C. UN DÉPASSEMENT DU TRIENNAL DE PLUS DE 26 %, TRADUISANT LA VOLONTÉ DU GOUVERNEMENT DE MASQUER LE COÛT DE L'IMMIGRATION

Sur le triennal 2018-2020 10 ( * ) , les crédits devaient diminuer de 1,4 % en valeur, contre une augmentation de 3 % en moyenne pour les missions du budget général. Votre rapporteur spécial avait estimé dès 2017 que cette programmation était irréaliste, eu égard à l'augmentation prévisible des flux sur les deux prochaines années (demandeurs d'asile nationaux et sous procédure Dublin). Il estimait en outre que cette programmation prenait le risque de ne pas donner de marge de manoeuvre budgétaire suffisante pour renforcer certains aspects fondamentaux de la mission, comme la lutte contre l'immigration irrégulière, ou le nécessaire renforcement du parcours d'intégration des étrangers primo-arrivants 11 ( * ) . Le précédent projet de loi de finances prévoyait d'ores et déjà un dépassement de la loi de programmation des finances publiques de plus de 15,7 %.

Sans surprise, ce dépassement se reproduit dans le présent budget, puisque les crédits dépasseront la programmation triennale, de plus de 26 %.

Comparaison des crédits demandés à ceux prévus par la LPFP

(en millions d'euros et en %)

PLF 2020

LPFP 2020 actualisée des transferts

Évolution LPFP 2020 / PLF 2020

Évolution LPFP 2020 / PLF 2020 en %

Mission « Immigration, asile et intégration »

1 818,1

1 444,92

378,18

26,70%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Ce dépassement constitue le plus important de l'ensemble des missions du budget général de l'État.

Comparaison entre les crédits des missions en 2020 et la LPFP

(en %)

Les prévisions de la LPFP par mission sont retraitées de la différence entre l'inflation prévue et l'inflation constatée en 2018 et estimée en 2019. Les crédits des missions en 2020 sont considérés sur le périmètre de la norme de dépenses pilotables, et retraités des mesures de transfert, de périmètre et de maquette survenues sur les missions entre 2018 et le projet de loi de finances pour 2020.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires (données retraitées)

Cette hausse est principalement imputable aux crédits du programme 303 « Immigration et asile », qui connaissent une hausse de 268,9 millions d'euros (+24,2 %) en CP par rapport à l'annuité 2020 du triennal. Cette hausse est la conséquence d'une réévaluation de certaines dotations, telles que l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA), l'hébergement d'urgence pour les demandeurs d'asile (HUDA) et la gestion des centres de rétention administrative (CRA). En effet, la prévision de dépenses en LPFP 2020 s'appuyait sur un flux prévisionnel de + 10 % de demandes d'asile en 2017 et stable ensuite, alors que la demande d'asile a progressé de + 22,7 % entre 2017 et 2018 et continue d'augmenter en 2019 (cf. infra ). Votre rapporteur spécial estime que ce dépassement procède directement d'une volonté délibérée de masquer le coût réel de l'immigration, notamment de la demande d'asile.

Les crédits du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » enregistrent quant à eux une hausse de 104,2 millions d'euros (+ 31,3 %) en CP par rapport à l'annuité 2020 de la LPFP.

Détail des principales causes de dépassement de la LPFP

Les crédits de l'action n°2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » sont en hausse de 221,3 millions d'euros (+ 21,5 %) en CP par rapport à la LPFP. Cette évolution se répartit de la manière suivante :

- + 191,7 millions d'euros (+ 74,8 %) pour le financement de l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA) créée par la loi du 29 juillet 2015 portant réforme de l'asile ;

- + 9,86 millions d'euros pour l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile en vue d'accroître le nombre de places et de rationaliser l'hébergement ;

- + 19,8 millions d'euros pour l'OFPRA afin de recruter 150 officiers de protection et réduire les délais d'instruction des demandes d'asile.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire


* 10 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 11 Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Sébastien Meurant, fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017.

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