TITRE IV - FAVORISER L'EMPLOI
CHAPITRE IER - AMÉLIORER L'ACCÈS AU DROIT DES TPE ET DES PME ET FAVORISER L'EMBAUCHE

Article 28 (art. L. 5143-1 [nouveau] du code du travail) - Amélioration de l'information fournie par l'administration aux entreprises employant moins de 300 salariés

Objet : Cet article instaure un service public de l'accès au droit afin de renforcer l'information en matière de droit du travail délivrée aux entreprises employant moins de 300 salariés.

I - Le dispositif proposé

Les dispositions relatives aux aides à la création d'entreprise , regroupant actuellement les articles L. 5141-1 à L. 5142-3 du code du travail, concernent des dispositifs aussi variés que les exonérations de cotisations sociales en cas de création ou de reprise d'entreprise, le financement d'actions de conseil, de formation et d'accompagnement, ou encore le contrat d'appui au projet d'entreprise.

L'article 28 propose de compléter ce volet avec la création d'un dispositif d'information par l'administration en matière de droit du travail dédié aux entreprises employant moins de trois cents salariés, à travers la création de l' article L. 5143-1 .

De fait, tout employeur d'une entreprise de cette taille aura le droit d'obtenir une information précise et délivrée dans un délai raisonnable lorsqu'il sollicite l'administration sur une question relative à l'application d'une disposition du droit du travail ou des accords et conventions collectives qui lui sont applicables.

A cette fin, des services d'information dédiés seront mis en place par l'autorité administrative compétente, qui peut y associer des représentants des collectivités territoriales , des organisations syndicales et professionnelles , ou tout autre acteur qu'elle estime compétent.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Suite à l'adoption de deux amendements identiques, l'un proposé par le rapporteur, l'autre par le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, le droit à l'information pourra également porter sur les démarches et procédures légales à suivre face à une situation de fait . En outre, si cette demande est suffisamment précise et complète, le document formalisant la prise de position de l'administration pourra ensuite être produit par l'entreprise en cas de contentieux pour attester de sa bonne foi .

La commission a en outre adopté un amendement du rapporteur prévoyant la mise en place d'un service public de l'accès au droit associant l'administration, des représentants des organisations syndicales et professionnelles, les chambres consulaires, les commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) représentant les salariés et les employeurs des TPE 334 ( * ) , les conseils départementaux de l'accès au droit, ainsi que toute autre personne compétente.

Dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, seul un amendement de notre collègue député Christophe Cavard a été retenu, afin de préciser que le service public de l'accès au droit devait être territorialisé.

III - La position de votre commission

Vos rapporteurs saluent la prise de conscience du Gouvernement des difficultés que rencontrent quotidiennement les petites et moyennes entreprises pour appliquer la réglementation, notamment en matière de droit du travail, mais constatent que le dispositif prévu initialement s'avérait bien en deçà des attentes des employeurs.

Ils tiennent également à rappeler que des services de renseignements sont déjà en place dans les Direccte pour répondre aux interrogations des salariés comme des employeurs. En effet, en vertu de la convention internationale n° 81 de l'Organisation internationale du travail, l'inspection du travail doit « fournir des informations et des conseils techniques aux employeurs et aux salariés sur les moyens les plus efficaces d'observer les dispositions légales » 335 ( * ) . Dans les faits, sur les 877 294 demandes de renseignements traitées par les services des Direccte en 2015, moins de 10 % émanaient d'employeurs, la plupart à la tête d'entreprise employant moins de cinquante salariés (83 %) 336 ( * ) .

Surtout, vos rapporteurs regrettent que cet article, de l'aveu même du rapporteur et malgré les avancées observées en commission à l'Assemblée nationale, n'instaure pas de véritable rescrit social , qui rendrait opposable la réponse de ce service public aux autres administrations, voire devant le juge 337 ( * ) . En effet, le rescrit fiscal, ouvert à tous les redevables, est une réponse de l'administration sur l'interprétation d'un texte fiscal, ou sur l'interprétation d'une situation de fait au regard du droit fiscal. Instauré par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, il prévoit que l'administration ne peut pas effectuer de redressement fiscal si le redevable oppose de bonne foi à l'administration une interprétation des textes, des instructions ou des circulaires qui lui sont favorables et étaient en vigueur à la date du différend.

Votre commission a adopté un amendement (COM-340) d'Annick Billon et plusieurs membres de la délégation sénatoriale aux entreprises, qui vise à créer un rescrit social pour les entreprises employant moins de trois cents salariés. S'appuyant sur un rapport du Conseil d'Etat de 2014 « Le rescrit : sécuriser les initiatives et les projets », cet amendement apporte plusieurs améliorations par rapport à la version actuelle de l'article 28 :

- l'employeur pourra interroger l'administration sur une situation de fait actuel, mais aussi sur un projet ;

- la réponse de la Dirrecte sera opposable à l'administration par l'employeur ;

- l'employeur sera prémuni de toute sanction en cas de changement d'interprétation de l'administration.

- un décret en Conseil d'Etat fixera notamment les modalités de dépôt de la demande, les délais de réponse, les circuits de transmission des questions entre administrations ;

- le service public territorial de l'accès au droit, dont les contours son flous, est supprimé.

La commission a également adopté un sous-amendement de vos rapporteurs ( COM-389 ), précisant que l'administration devra rendre sa réponse dans un délai maximal de deux mois si la sollicitation émane d'une entreprise employant moins de cinquante salariés. Pour mémoire, les 3 millions de TPE, ou micro-entreprises, représentent 95 % des entreprises en France et regroupent environ 20 % des salariés français, soit environ 2,9 millions de personnes 338 ( * ) .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 28 bis AA (nouveau) (art. L. 8112-1 du code du travail) - Mission d'information et de conseil des agents de l'inspection du travail

Objet : Cet article additionnel, issu d'un amendement de notre collègue Annick Billon et plusieurs membres du groupe Les Républicains adopté par la commission des affaires sociales, vise à conférer à l'inspection du travail un rôle d'information et de conseil.

L'article L. 8112-1 du code du travail est relatif aux missions des agents de l'inspection du travail. Ces derniers sont notamment chargés de veiller à l'application des dispositions du code du travail et de constater les infractions à ces dispositions.

Le présent article, inséré par la commission des affaires sociales à l'initiative de notre collègue Annick Billon et plusieurs membres du groupe Les Républicains (amendement COM-341 ) complète l'article L. 8112-1 afin de préciser que les agents de l'inspection du travail ont également pour rôle de fournir « des informations et des conseils techniques aux employeurs et aux salariés sur les moyens les plus efficaces d'observer » les dispositions et stipulation dont ils sont chargés de contrôler l'application.

Cette mission est conforme au b) de l'article 3 de la convention n° 81 de l'Organisation internationale du travail (OIT).

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 28 bis A (art. 34 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016) - Possibilité pour l'employeur d'assurer par décision unilatérale la couverture complémentaire de certains salariés par le versement santé

Objet : Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, tend à pérenniser le dispositif transitoire permettant à l'employeur d'assurer la couverture complémentaire des salariés en contrats courts par le versement d'une somme destinée à couvrir une partie de leurs cotisations à un contrat individuel.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Cet article propose une nouvelle modification de certaines des dispositions issues de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 transposées par la loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 et déjà modifiées par la loi de financement de la sécurité sociale du 21 décembre 2015.

A. Un dispositif marqué par une forte instabilité

La loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 a transposé dans son article 1 er les deux premiers articles de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013.

Cet article rend obligatoire, à compter du 1 er janvier 2016, la couverture des salariés en matière de remboursement de frais de santé, financée au moins pour moitié par l'employeur et couvrant un panier de soins fixé par décret 339 ( * ) .

Cette réforme est destinée à renforcer la protection des 400 000 salariés qui ne bénéficient pas d'une couverture complémentaire, dans un contexte où « l'accès aux soins est dépendant de la possession d'un contrat de couverture complémentaire et de sa qualité » 340 ( * ) .

Les salariés en contrats précaires sont particulièrement représentés parmi ceux ne disposant pas d'une couverture complémentaire. En 2012, d'après l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), 17 % des salariés ayant un CDD de moins de six mois, 10,8 % de ceux en intérim, 14,8 % des saisonniers et intermittents ainsi que 7,1 % des salariés en temps partiel subi ne bénéficiaient pas de complémentaire santé, contre 2,4 % des salariés en CDI.

Les salariés en contrats courts sont donc particulièrement concernés par l'extension de la couverture complémentaire d'entreprise.

Cependant, l'obligation prévue par l'article L. 911-7 du code de la sécurité sociale de mettre en place pour ces salariés une couverture collective à adhésion obligatoire a entrainé une réticence marquée des entreprises présentes dans les secteurs ayant un fort recours aux contrats courts. Elles n'ont donc pas engagé de négociation pour mettre en place la couverture complémentaire obligatoire.

Cette situation a conduit la ministre des affaires sociales à confier en octobre 2014 une mission à M. Dominique Libault afin qu'il puisse formuler des « propositions concrètes d'évolution à même d'offrir un cadre stabilisé et solidaire pour la couverture complémentaire collective et obligatoire ».

Ce rapport, remis en septembre 2015, dresse le constat que « les problèmes les plus significatifs en termes de couverture collective concernent les salariés qui sont à temps partiels et qui relèvent le plus souvent d'une pluralité d'employeurs ». En conséquence, le rapport préconisait de : « mettre en place une solution dérogatoire, qui n'interviendrait qu'à titre subsidiaire (lorsque les solutions de branche ne peuvent s'appliquer), consistant à confier à un fonds interprofessionnel, éventuellement le fonds CMU, la prise en charge de la part employeur des salariés qui cumulent les contrats courts dans des entreprises relevant de branches professionnelles ou de secteurs distincts. Le fonds pourrait soit remettre un chèque santé aux salariés concernés, soit, après appel d'offre, proposer une offre mutualisée, dans des conditions proches de celles mobilisées pour l'ACS. »

Dans le cadre du PLFSS pour 2016, le Gouvernement a proposé la mise en place d'une disposition dérogatoire permettant d'adapter la généralisation de la couverture de la complémentaire en matière de frais de santé pour les contrats courts et les temps très partiels .

Ce dispositif, devenu l'article 34 de la loi de financement (partiellement codifié au sein de l' article L. 911-7-1 du code de la sécurité sociale ) concerne les salariés en contrat à durée déterminée ou en contrat de mission de moins de trois mois ou ceux dont la durée de travail est inférieure à 15 heures par semaine 341 ( * ) . Ces seuils correspondent à ceux fixés par l'ANI du 11 janvier 2013 pour la majoration du taux de cotisation patronale à l'assurance chômage. Le Gouvernement n'a néanmoins pas été en mesure d'indiquer à vos rapporteurs combien de salariés sont concernés par ce dispositif.

A rebours des préconisations du rapport Libault, l'article L.911-7-1 fait sortir les salariés précaires de la couverture collective.

Il prévoit que l'obligation de couverture de ces salariés peut être assurée par la mise en place d'un « versement santé » financé uniquement par l'entreprise et correspondant à la contribution que l'employeur aurait versée pour la couverture collective de la catégorie à laquelle appartient le salarié concerné. Ce versement permet de participer à la prise en charge de la couverture santé que les salariés auront souscrite à titre individuel.

Cette modalité de couverture est soumise à la signature d'un accord de branche ou à la signature d'un accord d'entreprise si l'accord de branche le permet ou n'existe pas .

Lors de la discussion du PLFSS a l'Assemblée nationale, la rapporteure de la commission des affaires sociales , Michèle Delaunay, a déposé un amendement tendant à compléter les dispositions relatives à l'entrée en vigueur du dispositif, et donc non codifiées, contenue dans le V de l'article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Le dispositif inséré du fait de l'adoption de l'amendement tend : « à permettre aux entreprises, à titre dérogatoire et pendant une année au plus, de prévoir, par décision unilatérale de l'employeur et lorsque cela n'est pas contraire aux éventuels accords de branche ou d'entreprise, que la couverture complémentaire santé sera mise en oeuvre, pour les salariés visés au III de l'article L. 911-7-1, par le versement d'une contribution aux salariés, lorsqu'ils ne sont pas déjà couverts à titre collectif et obligatoire ». Il se justifie par la nécessité « de prendre en compte les délais de négociation collective ».

Il ressort en outre de l'exposé des motifs de l'amendement que la décision unilatérale de l'employeur aurait vocation à s'exercer dans les mêmes conditions que l'accord d'entreprise, c'est-à-dire en l'absence d'accord de branche ou si celui-ci le permet. Le dispositif mis en place à cependant en lui-même une portée beaucoup plus large puisqu'il ne fait pas explicitement référence aux conditions relatives à l'accord de branche qui figurent au III de l'article L.911-7-1.

Le Gouvernement ne dispose pas d'éléments sur la manière dont ce dispositif a été utilisé depuis janvier 2016.

B. Le dispositif proposé

L'article 28 bis A, issu d'un amendement du Gouvernement retenu dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, tend à pérenniser la possibilité pour l'employeur de décider de façon unilatérale que les salariés en contrats courts relèveront d'un versement santé plutôt que d'une couverture collective .

A cette fin, il supprime le terme du 31 décembre 2016 fixé par le B du V de l'article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Il résulte du deuxième alinéa du B. du V. de l'article 34 qu'il n'est pas possible de dénoncer un accord mettant en place une couverture collective pour passer à un régime de versement santé sur la base d'une décision unilatérale de l'employeur.

II - La position de votre commission

Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, votre commission s'était interrogée sur le choix du Gouvernement d'y faire figurer la mise en place d'un mécanisme de dérogation à la loi de sécurisation de l'emploi. Ce choix semblait en effet plus lié à l'urgence de prendre une mesure d'adaptation de la complémentaire d'entreprise avant l'échéance du 1 er janvier 2016, qui devait théoriquement voir sa généralisation, qu'à son impact sur les finances sociales. Celui-ci n'est établi en effet qu'à travers l'exonération dont bénéficient les entreprises qui ont mis en place un contrat collectif et la mesure elle-même ne devait entraîner aucune conséquence financière selon l'étude d'impact. Cette étude avait par ailleurs souligné que l'articulation entre le dispositif du versement santé et celui de l'accord de branche n'était pas clairement établie. En conséquence, votre commission était revenue sur le choix du Gouvernement.

Un nouveau véhicule législatif, cette fois dans le domaine du travail, entraîne une nouvelle modification en urgence du dispositif destiné à mettre en oeuvre la couverture complémentaire obligatoire des salariés.

Elle illustre l'état d'impréparation de cette réforme qui entraine des ajustements incessants et dont les effets en matière de couverture complémentaire de la population restent à démontrer.

L'évolution proposée par cet article n'est pas mineure . Alors que tout le dispositif de la mise en place de la couverture complémentaire obligatoire repose sur la négociation, au moins au niveau de l'entreprise, il est proposé d'y mettre un terme pour les salariés les plus fragiles et les moins bien couverts.

La décision unilatérale de l'employeur peut cependant apparaître comme un moindre mal pour les entreprises concernées et permettra aux salariés en contrats courts de financer leur couverture complémentaire.

Si cette solution doit être retenue, elle suppose néanmoins d'être insérée dans le code de la sécurité sociale afin que sa portée exacte soit précisée et qu'elle soit mise en cohérence avec les dispositions préexistantes.

Il paraît d'autant plus important de lever l'ambiguïté qui persiste et de prévoir explicitement si le dispositif proposé par l'article 28 bis A s'inscrit bien dans le cadre fixé par l'accord de branche.

La pérennisation de la possibilité d'une décision unilatérale de l'employeur pose également la question de la cohérence du dispositif mis en place par l'article L. 911-7-1 et de la pertinence des dispositions relatives à l'accord d'entreprise . En effet, l'accord d'entreprise destiné à mettre en place le versement santé n'est possible qu'en cas d'absence d'accord de branche ou si l'accord prévoit cette possibilité. A-t-il vocation à perdurer dès lors qu'une décision unilatérale de l'employeur suffit ?

Vos rapporteurs considèrent que l'article 28 bis A apporte une réponse pragmatique au problème de la mise en place du versement santé pour les salariés en contrats courts. Ils sont donc favorables à la pérennisation de la possibilité d'une décision unilatérale de l'employeur en ce domaine, dans le cas où cette possibilité est ouverte par un accord de branche ou en l'absence d'accord de branche . Dès lors que la décision unilatérale de l'employeur est possible, il semble inutile, par souci d'efficacité, de maintenir les dispositions imposant le recours à un accord d'entreprise .

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de vos rapporteurs ( COM-386 ) tendant à codifier cette disposition au sein de l'article L. 911-7-1 du code de la sécurité sociale et à remplacer le dispositif relatif à l'accord d'entreprise par la possibilité d'une décision unilatérale de l'employeur, tout en préservant les conditions relatives à l'accord de branche .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 28 bis (art. L. 131-4-4 du code de la sécurité sociale) - Plafonnement des exonérations de cotisations et de contributions sociales pour les avantages et cadeaux accordés aux salariés

Objet : Cet article, issu d'un amendement adopté en commission à l'Assemblée nationale sur proposition d'Alain Fauré et plusieurs de ses collègues du groupe socialiste, républicain et citoyen, sous-amendé par le rapporteur, puis supprimé dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, exonérait de cotisations et de contributions sociales les avantages et cadeaux accordés aux salariés par l'employeur, dans la limite annuelle de 10 % du plafond mensuel de la sécurité sociale pour chaque bénéficiaire, et de 20 % de ce plafond s'il s'agissait de réductions de tarifs ou de bonifications pour l'achat de biens culturels.

I - Le dispositif proposé par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale

Les avantages et cadeaux attribués par l'employeur constituent des accessoires de rémunération versés « en contrepartie ou à l'occasion du travail » et sont soumis à ce titre aux cotisations et contributions sociales .

Toutefois, sur le fondement d'instructions ministérielles et de circulaires de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), les bons d'achat bénéficient, lorsque certaines conditions sont remplies et selon qu'il s'agit ou non de prestations culturelles, d'une exemption d'assiette .

Qu'ils soient dispensés par l'employeur ou par un comité d'entreprise, les bons d'achat bénéficient d'une présomption de non-assujettissement à cotisations jusqu'à 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale par année civile et par salarié . Lorsque ce montant est dépassé, le seuil de 5 % est apprécié pour chaque événement et trois conditions cumulatives doivent être réunies : le bon d'achat doit être attribué à l'occasion d'un événement particulier (la naissance ou l'adoption d'un enfant, le mariage, le pacs ou le départ à la retraite du salarié, la fête des mères, des pères, la Sainte-Catherine, la Saint-Nicolas, Noël pour les salariés et les enfants jusqu'à 16 ans révolus dans l'année civile, la rentrée scolaire pour les salariés ayant des enfants âgés de moins de 26 ans dans l'année) ; il doit être en rapport avec cet événement (ex : achat de fournitures scolaires pour les bons distribués à l'occasion de la rentrée) ; il doit être conforme aux usages (par exemple, le seuil pour la rentrée scolaire s'apprécie par enfant).

Le régime diffère pour les « chèques-culture » qui sont exonérés de cotisations et contributions de sécurité sociale lorsqu'ils ont pour objet exclusif de faciliter l'accès de leurs bénéficiaires à des activités ou prestations de nature culturelle. Ils ne sont plus dès lors considérés comme des bons d'achat mais comme l'une des modalités d'exercice de la mission des comités d'entreprise de prise en charge des activités culturelles. Le montant distribué n'est donc pas plafonné . Pour des raisons d'équité, le même régime est applicable aux chèques-culture attribués par un employeur en l'absence de comité d'entreprise.

Issu d'un amendement présenté par Alain Fauré et plusieurs de ses collègues du groupe socialiste, républicain et citoyen, sous-amendé par le rapporteur et adopté en commission des affaires sociales, le présent article visait à donner rang législatif à ces tolérances des Urssaf tout en les aménageant. Il prévoyait en effet une exemption d'assiette des cotisations et contributions sociales pour les avantages et cadeaux accordés aux salariés par l'employeur au cours d'une année civile à hauteur de :

- 10 % du plafond mensuel de la sécurité sociale ;

- 20 % du plafond mensuel de la sécurité sociale « pour les avantages et cadeaux correspondant à des réductions de tarifs et bonifications pour l'achat de biens culturels ».

Cet article additionnel a été supprimé du texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, par un amendement de ce dernier, celui-ci proposant de réaliser, au préalable, un « bilan concerté, mené par les administrations compétentes en associant les parlementaires, les partenaires sociaux et les émetteurs de titres-cadeaux notamment » et d'en tirer les conséquences, le cas échéant, au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

II - La position de votre commission

Vos rapporteurs constatent tout d'abord que la rédaction de l'article pouvait conduire, in fine , à un régime moins favorable que le régime applicable sous l'empire des circulaires de l'Acoss. Le seuil de 5 % pour les bons d'achat s'apprécie actuellement par événement et prend en compte le nombre d'enfants, ce qui n'est pas le cas du seuil de 10 % applicable par an et par salarié. Surtout, les chèques-culture, qui peuvent actuellement être distribués sans limitation de leur montant, se verraient désormais appliquer un plafond de 20 %.

Le régime applicable aux chèques-culture pose la question des conséquences de cet article pour les prestations servies par les comités d'entreprise. Dans l'hypothèse où cet article leur serait applicable, ce qui semble être le cas en l'absence de mention spécifique de l'employeur, il aurait pour effet de bouleverser assez fortement leur fonctionnement . Il introduit en effet un plafond pour la notion assez extensive de « biens culturels » qui peut comprendre, par exemple les subventions pour l'achat de places de spectacles. En outre, dans la rédaction retenue par l'article, ce plafond est global, ce qui signifie que le comité d'entreprise, comme l'employeur devraient être en mesure d'en assurer le respect, en incluant les prestations servies par chacun à un même salarié, ce qui semble matériellement impraticable.

Si l'intention poursuivie par cet article n'est pas d'englober les comités d'entreprise, il introduirait une rupture d'égalité entre les entreprises selon qu'elles sont dotées ou non d'une telle structure : dans l'entreprise avec comité d'entreprise, les réductions de tarifs et bonifications pour l'achat de biens culturels seraient accordées sans plafonds et cumulables avec celles, plafonnées, accordées par l'employeur ; dans l'entreprise dépourvue de comité d'entreprise, les réductions seraient accordées uniquement par l'employeur et plafonnées.

Enfin, si vos rapporteurs pouvaient comprendre l'objectif, poursuivi par cet article, de sécurisation des pratiques des entreprises au regard des contrôles Urssaf , les exemptions d'assiette prévues pour les distributions de bons d'achat, qu'elle poursuivent un objectif général de soutien au pouvoir d'achat ou de promotion des pratiques culturelles ne font actuellement pas l'objet d'une compensation par l'État à la sécurité sociale. Le gage prévu à cet article ne constituait pas une compensation. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale ayant, en application des dispositions de la LOLFSS 342 ( * ) , le monopole des exonérations non-compensées, cet article a effectivement davantage sa place au sein du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Votre commission approuve la suppression de cet article.

Article 29 (art. L. 2232-10-1 du code du travail) - Généralisation de la possibilité pour un accord de branche étendu de contenir des accords types à l'attention des petites entreprises

Objet : Cet article prévoit que les accords de branche étendus, quel que soit le thème traité, pourront comprendre des stipulations spécifiques pour les entreprises employant moins de cinquante salariés, qui peuvent prendre la forme d'accords types, directement applicables selon les options retenues par les employeurs.

I - Le dispositif proposé

L'article 29 introduit dans le code du travail un nouvel article L. 2232-10-1 , afin de permettre à un accord de branche étendu de contenir des stipulations spécifiques pour les entreprises de moins de cinquante salariés, le cas échéant sous forme d'un accord type indiquant les différents choix laissés à l'employeur.

Ces stipulations spécifiques pourront couvrir l'ensemble des négociations prévues par les dispositions du présent code.

L'employeur pourra appliquer cet accord type à travers un document unilatéral indiquant les stipulations qu'il a retenues.

Pour mémoire, des accords types de branche à l'attention des PME existent déjà en matière d'épargne salariale.

Les accords type de branche
en matière de participation et d'intéressement

La participation

Suite à l'adoption à l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par nos collègues députés Jean-Christophe Fromantin, Francis Vercamer et Michel Zumkeller, l' article 154 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 343 ( * ) a actualisé les dispositions de l'article L. 3322-9 du code du travail en obligeant les branches professionnelles à négocier un accord de participation avant le 30 décembre 2017 , cet accord pouvant être appliqué directement au sein des entreprises. À défaut d'initiative de la partie patronale avant le 31 décembre 2016, une organisation représentative de salariés sera fondée à demander dans les quinze jours l'ouverture d'une négociation. Les entreprises employant moins de cinquante salariés qui ne sont pas assujetties à l'obligation de mettre en place un régime de participation pourront opter pour l'application directe d'un accord de branche par décision unilatérale de l'employeur .

Les auteurs de l'amendement à l'origine de cet article soulignaient que parmi les quelque 33 000 accords relatifs à la participation signés en 2012, seulement 17 accords ou avenants l'avaient été au niveau des branches professionnelles. La commission spéciale du Sénat avait approuvé l'initiative des députés, tout en soulignant que cet article ne prévoyait aucune sanction des branches professionnelles en cas de non-respect de l'obligation de négocier dans les délais impartis par la loi.

L'intéressement

Issu d'un amendement adopté par le Sénat à l'initiative de notre collègue Catherine Deroche, co-rapporteure, l' article 155 de la loi du 6 août 2015 a prévu des dispositions similaires pour le régime d'intéressement à destination des entreprises employant moins de cinquante salariés.

En effet, l'article L. 3312-9 du code du travail prévoit qu'un régime d'intéressement , adapté aux spécificités des entreprises employant moins de cinquante salariés, devra être négocié dans chaque branche au plus tard le 30 décembre 2017. Les entreprises de la branche, quelle que soit leur taille, peuvent opter pour l'application de l'accord ainsi négocié. A défaut d'initiative de la partie patronale au plus tard le 31 décembre 2016, la négociation devra s'engager dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation de salariés représentative.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre des amendements rédactionnels ou de précision juridique, un amendement du rapporteur a été adopté en commission afin d'obliger l' employeur , lorsqu'il applique unilatéralement tout ou partie de l'accord type, à informer également la commission paritaire régionale de branche ou, à défaut, la commission paritaire régionale interprofessionnelle .

Dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, celui-ci a retenu un de ses amendements supprimant les apports de la commission , en précisant que l'employeur devra seulement informer les salariés par tous moyens de ses choix lorsqu'il applique unilatéralement un accord type de branche.

III - La position de votre commission

Vos rapporteurs soutiennent résolument la diffusion des accords types de branche à l'attention des entreprises employant moins de cinquante salariés, qui sont souvent le parent pauvre de la législation en matière du droit du travail, malgré les engagement des gouvernements successifs.

Sur leur proposition, un amendement (COM-115) a été adopté afin d'obliger les partenaires sociaux à prévoir des stipulations spécifiques pour les entreprises employant moins de cinquante salariés dès lors qu'un accord de branche est signé, même s'il n'est pas étendu.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 29 bis A (supprimé) (art. L. 23-121-1 à L. 23-123-5 [nouveaux], L. 2122-14 [nouveau], L. 2143-24 et L. 2143-25 [nouveaux], L. 2232-40 à L. 2232-42 [nouveaux], L. 2411-1,L. 2411-26 [nouveau], L. 2412-1, L. 2412-17 [nouveau], L. 2421-2, L. 2422-1 et L. 243-11-1 [nouveau] du code du travail) - Dialogue social dans les réseaux de franchise

Objet : Cet article, issu d'un amendement de notre collègue député
Denys Robiliard retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, vise à mettre en place une instance de dialogue social unique au sein des réseaux de franchise, commune aux franchisés et aux franchiseurs.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article 29 bis A définit les conditions d'exercice d'une nouvelle forme de dialogue social au sein des réseaux de franchise , par le biais d'une instance centrale de dialogue placée auprès du franchiseur et représentant les salariés des franchisés, sur le modèle externe aux entreprises des commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) créée par la loi du 17 août 2015 344 ( * ) pour les salariés des TPE.

A. La création de l'instance de dialogue du réseau de franchise

Cet article complète donc, par un titre XII nouveau, le livre III de la deuxième partie du code du travail consacré aux institutions représentatives du personnel (IRP) afin de déterminer les règles d'établissement, de fonctionnement et les attributions de ces instances de dialogue du réseau de franchise (IDRF). Le premier chapitre de ce titre, consacré à la mise en place et à la composition des IDRF, est organisé selon l'architecture ternaire introduite aux articles 2 et 3 du projet de loi et qui distingue dispositions d'ordre public , champ de la négociation collective et cadre supplétif applicable à défaut d'accord.

Ainsi, après avoir déclaré que ces nouvelles dispositions s'appliquent aux réseaux de franchise , sans avoir apporté de définition de ces derniers pour autant (art. L. 23-121-1 nouveau), le présent article impose au franchiseur , au titre des dispositions d'ordre public, de mettre en place une instance de dialogue dès lors que son réseau de franchisé compte au moins 50 salariés et qu'il a été reconnu comme tel par un jugement du tribunal d'instance ou par le protocole d'accord préélectoral négocié entre le franchiseur, les franchisés et les organisations syndicales invités à le négocier (art. L. 23-121-2 nouveau ; cf. infra ).

Le processus de négociation du protocole préélectoral doit être engagé par le franchiseur au plus tard 15 jours après la demande en ce sens émanant d'un franchisé, d'une organisation syndicale de salariés représentative au niveau de la branche ou d'une organisation syndicale ayant constitué une section syndicale au sein d'une des entreprises du réseau. A défaut d'ouverture de la négociation dans ce délai ou de sa conclusion dans les trois mois , il appartient à l'un de ces organisations syndicales ou à une entreprise de saisir le tribunal d'instance du siège du franchiseur pour que celui-ci statue sur la reconnaissance et le périmètre du réseau et fixe les modalités d'organisation des élections des représentants des salariés au sein de l'instance (art. L. 23-121-3 nouveau).

La composition de l'instance est présentée à l'article L. 23-121-4 nouveau : cette dernière comporte des représentants élus des salariés et un représentant des franchisés ainsi qu'un de ses collaborateurs 345 ( * ) , sous la présidence d'un représentant du franchiseur , qui peut également être assisté d'un collaborateur avec voix consultative. Dans les réseaux rassemblant moins de 1 000 salariés, au moins un représentant élu des salariés du franchiseur siège dans l'instance. Ce plancher est porté à deux dans les réseaux de plus grande taille.

Les conditions de négociation du protocole préélectoral sont celles applicables au comité d'entreprise , « adaptées au niveau de l'ensemble des entreprises du réseau de franchise ». Doivent ainsi être informées de l'organisation d'élections et conviées à négocier ce protocole toutes les organisations syndicales qui satisfont à trois des critères 346 ( * ) auxquels la représentativité est conditionnée 347 ( * ) et dont le champ professionnel et géographique couvre le réseau de franchise. Il en va de même pour les syndicats affiliés à une organisation représentative au niveau national et interprofessionnel (art. L. 23-121-5 nouveau). Toutefois, pour l'élection des représentants du personnel au comité d'entreprise, les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ainsi que celles y ayant constitué une section syndicale participent à cette négociation. La transposition de cette règle à un réseau d'entreprises semble difficile , sauf à retenir uniquement les organisations représentatives chez le franchiseur.

Les conditions de validité du protocole préélectoral sont plus strictes que celles en vigueur pour le comité d'entreprise. Pour ce dernier, il doit être signé par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont des organisations représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles. Pour l'instance de dialogue en revanche, il doit toujours recueillir, du côté salarié, la signature de la majorité des organisations syndicales l'ayant négocié , mais également celle d' organisations ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés au niveau de la branche. Une double condition de validité est ajoutée pour la partie patronale : le protocole doit être signé par le franchiseur et par des franchisés représentant au moins 50 % des effectifs ou des franchisés du réseau (art. L. 23-121-6 nouveau).

Par ailleurs, les modalités d'élection des représentants des salariés au sein de l'instance de concertation sont celles applicables au comité d'entreprise, qui sont appréciées au niveau de l'ensemble des entreprises du réseau.

Le champ de la négociation collective est circonscrit au protocole d'accord préélectoral (art. L. 23-121-7 nouveau). Il doit assurer la reconnaissance du réseau de franchise, identifier le franchiseur et les franchisés et fixer les modalités d'organisation des élections. Il peut également prévoir :

- la composition de l'instance , dans le respect d'un plancher de cinq représentants des salariés ;

- la durée du mandat des élus , qui peut varier entre deux et quatre ans ;

- le nombre de réunions annuelles de l'instance, qui doit être supérieur ou égal à quatre ;

- d'éventuelles missions supplémentaires pour celle-ci.

Enfin, les normes supplétives fixées par le présent article à défaut de protocole préélectoral concernent le nombre de représentants des salariés à l'instance de dialogue ainsi que la durée de leur mandat . Dans le premier cas, il est légèrement supérieur à celui des élus au comité d'entreprise (art. L. 23-121-8 nouveau), chaque titulaire disposant par ailleurs d'un suppléant. Dans le second cas, elle est identique : quatre ans (art. L. 23-121-9 nouveau).

Comparaison du nombre de représentants élus du personnel titulaires
à l'instance de dialogue du réseau de franchise et au comité d'entreprise

Nombre de salariés

Comité d'entreprise

Instance de dialogue

50 à 74

3

5

75 à 99

4

100 à 299

5

299 à 399

5

7

400 à 749

6

750 à 999

7

7

1 000 à 1 999

8

9

2 000 à 2 999

9

3 000 à 3 999

10

11

4 000 à 4 999

11

5 000 à 7 499

12

13

7 500 à 8 000

13

13

8 000 à 9 999

13

15

Plus de 10 000

15

17 348 ( * )

Source : Article 29 bis A du projet de loi et article R. 2324-1 du code du travail

Les règles de fonctionnement de l'IDRF s'inspirent de celles de plusieurs IRP existantes , en particulier concernant les moyens des élus qui y siègent. Ils bénéficient d'un crédit d'heures de délégation d'au moins de 20 heures par mois , équivalent à celui des membres du comité d'entreprise. Le temps de trajet pour se rendre aux réunions et la durée de celles-ci ne s'y imputent pas. Comme les membres du comité d'entreprise européen, ceux de l'IRDF disposent des « moyens matériels ou financiers nécessaires à l'accomplissement de leurs missions ». Le franchiseur doit prendre en charge l'ensemble des frais de l'instance : fonctionnement, organisation des réunions, séjour et déplacement de ses membres (art. L. 23-122-1 nouveau).

Le règlement intérieur de l'instance est établi lors de sa première réunion et fixe ses modalités de fonctionnement , concernant en particulier la convocation de ses membres, la fixation de son ordre du jour et la désignation d'un secrétaire (art. L. 23-122-3 nouveau). La périodicité de ses réunions est au moins trimestrielle , alors qu'elle est bimensuelle pour le comité d'entreprise dans les entreprises de moins de 300 salariés et mensuelle au-dessus de ce seuil. Toutefois, des réunions exceptionnelles peuvent être convoquées à la demande de la majorité des représentants des salariés (art. L. 23-122-3 nouveau).

De nombreuses attributions consultatives sont conférées à l'instance de dialogue. Elle reçoit une information trimestrielle sur des thématiques similaires à celles aujourd'hui prévues par le code du travail pour le comité de groupe (art. L. 2332-1) : « l'activité, la situation économique et financière, l'évolution et les prévisions d'emploi annuelles ou pluriannuelles et les actions éventuelles de prévention envisagées compte tenu de ces prévisions », à l'échelle de l'ensemble du réseau. Deux thèmes supplémentaires viennent compléter cette énumération : la politique sociale et les conditions de travail
(art. L. 23-123-1 nouveau).

Comme le comité d'entreprise, l'instance est également informée des décisions prises ayant une incidence sur l'activité du réseau de franchise , c'est-à-dire celles relatives à son organisation et à sa gestion, en particulier lorsqu'elles sont susceptibles d'affecter « le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail ou les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle ». De même, des informations lui sont transmises concernant les entrées et sorties du réseau.

L'instance reçoit par ailleurs, sur le modèle du comité d'entreprise (art. L. 2323-1), une compétence générale pour formuler des propositions visant à améliorer les conditions de travail, d'emploi et de formation des salariés ainsi qu'en matière de conditions de vie et de prévoyance (art. L. 23-123-2 nouveau).

La mise en place d'activités sociales et culturelles par l'instance de dialogue à destination de l'ensemble des salariés du réseau est facultative . Si ce choix est fait, elle reçoit une subvention de la part des entreprises franchisées (art. L. 23-123-3 nouveau).

Enfin, l'instance a un rôle à jouer en matière d'emploi dans le réseau puisque les emplois disponibles chez les franchisés lui sont communiqués et qu'elle en informe les salariés (art. L. 23-123-4 nouveau).

B. La création d'un périmètre de la négociation collective dans le réseau de franchise

L'article 29 bis A du projet de loi va plus loin que la simple mise en place d'une instance représentative du personnel des franchisés au sein d'un réseau de franchise. Il fait du réseau de franchise une entité économique uniforme , assimilable à un groupe et faisant donc porter sur lui plusieurs responsabilités économiques et sociales.

Ainsi, l'article L. 23-123-5 nouveau dispose que l'obligation de reclassement qui pèse, en cas de licenciement pour motif économique, sur toute entreprise a pour périmètre , lorsqu'elle s'applique au franchiseur ou à un franchisé, l'ensemble du réseau de franchise . En l'état actuel du droit, selon l'article L. 1233-4, un licenciement économique ne peut avoir lieu que si le salarié concerné n'a pu être reclassé dans les « emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie ».

Le paragraphe II du présent article met en place une mesure de la représentativité des organisations syndicales à l'échelle d'un réseau de franchise . Il crée un article L. 2122-14 nouveau qui reprend les critères qui permettent de déterminer la représentativité des organisations syndicales dans les entreprises en les adaptant aux spécificités de la franchise : pour en bénéficier, elles doivent répondre aux critères généraux de l'article L. 2121-1 (respect des valeurs républicaines ; indépendance ; transparence financière ; ancienneté de deux ans ; influence ; effectifs et cotisations) et avoir recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour de l'élection des représentants des salariés à l'instance de dialogue du réseau concerné, sans que le nombre de votants soit pris en compte.

Le paragraphe III institue quant à lui un nouveau type de délégué syndical : le délégué syndical au sein d'un réseau de franchise . En application de l'article L. 2143-24 nouveau, toute organisation syndicale représentative dans un réseau de franchise pourrait désigner un délégué syndical pour la représenter auprès de l'ensemble des employeurs du réseau. Un second délégué pourrait l'être dans les réseaux de plus de 1 000 salariés.

L'ensemble des dispositions relatives aux délégués syndicaux d'entreprise seraient applicables aux délégués syndicaux des réseaux de franchise, appréciées au niveau de l'ensemble du réseau. Ainsi, la liberté de déplacement reconnue aux délégués syndicaux pour l'exercice de leurs fonctions s'exercerait dans l'ensemble des entreprises du réseau (art. L. 2143-25 nouveau).

La dernière pierre de cet édifice est posée par le paragraphe IV , qui reconnaît l'existence d'un champ conventionnel du réseau de franchise . Il permet la signature de conventions ou d'accords du réseau de franchise par le franchiseur, des franchisés comptant au moins 10 % des salariés du réseau et des organisations syndicales représentatives dans celui-ci (art. L. 2232-41 nouveau). Il conditionne la validité de ces accords à leur signature par le franchiseur , par plus de la moitié des franchisés ou ceux d'entre eux employant au moins 50 % des salariés du réseau ainsi que par les organisations syndicales représentatives selon les critères de droit commun des accords d'entreprise soit, selon l'article 10 du présent projet de loi dans sa version considérée comme adoptée par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, par des organisations ayant recueilli au moins 30 % des suffrages au premier tour des élections à l'instance de dialogue ou, à compter du 1 er janvier 2017 pour les accords portant sur la durée du travail, les repos et les congés ou du 1 er septembre 2019 pour les autres accords, au moins 50 % des suffrages (art. L. 2232-41 nouveau).

De plus, l'articulation entre l'accord de réseau et les conventions de branche ou les accords professionnels applicables aux entreprises du réseau est identique à celle prévue aujourd'hui à l'article L. 2232-35 concernant les accords de groupe et les normes conventionnelles de branche. Seule une stipulation expresse de ces dernières peut autoriser des dérogations par l'accord de réseau (art. L. 2232-42 nouveau).

Enfin, les paragraphes V , VI , VII et VIII confèrent aux représentants élus du personnel au sein de l'instance de dialogue le statut de salarié protégé , conditionnant leur licenciement à l' autorisation de l'inspecteur du travail jusqu'à six mois après la fin de leur mandat et ouvrant droit à leur réintégration dans leur emploi en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement (paragraphe VII, art. L. 2422-1 nouveau), qu'ils soient en CDI (paragraphe V, art. L. 2411-26 nouveau) ou en CDD (paragraphe VI, art. L. 2412-17 nouveau). Le non-respect de cette procédure est passible d'une peine d'un an d'emprisonnement de 3 750 euros d'amende (paragraphe VIII, art. L. 243-11-1 nouveau).

II - La position de votre commission

Vos rapporteurs ne partagent pas le point de vue de leurs collègues députés auteurs de l'amendement dont est issu cet article 29 bis A et estiment qu'il est tout à fait inadapté à la situation particulière des réseaux de franchise, sur la forme comme sur le fond .

Les modalités d'adoption d'une telle réforme sont tout d'abord très contestables et ne sont pas respectueuses du dialogue social interprofessionnel . Adoptées sans débat à l'Assemblée nationale, les dispositions de cet article n'ont fait l'objet d' aucune concertation avec les partenaires sociaux , alors qu'elles entrent dans le champ de l'article L. 1 du code du travail et qu'elles marquent une rupture profonde avec l'état actuel du droit. Aucune étude de leur impact économique et social n'a été réalisée , et les principaux intéressés, les réseaux de franchise, n'ont pas été consultés. Ainsi, lors de leur audition par vos rapporteurs, les organisations professionnelles d'employeurs ont fait part de leur surprise d'avoir découvert que le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité à l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution tentait d'opérer subrepticement une profonde remise en cause de la notion même de la franchise .

C'est en effet mal connaître cette forme de relation commerciale que de chercher à l'assimiler à un groupe. Le présent article semble directement inspiré par une note de la fondation Terra Nova qui, en décembre 2014, appelait à « mettre fin à l'hypocrisie sociale » concernant les franchises 349 ( * ) . Celle-ci repose sur une erreur conceptuelle essentielle , qui en vient à nier la spécificité de la franchise. Chaque franchisé est un entrepreneur indépendant , lié par un contrat de distribution avec le franchiseur. Ce dernier s'engage notamment à transmettre un savoir-faire spécifique et à apporter une assistance technique pour développer l'activité, en échange de quoi le franchisé s'engage à respecter les normes imposées par le franchiseur et à le rémunérer .

Dès lors, il est illusoire de vouloir assimiler les réseaux de franchise à des groupes unifiés et les transformer en unités économiques et sociales (UES) par le biais d'un mécanisme de représentation nationale des salariés complexe, reposant sur un dialogue social tripartite - représentants des salariés, franchiseur, franchisés - dont les contours sont ambigus mais dont les modalités d'application sont très contraignantes pour les entreprises voire même impossibles à respecter.

Ainsi, comment imposer à un employeur de chercher à reclasser, en cas de licenciement économique, un de ses salariés chez un autre franchisé, avec lequel il n'entretient aucun lien juridique ou économique ? Et pourquoi permettre à un hypothétique délégué syndical de réseau de franchise d'accéder à une entreprise dont il n'est pas salarié ? De plus, alors que le taux de participation aux élections organisées en 2012 dans les TPE pour mesurer la représentativité auprès de leurs salariés des organisations syndicales ne s'est élevé qu'à 10,4 % , comment espérer une participation plus élevée dans des structures de taille comparable au sein d'un réseau ?

Parmi les 1 834 réseaux de franchise recensés en 2015 en France, regroupant 69 483 magasins et employant près de 343 000 salariés 350 ( * ) , les principaux secteurs d'activité représentés sont l'équipement de la personne (356), les services à la personne (194), la restauration rapide (186), l'alimentation (160) et le commerce (160). Le secteur alimentaire est toutefois celui qui compte le plus de points de vente en franchise (14 223), devant le commerce (8 200) et les services automobiles (7 651 pour 80 réseaux). Dès lors, il convient de reconnaître qu' il s'agit pour la plupart de TPE qui doivent être soumises au droit commun . Il existe également des franchisés dont les effectifs sont suffisamment importants pour être soumis aux obligations fixées par le code du travail en matière de représentation du personnel, dans le secteur de la grande distribution par exemple.

Lors de son audition par votre commission le mardi 17 mai 2016, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a reconnu que la rédaction de cet article n'était pas encore « totalement satisfaisante ». Pour vos rapporteurs, les difficultés suscitées par cet article ne se limitent pas à un problème rédactionnel mais reposent sur le fait qu'elles entrent en contradiction avec le principe même de la franchise. C'est pourquoi ils ont proposé sa suppression à votre commission, qui a adopté en ce sens les trois amendements COM-200 de ses rapporteurs, COM-364 de notre collègue Daniel Chasseing et COM-83 de notre collègue Chantal Deseyne.

Votre commission a supprimé cet article.

Article 29 bis (art. 39 octies F [nouveau] du code général des impôts) - Provision pour risque lié à un contentieux prud'homal dans les entreprises employant moins de dix salariés

Objet : Cet article, issu d'un amendement adopté en commission à l'Assemblée nationale sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, mais intégralement réécrit dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, autorise les entreprises employant moins de dix salariés à déduire de leurs résultats une provision pour risque lié à un contentieux prud'homal.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Cet article additionnel, issu d'un amendement adopté en commission à l'Assemblée nationale sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, modifie la première partie de l' article 39 du code général des impôts , qui définit les bénéfices nets industriels et commerciaux imposables dans le cadre de l' impôt sur le revenu .

Le 5° de l'article 39 définit les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice.

L'amendement adopté en commission vise à instituer un 5° bis pour permettre aux entreprises de moins de cinquante salariés de constituer des provisions pour faire face à d'éventuelles indemnités pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse , qui ne peuvent être inférieures à six mois de salaire en vertu du second alinéa de l'article L. 1235-3 du code du travail. Ces provisions ne peuvent toutefois excéder un mois de la masse salariale de l'entreprise.

Selon l'auteur de l'amendement, l'objectif est d'aider les entreprises de moins de cinquante salariés à constituer une réserve de précaution pour faire face à un contentieux prud'homal dont les conséquences financières peuvent être très pénalisantes.

Dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, un de ses amendements a été retenu afin de sécuriser juridiquement le dispositif proposé en réécrivant intégralement l'article 29 bis .

Désormais codifié à l'article 39 octies G du code général des impôts, le dispositif diffère de celui proposé par le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les points suivants :

- il ne concerne que les entreprises employant moins de dix salariés , et non plus cinquante ;

- il s'applique aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2017 , alors que le dispositif initial ne prévoyait aucune date explicite pour l'entrée en vigueur ;

- l'entreprise devra ouvrir un compte courant spécifique dans un établissement de crédit avant la date de dépôt de déclaration des résultats ;

- ce compte pourra être utilisé soit pour payer les indemnités aux salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse , soit pour faire face aux dépenses liées à une procédure de redressement judiciaire ;

- l'entreprise devra inscrire dans son bilan l'épargne professionnelle déposée sur ce compte ;

- si l'entreprise utilise cette épargne de précaution à d' autres fins , elle devra réintégrer la somme correspondante dans son résultat imposable et s'acquitter des pénalités de retard ;

- le nouveau dispositif ne vise que les provisions pour indemnités de licenciement dénué de cause réelle et sérieuses relatives à des contrats à durée indéterminée conclus postérieurement à la promulgation de la présente loi ;

- la déduction est dans ce cas doublement plafonnée, car elle ne peut dépasser ni le montant mensuel de rémunérations versées aux salariés bénéficiant des CDI précités, ni le montant du bénéfice de l'exercice ;

- le bénéfice de ces déductions est subordonné au respect des règles européennes en matière d'aide d'Etat 351 ( * ) ;

- un décret fixera les modalités d'application de ce dispositif.

II - La position de votre commission

Compte tenu des graves conséquences financières que peut entraîner un contentieux prud'homal pour les petites entreprises, qui peuvent parfois conduire à un dépôt de bilan, vos rapporteurs ne peuvent qu'approuver cet article, qui aurait toutefois davantage trouvé sa place dans un projet de loi de finances.

Ils regrettent toutefois les nombreuses limitations apportées par le Gouvernement au dispositif initial, notamment le ciblage sur les entreprises employant moins de dix salariés, au détriment de celles employant entre onze et cinquante salariés. C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de vos rapporteurs ( COM-116 ) pour ouvrir cette provision pour risque de contentieux prud'homal aux entreprises employant moins de cinquante salariés, tout en étendant ce dispositif à tous les salariés embauchés en CDI.

La commission a par ailleurs adopté un amendement de notre collègue Catherine Deroche ( COM-142 ) pour préciser que les entreprises non tenues d'établir un bilan pourront également bénéficier de cette provision.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 29 ter (supprimé) (art. L. 1273-3 du code du travail) - Caractère libératoire du Titre Emploi-Service Entreprise (Tese) pour l'ensemble des obligations déclaratives des entreprises

Objet : Cet article, inséré dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité par un amendement présenté par notre collègue députée Sophie Errande, réaffirme le caractère libératoire du Tese pour l'ensemble des obligations déclaratives des entreprises.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Issu de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, le Tese est un dispositif facultatif destiné aux entreprises de France métropolitaine relevant du régime général de sécurité sociale, à l'exception des entreprises de travail temporaire, des groupements d'employeurs et des comités d'entreprise.

Construit sur le modèle du chèque emploi service pour les particuliers employeurs, il permet de simplifier les formalités sociales liées à l'emploi de salariés, quel que soit leur contrat de travail (CDI, CDD, contrat d'apprentissage...), à l'exception toutefois de certaines situations donnant lieu à la mise en oeuvre de taux réduits de cotisations ou de franchises (journalistes, intermittents du spectacle, VRP, ...) ou des personnes n'ayant pas la qualité de salariés (stagiaires).

Le recours au site du Tese permet ainsi :

- d'accomplir les formalités liées à l'embauche , comme la déclaration préalable à l'embauche et la rédaction du contrat de travail ;

- d'effectuer une seule déclaration en ligne pour les organismes de protection sociale gérant des régimes collectifs et obligatoires tels que l'Urssaf, l'assurance chômage, les caisses de retraite complémentaire et supplémentaire, les organismes de prévoyance ou encore les caisses de congés payés ;

- et de procéder à un seul règlement pour les cotisations de protection sociale obligatoire dues à ces organismes.

Le recours au Tese permet également l'établissement des bulletins de paie, des déclarations sociales annuelles et de l'attestation fiscale pour les salariés. Instrument de simplification, le Tese est aussi un outil de sécurisation de formalités pour lesquelles les entreprises devraient, à défaut de compétences internes, se faire assister par des professionnels du chiffre.

La possibilité de recourir au Tese, initialement réservée aux entreprises de moins de 10 salariés, a été étendue le 1 er juillet 2015 aux entreprises de moins de 20 salariés .

Les taxes et cotisations dont le recouvrement n'est pas assuré par les Urssaf ne sont en revanche pas comprises dans le champ du Tese. C'est notamment le cas pour la taxe d'apprentissage, la contribution à la formation professionnelle, la taxe sur les salaires, la médecine du travail, le financement du paritarisme ou encore les cotisations aux régimes d'entreprise de prévoyance complémentaire et de retraite, qui font l'objet de déclarations et de paiement spécifiques.

Plus simple pour les entreprises, le Tese est aussi un levier de modernisation pour les organismes de recouvrement. L'adhésion et les déclarations s'effectuent obligatoirement en ligne sur le site www.letese.urssaf.fr et depuis le 1 er janvier 2016, l'emploi du Tese est exclusif : l'employeur doit utiliser ce dispositif pour l'ensemble de ses salariés.

Dans le cadre de la mise en place de la déclaration sociale nominative, le recours au Tese permettra de remplir d'autres obligations comme l'attestation Pôle emploi.

Le présent article, sur le constat du faible recours au Tese, réaffirme le fait qu'il ne nécessite pas de déclarations complémentaires pour ce qui concerne « les cotisations et contributions sociales qui doivent être adressées aux organismes gérant les régimes mentionnés au code de la sécurité sociale », à Pôle emploi et aux caisses de congés payés. Il complète à cet effet l'article L. 1273-3 du code du travail, relatif aux fonctions remplies par le Tese, par un alinéa précisant que « les entreprises ayant recouru au Tese n'ont pas à procéder à d'autres déclarations relatives aux cotisations et contributions mentionnées au 2° ».

II - La position de votre commission

Si l'objectif de sécurisation poursuivi par cet article est parfaitement compréhensible et ne peut qu'être soutenu par vos rapporteurs, il semble cependant qu'il soit satisfait, tant par l'actuelle rédaction du code de la sécurité sociale que par celle du code du travail.

L'article L. 133-7-7 de code de la sécurité sociale dispose en effet que « (...) les dispositifs (simplifiés de déclaration et de recouvrement de cotisations et contributions sociales) mentionnés à l'article L. 133-5-7 permettent aux employeurs de :

1° déclarer et payer les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelles prévues par la loi, ainsi que le cas échéant et dans des conditions fixées par convention, d'autres cotisations et contributions sociales ; ».

L'article L. 133-9 du même code précise quant à lui que l'organisme de recouvrement est chargé, pour le compte des employeurs ayant recours aux dispositifs simplifiés « d'établir les formalités et déclarations auxquelles la déclaration sociale nominative (...) se substitue ».

L'article L. 1273-3 du code du travail vise, de façon exhaustive, « les déclarations relatives aux cotisations et contributions sociales ».

Si des déclarations complémentaires sont demandées pour ces mêmes cotisations et contributions sociales, elles ne peuvent résulter que d'une méconnaissance des textes à laquelle le présent article ne pourrait remédier.

Comme indiqué précédemment, le Tese ne satisfait pas, pour autant, l'ensemble des obligations déclaratives des employeurs, qui persistent pour les contributions qui ne sont pas comprises dans son champ. Le présent article n'a pas pour objet de supprimer ces déclarations résiduelles.

C'est pourquoi, la commission, à l'invitation de vos rapporteurs, a adopté un amendement de suppression (COM-376) de cet article qui ne modifie pas l'état du droit.

Votre commission a supprimé cet article.

Article 30 (art. L. 1233-3 du code du travail) - Modification de la définition du licenciement économique

Objet : Cet article précise les cas de recours au licenciement pour motif économique, désormais autorisé explicitement par la loi pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et en cas de cessation d'activité. L'employeur pourra procéder à ce type de licenciement en cas de difficultés économiques s'il remplit au moins un des critères définis par la loi. Dans les cas prévus par la loi, la cause réelle et sérieuse du licenciement économique sera présumée et variera en fonction de l'effectif de l'entreprise.

I - Le dispositif proposé

En vertu de l'article L. 1233-2 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse (CRS), à l'instar du licenciement pour motif personnel (art. L. 1232-1).

La définition du licenciement économique, mentionnée à l'article L. 1233-3 , est somme toute lapidaire . Ce licenciement doit en effet reposer sur un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant :

- soit d'une suppression ou transformation d'emploi ;

- soit d'une modification , refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail .

Ces deux cas d'ouverture font suite à un contexte particulier, caractérisé soit par des difficultés économiques , soit par des mutations technologiques , soit par tout autre élément laissé à l'appréciation de l'employeur, sous le contrôle du juge.

L'article L. 1233-3 ne fait pas obstacle aux dispositions spécifiques aux ruptures conventionnelles .

La version initiale de l'article 30, fortement remaniée en commission à l'Assemblée nationale, prévoyait une architecture des dispositions relatives au licenciement économique similaire à celle utilisée pour la durée du travail à l'article 2, en distinguant l'ordre public, le champ de la négociation collective et les dispositions supplétives .


Ordre public

En premier lieu, les dispositions d'ordre public, réunies à l'article L. 1233-3 , tout en conservant les deux cas d'ouverture précités, précisaient que le licenciement devait résulter de l'une des quatre situations suivantes :

- soit de difficultés économiques ;

- soit de mutations technologiques ;

- soit d'une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

- soit de la cessation d'activité de l'entreprise .

C'est la première situation, relative aux difficultés économiques , qui fait l'objet des précisions les plus nombreuses , car ces difficultés doivent être caractérisées, par rapport à la même période de l'année précédente :

- soit par une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires pendant plusieurs trimestres consécutifs ;

- soit par des pertes d'exploitation pendant plusieurs mois ;

- soit par une importante dégradation de la trésorerie ;

- soit par tout élément de nature à les justifier.

Le périmètre d'appréciation de ces critères (entreprise ou groupe) varie selon la nature du contrôle exercé.

D'une part, le contrôle des deux cas d'ouverture précités (autrement dit, la matérialité de la suppression ou de la transformation d'un emploi ainsi que la modification d'un élément essentiel du contrat de travail ) s'apprécie au niveau de l'entreprise .

D'autre part, l'appréciation des difficultés économiques , des mutations technologiques ou de la nécessité d'assurer la sauvegarde de sa compétitivité s'effectue :

- soit au niveau de l'entreprise si celle-ci n'appartient pas à un groupe ;

- soit au niveau du secteur d'activité commun aux entreprises implantées sur le territoire national du groupe auquel elle appartient.

Postérieurement à la transmission au Conseil d'Etat de l'avant-projet de loi, le Gouvernement avait souhaité compléter les dispositions d'ordre public du licenciement économique en indiquant que les difficultés économiques créées artificiellement à la seule fin de procéder à des suppressions d'emplois ne sauraient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif économique. Malgré les réserves du Conseil d'Etat formulées dans son avis, le Gouvernement avait maintenu ces dispositions dans le projet de loi initial.


Champ de la négociation collective

En deuxième lieu, l'article 30 introduisait dans le code du travail un article L. 1233-3-1 afin de définir le champ relevant de la négociation collective.

Cet article prévoyait en effet qu'il revenait à une convention ou un accord collectif de branche de fixer la durée :

- de la baisse des commandes ou du chiffre d'affaires , qui ne pouvait être inférieure à deux trimestres consécutifs ;

- des pertes d'exploitation caractérisant les difficultés économiques, qui ne pouvait être inférieure à un trimestre .


Dispositions supplétives

En dernier lieu, l'article 30 introduisait dans le code du travail un article L. 1233-3-2 , qui définissait les règles suivantes en l'absence d'une convention ou d'un accord collectif de branche :

- la durée de la baisse des commandes ou du chiffre d'affaires ne pouvait être inférieure à quatre trimestres consécutifs ;

- la durée des pertes d'exploitation était au moins égale à un semestre .

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission , plusieurs amendements ont été adoptés à l'initiative du rapporteur, qui ont profondément remanié l'article.

Tout d'abord, l' architecture de l'article a été simplifiée : l'ensemble des dispositions relatives à la définition du licenciement économique relève, comme c'est le cas aujourd'hui, exclusivement de la compétence de la loi, et non des partenaires sociaux.

Ensuite, le texte de la commission propose une nouvelle définition des critères prouvant l'existence de difficultés économiques (sans aborder par conséquent les autres critères tels que les mutations technologiques, la réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité ou encore la cessation de son activité). Celles-ci sont caractérisées :

- soit par l' évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation, une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation ;

- soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Le texte de la commission franchit une étape supplémentaire dans la sécurisation du licenciement pour motif économique, en indiquant que sera présumé reposer sur une cause réelle et sérieuse tout licenciement consécutif à une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires d'une durée au moins égale à :

- un trimestre pour une entreprise employant moins de onze salariés ;

- deux trimestres consécutifs pour une entreprise employant entre onze et quarante-neuf salariés ;

- trois trimestres consécutifs pour une entreprise employant entre cinquante et deux cent quatre-vingt-dix-neuf salariés ;

- quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus .

Le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, a retenu un amendement du rapporteur qui vise à supprimer :

- la règle selon laquelle l'appréciation des difficultés économiques, des mutations technologiques et de la sauvegarde de l'entreprise devait s'effectuer au niveau des autres entreprises françaises appartenant au même groupe et à un secteur d'activité commun ;

- l'alinéa qui interdit de procéder à un licenciement économique en cas de difficultés économiques créées artificiellement.

III - La position de votre commission

Vos rapporteurs tiennent tout d'abord à rappeler que si les licenciements économiques, notamment lorsqu'ils donnent lieu à des plans de sauvegarde de l'emploi, suscitent souvent une vive émotion parmi nos concitoyens, leur nombre demeure limité si l'on observe l'ensemble des motifs d'inscription à Pôle emploi.

Ils prennent acte de la volonté du Gouvernement de sécuriser les motifs du licenciement économique. Compte tenu du caractère lacunaire de la définition légale du licenciement économique, le juge a été conduit à élaborer un corpus de règles pour pallier le silence de la loi. Or la jurisprudence de la Cour de cassation n'a pas toujours été appliquée uniformément sur le territoire et dans le temps, pénalisant à la fois les salariés et les employeurs, et nuisant à l'image de notre pays vis-à-vis des investisseurs internationaux.

Un grand nombre des personnes auditionnées par vos rapporteurs considèrent néanmoins que les critères retenus dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité prêtent le flanc à quatre types de critiques. Tout d'abord, la mise en exergue d'un seul indicateur , comme la baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation, la dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, ne suffit pas toujours à lui seul à caractériser l'existence de difficultés économiques .

Il est parfois assez aisé de provoquer une baisse du chiffre d'affaires ou de l'excédent brut d'exploitation en utilisant des règles comptables. Ensuite, les périodes considérées font abstraction des spécificités des secteurs d'activité : certains connaissent des cycles longs de plusieurs années, tandis qu'un grand nombre d'entreprises n'ont parfois de visibilité sur leur carnet de commande qu'à l'horizon d'un mois. Par ailleurs, la notion de baisse significative d'un indicateur économique n'est pas objectivée : s'agit-il d'une baisse d'au moins 10 %, 20 %, 30 % par rapport à l'année précédente ? Enfin, il existe un risque sérieux que la différenciation des planchers, en fonction de la taille de l'entreprise, pour définir une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires, soit censurée par le Conseil constitutionnel en vertu du principe d'égalité devant la loi 352 ( * ) .

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de vos rapporteurs (COM-117) qui comprend deux volets : la clarification des critères du licenciement économique et la sécurisation de la procédure devant le juge en cas de contestation de sa cause réelle et sérieuse .

En premier lieu, l'amendement clarifie les critères du licenciement économique.

Il pose comme principe que les difficultés économiques résultent le plus souvent d'un faisceau de critères concordants .

Toutefois, dans certaines situations évidentes , l'employeur doit pouvoir s'appuyer sur un critère simple et incontestable. Ainsi, tout licenciement sera présumé reposer sur une cause réelle et sérieuse s'il est consécutif à une baisse de l'encours des commandes ou du chiffre d'affaires de l'entreprise d' au moins 30 % pendant deux trimestres consécutifs en comparaison avec la même période de l'année précédente. De même, une entreprise doit pouvoir se réorganiser pour sauvegarder sa compétitivité si elle perd un marché qui représente au moins 30 % de son chiffre d'affaires ou de ses commandes .

L'amendement renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser la liste des indicateurs économiques , le niveau et la durée de leur baisse significative qui varie selon les spécificités de l'entreprise et du secteur d'activité, ainsi que les situations justifiant une réorganisation de l'entreprise nécessaire pour la sauvegarde de sa compétitivité. Vos rapporteurs souhaitent que ce décret soit pris après concertation des employeurs et des professionnels de la gestion des entreprises et rappellent qu'il s'imposera au juge judiciaire au même titre qu'une disposition légale.

Par ailleurs, l'amendement indique que si un juge a prononcé une procédure de sauvegarde , un plan de redressement ou une liquidation de l'entreprise , le licenciement économique des salariés reposera également sur une cause réelle et sérieuse.

En outre, il rétablit la version initiale du projet de loi sur le périmètre d'appréciation des difficultés économiques , des mutations technologiques ou de la nécessité d'assurer la sauvegarde de sa compétitivité, en prévoyant que celle-ci s'effectuera uniquement au niveau des entreprises du groupe, exerçant dans le même secteur d'activité et implantées sur le territoire national.

En deuxième lieu, l'amendement modifie la procédure en cas de contestation du caractère réel et sérieux d'un licenciement économique .

Tout d'abord, le salarié licencié pour motif économique disposera de six mois , et non plus d'un an, pour engager une procédure judiciaire s'il estime que son licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

Ensuite, les délais imposés à la justice pour rendre son jugement en cas de contestation du bien fondé d'un plan de sauvegarde de l'emploi sont sécurisés : le juge prud'homal devra se prononcer dans un délai de six mois et la cour d'appel territorialement compétente dans un délai de trois mois, tandis que la Cour de cassation pourra statuer au fond le litige si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie 353 ( * ) .

Enfin, l'amendement invite le juge, en cas de doute sur le caractère réel et sérieux d'un licenciement économique, à solliciter une expertise extérieure . Le juge prud'homal, parfois peu à même d'apprécier la réalité des motifs d'un licenciement économique lorsqu'il concerne des entreprises de grande taille ou appartenant à un groupe international, pourra ainsi de sa propre initiative ou à la demande de l'une des parties, solliciter une expertise extérieure qui devra rendre ses conclusions dans un délai de deux mois. Le juge ne sera pas lié par cette expertise , mais elle l' éclairera utilement sur les suites à réserver au litige.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 30 bis A (nouveau) (art. L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-3-2 [nouveaux], L. 1235-5, L. 1235-11, à L. 1235-15 et L. 1226-15 du code du travail) - Encadrement du montant des indemnités prud'homales

Objet : Cet article, inséré par la commission des affaires sociales sur proposition de vos rapporteurs, instaure un plafonnement des indemnités octroyées par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail, lorsqu'un licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et que le salarié n'est pas réintégré, le juge lui octroie une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant ne peut être inférieur au salaire des six derniers mois.

L'incertitude liée à l'hétérogénéité des décisions rendues par les conseils de prud'hommes, souvent contredites dans un sens ou dans un autre en appel, est un des freins identifiés à l'embauche, notamment dans les petites entreprises.

Plus qu'un barème indicatif, c'est donc un plafonnement qu'il convient de mettre en oeuvre.

Lors de l'examen du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 354 ( * ) , le Sénat avait proposé l'instauration d'un plafonnement du montant des indemnités prononcées par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le Gouvernement avait repris cette proposition à son compte et proposé l'instauration d'un barème fixant un montant maximal et un montant minimal variant en fonction de l'ancienneté du salarié, d'une part, et de la taille de l'entreprise, d'autre part. Ce barème avait été adopté par le Sénat en nouvelle lecture, puis par l'Assemblée nationale en lecture définitive.

Toutefois, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition (article 266 du texte adopté), jugeant qu'elle introduisait une rupture d'égalité devant la loi entre les salariés licenciés. Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a retenu que « le législateur a entendu, en aménageant les conditions dans lesquelles la responsabilité de l'employeur peut être engagée, assurer une plus grande sécurité juridique et favoriser l'emploi en levant les freins à l'embauche ; qu'il a ainsi poursuivi des buts d'intérêt général ». Il a ensuite estimé que « si le législateur pouvait, à ces fins, plafonner l'indemnité due au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, il devait retenir des critères présentant un lien avec le préjudice subi par le salarié ; que, si le critère de l'ancienneté dans l'entreprise est ainsi en adéquation avec l'objet de la loi, tel n'est pas le cas du critère des effectifs de l'entreprise ; que, par suite, la différence de traitement instituée par les dispositions contestées méconnaît le principe d'égalité devant la loi ».

Dans la version préparatoire du présent projet de loi, le Gouvernement entendait soumettre au Parlement une nouvelle version de ce barème, dans lequel le montant des indemnités ne varie qu'en fonction de l'ancienneté du salarié, et non en fonction de la taille de l'entreprise. Cette disposition a finalement été retirée du texte soumis à l'examen du Parlement.

Sur proposition de ses rapporteurs, la commission a réintroduit ce plafonnement (amendement COM-363 ), dans une rédaction proche de celle de l'avant-projet de loi.

Le barème retenu est présenté dans le tableau ci-dessous :

Encadrement du montant des indemnités
en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Ancienneté du salarié

Montant maximal de l'indemnité

Inférieure à 2 ans

3 mois de salaire

Entre 2 et 5 ans

6 mois de salaire

Entre 5 et 10 ans

9 mois de salaire

Entre 10 et 20 ans

12 mois de salaire

Supérieure à 20 ans

15 mois de salaire

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Ce barème s'applique aux cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il ne s'applique pas aux licenciements dont le juge a prononcé la nullité, par exemple dans les cas de traitement discriminatoire ou de harcèlement. Si la version de cet article contenue dans l'avant-projet de loi, comme l'article 266 de la loi du 6 août 2015, énumérait une série de cas de nullité, le présent article se contente d'effectuer un renvoi plus général.

Une modification de l'article L. 1235-5 est en outre nécessaire. Cet article exclut actuellement l'application de certaines dispositions aux petites entreprises et aux licenciements d'un salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté. Il s'agit de dispositions relatives à l'indemnisation des salariés dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (article L. 1235-3) ou entaché de vice de procédure (article L. 1235-2) et des dispositions de l'article L. 1235-4 relatives au remboursement à Pôle emploi des indemnités chômage versées à un salarié victime d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou déclaré nul par le juge. Compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel qui juge que l'indemnisation ne peut dépendre de la taille de l'entreprise et du barème créé par le présent article, seule l'exception aux dispositions de l'article L. 1235-4 est conservée.

L'article L. 1235-14 , qui porte sur la sanction des irrégularités des licenciements économiques, prévoit que les dispositions des articles L. 1235-11, relatif à l'indemnisation du salarié dont le licenciement économique a été annulé, L. 1235-12 relatif aux cas de non-respect par l'employeur des procédures de consultation des représentants du personnel et L. 1235-15, relatif au licenciement économique dans une entreprise où le comité d'entreprise ou les délégués du personnel n'ont pas été mis en place ne s'appliquent pas non plus au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté et au licenciement opéré dans une entreprise de moins de onze salariés. Le présent article soumet les indemnités prévues par l'article L. 1235-12 et L. 1235-15 au barème qu'il met en place et modifie l'article L. 1235-14 afin de restreindre l'exception qu'il prévoit au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté et de ne viser que les dispositions de l'article L. 1235-11. En contrepartie, le plancher de l'indemnité prévue à l'article L. 1235-11 est abaissé de douze à six mois de salaire.

Enfin, le plancher de l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration du salarié déclaré apte est réduit de douze à six mois de salaire.

Les dispositions de cet article seront applicables aux licenciements notifiés à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 30 bis B (nouveau) (art. L. 1462-2 [nouveau] du code du travail) - Modulation dans le temps des décisions du juge judiciaire

Objet : Cet article additionnel, issu d'un amendement présenté par notre collègue Annick Billon ainsi que par plusieurs membres des groupes Les Républicains et UDI - UC, permet au juge judiciaire de moduler dans le temps les effets de ses décisions.

Le dispositif proposé par l'amendement COM-345 s'appuie sur les préconisations du rapport d'information présenté par notre collègue Annick Billon au nom de la délégation aux entreprises 355 ( * ) . Il propose d'étendre au juge judiciaire la possibilité que le Conseil d'État a reconnue depuis 2004 au juge administratif de prévoir une modulation dans le temps des effets de ses décisions, au nom du principe de sécurité juridique . Il s'appuie sur l'idée selon laquelle les revirements jurisprudentiels auraient, particulièrement en droit du travail, des conséquences préjudiciables du fait de leur rétroactivité.

La rétroactivité d'une décision jurisprudentielle a pour conséquence l'application directe de ses effets à toute situation juridique ou économique s'y prêtant, même formée en vertu d'une jurisprudence ou d'une réglementation antérieure. Elle est donc un facteur de forte insécurité juridique et de risques économiques importants pour les entreprises, comme le montre l'exemple du forfait en jours.

Les risques du revirement jurisprudentiel : l'exemple du forfait en jours

Le forfait en jours fait partie des innovations portées par les lois Aubry de 1998 et 2000 et concerne particulièrement les salariés à forte autonomie qui, par la nature de leur activité, ne sont pas soumis à la limite maximale de 35 heures hebdomadaires mais à un nombre maximal de jours de travail par an.

Le régime juridique du forfait en jours a été profondément modifié par la loi du 20 août 2008 356 ( * ) . Ainsi, en vertu du principe de rétroactivité immédiate de la jurisprudence, les employeurs n'étant pas en conformité avec celle-ci risquaient d'encourir la nullité du forfait en jours, et cela même si la convention individuelle de forfait avait été conclue avant cette loi . En plus des dispositions législatives, la chambre sociale de la Cour de cassation, se fondant tant sur les textes européens que sur l'exigence constitutionnelle du droit à la santé et au repos , a jugé dans un attendu de principe en 2011 357 ( * ) que « toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ». La sanction en cas de défaut de conformité est la même qu'en cas de défaut de conclusion d'un accord individuel, à savoir la nullité de la convention de forfait-jours.

Or, la nullité prononcée par le juge emporte la disparition rétroactive de l'acte juridique qui ne remplit pas les conditions requises pour sa formation . Les risques financiers encourus par l'employeur du fait de la nullité sont alors conséquents : elle permet au salarié de réclamer, comme ses collègues soumis à la durée légale de travail, une rémunération complémentaire et majorée pour toute heure supplémentaire effectuée au-delà de celle-ci. Des sanctions pénales sont également potentiellement attachées au non-respect de la règlementation du travail voire au délit de travail dissimulé.

Vos rapporteurs, convaincus des effets bénéfiques d'une modulation dans le temps des effets d'une décision du juge judiciaire, ont approuvé les dispositions de cet amendement.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 30 bis (art. L. 1454-1-2 du code du travail) - Clôture de l'instruction devant le conseil de prud'hommes

Objet : Cet article, issu d'un amendement présenté par nos collègues députés Denys Robiliard et Richard Ferrand et retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, autorise le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes, les conseillers rapporteurs qu'il a désignés ainsi que les conseillers choisis par le bureau de jugement, à prendre une ordonnance non susceptible de recours pour clôturer l'instruction d'un litige.

I - Le dispositif proposé

La justice prud'homale est actuellement confrontée à de nombreux défis :

- le délai moyen de jugement est extrêmement long ( 15,6 mois en moyenne en 2013), soit le délai le plus long parmi les juridictions de première instance (5,2 mois devant le tribunal d'instance par exemple), avec des délais qui peuvent dépasser cinq ans dans certains conseils de prud'hommes 358 ( * ) ;

- près des deux tiers (64,5 %) des jugements prononcés par les conseils de prud'hommes sont frappés d'appel (contre 5,9 % des jugements des tribunaux d'instance) ;

- pratiquement trois quarts des jugements prud'homaux frappés d'appel sont invalidés soit partiellement (50,5 %) soit totalement (21,2 %) par les cours d'appel 359 ( * ) .

Les réformes de la procédure prud'homale engagées depuis 2013 ont visé en priorité à développer la phase de conciliation , obligatoire avant le passage devant les formations de jugement, car seulement 5,5 % des litiges portés devant les conseils de prud'hommes ont été réglés à ce stade en 2013 360 ( * ) .

En premier lieu, l'article 21 de la loi précitée du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi a encouragé le recours, en cas de contestation et d'irrégularité du licenciement devant le juge prud'homal, à la phase de conciliation par l'instauration d'un barème indicatif . Conformément au souhait des partenaires sociaux, un barème a prévu que l'indemnité augmente régulièrement selon l'ancienneté du salarié : elle s'élève à deux mois de salaire si le salarié justifie chez l'employeur d'une ancienneté inférieure à deux ans, et atteint quatorze mois de salaire si son ancienneté dépasse vingt-cinq ans 361 ( * ) .

En second lieu, l'article 258 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a réformé la procédure prud'homale sur de nombreux points pour renforcer le rôle du bureau de conciliation et en faire le pivot de sa rationalisation .

Tout d'abord, ce bureau doit assurer lui-même la mise en état de l'affaire , en faisant procéder aux débats contradictoires et échanges de pièces et de conclusions qui permettent de mettre l'affaire en état d'être jugée 362 ( * ) .

Par exception au principe du contradictoire, il peut d'ailleurs entendre séparément et confidentiellement les parties 363 ( * ) .

Afin de lutter contre l'absentéisme en phase de conciliation, le bureau peut en outre directement juger une affaire, en l'état des pièces et moyens que la partie comparante a contradictoirement communiqués quand celle-ci ne comparaît pas, personnellement ou par l'entremise d'un représentant, sauf si elle justifie d'un motif légitime 364 ( * ) .

Ensuite, le bureau, qui s'est vu adjoindre la mission d' orienter le litige le plus en amont possible, peut, par simple mesure d'administration judiciaire, renvoyer les parties 365 ( * ) :

- avec leur accord, devant le bureau de jugement dans sa formation restreinte si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;

- à leur demande ou si la nature du litige le justifie, devant le bureau de jugement présidé par le juge départiteur ;

- à défaut, devant le bureau de jugement de droit commun .

Le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, a retenu un amendement présenté par nos collègues Denys Robiliard et Richard Ferrand, qui complète l'article L. 1454-1-2 du code, afin de permettre au bureau de conciliation et d'orientation, aux conseillers rapporteurs qu'il aura désignés ainsi qu'aux conseillers désignés par le bureau de jugement, de fixer la clôture de l'instruction par ordonnance . Cette ordonnance, dont une copie doit être remise aux parties ou à leur conseil, constitue une mesure d'administration judiciaire , qui ne peut donc faire l'objet d'un recours contentieux mais peut être modifiée ou rapportée par son auteur.

II - La position de votre commission

Vos rapporteurs considèrent que cet article additionnel, qui s'inscrit dans la continuité de la réforme engagée par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, est de nature à réduire les délais de jugement devant les conseils de prud'hommes, qui constituent souvent un déni de justice pour un grand nombre de nos concitoyens. Le rapport précité du président Alain Lacabarats avait d'ailleurs plaidé pour « l'instauration d'une forme de mise en état destinée à réguler les échanges d'écritures et de pièces entre les parties, de manière à réduire le risque de renvoi ou de radiation pour cause de communications tardives, d'autant plus mal accepté que les délais de traitement des affaires sont globalement trop importants ». 366 ( * )

Ils doutent cependant que les mesures prises par le législateur depuis trois ans suffiront à répondre aux nombreux défis auxquels est confrontée la justice prud'homale. Notre pays est régulièrement condamné pour violation de la convention européenne des droits de l'homme en raison des délais anormalement longs des litiges devant le conseil de prud'hommes 367 ( * ) . Nombreuses ont été les personnes auditionnées qui considèrent que ces mesures constituent la dernière tentative pour maintenir le modèle prud'homal aujourd'hui à bout de souffle, avant l'engagement de réformes radicales, qui pourraient imposer l'échevinage au sein des conseils de prud'hommes, mettant fin ainsi à une singularité française parmi les démocraties occidentales.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 31 - Ratification de l'ordonnance n° 2015-1628 du 10 décembre 2015 relative aux garanties consistant en une prise de position formelle, opposable à l'administration, sur l'application d'une norme à la situation de fait ou au projet du demandeur

Objet : Cet article ratifie l'ordonnance n° 2015-1628 du 10 décembre 2015 relative aux garanties consistant en une prise de position formelle, opposable à l'administration, sur l'application d'une norme à la situation de fait ou au projet du demandeur.

I - Le dispositif proposé

L'ordonnance précitée, prise sur le fondement de l'article 9 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 de simplification de la vie des entreprises 368 ( * ) , a pour objet de renforcer les garanties applicables aux porteurs de projet et de renforcer leur sécurité juridique. Ce renforcement prend alors la forme d'un rescrit. Son dispositif vise à prémunir le demandeur (entreprise ou particulier) d'un changement d'interprétation ou d'appréciation de l'administration qui serait de nature à faire naître une créance de l'administration à son encontre, à l'exposer à des sanctions administratives ou à compromettre l'obtention d'une décision administrative postérieure nécessaire à la réalisation de son projet. L'ouverture du droit au rescrit est nécessairement précontentieuse et ne lie pour l'avenir l'administration qui l'a émis que si les conditions de droit et de fait constatées lors de la demande restent identiques.

L'ordonnance modifie en ce sens le code de la consommation (article 1 er ), le code général de la propriété des personnes publiques (article 2), le code rural et de la pêche maritime (article 3), le code de la sécurité sociale (article 4) et le code du travail (article 5).

L'article 1 er établit une protection à l'égard des opérateurs commerciaux qui, en raison de prestations spécifiques ou composites, ne sont pas en mesure de donner une information exhaustive sur les prix aux consommateurs. Il leur sera alors possible de demander à l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, en lui communiquant toutes les informations nécessaires, de prendre formellement position sur les entraves au calcul préalable du prix. La position formulée par l'autorité administrative engagera cette dernière et protégera l'opérateur des sanctions administratives applicables en cas de changement de prix injustifié. Enfin, le silence gardé par l'administration après réception d'une demande de position par un opérateur vaudra rejet implicite.

L'article 2 modifie le régime de l'autorisation d'occupation temporaire (AOT) du domaine public. L'article L. 2122-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) permet au titulaire d'une AOT de transmettre à un repreneur ses droits réels sur le domaine public, sous réserve d'un agrément du repreneur par l'autorité publique compétente, en vue d'une utilisation compatible avec l'affectation du domaine public occupé. L'article 2 vise à renforcer la sécurité juridique des repreneurs, notamment s'ils ne disposent pas encore de tous les attributs de la personnalité juridique. L'instauration d'un mécanisme de pré-décision répond aux attentes des opérateurs économiques qui exercent leur activité sur le domaine public et souhaitent être confortés au plan juridique, notamment en cas de création ou de reprise de sociétés. Ce dispositif est ainsi étendu à toutes les hypothèses de création ou de reprise de sociétés qui n'ont pas encore de personnalité juridique définie (par exemple, en cas de reprise d'une société placée en redressement judiciaire), étant précisé que sont également visés par la réforme les cas de restructuration d'entreprise ou de changement d'exploitant. Il s'agit d'encourager ces évolutions à un stade très en amont des décisions des acteurs économiques, en garantissant que la transmission du titre d'occupation pour la durée restant à courir sera bien agréée, le moment venu, aux conditions connues au jour de la pré-décision d'agrément. Cette pré-décision, contrairement au rescrit, s'impose à l'administration mais aussi à l'usager. Elle prémunit le demandeur d'un changement d'interprétation ou d'appréciation qui serait de nature à compromettre l'obtention ultérieure de l'agrément. Toutefois, l'article L. 2122-7 du CGPPP prévoit la possibilité pour l'autorité administrative compétente d'abroger cette pré-décision, en cas de changement dans les circonstances de droit ou de fait postérieures à la garantie accordée.

L'article 3-1 permet à la personne qui envisage une reprise de biens pour y exercer une activité agricole de demander, en amont de son projet, si celui-ci nécessite soit une autorisation d'exploiter, soit une déclaration préalable, ou bien s'il peut être mis en oeuvre librement. L'autorité administrative compétente est alors tenue de prendre formellement position, ce qui la prémunira, le cas échéant, d'un changement d'interprétation ou d'appréciation l'exposant à une sanction pécuniaire 369 ( * ) .

L'article 3-2 applique à l'article L. 725-24 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) le régime prévu à l'article 4-4° de la présente ordonnance (cf. infra ). La version actuelle de l'article L. 725-24 pose une double limite aux bénéficiaires du rescrit social dans le champ de la protection sociale agricole : ces derniers ne peuvent être qu'employeurs et leurs demandes ne peuvent porter que sur les cas d'exonération de cotisations sociales. L'ordonnance prévoit une ouverture du rescrit social à tout cotisant du régime agricole, de même qu'à leur mandataire avocat ou leur expert-comptable, et les demandes de rescrit pourront porter sur tous les sujets qui relèvent de la compétence des caisses de mutualité sociale agricole (MSA). Par ailleurs, s'inspirant du régime social des indépendants, l'article 3-2° conserve une disposition particulière aux « chefs d'exploitation ou d'entreprises agricoles », autrement dit aux cotisants non-salariés du régime agricole. En plus du droit de rescrit, ces derniers peuvent désormais solliciter la Caisse centrale de la MSA en cas de modification de la position des caisses de mutualité agricole.

L'article 4 modifie au sein du code de la sécurité sociale le régime applicable au rescrit social . Il prévoit tout d'abord que la décision explicite de l'organisme conventionné du RSI doit intervenir dans un délai fixé par décret en Conseil d'État et, qu'à défaut du respect de ce délai, aucun redressement relatif à la demande initialement formulée ne pourra se faire. Par ailleurs, symétriquement à l'article 3 de l'ordonnance, l'article 4, en modifiant l'article L. 243-6-3 du code de la sécurité sociale, étend le droit au rescrit à l'ensemble des cotisants du régime général, alors que l'ancienne version de l'article L. 243-6-3 en limitait l'accès aux cotisants employeurs sur un nombre limité de matières. Par ailleurs, le droit au rescrit est étendu aux avocats et experts comptables ainsi qu'aux organisations syndicales avec, pour ces dernières, une limitation aux matières spécifiques aux situations de branches (questions de régime complémentaire, prévoyance, frais de santé, exonérations de cotisations sociales de dispositifs uniquement prévus par une convention de branche).

L'article 5 insère deux nouveaux articles dans le code du travail . Le premier, l'article L. 2242-9-1, instaure une procédure de rescrit permettant à une entreprise de demander à l'autorité administrative une prise de position formelle quant à la conformité de son accord ou, à défaut d'accord, de son plan d'action relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes . Ce rescrit lie également l'autorité administrative quant à l'application de la pénalité à laquelle les entreprises qui ne sont pas couvertes par ce type d'accord sont soumises. Le second, l'article L. 5212-5-1, dispose que l'association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph) se prononce de manière explicite sur toute demande d'un employeur concernant l'application à sa situation de la législation relative à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.

L'article 6 est consacré aux dispositions outre-mer . Il prévoit des dispositions relatives au mécanisme de pré-décision en matière domaniale, prévues à l'article 2 de la présente ordonnance, spécifiquement applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna. Il prévoit également une modification du code du travail applicable à Mayotte pour permettre la mise en oeuvre la disposition de l'article 5 de la présente ordonnance relative aux travailleurs handicapés.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Cet article n'a fait l'objet d'aucune modification en commission et n'a pas été modifié par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité.

III - La position de votre commission

Sur proposition des rapporteurs, votre commission a adopté un amendement de précision juridique (COM-27) à cet article.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 31 bis (nouveau) (art. L. 141-23 à L. 141-32, L. 23-10-1 à L. 23-10-12 du code de commerce ; art. L 1233-57-2, L. 1233-57-3, L. 1233-57-21 du code du travail ; art. 18 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire) - Suppression de l'obligation d'information des salariés avant la vente d'une entreprise

Objet : Cet article additionnel, introduit en commission sur proposition de notre collègue Catherine Deroche, supprime l'obligation pour l'employeur d'informer les salariés au moins deux mois avant la vente d'une entreprise.

Dans le but de faciliter la transmission d'entreprises aux salariés , l' article 18 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire 370 ( * ) a instauré un dispositif d'information des salariés sur les possibilités de reprise d'une société de moins de deux cent cinquante salariés. Organisé au moins une fois tous les trois ans, ce dispositif porte notamment sur les conditions juridiques de la reprise d'une entreprise par les salariés, sur ses avantages et ses difficultés, ainsi que sur les dispositifs d'aide dont ils peuvent bénéficier.

L' article 19 de la loi du 31 juillet 2014 oblige le propriétaire ou l'exploitant d'un fonds de commerce employant moins de deux cent cinquante salariés à informer les salariés au moins deux mois avant sa cession 371 ( * ) . Faute d'information préalable, la cession peut être annulée à la demande de tout salarié, s'il saisit le juge dans un délai de deux mois après la cession. Dans les entreprises soumises à l'obligation de mettre en place un comité d'entreprise , l'exploitant doit informer et consulter ce dernier du projet de cession dans le cadre de la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise.

L' article 20 décline ces principes pour les offres de rachat des parts sociales, des actions et des valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital dans les sociétés de moins de deux cent cinquante salariés 372 ( * ) .

Les dispositions prévues à ces deux articles ne s'appliquent pas en cas de succession, de liquidation du régime matrimonial, de cession à un conjoint, à un ascendant ou un descendant, ou en cas de procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

L' article 21 ne concerne pas l'obligation d'information préalable des salariés avant une cession d'entreprise, mais les règles que doit suivre une entreprise employant au moins mille salariés quand elle envisage de fermer un site in bonis 373 ( * ) . En effet, dans sa décision n° 2014-692 DC du 27 mars 2014, le Conseil constitutionnel a jugé contraires à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété les dispositions relatives au refus de cession d'un établissement en cas d'offre de reprise et à la sanction de ce refus, et a censuré les dispositions prévoyant une pénalité en cas de non-respect de l'obligation de recherche d'un repreneur. En conséquence, l'article 21 de la loi du 31 juillet 2014 a remplacé la phase de contrôle devant le tribunal de commerce, ainsi que la sanction financière en cas de défaut de recherche ou refus de cession, par une simple vérification par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) de la réalité des efforts de l'employeur pour rechercher un repreneur dans le cadre de la procédure de validation ou de l'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi 374 ( * ) .

Quant à l' article 22 , il autorise l'autorité administrative à demander le remboursement des aides publiques en matière d'installation, de développement économique, de recherche ou d'emploi attribuées depuis deux ans si l'entreprise n'a pas fourni d'efforts suffisants pour rechercher un repreneur 375 ( * ) .

Compte tenu des nombreuses critiques dont ont fait l'objet ces dispositions, plusieurs modifications y ont été apportées par l'article 204 de la loi du 6 août 2015 376 ( * ) :

- le dispositif d'information des salariés devra également porter sur les orientations générales de l'entreprise relatives à la détention de son capital, notamment sur le contexte et les conditions d'une cession de celle-ci et, le cas échéant, sur le contexte et les conditions d'un changement capitalistique substantiel ;

- la notion de vente remplace celle de cession ;

- l'exploitant doit notifier sans délai au propriétaire toute offre d'achat présentée par un salarié ;

- la sanction de la nullité de la vente est remplacée par une amende civile. Dorénavant, lorsqu'une action en responsabilité est engagée, la juridiction saisie peut, à la demande du ministère public, prononcer cette amende dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente ;

- l'amende civile ne peut pas s'appliquer à un l'employeur qui a organisé, dans l'année précédant la vente, une information des salariés sur les enjeux de la reprise d'une entreprise par ses salariés ;

- si l'employeur décide d'informer ses salariés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception de son souhait de vendre l'entreprise, le délai légal de deux mois débute lors de la première présentation de la lettre.

Sur proposition de notre collègue Catherine Deroche et plusieurs membres du groupe Les Républicains, la commission a adopté l'amendement COM-303 pour supprimer les dispositions issues des articles 18 à 22 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, telles qu'elles ont été modifiées par la loi précitée du 6 août 2015.

Le Sénat considère de manière constante 377 ( * ) que le dispositif d'information préalable des salariés avant la vente d'une société employant moins de deux cent cinquante salariés est extrêmement complexe, qu'il méconnait la vie des affaires et que la sanction en cas de non-respect de l'obligation d'information préalable est disproportionnée.

La commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.


* 334 Ces commissions ont été instaurées par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi.

* 335 Convention n° 81 de 1947 de l'Organisation internationale du Travail, concernant l'inspection du travail dans l'industrie et le commerce, article 3, point 1, b.

* 336 Cf. étude d'impact, p. 254.

* 337 L'exposé sommaire de l'amendement n° AS963 du rapporteur indique en effet que l'amélioration de l'accès au droit des entreprises de moins de 300 salariés ne crée pas pour autant de « droit opposable » ni de « rescrit » à proprement parler.

* 338 Cf. étude d'impact, page 258.

* 339 Décret n° 2014-1025 du 8 septembre 2014 créant les articles D. 911-1 à D. 911-3 du code de la sécurité sociale.

* 340 « Quels impacts attendre de la généralisation de la complémentaire santé d'entreprise sur la non-couverture en France ? Une simulation à partir de l'Enquête santé et protection sociale (ESPS) 2012 », Florence Jusot (Université Paris-Dauphine-Leda-Legos, Irdes) Aurélie Pierre (Irdes), Questions d'économie de la santé, n° 209, mai 2015.

* 341 Le III de l'article L. 911-7-1 vise les salariés « dont la durée du contrat ou la durée du travail prévue par celui-ci est inférieure à des seuils fixés par cet accord, dans la limite de plafonds fixés par décret ». Le décret n° 2015-1883 du 30 décembre 2015 qui en découle insère dans le code de la sécurité sociale un article D. 911-7 qui fixe les seuils de durée minimale du travail permettant la mise en place d'un versement santé.

* 342 Loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

* 343 Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 344 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 précitée, art. 1.

* 345 Avec voix consultative.

* 346 Respect des valeurs républicaines ; indépendance ; ancienneté d'au moins deux ans.

* 347 Par l'article L. 2121-1 du code du travail.

* 348 Et un titulaire et un suppléant supplémentaires par tranche de 2 000 salariés.

* 349 Guillaume Duval, Thomas Meilhand, « Franchises : mettre fin à l'hypocrisie sociale », Terra Nova, 11 décembre 2014.

* 350 Source : Fédération française de la franchise, « L'impact économique de la franchise en France », 2015.

* 351 Règlement (UE) n° 1407/2013 de la commission, du 18 décembre 2013, relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides de minimis.

* 352 Cf. n° 2015-715 DC du 5 août 2015, considérants 148 à 153. Le Conseil constitutionnel a censuré l'article 266 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, qui fixait un barème impératif différencié en fonction de la taille de l'entreprise pour encadrer le montant de l'indemnité prononcée par le conseil de prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, en considérant que le critère des effectifs de l'entreprise n'était pas en adéquation avec l'objet de la loi, c'est-à-dire assurer une plus grande sécurité juridique et favoriser l'emploi en levant les freins à l'embauche, et qu'il entraînait par conséquent une différence de traitement entre salariés méconnaissant le principe d'égalité devant la loi.

* 353 Pour mémoire, l'article L. 1235-7-1 du code du travail, créé par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, prévoit que l'employeur doit présenter son recours contre une décision administrative d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi dans un délai de deux mois à compter de sa notification (ce délai de deux mois s'applique également aux organisations syndicales et aux salariés à compter de la date à laquelle la décision de l'administration a été portée à leur connaissance). En outre, le tribunal administratif doit statuer dans un délai de trois mois. Enfin, si à l'issue de ce délai il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui doit également statuer dans un délai de trois mois.

* 354 Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 355 Rapport d'information n° 647 (2015-2016) relatif aux entreprises et à la réforme du droit du travail, présenté par Annick Billon au nom de la délégation aux entreprises du Sénat.

* 356 Loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

* 357 Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71107.

* 358 Il convient d'ailleurs de rappeler que certaines décisions prud'homales sont rédigées postérieurement à leur prononcé, ce qui n'est par construction pas pris en compte dans cette statistique.

* 359 Ces statistiques sont extraites du rapport d'Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIe siècle, rapport à la garde des sceaux, ministre de la justice, juillet 2014, pp. 59-60.

* 360 Idem, p. 8.

* 361 Décret n° 2013-721 du 2 août 2013 portant fixation du montant du barème de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 1235-1 du code du travail.

* 362 L. 1454-1-2 du code du travail.

* 363 L. 1454-1-2 du même code.

* 364 L. 1454-1-3 du même code.

* 365 L. 1454-1-3 du même code.

* 366 Op. cit., p. 59.

* 367 L'article 6, alinéa 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales prévoit que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable ».

* 368 Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives.

* 369 Cette sanction, prévue à l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime et pouvant aller jusqu'à 914,70 euros par hectare, est prononcée par l'autorité administrative à l'encontre de l'exploitant agricole dont le fonds n'est pas exploité conformément aux règles entourant la mise en valeur des terres agricoles ou des ateliers de production hors sol.

* 370 Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire.

* 371 Art. L. 141-23 à L. 141-32 du code de commerce.

* 372 Art. L. 23-10-1 à L. 23-10-12 du code de commerce.

* 373 Loi n° 2014-384 du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, également appelée « loi Florange ».

* 374 Art. L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 du code du travail.

* 375 Art. L. 1233-57-21 du code du travail.

* 376 Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 377 Lors de l'examen en commission le 29 octobre 2014 du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives, un amendement de Jean-Jacques Hyest (COM-6) avait été adopté visant à supprimer ce dispositif. En outre, lors de l'examen en séance publique le 5 mai 2015 du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, l'amendement n° 756 rectifié de Bruno Retailleau a été adopté afin de limiter le délai d'information préalable des salariés aux seuls cas de cessation d'activité du fait de l'absence de repreneur.

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