physique ou moteur au milieu ordinaire. Néanmoins, deux difficultés subsistent qui expliquent particulièrement la réticence des employeurs du milieu ordinaire à embaucher des personnes handicapées :

- l'accompagnement médico-social via les SAVS (services d'accompagnement à la vie sociale) et Samsah (services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés avec prestations de soins) s'exerce essentiellement en dehors des heures de travail. Il est aujourd'hui très peu fréquent que le secteur médico-social passe une convention avec l'employeur pour aider au suivi du salarié. Des entreprises ont tenté de pallier cette absence du médico-social en instaurant un tutorat spécifique pour l'accueil des personnes handicapées, mais en l'absence de formation adéquate et d'incitation financière, l'initiative est souvent de faible portée ;

- les aides accordées par l'Agefiph sont d'un montant trop limité et sont surtout essentiellement ponctuelles : 1 000 euros pour la signature d'un CDD inférieur à 11 mois, 2 000 euros pour un CDD ou un CDI d'au moins 12 mois à temps partiel, 4 000 euros pour un CDD ou un CDI d'au moins 12 mois à temps plein. Ces aides, non renouvelables, ne permettent pas un accompagnement dans la durée des personnes handicapées. Or, la situation particulière d'une personne handicapée dans l'emploi rend souvent nécessaire un suivi, certes plus ou moins intensif selon les cas, mais au moins durable .

Il convient aussi de faire mention d'une catégorie de handicap particulièrement vulnérable quant à son intégration en milieu ordinaire : le handicap psychique . Les employeurs, à cause de son caractère parfois difficilement détectable, se montrent extrêmement réticents à l'embauche de personnes handicapées psychiques, et les prestations ponctuelles spécifiques (PPS) déployées par l'Agefiph se sont là aussi montrées insuffisantes et trop ponctuelles.

b) Le Sénat avait appelé dès 2012 à une révision du pilotage des politiques d'insertion

Le rapport sénatorial d'information relatif à la loi handicap 325 ( * ) de 2005 fait état de « dysfonctionnements dans le pilotage des politiques d'insertion professionnelle des personnes handicapées », notamment d'un rôle trop effacé de l'État et du service public de l'emploi, ainsi que d'un climat de méfiance entre ce dernier et l'Agefiph.

La principale préconisation de ce rapport, en la matière, consiste en une clarification du rôle des différents acteurs et en une construction de partenariats efficaces afin de mieux répondre aux attentes des personnes handicapées et des employeurs. L'article 23 ter du projet de loi s'emploie à satisfaire cet objectif.

B. Le dispositif proposé vise à assurer un suivi durable et réorganisé autour de la personne handicapée

1. Les modifications apportées au code de l'action sociale et des familles unifient le dispositif autour de la personne handicapée

Le texte fixe les conditions de l'ouverture du dispositif, qui l'inscrivent dans le parcours institutionnel ordinaire des personnes handicapées : évaluation par l'équipe pluridisciplinaire, en complément de l'orientation décidée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), avec, de façon facultative, l'intervention du service public de l'emploi compétent. Le dispositif d'emploi accompagné est alors accordé par la CDAPH et son contenu comprend bien les doubles mesures de soutien et d'accompagnement à apporter au salarié et à l'employeur .

L'autre apport du texte réside dans la convention tripartite conclue entre la personne morale gestionnaire du dispositif d'emploi accompagné, une personne morale gestionnaire d'un Esat ou d'un établissement médico-social spécialisé dans l'aide à l'insertion, et un organisme de service public de l'emploi (Pôle emploi, Cap emploi ou mission locale). Le texte s'efforce de rassembler très largement toutes les institutions susceptibles d'intervenir dans le parcours de la personne handicapée. Cette convention tripartite vise à associer les deux acteurs de l'accompagnement ordinaire qui jusqu'ici opéraient séparément : le médico-social et le service public de l'emploi. De plus, la convention permettra l'intervention directe du médico-social au sein de l'entreprise pour s'assurer du suivi du salarié et de sa bonne intégration.

En outre, en choisissant la convention comme véhicule de ce dispositif, l'article 23 ter opte pour son insertion dans une démarche partenariale entre acteurs directement concernés (la personne handicapée, l'Esat, l'entreprise) plutôt que d'en faire un droit ouvert accordé directement et sans concertation par la CDAPH. Ce choix vise à faire du dispositif d'emploi accompagné un outil à destination des personnes spécifiquement concernées par une insertion ou un maintien dans l'emploi.

Le texte porte également mention d'une convention individuelle d'accompagnement signée entre la personne gestionnaire du dispositif d'emploi accompagné, la personne handicapée et l'employeur, qui précise les modalités d'accompagnement. Cette convention ne se substitue pas au contrat de travail.

2. Les modifications apportées au code du travail redéfinissent l'accompagnement par le service public de l'emploi

Le dispositif d'emploi accompagné spécifique n'apparaît plus comme un ensemble disparate de prestations livrées à la discrétion de l'Agefiph, mais bien comme un droit ouvert au salarié et à l'employeur , qui fait désormais l'objet d'une application durable et peut être sollicité « tout au long du parcours professionnel par le travailleur handicapé et [...] par l'employeur ».

En mobilisant le dispositif « en complémentarité des services, aides et prestations existantes », l'article 23 ter invite les acteurs de l'insertion et du maintien des personnes handicapées dans l'emploi, au premier rang desquels l'Agefiph, à enclencher une rationalisation de leur offre .

Enfin, le texte ajoute qu'un décret aura à préciser les conditions dans lesquelles l'agence régionale de santé (ARS) pourra inclure, via le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, les nouvelles modalités relatives au dispositif d'emploi accompagné applicables aux établissements sociaux et médico-sociaux.

II - La position de votre commission

Votre commission salue l'innovation consistant à associer le secteur médico-social et le service public de l'emploi dans le suivi de l'insertion en milieu ordinaire de la personne handicapée. Elle se montrera particulièrement attentive aux modalités prévues par décret, s'agissant notamment du suivi individualisé de la personne. En effet, il paraît essentiel, pour le travailleur handicapé comme pour l'employeur, que le référent médico-social et le référent du service public de l'emploi compétent soient uniques pour chaque travailleur.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 23 quater (art. L. 5132-15-1 du code du travail) - Augmentation plafonnée à 60 mois de la durée maximale du contrat de travail des salariés en atelier et chantier d'insertion

Objet : Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de l'Assemblée nationale retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, crée une nouvelle exception au principe de durée maximale des contrats de travail en atelier et chantier d'insertion.

I - Le dispositif proposé

Les ateliers et chantiers d'insertion (ACI) proposent un accompagnement et une activité professionnelle aux personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières. Les ACI, quel que soit leur statut juridique, peuvent conclure avec des personnes des contrats à durée déterminée, dits d'insertion . La durée de ces contrats ne peut pas être inférieure à 4 mois, sauf pour les personnes ayant fait l'objet d'une condamnation et bénéficiant d'un aménagement de peine. Ils peuvent être renouvelés dans la limite d'une durée totale de 24 mois, sauf dérogations.

Il existe deux exceptions à la durée maximale des contrats conclus par les ACI. En premier lieu, il est possible à l'ACI, à titre dérogatoire, de renouveler un contrat au-dessus du terme de 24 mois pour permettre au titulaire d'achever une formation professionnelle en cours de réalisation. En second lieu, dans les cas de salariés âgés de plus de cinquante ans ou de personnes reconnues travailleurs handicapés, en raison de la fragilité particulière de leur situation, le contrat de travail pourra être prolongé au-delà de la durée maximale sans mention d'un autre plafond. Cette prolongation peut être accordée par Pôle emploi.

L'article 23 quater , issu d'un amendement du rapporteur de l'Assemblée nationale retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, insère une nouvelle exception au principe de la durée maximale. Elle vise les salariés dont la situation particulièrement difficile ferait obstacle à leur insertion professionnelle, et dont le contrat pourrait alors faire l'objet de prolongations successives d'un an au plus, dans la limite de 60 mois. Cette nouvelle exception entre également dans le cadre d'une autorisation préalable par Pôle emploi.

II - La position de votre commission

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 24 (art. L. 3243-2 du code du travail) - Dématérialisation du bulletin de paie

Objet : Cet article vise à faire de la transmission par voie électronique la modalité par défaut de la remise du bulletin de paie aux salariés.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 3243-2 du code du travail prévoit la remise au salarié d'une pièce justificative appelée bulletin de paie. La loi du 12 mai 2009 326 ( * ) a permis la dématérialisation du bulletin de paie en précisant que l'employeur peut, avec l'accord du salarié concerné , effectuer cette remise sous forme électronique, dans des conditions de nature à garantir l'intégrité des données. La remise du bulletin de paie sous forme électronique est donc une option laissée à l'appréciation de l'employeur et soumise à l'accord du salarié.

Le présent article procède à l'inversion de la règle d'option .

Il supprime en effet la deuxième phrase de l'article L. 3243-2 et ajoute un alinéa aux termes duquel l'employeur peut procéder à la remise du bulletin de paie sous forme électronique sauf opposition du salarié . Il est précisé que les conditions de cette remise par voie électronique ne doivent pas seulement garantir l'intégrité des données , comme le prévoit le droit actuel, mais également leur disponibilité et leur confidentialité . À la demande du salarié, le bulletin de paie électronique peut être hébergé par le service en ligne associé au compte personne d'activité (CPA).

Les dispositions de cet article entrent en vigueur le 1 er janvier 2017.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires sociales a adopté un amendement visant, lorsque le bulletin de paie est remis sous forme électronique, à ce qu'il soit obligatoirement accessible depuis le service en ligne associé au CPA . Cet amendement précise qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), détermine les modalités de cette accessibilité afin de préserver la confidentialité des données.

Un amendement, déposé en séance publique par notre collègue députée Anne-Christine Lang et retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, prévoit qu'un décret fixe la durée de conservation en ligne des bulletins de paie dématérialisés au cours de laquelle le document reste accessible par le salarié . Cette règle de conservation est distincte de celle imposant aux employeurs de conserver un double des bulletins de paie pendant cinq ans fixée à l'article L. 3243-4.

III - La position de votre commission

Alors que la remise d'un bulletin de paie mensuel constitue une garantie essentielle pour le salarié, la dématérialisation de ce document rendue possible depuis le début des années 2000 par les progrès des technologies numériques est un facteur de simplification et de réduction des coûts . La France accuse pourtant en la matière un retard conséquent comme l'a montré le rapport de Jean-Christophe Sciberras sur la clarification du bulletin de paie 327 ( * ) .

L'étude d'impact souligne que la dématérialisation permet une réduction du coût supporté par l'employeur de 10 à 42 centimes d'euros par bulletin de paie (impression et affranchissement). Pour une entreprise de 100 salariés et sur un an, l'économie s'élèverait ainsi à plus de 38 000 euros. Pour le salarié , la dématérialisation peut permettre une conservation plus sûre , à condition que les précautions nécessaires soient prises, ainsi qu'un accès et, le cas échéant, une transmission plus simples . Enfin, et sans que cet impact puisse être vérifié ex ante , la dématérialisation pourrait permettre de réduire les impressions et donc la consommation de papier.

Vos rapporteurs approuvent l'objectif de renforcement du recours à la dématérialisation du bulletin de paie. Ils notent toutefois que l'inversion de la règle d'option ne change rien à l'état actuel du droit, l'employeur demeurant libre de continuer à remettre le bulletin de paie sous forme papier.

L'absence d'obligation, si elle peut freiner la généralisation de la procédure dématérialisée, apparait nécessaire pour les plus petites entreprises. Les garanties entourant la dématérialisation de la fiche de paie nécessitent en effet la mise en place d'un système informatique relativement complexe. Comme l'indiquait une note du ministère de l'économie en 2011, l'instauration du bulletin de paie électronique implique pour l'employeur la « mise en place d'une solution garantissant l'intégrité des données. Un simple courrier électronique avec le bulletin de paie en pièce-jointe, par exemple, ne fournit pas cette garantie d'intégrité. [De même,] sa simple mise à disposition ne suffit pas. La remise implique le dépôt du document dans un espace personnel appartenant au salarié. Le bulletin de paie électronique nécessite un système d'échange de documents électroniques gérant l'autorisation en amont et la conservation du bulletin en aval » 328 ( * ) .

Par ailleurs, si l'accessibilité du bulletin de paie au sein du CPA apparaît comme une réponse partielle à cette difficulté technique pour les entreprises, vos rapporteurs doutent que la date d'entrée en vigueur du présent article, au 1 er janvier 2017, soit réaliste au regard de l'état d'avancée de la mise en oeuvre du CPA . Dans son avis rendu sur le présent projet de loi, le Conseil d'État alerte le Gouvernement « quant à l'urgence de mettre en place ce service en ligne d'ici le 1 er janvier 2017 afin d'en garantir l'effectivité » .

Malgré ces observations, vos rapporteurs ont souhaité maintenir inchangée la date d'entrée en vigueur de cet article de façon à inciter les entreprises qui le souhaitent et en ont les moyens à mettre en oeuvre au plus vite la dématérialisation du bulletin de paie.

Votre commission a adopté cet article sans modification.


* 247 Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, art. 5 ; JO 16 juin 2013.

* 248 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, art. 1 ; JO 6 mars 2014.

* 249 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, art. 10 ; JO 21 janvier 2014.

* 250 Défini par le décret n° 2015-172 du 13 février 2015 relatif au socle de connaissances et de compétences.

* 251 Elaborée par le comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation (Copanef).

* 252 Elaborée par le comité paritaire interprofessionnel régional pour l'emploi et la formation (Coparef).

* 253 Définis à l'article D. 4161-2 du code du travail : manutention manuelle de charges ; postures pénibles ; vibrations mécaniques ; agents chimiques dangereux ; activités exercées en milieu hyperbare ; températures extrêmes ; bruit ; travail de nuit ; travail en équipes successives alternantes ; travail répétitif.

* 254 Soit la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav).

* 255 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi ; JO 18 août 2015.

* 256 Position commune sur le compte personnel d'activité, la sécurisation des parcours et la mobilité professionnelle, 8 février 2016.

* 257 En application du b du 1 de l'article 200 du code général des impôts.

* 258 Chambres régionales de métiers et de l'artisanat ou chambres de métiers et de l'artisanat de région.

* 259 Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, art. 8 ; JO 9 juillet 2013.

* 260 Qui implique notamment l'affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale (art. L. 6342-1 du code du travail).

* 261 Chapitre III du titre 2 du livre III de la sixième partie.

* 262 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 précitée.

* 263 Source : Document d'orientation pour la négociation interprofessionnelle relative au compte personnel d'activité et à la sécurisation des parcours professionnels adressé par le Gouvernement aux partenaires sociaux, novembre 2015, p. 3.

* 264 « Le compte personnel d'activité, de l'utopie au concret », rapport de la commission compte personnel d'activité présidée par Selma Mahfouz, France Stratégie, 9 octobre 2015.

* 265 Source : Feuille de route sociale, octobre 2015, p. 20.

* 266 Source : Document d'orientation précité, p. 4.

* 267 Source : Position commune précitée, p. 1.

* 268 Source : Etude d'impact annexée au projet de loi, p. 207.

* 269 Ibid., p. 215.

* 270 Rapport d'information n° 3558, AN, quatorzième législature, 9 mars 2016.

* 271 Source : Document de politique transversale « Formation professionnelle » annexé au projet de loi de finances pour 2016, p. 54.

* 272 Travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail en milieu hyperbare, travail répétitif.

* 273 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 précitée.

* 274 Membres de l'organe d'administration ou de direction des associations d'intérêt général inscrites sur liste établie par arrêté des ministres chargés de la vie associative et de la formation professionnelle.

* 275 L'Agefice pour les chefs d'entreprises de l'industrie, du commerce et des services ; le FAFCEA pour les artisans ; l'Afdas pour les artistes et auteurs ; le FIF-PL pour les professionnels libéraux ; le FAF-PM pour les médecins ; Vivea pour les chefs d'entreprises agricoles et Agefos-PME pour la pêche et les cultures marines.

* 276 Source : Document de politique transversale précité, p. 123.

* 277 C'est-à-dire en 2016.

* 278 Source : Etude d'impact précitée, p. 217.

* 279 p. 213.

* 280 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 précitée.

* 281 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 précitée, art. 5.

* 282 Jean-Michel Paguet (Igen), Pascal-Raphaël Ambrogi (Igaenr), « Introduction de blocs de compétences dans les diplômes professionnels », rapport n° 2015-078, novembre 2015.

* 283 Ibid., p. 63.

* 284 Ibid., p. 94.

* 285 Art. L. 718-2-1 et D. 718-16 du code rural et de la pêche maritime.

* 286 Art. 1601 B du code général des impôts.

* 287 Art. 1601 du code général des impôts.

* 288 Art. L. 6331-53 du code du travail.

* 289 Art. L. 1609 quatervicies B du code général des impôts.

* 290 C'est-à-dire les meublés de tourisme et les chambres d'hôtes.

* 291 Ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003 relative aux mesures de simplification des formalités concernant les entreprises, les travailleurs indépendants, les associations et les particuliers employeurs ; JO 20 décembre 2003.

* 292 Sylviane Bulteau, Fabrice Verdier, « Rapport à Monsieur le Premier ministre sur le fonctionnement du RSI dans sa relation avec les usagers », 21 septembre 2015.

* 293 Ibid., p. 30.

* 294 Source : « Heures supplémentaires et rachat de jours de congé : les dispositifs d'allongement du temps de travail vus par les salariés » ; Dares analyses n° 54, juillet 2011, p. 2.

* 295 Source : Direction générale de l'administration et de la fonction publique, « Rapport annuel sur l'état de la fonction publique », édition 2015, p. 259.

* 296 Depuis les lois n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique pour la fonction publique d'Etat, n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale pour la fonction publique territoriale et n° 2007-148 du 2 février 2007 précitée pour la fonction publique hospitalière.

* 297 Source : Direction générale de l'administration et de la fonction publique, op. cit., p. 276.

* 298 Ibid., p. 259.

* 299 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, art. 167 ; JO 30 décembre 2015.

* 300 Source : Rapport général n° 164 (2015-2016) d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, sur le projet de loi de finances pour 2016, tome III, annexe n° 26 « Relations avec les collectivités territoriales » (Charles Guéné et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux), 19 novembre 2015.

* 301 Article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

* 302 Loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers ; JO 11 décembre 1952.

* 303 Arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires, NOR: ECOA9710005A ; JO 2 août 1997.

* 304 Arrêté du 20 mars 1972 relatif au statut du personnel administratif des chambres d'agriculture ; JO 9 avril 1972.

* 305 Avis relatif au statut adopté par la commission paritaire nationale 52 réunies le 13 novembre 2008, NOR : ECEA0830346V ; JO 6 janvier 2009.

* 306 Devenu la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 précitée, art. 26.

* 307 CGAAER, « Rapport relatif à l'articulation entre le code du travail et le statut du personnel des chambres d'agriculture (art 26 de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi) », janvier 2014.

* 308 Ibid., p. 19.

* 309 « Not in education, employment or training », ni scolarisés ni en emploi ni en formation.

* 310 Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

* 311 Cour des Comptes, Les dispositifs et les crédits mobilisés en faveur des jeunes sortis sans qualification du système scolaire , Communication à la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, décembre 2015.

* 312 Décret n° 2013-880 du 1 er octobre 2013 relatif à l'expérimentation de la « garantie jeunes ».

* 313 Soit, au 1 er avril 2016, 524,68 euros pour une personne seule .

* 314 Décret n° 2015-1890 du 30 décembre 2015 modifiant le décret n° 2013-880 du 1 er octobre 2013 relatif à l'expérimentation de la « garantie jeunes ».

* 315 La communauté urbaine de Marseille Provence Métropole, La Réunion, la communauté d'agglomération Est Ensemble, le Vaucluse, le Lot-et-Garonne, l'Allier et quatre communes du Puy-de-Dôme (Cournon-d'Auvergne, Clermont-Ferrand, Thiers et Ambert), le Finistère, l'Eure, l'Aude, les Vosges.

* 316 La garantie jeunes a été étendue à 62 nouveaux départements en 2015 et à 19 autres en 2016. Restent ainsi exclus de cette expérimentation les Hautes-Alpes, les Alpes-de-Haute-Provence, l'Aube, l'Eure-et-Loir, le Jura, le Loir-et-Cher, la Marne, la Moselle, les Pyrénées-Atlantiques et Mayotte ainsi que les collectivités d'Outre-mer.

* 317 La délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a indiqué à vos rapporteurs que le montant retenu dans les hypothèses de financement était de 3 680 euros par jeune, ce qui correspond à huit mois d'allocation à taux plein.

* 318 En application de l'article L. 6222-36-1 du code du travail.

* 319 Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, art. 59 ; JO du 22 décembre 2015.

* 320 Loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, article 138.

* 321 Décret n° 2011-128 du 31 janvier 2011 relatif à l'expérimentation d'un revenu contractualisé d'autonomie.

* 322 A. Le Houérou, « Dynamiser l'emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire - Aménager les postes et accompagner les personnes », rapport au Premier ministre, septembre 2014.

* 323 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

* 324 Loi n° 2011-901 du 28 juillet 2011 tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap.

* 325 Rapport d'information n° 635 (2011-2012) de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois relatif à la loi handicap, présenté par Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, juillet 2012.

* 326 Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, article 26. JO du 13 mai 2009.

* 327 Jean-Christophe Sciberras, Pour une clarification du bulletin de paie , rapport remis au Gouvernement le 27 juillet 2015. Le rapport cite notamment l'enquête menée au sein du groupe de chimie Solvay, au sein duquel le taux de dématérialisation des bulletins de paie atteint 15 % dans sa filiale française, contre 95 % en Allemagne, 73 % en Grande-Bretagne ou encore 57 % en Italie.

* 328 Fiche praTIC n°7 à destination des dirigeants d'entreprise, Le bulletin de paie dématérialisé et l'information du salarié , Ministère de l'économie et de l'industrie, 2011.

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