B. LE PARTENARIAT ÉTAT-DÉPARTEMENTS S'ÉTEND ÉGALEMENT DEPUIS 2020 AU CHAMP DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE

Un second processus de contractualisation associant l'État, les départements et les agences régionales de santé (ARS) a été engagé en 2021, portant sur la stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance .

La stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance 2020-2022

La stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance présentée le 14 octobre 2019 constitue le cadre de mise en oeuvre d'actions concrètes au bénéfice des enfants et de leurs familles pour renforcer l'accès à la prévention en santé de tous les enfants, améliorer la situation des enfants protégés (soit 340 000 mineurs environ), et produire une meilleure convergence des réponses à leurs besoins dans les territoires. Elle s'inscrit dans la continuité du plan « Priorité prévention » qui a fait des 1 000 premiers jours un axe phare de la politique de santé, et en complémentarité avec le plan 2020-2022 pour en finir avec les violences faites aux enfants.

Les actions de cette stratégie s'articulent autour de 4 engagements :

1. agir le plus précocement possible pour répondre aux besoins des enfants et de leurs familles, en répondant de manière réactive aux besoins de relayage des parents ;

2. sécuriser les parcours des enfants protégés et prévenir les ruptures, en favorisant l'innovation et la diversification des interventions auprès de l'enfant protégé ;

3. donner aux enfants les moyens d'agir et de garantir leurs droits, en renforçant la participation des enfants aux décisions qui les concernent et en fluidifiant notamment l'accompagnement scolaire des enfants protégés ;

4. préparer l'avenir en amont des 18 ans pour faciliter l'accès au logement et aux droits des jeunes sortants de l'aide sociale à l'enfance.

Source : documents budgétaires

Une enveloppe de 140 millions d'euros financée sur le programme 304 est allouée à ce dispositif de contractualisation en PLF 2022, soit 25 millions d'euros de plus qu'en LFI 2021.

69 départements ont conclu un contrat avec l'État dans ce cadre. Le dispositif pourra être étendu à tous les départements volontaires en 2022.

C. L'ACCUEIL ET L'ORIENTATION DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS RESTE UNE SOURCE DE TENSIONS ENTRE L'ÉTAT ET LES DÉPARTEMENTS

Comme les rapporteurs spéciaux l'ont déjà souligné, la politique d'accueil et d'orientation des mineurs non accompagnés (MNA) est source de nombreuses tensions entre l'État et les départements.

L'accueil et l'orientation des MNA relève en principe des compétences des départements.

En application de l'article 48 de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance , il revient au président du conseil départemental un rôle de mettre à l'abri et d'évaluer la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille dans son département, avant que ceux-ci ne soient répartis entre les départements par le ministre de la justice.

En vertu de leur compétence de gestion du service d'aide sociale à l'enfance (ASE) prévue par l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles, les départements sont également chargés de la prise en charge des MNA répartis sur leur territoire.

Dans un rapport récent 14 ( * ) , les sénateurs Hussein Bourgi, Laurent Burgoa, Xavier Iacovelli et Henri Leroy, ont évalué les dépenses annuelles totales consacrées à ces missions à 1,1 milliard d'euros (hors contrats jeune majeur). Ils relèvent cependant des difficultés à retracer avec précision les dépenses d'aide sociale à l'enfance directement imputables aux MNA, et appellent pour cette raison de leurs voeux la réalisation d'une enquête nationale sur les coûts pour les départements de la prise en charge des MNA, proposition à laquelle les rapporteurs ne peuvent que souscrire.

Alors que le nombre d'arrivées de MNA s'est fortement accru à partir de 2016, l'État assure désormais également une participation financière à la politique d'accueil et d'orientation des MNA , relevant des crédits du programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». En PLF 2022, ces crédits s'élèvent à 92,4 millions d'euros, soit une baisse de 27,5 millions d'euros par rapport à 2021 , faisant elle-même suite à une baisse de 42 millions d'euros en LFI 2021 par rapport à 2020, explicable par la tendance à la décrue des entrées de MNA constatée depuis 2018, comme le montre le graphique ci-dessous.

Nombre de personnes déclarées MNA

Source : mission d'information du Sénat sur les mineurs non accompagnés

S'agissant de la phase de mise à l'abri et d'accompagnement , depuis le 1 er janvier 2019 et conformément au décret n° 2019-670 du 27 juin 2019 et à l'arrêté du 28 juin 2019 pris pour son application, la participation forfaitaire financière de l'État est fixée à 500 euros par jeune auxquels s'ajoutent 90 euros par jour pendant 14 jours maximum puis 20 euros par jour pendant 9 jours maximum pour chaque jeune effectivement mis à l'abri.

S'agissant de la phase d'ASE , la participation de l'État a été fixée à 30 % du coût correspondant à la prise en charge du nombre de MNA supplémentaires accueillis par les départements au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. L'arrêté du 23 juillet 2018 fixant le montant alloué à chaque département a été publié sur cette base au Journal officiel du 5 août 2018, pour un montant total de 96,2 millions d'euros en 2018. Depuis 2019, l'État et l'ADF ont convenu d'une prolongation de cette aide exceptionnelle, sur la base de 6000 euros par jeune MNA supplémentaires pris en charge par l'ASE au 31 décembre de l'année N par rapport au 31 décembre de l'année N-1 et pour 75 % des jeunes concernés. Le montant total de cette aide s'établit donc à 15,8 millions d'euros en 2020, et 1,7 million d'euros en 2021.

Les auteurs du rapport précité ont néanmoins fortement critiqué la formule de calcul de cette dotation qui, parce qu'elle se fonde sur le « flux » et non le « stock », « ne constitue pas une assiette pertinente pour mesurer le besoin de financement complémentaire d'un département donné » et « n'est justifié par aucun raisonnement objectif ».

Même si elle s'inscrit dans le contexte d'une baisse des entrées de MNA, cette baisse tendancielle de l'aide de l'État constitue une source de tensions avec les départements . La charge financière supportée par les départements au titre de l'accueil et de l'évaluation des MNA peut à bien des égards être considérée comme indue et devant relever de la politique migratoire de l'État. Ces derniers auraient davantage vocation à concentrer leur action sur le volet d'aide sociale à l'enfance, qui correspond à leur vocation.

Aussi, les rapporteurs soulignent l'importance d'un engagement fort et durable de l'État aux côtés des départements dans la politique d'accueil et d'orientation des MNA , qui est source de problématiques complexes, au carrefour d'enjeux de politique migratoire, d'intégration, d'action sociale et dans certains cas de prévention de la délinquance juvénile.


* 14 « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale »,

Rapport d'information de MM. Hussein BOURGI, Laurent BURGOA, Xavier IACOVELLI et Henri LEROY, fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales n° 854 (2020-2021), 29 septembre 2021.

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