B. LES CRÉDITS AUTRES QUE LES DÉPENSES DE PERSONNEL SONT DYNAMIQUES ET LES MONTANTS PRÉVUS TÉMOIGNENT D'UN EFFORT NOTABLE DE SINCÉRISATION

1. Avec plus de 5 milliards d'euros, les crédits autres que les dépenses de personnel peuvent être comparés à une mission budgétaire propre

En 2020, les dépenses de la mission autres que celles de personnel s'élèveraient à 5,5 milliards d'euros en AE comme en CP .

Le niveau de ces dépenses peut être comparé à celui des autres missions du budget général . Il est, ainsi, supérieur à l'ensemble des crédits demandés pour les missions « Administration générale et territoriale de l'État », « Relations avec les collectivités territoriales » ou encore « Agriculture ».

Le niveau de ces dépenses augmenterait de + 3,4 % en 2020 par rapport aux montants inscrits en loi de finances initiale pour 2019 . Il s'agit, de ce fait, d'une croissance près de deux fois supérieure à celle des crédits de l'ensemble de la mission en 2020.

La répartition des crédits entre les différents titres laisse apparaitre que près de 86 % d'entre eux correspondent à des dépenses d'intervention pour un montant s'élevant, en 2020, à 4,5 milliards d'euros.

Répartition des dépenses autres que celles de personnel
de la mission « Enseignement scolaire » en 2020

Titre de la dépense

Montant en AE

Montant en CP

Titre 3 - Dépenses de fonctionnement

721,7 M€

698,80 M€

dont dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

562,27 M€

539,37 M€

dont subventions pour charges de service public

159,43 M€

159,43 M€

Titre 5 - Dépenses d'investissement

181,74 M€

67,11 M€

dont dépenses pour immobilisations corporelles de l'État

181,74 M€

67,11 M€

Titre 6 - Dépenses d'intervention

4 518,89 M€

4 518,89 M€

dont transferts aux ménages

892,44 M€

892,44 M€

dont transferts aux collectivités territoriales

2 453,43 M€

2 453,43 M€

dont transferts aux autres collectivités

1 173,02 M€

1 173,02 M€

Titre 7 - Dépenses d'opérations financières

0,17 M€

0,17 M€

dont dotations en fonds propres

0,17 M€

0,17 M€

Total hors titre 2

5 422,5 M€

5 285 M€

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Ces dépenses d'intervention sont particulièrement dynamiques puisqu'elles sont en augmentation de plus de 5 % par rapport à 2019.

Elles se répartissent entre trois grandes catégories dont la plus importante - du point de vue des montants transférés - concerne les dépenses en faveur des collectivités territoriales .

À titre de comparaison, le montant des transferts aux collectivités territoriales portés par la mission « Enseignement scolaire » s'élèverait à 2,4 milliards d'euros ce qui représente l'équivalent de plus de 60 % des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » .

2. Si la nature ou l'évolution de certaines dépenses prévues en 2020 peuvent susciter des interrogations, nombre d'entre elles sont pleinement justifiées et s'inscrivent, le cas échéant, dans une démarche de sincérisation

Un certain nombre des orientations budgétaires proposées au titre de la mission « Enseignement scolaire » peuvent susciter des interrogations.

Pour certaines d'entre elles, votre rapporteur spécial souhaite apporter des éléments de contexte et d'explication .

a) Une diminution des subventions aux établissements publics locaux d'enseignement du second degré qui s'inscrit dans un souci mal expliqué de sincérisation de la prévision budgétaire

Le programme « 141 - Enseignement scolaire public du second degré » connaitrait, en 2020, une importante contraction des dépenses de fonctionnement (- 14,1 %) et d'intervention (- 19,5 %) représentant un montant total de 23 millions d'euros .

Cette évolution est portée principalement par une baisse des subventions versées aux établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) de 16,4 millions d'euros (- 32 %) . Mis en comparaison avec l'évolution observée depuis 2017, cette baisse semble d'autant plus prononcée.

Évolution du montant des subventions
versées aux EPLE entre 2017 et 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Pour rappel, les subventions aux EPLE permettent de couvrir les dépenses pédagogiques restant à la charge de l'État dont la nature est définie à l'article L. 211-8 du code de l'éducation.

Article L211-8 du code de l'éducation

« L'État a la charge :

1° De la rémunération du personnel enseignant des écoles élémentaires et des écoles maternelles créées conformément à l'article L. 212-1, sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 216-1 ;

2° De la rémunération du personnel de l'administration et de l'inspection ;

3° De la rémunération du personnel exerçant dans les collèges, sous réserve des dispositions des articles L. 213-2-1 et L. 216-1 ;

4° De la rémunération du personnel exerçant dans les lycées, sous réserve des dispositions des articles L. 214-6-1 et L. 216-1 ;

Des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique dans les collèges, les lycées et les établissements d'éducation spéciale, dont celles afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique, ainsi que de la fourniture des manuels scolaires dans les collèges, les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole mentionnés à l'article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime et les établissements d'éducation spéciale et des documents à caractère pédagogique à usage collectif dans les lycées professionnels ;

6° De la rémunération des personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

7° Des droits dus en contrepartie de la reproduction par reprographie à usage pédagogique d'oeuvres protégées dans les écoles élémentaires et les écoles maternelles créées conformément à l'article L. 212-1 . »

Votre rapporteur spécial s'est étonné à la fois de cette diminution des crédits mais également de sa répartition .

En effet, le montant des subventions accordées aux établissements régionaux d'enseignement adapté (EREA) et aux sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) devrait diminuer de 6 millions d'euros par rapport à l'autorisation prévue en loi de finances pour 2019. En conséquence, la dépense par élève passerait de 10,41 € à 7,46 €.

De même, les lycées professionnels devraient s'attendre à une contraction de la subvention qui leur est accordée de 2,6 millions d'euros par rapport à 2019. Celle-ci se traduira par une baisse de la dépense par élève de 17,81 € à 12,77 €.

Votre rapporteur spécial a régulièrement insisté sur l'importance qu'il accorde à l'enseignement professionnel et à l'accès à l'école le plus large.

L'absence d'explications détaillées dans les documents budgétaires permettant d'apprécier l'opportunité ou la justification de cette prévision budgétaire contribue à la rendre assez incompréhensible.

Votre rapporteur spécial a, dès lors, été particulièrement vigilant lors des auditions qu'il a conduites à ce que le ministère de l'Éducation nationale et de la jeunesse fournisse des éléments de justification.

En l'espèce, il a été indiqué à votre rapporteur spécial que cette évolution était justifiée par une volonté de sincérisation de la prévision budgétaire .

En effet, il est apparu que les montants des subventions ainsi versées aux établissements n'étaient généralement pas entièrement consommés formant, à leur profit, un reliquat qui n'était que rarement restitué.

En tenant compte de l'existence de tels reliquats dans la trésorerie des établissements, les crédits demandés sont minorés de sorte à maintenir au même niveau le ratio de la dotation budgétaire par rapport au nombre d'élèves.

Votre rapporteur spécial entend ces éléments d'explication et considère qu'ils justifient effectivement une réduction du montant des crédits pédagogiques demandés pour 2020 .

Néanmoins, il considère que le montant de ces reliquats et les explications précédentes auraient dû figurer dans le projet annuel de performances .

En effet, même s'il s'agit de montants qui ne sont retracés qu'en gestion, ils participent directement à une décision de nature budgétaire et politique et doivent donc être versés le plus tôt possible au débat public .

b) Une baisse des « fonds sociaux » qui s'inscrit dans la même démarche de sincérisation

L'action « Aide sociale » du programme 230 - « Vie de l'élève » serait marquée, en 2020, par une réduction équivalente de 50 % des crédits de l'enveloppe dédiée au fonds sociaux des établissements.

Ces fonds sont versés aux établissements pour apporter une aide exceptionnelle aux familles défavorisées sur décision du chef d'établissement après consultation de la communauté éducative.

Ils se composent d'une part destinée à permettre l'accès à la cantine scolaire et d'une autre au profit des collégiens et lycéens pour faire face aux situations difficiles.

Alors qu'en loi de finances pour 2019, ils s'élevaient à près
de 60 millions d'euros, il est prévu de ramener ce montant à 30,7 millions d'euros en 2020.

Compte tenu de la vocation de ces fonds destinés à permettre de soulager les élèves et les familles connaissant des situations de grande fragilité, cette diminution a alerté votre rapporteur spécial.

Toutefois - et de la même manière que s'agissant des subventions aux établissements - il s'avère que cette mesure se justifie par une volonté de sincérisation budgétaire et n'aura pas d'impact sur la capacité des établissements à faire face aux situations auxquelles ils peuvent être confrontées.

En effet, la sous-consommation - forte heureuse - de ces fonds dans les années précédentes a contribuée à la constitution d'un reliquat dans la trésorerie des établissements.

Suivant le même raisonnement que celui qu'il a retenu s'agissant des subventions aux établissements, le ministère a souhaité ramener le niveau des crédits à celui de 2018 de sorte à tenir compte des reliquats à la disposition des établissements.

Pour les mêmes raisons qu'évoquées précédemment, votre rapporteur spécial adhère à la proposition du Gouvernement , d'une part, et l'incite à mieux faire état des éléments de compréhension nécessaires dans les documents budgétaires, d'autre part.

c) Un financement des « internats du XXIème siècle » par la Caisse des dépôts et consignations qui peut susciter quelques doutes quant à sa pérennité

A l'occasion d'une conférence de presse donnée le 1 er juillet 2019, le ministre de l'Éducation nationale a fait part de son intention de relancer le programme des internats d'excellence dans la perspective de développer des « internats du XXIème siècle ».

Prévu pour être déployé entre 2020 et 2022, ce plan ambitionne de renforcer les capacités actuelles d'accueil en internat de 13 000 places en soutenant la mise en place de 240 projets d'internats . En 2018,
ce sont 201 500 élèves qui étaient internes dans le second degré.

Ces établissements se distingueraient en trois grandes catégories :

- Les « résidences à thèmes » ;

- Les internats d'excellence ;

- Les internats et campus « pro ».

Cette ambition politique s'appuie, toutefois, sur la bonne volonté des collectivités territoriales et sur la mobilisation de leurs ressources.

Pour les inciter à s'investir dans des projets qui pourraient - indéniablement - favoriser l'attractivité de territoires aujourd'hui en grande difficulté, l'État s'appuie sur la Caisse des dépôts et consignations pour qu'elle assure une mission de financement des initiatives à hauteur d'un milliard d'euro.

Votre rapporteur spécial considère que ces « internats du XXIème siècle » sont une excellente initiative mais s'inquiète de la pérennité et de la transparence - notamment financière - d'un tel projet.

La question des moyens alloués par l'État au fonctionnement de ces établissements devra également trouver une réponse ce qui n'est pas le cas à ce stade.

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