Rapport général n° 163 (2021-2022) de MM. Arnaud BAZIN et Éric BOCQUET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021

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N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 30

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

Rapporteurs spéciaux : MM. Arnaud BAZIN et Éric BOCQUET

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l'État en faveur des personnes les plus fragiles. Elle finance notamment la prime d'activité et l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

I. LES CRÉDITS DEMANDÉS EN PLF 2022 S'ÉLÈVENT À PRÈS DE 28 MILLIARDS D'EUROS, SOIT UNE HAUSSE DE 3 % À PÉRIMÈTRE CONSTANT

En projet de loi de finances (PLF) pour 2022, les crédits demandés au titre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élèvent à 27,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 27,6 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Plus des trois quarts de ce total est consacré respectivement au financement de l'AAH et de la prime d'activité.

Total mission en PLF 2022 (CP)

Dont AAH

Dont prime d'activité

La mission finance en outre plusieurs actions essentielles des politiques de la solidarité, en particulier :

- la participation financière de l'État à la politique d'accueil et d'orientation des mineurs non accompagnés mise en oeuvre par les départements : 92,4 millions d'euros en PLF 2022 ;

- le soutien au secteur de l'aide alimentaire : 56,7 millions d'euros en PLF 2022, pour un total de 122,5 millions d'euros en comptant les co-financements européens ;

- les politiques de l'égalité entre les femmes et les hommes : 50,6 millions d'euros (CP), dont 28 millions d'euros fléchés sur la lutte contre les violences faites aux femmes.

Les crédits de la mission se caractérisent par une dynamique importante sur la période récente, liée à sa mobilisation face aux crises , que ce soit avec l'augmentation pérenne de la prime d'activité décidée en réponse à l'urgence sociale exprimée par le mouvement des « gilets jaunes » (+ 4,4 milliards d'euros annuels) ou encore avec le versement d'aides exceptionnelles de solidarité (AES) en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire (1,9 milliard d'euros).

Évolution des crédits de la mission à périmètre courant entre 2018 et 2022 (CP)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

À périmètre constant, si l'on neutralise les mesures de périmètre et de transfert, en particulier le financement de l'expérimentation de recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) prévue par l'article 12 du PLF 2022, les crédits demandés sont en hausse de 3 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2021 .

Cette hausse est notamment imputable à la dynamique de l'AAH, qui intègre une mesure nouvelle d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint (voir infra ), et de la prime d'activité, ainsi que du renforcement des moyens alloués aux stratégies nationales de lutte contre la pauvreté (325 millions d'euros en PLF 2022) et de la protection de l'enfance (140 millions d'euros), qui sont mises en oeuvre dans le cadre d'une contractualisation avec les départements .

Décomposition de la hausse des crédits de la mission en PLF 2022
à périmètre constant (CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

II. FOCUS : LE BILAN CONTRASTÉ DU QUINQUENNAT SUR L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

A. UNE DÉPENSE STRUCTURELLEMENT DYNAMIQUE

Les dépenses d'AAH sont structurellement orientées à la hausse , notamment en raison des évolutions démographiques, avec le vieillissement de la population, de la mise en oeuvre de différentes réformes favorables aux bénéficiaires de l'AAH, bien que celles-ci aient été modérées par d'autres mesures d'économies (voir infra ), du faible taux de sortie du dispositif pour l'AAH , et de l'extension du champ et de la reconnaissance du handicap , qui a joué un rôle non négligeable dans l'augmentation des dépenses d'AAH.

Ainsi, selon les dernières prévisions, le nombre de bénéficiaires progresserait de 28,5 % depuis 2012, pour s'établir à environ 1,28 million en 2021 .

Depuis 2018, la dépense a ainsi connu une progression de 24 % pour s'établir à 11,8 milliards d'euros en PLF 2022 , avec un taux de croissance annuelle moyen de 5,5 %.

Croissance de la dépense d'AAH depuis 2018

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

B. ENTRE HAUSSE DU MONTANT DE L'AAH ET DISCRÈTES MESURES D'ÉCONOMIES : QUAND L'ÉTAT DONNE D'UNE MAIN ET REPREND DE L'AUTRE

Conformément à un engagement du président de la République, le montant à taux plein de l'AAH a été significativement revalorisé . Celui-ci a d'abord été porté de 820 à 860 euros en LFI 2018 avant d'être relevé à 900 euros en LFI 2019. Compte-tenu de son indexation à l'évolution des prix, celui-ci est aujourd'hui de 903,60 euros mensuels au 1 er avril 2021. Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux, le coût de cette revalorisation est estimé à 0,8 milliard d'euros par an .

Si cet effort conséquent en faveur des personnes en situation de handicap les plus modestes peut être salué, il convient cependant de noter que ces revalorisations se sont accompagnées de discrètes mesures d'économies, absorbant in fine plus du tiers de la hausse des dépenses qu'elle aurait spontanément provoquées (voir tableau infra ). Selon les caractéristiques des bénéficiaires, elles peuvent avoir pour effet d'en atténuer considérablement la portée.

Estimation de l'impact budgétaire des mesures positives et négatives prises ou proposées sur 2018-2022 en matière d'AAH

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

Total 2018-2022

Mesures positives

52

648

775

775

960

3 210

Revalorisation plafond

52

648

775

775

775

3 025

Abattement forfaitaire revenus du conjoint (art. 51 PLF 2022)

-

-

-

-

185

185

Mesures négatives

- 10

- 250,5

- 375,7

- 275,7

- 275,7

- 1 187,6

Réforme plafond de ressources couples

- 10

- 150

- 270

- 270

- 270

- 970

Suppression complément de ressources

-

- 0,5

- 5,7

- 5,7

- 5,7

- 17,6

Sous-indexation revalorisation légale

-

- 100

- 100

- 200

Bilan

42

397,5

399,3

499,3

684,3

2 022,4

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

C. TOUJOURS PAS DE « DÉCONJUGALISATION » DE L'AAH

L'article 51 du présent PLF 2022 , rattaché à la mission, prévoit d'instaurer une mesure d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint du bénéficiaire de l'AAH, dont le coût est estimé à 185 millions d'euros.

Pour autant, le dispositif ne saurait en aucun cas être assimilé à une réelle « déconjugalisation » de l'AAH, soit l'absence totale de prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'allocation . Une telle évolution est défendue par les associations représentant les personnes en situation de handicap et correspond à une aspiration sociale profonde. Celle-ci permettrait de clarifier la nature du dispositif en faisant de l'AAH une véritable prestation de compensation de l'éloignement de l'emploi provoqué par le handicap, et d'accès à l'autonomie .

La proposition de « déconjugalisation » de l'AAH constitue même l'objet de la première pétition à recueillir plus de 100 000 signatures sur la plateforme dédiée du Sénat en février 2021 . L'atteinte de ce seuil a entraîné l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale. Le Sénat a adopté dans ce cadre une disposition tendant à la « déconjugalisation » de l'AAH en première lecture le 9 mars 2021 . En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a ensuite modifié le texte en adoptant un dispositif d'abattement forfaitaire identique à celui de l'article 51 du présent PLF, avant que le Sénat ne rétablisse sa version dans le texte adopté le 12 octobre 2021 .

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et de l'article 51.

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission et l'article 51. Elle a proposé l'adoption sans modification de l'article 52 et la suppression de l'article 53.

Au 10 octobre 2021, date limite, en application de l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 59 % des réponses portant sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux.

PREMIÈRE PARTIE :
LES GRANDS ENJEUX BUDGÉTAIRES
DE LA MISSION « SOLIDARITÉ, INSERTION
ET ÉGALITÉ DES CHANCES » EN 2022

I. LES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 2022 S'ÉLÈVENT À PRÈS DE 28 MILLIARDS D'EUROS, SOIT UNE HAUSSE DE 3 % À PÉRIMÈTRE CONSTANT

A. UNE MISSION PERMETTANT LE FINANCEMENT DE DIVERSES POLITIQUES DANS LE DOMAINE DE L'INCLUSION SOCIALE, DU HANDICAP ET DE L'ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES, POUR UN MONTANT GLOBAL DE PRÈS DE 28 MILLIARDS D'EUROS

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l'État en faveur des personnes les plus fragiles.

Les autorisations d'engagement (AE) demandées s'élèvent à 27,9 milliards d'euros en projet de loi de finances (PLF) pour 2022 contre 26,1 milliards d'euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2021 soit une hausse de 6,1 % .

Les crédits de paiement (CP) demandés s'élèvent également à 27,6 milliards d'euros en PLF 2022 contre 26,3 milliards d'euros en LFI 2021, soit une hausse de 5,1 % .

Pour mémoire, la mission se décompose en quatre programmes :

- le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » porte notamment les crédits de la prime d'activité . Il concourt entre autres à la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté. Il permet enfin de financer les politiques d'aide alimentaire, les actions relatives à la qualification en travail social, les mesures de protection juridique des majeurs, des actions de protection et d'accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables, ainsi que l'aide à la vie familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine. Les crédits demandés s'élèvent à 13,1 milliards d'euros en AE et en CP, soit une hausse de 6,1 % par rapport à la LFI 2021 à périmètre courant ;

- le programme 157 « Handicap et dépendance » porte notamment les crédits de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Il assure également le financement de l'aide au poste versée aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ainsi que le dispositif d'emploi accompagné. Le programme finance en outre des actions de lutte contre la maltraitance des personnes dépendantes. Les crédits demandés pour 2022 s'élèvent à 13,2 milliards d'euros en AE comme CP, soit une hausse de 4,5 % par rapport à la LFI 2021 à périmètre courant ;

- le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » vise notamment à financer des actions d'accès au droit, de lutte contre les violences faites aux femmes et visant à favoriser l'émancipation économique des femmes. Les crédits demandés pour 2022 s'élèvent à 47,4 millions d'euros en AE, soit une légère diminution de 2,7 % par rapport à la LFI 2021 et à 50,6 millions d'euros en CP, soit une nette hausse de 22 % à périmètre courant ;

- enfin, le programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » constitue le programme d'appui et de soutien aux politiques du ministère des solidarités et de la santé, portant l'ensemble des emplois de la mission. Il finance également la subvention pour charges de service public allouée aux agences régionales de santé (ARS ). Les crédits demandés pour 2022 s'élèvent à 27,8 milliards d'euros en AE et 27,6 milliards d'euros en CP, en hausse respectivement de 6,1 % et de 5,2 % par rapport à la LFI 2021 à périmètre courant .

Les crédits des programmes de la mission « Solidarité, insertion
et égalité des chances » en LFI 2021 et en PLF 2022 à périmètre courant

(en milliers d'euros et en pourcentage)

Programme

LFI 2021

PLF 2022

Variation 2022/2021

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes »

12 388 815,2

12 388 815,2

13 141 875,1

13 141 875,1

+ 6,08 %

+ 6,08 %

Programme 157 « Handicap et dépendance »

12 668 464,9

12 663 564,9

13 237 188,0

13 238 484,5

+ 4,49 %

+ 4,54 %

Programme 137
« Égalité entre les femmes et les hommes »

48 695,6

41 495,6

47 388,6

50 609,4

- 2,68 %

+ 21,96 %

Programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales »

1 150 309,0

1 159 223,2

1 439 152,0

1 174 510,3

+ 25,11 %

+ 1,32 %

TOTAL

26 256 284,6

26 253 098,8

27 865 603,8

27 605 479,3

+ 6,13 %

+ 5,15 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Il convient de noter que la prime d'activité (7,8 milliards d'euros) et l'AAH (11,8 milliards d'euros) représentent à elles seules plus des trois quarts des crédits demandés pour la mission en PLF 2022 (78,3 %).

Part de la prime d'activité et de l'AAH
dans les crédits demandés pour la mission en PLF 2022 (CP)

(en %)

Source : commission des finances du Sénat

B. UNE AUGMENTATION NOTABLE DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2022

1. Une mission largement mobilisée face aux crises

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » se caractérisent par un taux de croissance annuel moyen de plus de 8 %.

Si une tendance à la hausse des crédits est indéniable, il convient cependant de relever que celle-ci est largement liée à la mobilisation de la mission pour financer la réponse à des situations d'urgence économique et sociale .

L'augmentation à 90 euros du bonus individuel de la prime d'activité avait ainsi constitué en 2019 l'un des principaux vecteurs utilisés par le Gouvernement pour répondre à l'urgence sociale exprimée par le mouvement des « gilets jaunes ». Cette mesure représente un coût annuel pérenne d'environ 4,4 milliards d'euros.

L'exercice 2020 avait ensuite été marquée par le financement d'une série de mesures d'urgence en réponse à la crise sanitaire, avec l'ouverture de 2,7 milliards d'euros en lois de finances rectificatives , au premier rang desquelles les aides exceptionnelles de solidarité (AES) en faveur des ménages modestes (1,9 milliard d'euros) , ainsi qu'un plan d'urgence en faveur de l'aide alimentaire (94 millions d'euros), de l'aide sociale à l'enfance (50 millions d'euros) et de lutte contre les violences conjugales dans le contexte des confinements (4 millions d'euros).

Évolution des crédits de la mission à périmètre courant entre 2018 et 2022 (CP)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Une comparaison entre les exercices affectée par des mesures de périmètre et de transfert, au premier rang desquelles le financement de l'expérimentation de la recentralisation du RSA

La mission est affectée par des mouvements de périmètre et de transferts représentant un montant global de 568 millions d'euros en AE et en CP.

Le programme 304 porte l'essentiel de ces mesures, avec :

- le financement par l'État de l'expérimentation de recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) prévue par l'article 12 du présent PLF et qui ne devrait concerner en 2022 que le département de la Seine-Saint-Denis, pour un montant de 524,9 millions d'euros en AE et en CP (voir infra ) ;

- le transfert, dans le cadre d'une nouvelle action 21 « allocations et dépenses d'aide sociale », de la prise en charge d'une partie des prestations d'aide sociale à destination des personnes sans domicile fixe âgées ou en situation de handicap (34 millions d'euros en AE et en CP). Il s'agit d'une compétence résiduelle de l'État, par dérogation à la décentralisation aux départements de la compétence d'aide sociale, qui était auparavant financée sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

Le programme 157 comporte également une mesure de périmètre sortante de - 1,8 million d'euros en AE et en CP, dans le cadre d'un ajustement de la répartition des compétences entre l'État et la sécurité sociale (notamment la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie).

Enfin, le programme 124 est affecté par divers transferts sortants liés à la réorganisation de l'administration territoriale de l'État (voir infra ) et à la création du service public de la rue et du logement (SPRULO) relevant de la mission « Cohésion des territoires », représentant un montant total de - 7,3 millions d'euros en AE et en CP.

La recentralisation du RSA en Seine-Saint-Denis

L'article 12 du PLF 2022 prévoit que les départements qui le souhaitent soient autorisés à expérimenter, pendant cinq ans, une recentralisation du RSA. L'État assurera alors le financement du RSA ainsi que l'instruction, l'attribution et le service de cette prestation qui seront exercés par délégation par les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (MSA). Les départements conserveront donc la compétence liée à l'orientation ainsi que celle liée à l'insertion.

Cette recentralisation se traduira par une mesure de périmètre sur le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » en 2022.

Le département de la Seine-Saint-Denis est actuellement le seul à avoir officiellement manifesté sa volonté de participer à cette expérimentation. Le montant de l'enveloppe budgétaire en PLF 2022 est de 564,9 millions d'euros. Cette enveloppe comprend des frais de gestion pour un 1 million d'euros en faveur des CAF.

Ce montant se décompose entre une mesure de périmètre de 524,9 millions d'euros (égale aux recettes reprises par l'État à compter de 2022) et 40 millions d'euros de crédits intégrés à la budgétisation à périmètre constant (égaux à l'écart entre la mesure de périmètre et la prévision de dépense totale).

Les modalités de financement de ce transfert sont prévues par le même article. Le montant du droit à compensation pour l'État est égal à la moyenne triennale des dépenses des années 2018 à 2020. Pour atteindre ce montant, il est prévu une reprise :

- des compensations historiques résultant du transfert du revenu minimum d'insertion (RMI) et de la généralisation du RSA attribuées sous forme de fiscalité transférée (fractions de TICPE) ;

- des ressources d'accompagnement à l'exercice de la compétence relative au RSA, que sont le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI), prélèvement sur recettes visant à améliorer le taux de couverture des dépenses du RMI-RSA et le dispositif de compensation péréquée (DCP) qui correspond au reversement des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) afin de financer les revalorisations exceptionnelles du RSA socle adoptées depuis 2013 ;

- du solde éventuellement non couvert par la reprise des financements historiques et des ressources d'accompagnement, via la reprise complémentaire d'une fraction maximum de 20% du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ainsi que, le cas échéant, par des parts fixes de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Source : réponses au questionnaire budgétaire

3. À périmètre constant, les crédits de la mission connaîtraient une hausse de 3 % en 2022

À périmètre constant, les crédits de la mission connaissent entre 2021 et 2022 une légère progression de 1,1 milliard d'euros en AE (+ 4 %) et de 802,6 millions d'euros en CP (+ 3 %).

Évolution des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Execution 2020

LFI 2021

PLF 2022 courant

PLF 2022 constant

Evolution PLF 2022 / LFI 2021 (volume)

Evolution PLF 2022 / LFI 2021 (%)

FDC et ADP attendus en 2022

137 - Égalité entre les femmes et les hommes

AE

35,8

48,7

47,4

47,4

- 1,3

- 2,7 %

0,0

CP

36,5

41,5

50,6

50,6

+ 9,1

+ 22,0 %

0,0

157 - Handicap et dépendance

AE

13 068,5

12 668,5

13 237,2

13 2 39,0

+ 570,5

+ 4,5 %

0,0

CP

13 067,2

12 663,6

13 238,5

13 240,3

+ 576,7

+ 4,6 %

0,0

124 - Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

AE

1 383,1

1 150,3

1 439,2

1 446,4

+ 296,1

+ 25,7 %

12,5

CP

1 324,7

1 159,2

1 174,5

1 181,8

+ 22,6

+ 1,9 %

12,5

304 - Inclusion sociale et protection des personnes

AE

14 595,6

12 388,8

13 141,9

12 583,0

+ 194,2

+ 1,6 %

0,0

CP

14 590,8

12 388,8

13 141,9

12 583,0

+ 194,2

+ 1,6 %

0,0

Total mission

AE

29 083,0

26 256,3

27 865,6

27 315,8

+ 1 059,5

+ 4,0 %

12,5

CP

29 019,2

26 253,1

27 605,5

27 055,7

+ 802,6

+ 3,1 %

12,5

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La différence entre les montants courants et constants correspond aux évolutions de périmètre présentées dans le PAP et détaillées ci-dessous. Les différences et pourcentages correspondent à l'évolution en termes constants.

Les principaux facteurs de la hausse constatée en 2022 en CP sont :

- la dynamique de l'AAH, renforcée par une mesure nouvelle « positive » d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint prévue à l'article 51 du présent PLF (voir infra ) : + 562,6 millions d'euros (dont 185 millions d'euros imputables à la mesure d'abattement forfaitaire) ;

- la dynamique de la prime d'activité : + 60,8 millions d'euros ;

- le renforcement des crédits de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté : + 72,5 millions d'euros

- le renforcement des crédits de la stratégie de la protection de l'enfance : + 25 millions d'euros ;

- le renforcement des crédits du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » : + 10,7 millions d'euros.

Décomposition de la hausse des crédits de la mission en PLF 2022
à périmètre constant (CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Hors contribution au CAS Pensions (137,4 millions d'euros en PLF 2022), et au format PLF 2020 1 ( * ) , le budget demandé pour la mission représente un total de 27,3 milliards d'euros, soit un dépassement de 1,3 milliard d'euros par rapport au plafond fixé par le budget triennal 2020-2022 (26,1 milliards d'euros) présenté dans le projet annuel de performance annexé au PLF 2020.

II. UNE HAUSSE DES EMPLOIS RÉMUNÉRÉS PAR LA MISSION, DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR LA RÉPONSE À LA CRISE ET LA RÉFORME DE L'ADMINISTRATION DÉCONCENTRÉE

A. DES EMPLOIS QUI REPARTENT À LA HAUSSE DANS LE CONTEXTE DE LA CRISE SANITAIRE

Les dépenses de personnel représentent 387,2 millions d'euros en PLF 2022 , soit à un niveau stable à périmètre constant.

Ces crédits ne représentent que 1,4 % des CP de la mission , qui est essentiellement composée de dépenses d'intervention. Il est à noter que l'ensemble des crédits du T2 sont ouverts sur le programme support 124.

Les emplois rémunérés par la mission ont toutefois connu une importante baisse au cours des années récentes à périmètre constant, imputable à l'effort de maîtrise des dépenses publiques déployé lors des trois premières années du quinquennat.

Évolution du plafond d'emploi à périmètre constant depuis 2018
(base 2022, hors opérateurs)

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Sur le quinquennat, le plafond d'emplois de la mission (hors opérateurs) a diminué de 426 équivalents temps plein travaillé (ETPT) à périmètre constant.

Au total, l'application des schémas d'emplois a ainsi généré des économies à hauteur de 33,8 millions d'euros .

Économies réalisées au titre du schéma d'emploi des années antérieures

(en millions d'euros)

Source : réponses au questionnaire budgétaire

On observe néanmoins une hausse du plafond d'emplois à périmètre constant en PLF 2022 (+ 136 ETPT), notamment imputable à une nouvelle hausse du schéma d'emplois prévue pour 2022 (+ 35 ETP) après celle de 2021 (+ 29 ETP) .

Ces hausses ont notamment permis de renforcer les équipes d'appui à la cellule de crise sanitaire , ainsi que de couvrir les besoins du nouveau Conseil stratégique des industries de santé. En effet, de l'aveu même du ministère des solidarités et de la santé, « la crise sanitaire due au coronavirus en 2020 a montré que le programme 124 ne pouvait plus diminuer ses effectifs » 2 ( * ) .

Évolution du schéma d'emplois depuis 2018

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Les hausses du plafond d'emplois s'expliquent toutefois également par la nécessité de faire face à certaines difficultés opérationnelles rencontrées dans le cadre de la mise en oeuvre de la réforme « Organisation territoriale de L'État » (voir infra ).

B. UNE ANNÉE 2022 MARQUÉE PAR LA POURSUITE DE LA RÉFORME « ORGANISATION TERRITORIALE DE L'ÉTAT »

La réforme de l'organisation territoriale de l'État (OTE) qui découle d'instructions du Premier ministre adressées aux administrations en 2019 et d'un décret pris début 2020 3 ( * ) , concerne les ministères sociaux au premier chef, en visant :

- une mutualisation des fonctions supports entre les préfectures et les directions départementales interministérielles (DDI) au sein des Secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), créés le 1 er janvier 2021 ;

- un transfert au 1 er janvier 2021 des compétences jeunesse et sports, initialement dévolues aux DR(D)JSCS, à de nouveaux services rattachés aux rectorats : les délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (DRAJES) ;

- un rapprochement, au 1 er avril 2021, des deux réseaux territoriaux préexistants, les directions (régionales) (et départementales) de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (D(R)(D)JSCS) et les directions (régionales) des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DI(R)ECCTE) pour créer un nouveau réseau régional et départemental : les directions (régionales) de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (D(R)EETS) . Cette réforme se décline au niveau départemental par la création de directions départementales de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS). L'objectif était de créer un nouveau réseau capitalisant les compétences d'insertion sociale et d'insertion professionnelle pour donner corps au service public de l'insertion et de l'emploi (SPIE) grâce à la consolidation des acquis des deux réseaux (santé-social et travail-emploi) .

Sa mise en oeuvre opérationnelle, initialement prévue en 2020 et reportée en 2021 en raison de la crise, induit des transferts de personnels de très grande ampleur vers le ministère de l'Éducation nationale, de la jeunesse et des sports (- 2 350 ETPT) et le ministère de l'intérieur (- 78 ETPT) et des transferts de crédits représentant un total de - 6,3 millions d'euros en AE et - 13 millions d'euros en CP.

Le PLF 2022 prévoit une poursuite de ces mouvements , avec des transferts sortants de personnels de - 18 ETPT pour un montant de - 1,2 million d'euros, et des transferts de crédits de - 4,1 millions d'euros.

Au bilan, la réforme devrait concerner près du tiers des ETPT financés sur le programme 124.

L'une des principales difficultés de mise en oeuvre opérationnelle, mise en avant lors des auditions conduites par les rapporteurs spéciaux, réside dans le fait que tous les agents n'ont pas « suivi » leurs missions dans le cadre de la réforme, notamment en raison des mobilités géographiques parfois importantes qu'elle peut nécessiter . Il existe donc une inadéquation en matière d'emplois entre les transferts budgétés en LFI 2021 et les départs réels des agents. La direction des finances, des achats et des services du secrétariat général des ministères sociaux estime qu'environ 190 agents n'ont pas suivi leur mission.

Cependant, grâce à des arbitrages obtenus à l'issue de réunions interministérielles, une révision à la hausse du plafond d'emplois et de la masse salariale correspondante est prévue en gestion 2021. Couplée à un effort de redéploiement interne de ces agents sur des postes vacants, cette hausse vise à permettre la couverture de l'impasse budgétaire 2021 dans ce domaine. De même, le PLF 2022 prévoit une augmentation du plafond d'emplois 2022 à hauteur de 116 ETPT et 4,8 millions d'euros de masse salariale pour permettre au ministère de continuer à faire face à ces inadéquations.

DEUXIÈME PARTIE :
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. LA PRIME D'ACTIVITÉ : UN DISPOSITIF ESSENTIEL EN FAVEUR DU POUVOIR D'ACHAT, MAIS UNE PRÉVISION BUDGÉTAIRE PROBABLEMENT INSUFFISANTE

A. LA PRIME D'ACTIVITÉ AVAIT CONSTITUÉ UN PUISSANT INSTRUMENT DE POUVOIR D'ACHAT POUR RÉPONDRE AUX DEMANDES EXPRIMÉES PAR LE MOUVEMENT DES « GILETS JAUNES »

La prime d'activité , créée par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, a remplacé au 1 er janvier 2016 la part « activité » du revenu de solidarité active (RSA) ainsi que la prime pour l'emploi (PPE). Cette prime est versée aux personnes en activité professionnelle dont les ressources sont inférieures à un certain montant garanti - pour une personne célibataire sans enfant, ce montant est égal à environ 1 787 euros net par mois.

Formule de calcul de la prime d'activité

Le montant de la prime d'activité est calculé sur la base d'un montant forfaitaire variable en fonction de la composition du foyer (dont le nombre d'enfants à charge), auquel s'ajoutent les revenus professionnels pris en compte à hauteur de 61 % afin de favoriser l'activité . Pour mémoire, le montant forfaitaire de la prime d'activité s'élève à 553,71 euros (depuis le 1 er avril 2021) pour un foyer composé d'une personne seule sans enfant.

Un bonus individuel est également ajouté pour chaque personne en activité, membre du foyer, dont les revenus d'activité sont compris entre 0,5 SMIC et 1 SMIC. Le montant du bonus est croissant entre 0,5 SMIC et 1 SMIC et atteint son maximum dès 1 SMIC (soit 161,14 euros par mois au 1 er avril 2021), plafond au-delà duquel son montant est fixe. De ce total est déduit l'ensemble des ressources du foyer (notamment les prestations sociales, les revenus de remplacement).

La prime d'activité est ouverte aux jeunes actifs dès 18 ans , ainsi qu'aux étudiants et aux apprentis ayant perçu, au cours des trois derniers mois, un salaire mensuel supérieur à 78 % du SMIC. Elle a également été ouverte à compter du 1 er juillet 2016 4 ( * ) aux bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) qui travaillent en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou en milieu ordinaire.

Les dépenses liées à la prime d'activité ont fortement augmenté à compter de 2019, le dispositif ayant constitué l'un des principaux vecteurs utilisés par le Gouvernement pour répondre à l'urgence sociale exprimée par le mouvement des « gilets jaunes ». Par ailleurs, la communication qui a entouré la mise en oeuvre de cette réforme a conduit à augmenter le taux de recours de personnes déjà éligibles mais qui n'avaient pas sollicité la prime d'activité. Au total, le nombre de bénéficiaires de la prime d'activité a augmenté de 47 % entre décembre 2018 et décembre 2019.

Les revalorisations de prime d'activité décidées
en 2018 et en 2019

La prime d'activité a été revalorisée afin de soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs modestes et particulièrement ceux rémunérés au Smic :

- le montant forfaitaire de la prime d'activité a été revalorisé de 20 euros à compter du 1 er août 2018 (pour mémoire, le montant forfaitaire de la prime d'activité s'élève, depuis la revalorisation de 0,3 % de son montant en avril 2020, à 553,16 euros pour un foyer composé d'une personne seule sans enfant) ;

- le montant maximal de la composante individuelle de la prime d'activité, le bonus, a été revalorisé de 90 euros à compter du 1 er janvier 2019, passant de 70,49 euros à 160,49 euros, en application du décret n° 2018-1197 du 21 décembre 2018 relatif à la revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité. Versé à chaque membre du foyer dont les revenus sont supérieurs à 0,5 Smic, le montant du bonus est croissant jusqu'à 1 Smic où il atteint son point maximal. Il reste stable au-delà.

Tableau : Impact des mesures réglementaires de revalorisation de la prime d'activité
en masses financières, tous régimes

(en millions d'euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Cette réforme a eu une certaine efficacité puisqu'elle aurait permis la diminution du taux de pauvreté monétaire en France de 0,5 point et la diminution de 0,9 point du taux de pauvreté monétaire au sein des familles monoparentales 5 ( * ) .

En janvier 2020, le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC) a mené, pour la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), une enquête sur l'opinion des Français sur la prime d'activité, dans le cadre de laquelle il est estimé que le dispositif a bien touché les bénéficiaires cibles : les jeunes actifs disposant de salaires peu élevés, sur des contrats de travail s'éloignant de la norme d'emploi à temps plein en contrat à durée indéterminée (CDI). Cette enquête rappelle que la prime d'activité s'adresse aux salariés qui disposent de faibles ressources : 47 % des bénéficiaires de la prime disposent de bas revenus (contre 26 % en moyenne générale), 36 % relèvent des classes moyennes inférieures (contre 24 % en moyenne générale). Elle rappelle également que les trois quarts des bénéficiaires de la prime d'activité sont en emploi. 41 % disposent de bas revenus (contre 22 % des actifs occupés). Ils sont plus souvent en temps partiel subi (19 % contre 11 % des actifs occupés) 6 ( * ) .

Évolution du nombre de foyers bénéficiaires de la prime d'activité et du glissement annuel du nombre de bénéficiaires

(en milliers et en pourcentage)

Source : caisse nationale des allocations familiales

B. UN MONTANT PRÉVISIONNEL DE 9,8 MILLIARDS D'EUROS EN 2022, SANS DOUTE SOUS-ESTIMÉ

En PLF 2022, 9,9 milliards d'euros en AE et en CP sont prévus au titre de ce dispositif , soit une hausse de 100 millions d'euros par rapport à la prévision 2021 (9,8 milliards d'euros).

Compte-tenu du dynamisme observé du marché du travail, la DGCS a indiqué aux rapporteurs spéciaux que les dépenses de prime d'activité ont de fortes chances de dépasser les prévisions . On constate en effet que, sur les exercices précédents, les crédits alloués au dispositif ont systématiquement fait l'objet de surconsommations.

Évolution des crédits prévus et consommés au titre de la prime d'activité (CP)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

II. LE BILAN CONTRASTÉ DU QUINQUENNAT SUR L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

A. UNE DÉPENSE STRUCTURELLEMENT DYNAMIQUE

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées de plus de vingt ans 7 ( * ) . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse. Elle peut se cumuler avec des ressources personnelles, y compris des revenus d'activité 8 ( * ) , dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 10 843,2 euros pour une personne seule sans enfant depuis le 1 er avril 2020 9 ( * ) .

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable 10 ( * ) pour l'accès à l'emploi (RSDAE) ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail (« AAH 2 »).

Ces conditions sont appréciées par les commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) après instruction par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Les dépenses d'AAH sont structurellement orientées à la hausse, en raison :

- des évolutions démographiques , avec le vieillissement de la population . Le risque de survenance d'un handicap et le taux de prévalence de l'AAH augmentent avec l'âge ;

- de la mise en oeuvre de différentes réformes favorables aux bénéficiaires de l'AAH, bien que celles-ci aient été modérées par d'autres mesures d'économies (voir infra ) ;

- du faible taux de sortie du dispositif pour l'AAH : seuls 7,7 % des bénéficiaires sont sortis en 2017 ;

- de l'extension du champ et de la reconnaissance du handicap , qui a joué un rôle non négligeable dans l'augmentation des dépenses d'AAH.

Ainsi, selon les dernières prévisions, le nombre de bénéficiaires progresserait de 28,5  % depuis 2012, pour s'établir à environ 1,28 million en 2021.

Depuis 2018, la dépense a ainsi connu une progression de 24 % pour s'établir à 11,8 milliards d'euros en PLF 2022 , avec un taux de croissance annuelle moyen de 5,5 %.

Croissance de la dépense d'AAH depuis 2018

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

B. ENTRE HAUSSE DU MONTANT DE L'AAH ET DISCRÈTES MESURES D'ÉCONOMIE : QUAND L'ÉTAT DONNE D'UNE MAIN ET REPREND DE L'AUTRE

1. Une revalorisation significative de l'AAH, mais toujours pas de « déconjugalisation »

Conformément à un engagement du président de la République, le montant à taux plein de l'AAH a été significativement revalorisé . Celui-ci a d'abord été porté de 820 à 860 euros en LFI 2018 avant d'être relevé à 900 euros en LFI 2019. Compte-tenu de son indexation à l'évolution des prix, celui-ci est aujourd'hui de 903,60 euros mensuels au 1 er avril 2021 . Selon les informations communiquées aux rapporteurs spéciaux, le coût de cette revalorisation est estimé à 0,8 milliard d'euros par an.

Par ailleurs, l'article 51 du présent projet de loi de finances, rattaché à la mission, prévoit d'instaurer une mesure d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint du bénéficiaire de l'AAH .

Cette mesure doit effectivement permettre un gain financier estimé à 120 euros par mois pour 130 000 bénéficiaires, représentant un coût total estimé à 185 millions d'euros en 2022.

Pour autant, le dispositif ne saurait en aucun cas être assimilé à une réelle « déconjugalisation » de l'AAH , soit l'absence totale de prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'allocation. Une telle évolution est défendue par les associations représentant les personnes en situation de handicap - entendues sur ce point par les rapporteurs spéciaux. Celle-ci témoignerait de la pleine reconnaissance de la spécificité du public ciblé par l'AAH, qui, en raison de son montant et de ses conditions d'accès plus favorables, ne saurait être regardée comme un minimum social comme un autre. Elle permettrait de clarifier la nature du dispositif en faisant de l'AAH une véritable prestation de compensation de l'éloignement de l'emploi provoqué par le handicap, et d'accès à l'autonomie. En risquant d'accroître la dépendance de la personne handicapée aux revenus de son conjoint, la « conjugalisation » constitue en effet un frein à cette logique d'autonomie.

La proposition de « déconjugalisation » de l'AAH constitue même l'objet de la première pétition à recueillir plus de 100 000 signatures sur la plateforme dédiée du Sénat en février 2021 . L'atteinte de ce seuil a entraîné l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale 11 ( * ) . Le Sénat a adopté dans ce cadre une disposition tendant à la déconjugalisation de l'AAH en première lecture le 9 mars 2021 . En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a ensuite modifié le texte en adoptant un dispositif d'abattement forfaitaire identique à celui de l'article 51 du présent PLF, avant que le Sénat ne rétablisse sa version dans le texte adopté le 12 octobre 2021 .

Enfin, les rapporteurs relèvent également que, conformément aux annonces du président de la République lors de la Conférence nationale du handicap du 11 février 2020, des travaux seront engagés pour réformer l'appréciation du critère de la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, afin d'élargir les possibilités de cumuler l'AAH avec des revenus d'activité. Une telle réforme, qui va dans le sens d'une meilleure inclusion sociale des personnes en situation de handicap, constituerait une avancée très positive.

2. Dans le même temps, de discrètes mesures d'économies ont été prises

Si les rapporteurs spéciaux ne peuvent que saluer cet effort conséquent en faveur des personnes en situation de handicap les plus modestes, ils rappellent cependant que la revalorisation s'est accompagnée de discrètes mesures d'économies :

- la réforme du plafond de ressources pour les bénéficiaires de l'AAH en couple , traduisant un rapprochement des règles de prise en compte des revenus d'un couple à l'AAH avec celles d'un couple au RSA . Le coefficient multiplicateur entrant dans le calcul du plafond de ressources est abaissé progressivement. Le plafond de ressources, qui correspond depuis novembre 2018 à 189 % de celui appliqué aux personnes seules, est égal à 181 % de celui-ci à compter du 1 er novembre 2019. Cet abaissement de plafond permettra d'économiser 270 millions d'euros chaque année entre 2020 et 2022 et concerne environ 14 % des allocataires. La mesure pose un problème de principe dans la mesure où, en étant susceptible d'accroître la dépendance financière de la personne en situation de handicap vis-à-vis de son conjoint, elle va à l'encontre de la logique d'autonomie recherchée ;

- la disparition du complément de ressources au 1 er janvier 2020 . Ce complément de ressource - d'un montant de 179 euros mensuel - était versé à près de 67 000 bénéficiaires. Il bénéficiait aux personnes handicapées qui ont un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 %, qui reçoivent une allocation à taux plein et vivent dans un logement indépendant (sans percevoir d'aide au logement) et qui ont une capacité de travail inférieure à 5 % . Cette mesure s'applique aux bénéficiaires de l'AAH à compter de son entrée en vigueur (flux) mais ne concerne pas les droits des anciens bénéficiaires (stock) du complément de ressources pendant 10 ans. Elle engendre une diminution de la dépense estimée à 5,7 millions d'euros par an à partir de 2020 ;

- la sous-indexation de la revalorisation légale annuelle de l'AAH par rapport à l'évolution des prix en 2019 et en 2020, limitée à 0,3 % en lieu et place de l'indexation sur l'inflation. Cette mesure a permis de générer en 2019 et en 2020 une économie de 100 millions d'euros.

Ces mesures sont destinées à modérer l'impact budgétaire de la revalorisation, absorbant in fine plus du tiers de la hausse des dépenses qu'elle aurait spontanément provoquées (voir tableau infra ). Selon les caractéristiques des bénéficiaires, elles peuvent avoir pour effet d'en atténuer considérablement la portée.

Estimation de l'impact budgétaire des mesures positives et négatives prises ou proposées sur 2018-2022 en matière d'AAH

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

Total

2018-2022

Mesures positives

52

648

775

775

960

3 210

Revalorisation plafond

52

648

775

775

775

3 025

Abattement forfaitaire revenus du conjoint (art. 51 PLF 2022)

-

-

-

-

185

185

Mesures négatives

- 10

- 250,5

- 375,7

- 275,7

- 275,7

- 1 187,6

Réforme plafond de ressources couples

- 10

- 150

- 270

- 270

- 270

- 970

Suppression complément de ressources

-

- 0,5

- 5,7

- 5,7

- 5,7

- 17,6

Sous-indexation revalorisation légale

-

- 100

- 100

- 200

Bilan

42

397,5

399,3

499,3

684,3

2 022,4

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

3. Pour un renforcement du pilotage de l'AAH, dans une logique d'équité territoriale et non d'économies budgétaires

Les rapporteurs spéciaux ont mené en 2021 un travail de contrôle budgétaire sur le rôle des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) dans la gestion de l'AAH (voir encadré ci-dessous).

Face au constat de disparités géographiques importantes entre les MDPH en matière de délais de traitement des demandes et de taux d'attribution de l'AAH , les rapporteurs en avaient appelé à un renforcement de leur pilotage national par l'État et la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) en vue d'harmoniser leurs pratiques.

La DGCS, entendue sur ce point, a assuré que les services de l'État souscrivaient pleinement à cet objectif.

Les rapporteurs spéciaux ne peuvent cependant que s'étonner du fait qu'ils l'aient adossé à un objectif d'économies budgétaires, fixé à 80 millions d'euros en 2021 . Tout d'abord, rien ne permet d'affirmer avec certitude que l'harmonisation des pratiques conduira à une baisse de la dépense. Surtout, cet objectif d'économies introduit une confusion sur la finalité d'une telle harmonisation, qui est l'égalité territoriale entre les citoyens pour l'accès à un droit relevant de la solidarité nationale. Ce risque de confusion avait déjà été identifié dans leur rapport, raison pour laquelle ils préconisaient une clarification des compétences de la mission nationale d'audit et de contrôle (MNAC) des MDPH, appelée à être instituée dans le cadre de la Feuille de route « MDPH 2022 ».

Les propositions des rapporteurs spéciaux pour renforcer les moyens et le pilotage des MDPH

Dans leur rapport du 7 juillet 2021 consacré au rôle des MDPH dans la gestion de l'AAH, les rapporteurs pointent le contraste existant entre la relative stabilité des moyens dont ces structures sont dotées et la hausse considérable de leur activité, notamment au titre de l'AAH. Ils en appellent donc à une augmentation structurelle de leurs moyens, au financement de laquelle l'État doit prendre sa juste part. Ils considèrent également que les MDPH peuvent contribuer à améliorer notre connaissance de l'AAH et de ses bénéficiaires, notamment grâce à la poursuite de l'effort d'harmonisation de leurs systèmes d'information et en les associant davantage à une démarche d'objectivation des phénomènes de fraude et de non recours au droit. Enfin, face au constat de disparités territoriales persistantes, les rapporteurs appellent de leurs voeux le renforcement du pilotage national des MDPH qui doit mettre au coeur de ses préoccupations l'harmonisation des pratiques, dans un souci de justice territoriale, tout en sachant prendre en compte les situations particulières.

Leurs principales recommandations sont les suivantes :

- réformer les dotations nationales aux MDPH en remettant notamment à plat la méthode de valorisation des emplois vacants compensés par l'État ;

- mener un travail de qualification et de quantification des compétences dont doit disposer une MDPH pour assurer ses missions convenablement, en portant un diagnostic précis sur les effectifs et la composition des équipes pluridisciplinaires dans les MDPH ;

- évaluer rigoureusement l'action de la « task force » mise en place par la CNSA en faveur des MDPH les plus en difficulté d'ici 2022, afin d'examiner l'opportunité d'une pérennisation voire d'un renforcement de l'enveloppe ponctuelle qui lui a été attribuée ;

- examiner, à plus long terme, les avantages qui pourraient être tirés du passage à un système d'information unique, en capitalisant sur les acquis du système d'information harmonisé en cours de déploiement ;

- améliorer l'offre de formation des agents des MDPH, en partenariat avec le CNFPT ;

- harmoniser les pratiques d'appréciation de la réduction substantielle et durable d'emploi (RSDAE) servant de base à l'instruction des dossiers d'AAH-2 ;

- clarifier la gouvernance, le rôle et les objectifs de la mission nationale de contrôle et d'audit devant être constituée auprès de la DGCS ;

- veiller à ce que la remontée de données serve de support à un véritable dialogue individualisé entre la CNSA et la MDPH afin d'en faire un levier d'amélioration de la performance.

Source : « Gestion de l'allocation aux adultes handicapés : propositions pour renforcer les moyens et le pilotage des MDPH », rapport d'information n° 748 (2020-2021) de MM. Arnaud Bazin et Éric Bocquet fait au nom de la commission des finances du Sénat, 7 juillet 2021.

III. UN PARTENARIAT ÉTAT-DÉPARTEMENTS À CONSOLIDER

Un récent rapport sénatorial de Mme Cécile Cukierman, fait au nom de la mission d'information « Quel rôle, quelle place et quelles compétences des départements dans les nouvelles régions fusionnées » présidée par M. Arnaud Bazin 12 ( * ) a montré que, si « en matière sociale, le partage des compétences a longtemps été clair : les principes et les règles étaient fixés au niveau national et les départements étaient chargés de la mise en oeuvre opérationnelle et du financement des dispositifs » , une « 'refondation des logiques d'action' 13 ( * ) se fait jour via le développement de la technique de la contractualisation . L'État fixe alors une stratégie et des objectifs, puis demande aux départements de s'inscrire dans cette démarche en bénéficiant pour cela de moyens supplémentaires ».

Les rapporteurs spéciaux considèrent que cette technique mérite effectivement d'être amplifiée, dans un contexte où la situation financière des départements ne leur permet pas toujours de tirer le meilleur parti de l'expertise dont ils disposent en matière d'action sociale et de leur fine connaissance du territoire. Encore faut-il que celle-ci se fasse sur une base équitable et lever les points de tensions qui subsistent entre l'État et les départements.

A. LES DÉPARTEMENTS SONT DES PARTENAIRES ESSENTIELS DE L'ÉTAT DANS LA MISE EN oeUVRE DE LA STRATÉGIE INTERMINISTÉRIELLE DE PRÉVENTION ET DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

Les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les départements, sont en particulier associés à la mise en oeuvre de la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté lancée à l'automne 2018.

Le programme 304 finance depuis 2019 un programme de contractualisation avec celles-ci, doté de 255 millions d'euros en PLF 2022 , soit à un niveau stable par rapport à 2021.

La stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté

Annoncée par le Président de la République le 13 septembre 2018, la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté s'articule autour de cinq objectifs :

- l'égalité des chances dès les premiers pas pour rompre la reproduction de la pauvreté ;

- garantir au quotidien les droits fondamentaux de tous les enfants ;

- un parcours de formation garanti pour tous les jeunes ;

- assurer l'émancipation sociale par l'activité ;

- rendre les minima sociaux plus simples, plus lisibles et plus incitatifs à l'activité.

Elle s'appuie sur trois leviers de transformation :

- un « choc de participation » et la rénovation du travail social ;

- un pilotage de la stratégie à partir des territoires ;

- un engagement des entreprises.

Ses deux principaux piliers sont :

- la refonte de plusieurs prestations sociales existantes, dont le RSA, au sein d'un revenu universel d'activité (RUA) ;

- la création d'un service public de l'insertion.

La stratégie doit être dotée de 8,5 milliards d'euros sur la période 2018-2022.

La quasi-totalité des départements (hormis les Yvelines et les Hauts-de-Seine) se sont engagés dans une contractualisation avec l'État, ainsi que certaines métropoles (pour environ 10 millions d'euros en 2020 et en 2021) et régions (pour environ 2 millions d'euros en 2020 et en 2021).

Les conventions, d'une durée de trois ans, comportent un socle de six engagements :

- l'accompagnement des sorties de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) (10 millions d'euros en PLF 2022) ;

- l'amélioration de l'insertion des bénéficiaires du RSA (106 millions d'euros) ;

-  l'insertion professionnelle par la couverture des zones blanches des plateformes de mobilité (21 millions d'euros) ;

- la refondation du travail social par la généralisation les démarches de premier accueil social et de référent de parcours (6,2 millions d'euros) ;

- la création ou le renforcement de maraudes mixtes (1,8 million d'euros) ;

- la création ou le renforcement d'actions de terrain relevant de la prévention spécialisée (3,4 millions d'euros).

Entendue sur ce point par les rapporteurs spéciaux, l'Assemblée des départements de France (ADF) a accueilli favorablement cette démarche, qui a permis aux départements de mener des actions nouvelles et de bénéficier pour ce faire de moyens nouveaux.

Un des points de vigilance, déjà souligné l'an passé par les rapporteurs spéciaux, concerne la définition des indicateurs de résultats des actions , qui conditionnent en partie les financements. L'Assemblée des départements de France déplore une absence totale de concertation préalable sur la fixation de ces indicateurs, alors que leur fine connaissance de leur territoire les prédisposait à au moins participer à leur conception. Les rapporteurs soulignent cependant que certains assouplissements ont pu être observés à cet égard.

B. LE PARTENARIAT ÉTAT-DÉPARTEMENTS S'ÉTEND ÉGALEMENT DEPUIS 2020 AU CHAMP DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE

Un second processus de contractualisation associant l'État, les départements et les agences régionales de santé (ARS) a été engagé en 2021, portant sur la stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance .

La stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance 2020-2022

La stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance présentée le 14 octobre 2019 constitue le cadre de mise en oeuvre d'actions concrètes au bénéfice des enfants et de leurs familles pour renforcer l'accès à la prévention en santé de tous les enfants, améliorer la situation des enfants protégés (soit 340 000 mineurs environ), et produire une meilleure convergence des réponses à leurs besoins dans les territoires. Elle s'inscrit dans la continuité du plan « Priorité prévention » qui a fait des 1 000 premiers jours un axe phare de la politique de santé, et en complémentarité avec le plan 2020-2022 pour en finir avec les violences faites aux enfants.

Les actions de cette stratégie s'articulent autour de 4 engagements :

1. agir le plus précocement possible pour répondre aux besoins des enfants et de leurs familles, en répondant de manière réactive aux besoins de relayage des parents ;

2. sécuriser les parcours des enfants protégés et prévenir les ruptures, en favorisant l'innovation et la diversification des interventions auprès de l'enfant protégé ;

3. donner aux enfants les moyens d'agir et de garantir leurs droits, en renforçant la participation des enfants aux décisions qui les concernent et en fluidifiant notamment l'accompagnement scolaire des enfants protégés ;

4. préparer l'avenir en amont des 18 ans pour faciliter l'accès au logement et aux droits des jeunes sortants de l'aide sociale à l'enfance.

Source : documents budgétaires

Une enveloppe de 140 millions d'euros financée sur le programme 304 est allouée à ce dispositif de contractualisation en PLF 2022, soit 25 millions d'euros de plus qu'en LFI 2021.

69 départements ont conclu un contrat avec l'État dans ce cadre. Le dispositif pourra être étendu à tous les départements volontaires en 2022.

C. L'ACCUEIL ET L'ORIENTATION DES MINEURS NON ACCOMPAGNÉS RESTE UNE SOURCE DE TENSIONS ENTRE L'ÉTAT ET LES DÉPARTEMENTS

Comme les rapporteurs spéciaux l'ont déjà souligné, la politique d'accueil et d'orientation des mineurs non accompagnés (MNA) est source de nombreuses tensions entre l'État et les départements.

L'accueil et l'orientation des MNA relève en principe des compétences des départements.

En application de l'article 48 de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance , il revient au président du conseil départemental un rôle de mettre à l'abri et d'évaluer la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille dans son département, avant que ceux-ci ne soient répartis entre les départements par le ministre de la justice.

En vertu de leur compétence de gestion du service d'aide sociale à l'enfance (ASE) prévue par l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles, les départements sont également chargés de la prise en charge des MNA répartis sur leur territoire.

Dans un rapport récent 14 ( * ) , les sénateurs Hussein Bourgi, Laurent Burgoa, Xavier Iacovelli et Henri Leroy, ont évalué les dépenses annuelles totales consacrées à ces missions à 1,1 milliard d'euros (hors contrats jeune majeur). Ils relèvent cependant des difficultés à retracer avec précision les dépenses d'aide sociale à l'enfance directement imputables aux MNA, et appellent pour cette raison de leurs voeux la réalisation d'une enquête nationale sur les coûts pour les départements de la prise en charge des MNA, proposition à laquelle les rapporteurs ne peuvent que souscrire.

Alors que le nombre d'arrivées de MNA s'est fortement accru à partir de 2016, l'État assure désormais également une participation financière à la politique d'accueil et d'orientation des MNA , relevant des crédits du programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». En PLF 2022, ces crédits s'élèvent à 92,4 millions d'euros, soit une baisse de 27,5 millions d'euros par rapport à 2021 , faisant elle-même suite à une baisse de 42 millions d'euros en LFI 2021 par rapport à 2020, explicable par la tendance à la décrue des entrées de MNA constatée depuis 2018, comme le montre le graphique ci-dessous.

Nombre de personnes déclarées MNA

Source : mission d'information du Sénat sur les mineurs non accompagnés

S'agissant de la phase de mise à l'abri et d'accompagnement , depuis le 1 er janvier 2019 et conformément au décret n° 2019-670 du 27 juin 2019 et à l'arrêté du 28 juin 2019 pris pour son application, la participation forfaitaire financière de l'État est fixée à 500 euros par jeune auxquels s'ajoutent 90 euros par jour pendant 14 jours maximum puis 20 euros par jour pendant 9 jours maximum pour chaque jeune effectivement mis à l'abri.

S'agissant de la phase d'ASE , la participation de l'État a été fixée à 30 % du coût correspondant à la prise en charge du nombre de MNA supplémentaires accueillis par les départements au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. L'arrêté du 23 juillet 2018 fixant le montant alloué à chaque département a été publié sur cette base au Journal officiel du 5 août 2018, pour un montant total de 96,2 millions d'euros en 2018. Depuis 2019, l'État et l'ADF ont convenu d'une prolongation de cette aide exceptionnelle, sur la base de 6000 euros par jeune MNA supplémentaires pris en charge par l'ASE au 31 décembre de l'année N par rapport au 31 décembre de l'année N-1 et pour 75 % des jeunes concernés. Le montant total de cette aide s'établit donc à 15,8 millions d'euros en 2020, et 1,7 million d'euros en 2021.

Les auteurs du rapport précité ont néanmoins fortement critiqué la formule de calcul de cette dotation qui, parce qu'elle se fonde sur le « flux » et non le « stock », « ne constitue pas une assiette pertinente pour mesurer le besoin de financement complémentaire d'un département donné » et « n'est justifié par aucun raisonnement objectif ».

Même si elle s'inscrit dans le contexte d'une baisse des entrées de MNA, cette baisse tendancielle de l'aide de l'État constitue une source de tensions avec les départements . La charge financière supportée par les départements au titre de l'accueil et de l'évaluation des MNA peut à bien des égards être considérée comme indue et devant relever de la politique migratoire de l'État. Ces derniers auraient davantage vocation à concentrer leur action sur le volet d'aide sociale à l'enfance, qui correspond à leur vocation.

Aussi, les rapporteurs soulignent l'importance d'un engagement fort et durable de l'État aux côtés des départements dans la politique d'accueil et d'orientation des MNA , qui est source de problématiques complexes, au carrefour d'enjeux de politique migratoire, d'intégration, d'action sociale et dans certains cas de prévention de la délinquance juvénile.

IV. L'AIDE ALIMENTAIRE : UNE POLITIQUE PRIORITAIRE QUI CONNAÎTRA D'IMPORTANTES MUTATIONS EN 2022

L'aide alimentaire permet de mettre à disposition des personnes les plus démunies des denrées qui sont distribuées par des réseaux associatifs nationaux ou locaux .

Les rapporteurs spéciaux avaient montré, dans un rapport, présenté en octobre 2018 et intitulé : « Un dispositif vital, un financement menacé ? un modèle associatif fondé sur le bénévolat à préserver » 15 ( * ) , que l'aide alimentaire est un dispositif vital qui a bénéficié à 5,5 millions de personnes en 2017, représentant une masse financière estimée à près d'1,5 milliard d'euros , dont un tiers de financements publics (aides européennes, dépenses budgétaires de l'État et des collectivités territoriales, dépenses fiscales), un tiers de financements privés (dons en nature et numéraires des particuliers et entreprises), et un tiers correspondant à la valorisation du bénévolat au sein des associations intervenant dans le domaine de l'aide alimentaire.

A. LA CRISE SANITAIRE A EU UN FORT IMPACT SUR LA PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE

En 2020, les confinements, la fermeture des écoles et donc de la restauration scolaire, l'effondrement de l'économie informelle et la disparition temporaire des « petits boulots » notamment pour les étudiants, ont eu un impact brutal sur la trésorerie des personnes et des familles modestes. Les réseaux solidaires de l'aide alimentaire ont pris le relai, que ce soient les réseaux associatifs déjà mobilisés ou des nouveaux acteurs qui se sont emparé de cette problématique .

Cette mobilisation exceptionnelle a agi comme un révélateur et a rendu visible la diversité des publics concernés. La situation de personnes déjà inscrites à l'aide alimentaire s'est dégradée et la crise a également entrainé l'arrivée de nouveaux publics jusqu'alors inconnus des associations et qui ne disposaient que de peu de sécurité : actifs ayant subi une perte de revenus, étudiants, familles fragilisées par la prise en charge des repas lors du confinement... La crise a également révélé les besoins des personnes hébergées à l'hôtel notamment. Dans le même temps, les associations ont dû agir dans un contexte très complexe : baisse du nombre de bénévoles, modification des pratiques pour respecter les gestes barrières, besoins de locaux, désorganisation de l'approvisionnement.

Le nombre total de personnes ayant recours à une forme d'aide alimentaire au moins une fois dans l'année 2020 s'élève à 5,2 millions de personnes, en évolution par rapport aux 4,9 millions déclarées en 2019 (+ 7,3 %) 16 ( * ) . Au plus fort de la crise (mars-juin 2020), certaines associations, entendues par les rapporteurs spéciaux, font état d'une hausse de 20 % à 25 % des inscriptions. La hausse des volumes distribués en 2020 (+ 10,6 % par rapport à 2019), plus prononcée que celle des inscriptions (+ 7,3 %), a traduit à la fois un afflux de nouveaux bénéficiaires et un recours à l'aide alimentaire plus important pour les personnes inscrites de plus longue date. La crise sanitaire semble ainsi avoir engendré une hausse des besoins pour des nouveaux publics comme pour des plus anciens.

En 2021, certains signes d'inquiétude persistent , en particulier la part restée importante des jeunes parmi les personnes accueillies. Selon la fédération française des Banques alimentaires, les 15-25 ans représentent désormais 22 % des personnes accueillies, soit une progression de 12 % en un an.

B. UNE MOBILISATION LOUABLE DES POUVOIRS PUBLICS, QUI DOIT S'INSCRIRE DANS LA DURÉE

1. Une mobilisation importante des pouvoirs publics nationaux et européens depuis 2020

En 2020, pour soutenir les associations d'aide alimentaire confrontées à un fort afflux des demandes , deux plans d'urgence ont été adoptés, représentant un montant total de 94 millions d'euros (voir l'encadré ci-dessous) .

En 2021, la mission « Plan de relance » prévoit en outre la constitution d'un fonds d'aide aux associations de lutte contre la pauvreté, doté de 100 millions d'euros et en CP, fortement tourné vers l'aide alimentaire . Un premier appel à projets a été lancé dès la fin 2020. Alors qu'il ne devait initialement porter que sur la moitié de l'enveloppe, le nombre et la qualité des projets déposés a conduit le ministère des solidarités et de la santé à consacrer la totalité de l'enveloppe au premier appel à projets (AAP). Le second appel à projets initialement prévu a donc été annulé. 741 projets ont finalement été sélectionnés, sur un total de 2 611 candidatures. Sur les 741 projets sélectionnés dans ce cadre, 164 projets, représentant près de 18 % de l'enveloppe consommée à ce stade, concernent exclusivement la lutte contre la précarité alimentaire . Au total, ce sont même 430 projets qui comportent exclusivement ou non la thématique « précarité alimentaire »

Les associations de lutte contre la pauvreté ont salué la mise en place de ce fonds, qui a permis le financement de projets de développement et de modernisation structurants. Néanmoins, en termes de méthode, l'annulation du second AAP a pu être critiquée : en effet, sachant que deux AAP étaient à prévoir, certaines structures avaient fait le choix d'attendre le second pour approfondir la préparation de leur projet, et n'ont donc finalement jamais pu le présenter.

Les plans d'urgence en faveur de l'aide alimentaire en 2020

Un premier plan de soutien à l'aide alimentaire de 39 millions d'euros lancé en avril 2020 a permis de financer :

- la compensation, à hauteur de 25 millions d'euros, des surcouts supportés par les associations d'aide alimentaire et engendrés par la crise ;

- des mesures spécifiques pour les outre-mer (4 millions d'euros) ;

- l'achat de chèques d'urgence alimentaire qui ont été distribués, pour pallier l'urgence de la situation de territoires en tension, principalement en direction des habitants des QPV de 18 départements (10 millions d'euros).

Un second plan d'urgence de 55 millions d'euros a été lancé en juillet dont plus de 80 % délégués aux services déconcentrés afin de permettre de soutenir les actions spécifiques menées sur les territoires pour maintenir l'accès aux biens essentiels des publics précaires (alimentation, hygiène) dans le contexte de crise. Ce plan a vocation à financer les dispositifs d'aide alimentaire généralistes et la montée en charge des dispositifs visant les personnes sans domicile sans ressource afin qu'ils prennent le relais de la distribution des chèques services dans le cadre du dispositif mobilisé par le ministre de la ville et du logement lors des premiers mois de la crise.

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Par ailleurs, la Commission européenne a lancé fin mai 2020 une initiative REACT-EU visant à abonder les fonds de cohésion pour la période 2020-2022 en réponse à la crise sanitaire et économique. Cela a permis d'allouer au FEAD français 132 millions d'euros de crédits financés à 100 % par l'UE permettant à l'opérateur FranceAgrimer d'effectuer des achats complémentaires de denrées. Sur cette initiative, 126 millions d'euros ont été engagés à ce jour.

Au niveau européen, un accord a été trouvé pour un plan pluriannuel très ambitieux de financement de l'aide alimentaire, dans le cadre de l'inclusion du FEAD dans le nouveau Fonds social européen plus (FSE +) à compter de 2022. Pour la France, une dotation de 647 millions d'euros dans le cadre du nouveau FSE + (dont 110 millions d'euros de crédits nationaux), soit un montant supérieur de 172 millions d'euros à celui prévu pour la campagne 2014-2020 du FEAD. Le taux de co-financement européen sur les achats de denrées a également été relevé à 90 % (contre 85 % sur la précédente campagne).

Projection des financements européens au titre de l'aide alimentaire
sur la période 2021-2027

Enveloppe

Calendrier
de livraison

Financement UE

Co-financement national

Total

Reliquat du FEAD 2014-2020

recyclé pour une campagne 2021 supplémentaire

Septembre 2021

ð juin 2022

77 M€

(85 %)

13 M€

(15 %)

90 M€

React-EU

Relance européenne, pour les années 2020 - 2022

Juin 2021

ð juin 2022

132 M€

(100 %)

(0 %)

132 M€

FSE+

2021 - 2027

Septembre 2022

ð juin 2028

582 M€

(90 %)

65 M€

(10 %)

647 M€

Total

791 M€

78 M€

868 M€

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les rapporteurs spéciaux ne peuvent que se féliciter de l'important effort national et européen annoncé en faveur de l'aide alimentaire pour les années à venir , même si, au plan opérationnel, le fonctionnement du futur FSE + constitue encore un point de vigilance (voir infra ).

2. En PLF 2022, une stabilité des crédits du budget de l'État en faveur de l'aide alimentaire

Pour mémoire, le programme opérationnel FEAD prévoyait d'octroyer à la France une dotation de 587,39 millions d'euros pour la période 2014-2020. Cette dotation est financée par des crédits européens à hauteur de 499 millions d'euros (85 %), via un fonds de concours relevant du programme 304, ainsi que par des crédits nationaux à hauteur de 15 %. Ces crédits sont destinés en grande majorité à l'achat de denrées, réalisé par FranceAgriMer au profit des quatre associations têtes de réseau nationales habilitées (la Fédération Française des Banques Alimentaires, les Restos du Coeur, le Secours Populaire Français et la Croix-Rouge française) . Le solde permet de financer au niveau national le fonctionnement des têtes de réseau associatives ainsi que des projets d'approvisionnement en denrées, et au niveau régional le fonctionnement des associations habilitées localement.

Le reste des crédits est destiné à soutenir les épiceries sociales - celles-ci n'étant pas éligibles au FEAD 17 ( * ) -, à subventionner les têtes de réseau associatives nationales afin de prendre en charge une partie de leurs coûts de fonctionnement au titre de l'aide alimentaire (logistique, formation des bénévoles, etc.), à financer les services déconcentrés qui mettent en oeuvre la distribution de l'aide alimentaire, ainsi qu'à verser une subvention pour charges de service public à FranceAgriMer en tant qu'organisme intermédiaire de gestion du FEAD.

La contribution européenne au titre du FEAD représentera un montant brut de 122,5 millions d'euros en 2022 (contre 77,1 millions d'euros en 2021). Ainsi, en ajoutant les autres crédits nationaux, on constate au total une augmentation des crédits alloués à l'aide alimentaire en 2022 (158 millions d'euros) par rapport à 2021 (141,3 millions d'euros), hors plan de relance européen.

Comme l'indique le tableau ci-dessous, la baisse observée des crédits nationaux portés par le programme 304 en PLF 2022 porte intégralement sur la compensation à FranceAgriMer de dépenses financées sur appel de fonds mais finalement déclarées non éligibles au FEAD , et tiendrait donc seulement à une diminution du taux d'inéligibilité des dépenses présentées par l'opérateur, tandis que le soutien financier aux associations reste stable.

Cette stabilité peut néanmoins poser question, notamment pour ce qui concerne les épiceries sociales, qui ne sont pas concernées par le FEAD, et qui paraît contradictoire avec l'impulsion donnée par le Gouvernement en faveur de la création de ces structures . D'après les projections de l'Association nationale des épiceries solidaires, entendue par les rapporteurs spéciaux, le contraste entre la forte hausse prévisionnelle des structures d'une part et la stabilité de l'enveloppe aboutirait à une diminution de 35,3 % de la dotation par structure entre 2019 à 2022.

La Fédération française des banques alimentaires juge également que la progression des crédits qui lui sont alloués (+ 2 % sur 2021-2023) s'avère assez faible au regard de l'accroissement de l'activité des banques alimentaires.

Évolution des crédits nationaux en faveur de l'aide alimentaire
entre 2021 et 2022

(en millions d'euros)

LFI 2021

PLF 2022

P.304 - Action 14

64,5

56,7

dont contribution nationale au FEAD

13,5

12,3

Prise en charge des dépenses inéligibles au titre des exercices précédents

16
(exercices 2018 et 2019)

8,9
(exercices 2019 et 2020)

dont épiceries sociales

8,9

9,1

dont subventions aux têtes de réseau associatives nationales

4,7

4,8

dont aide alimentaire déconcentrée

18,6

18,7

dont subvention pour charge de service public à FranceAgriMer

2,7

2,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

C. DES INQUIÉTUDES PERSISTENT SUR LE DÉPLOIEMENT OPÉRATIONNEL DE LA RÉFORME DU DISPOSITIF D'ACHATS DE DENRÉES EN 2022

Les associations entendues par les rapporteurs spéciaux ont fait part de leurs inquiétudes sur leur manque de visibilité quant au fonctionnement opérationnel du dispositif d'achats de denrées en 2022 dans le cadre du nouveau FSE +.

Sur le fond, les réformes annoncées vont toutefois dans le bon sens, avec :

- la mise en place de marchés pluriannuels sur trois ans sur une liste de cinq produits expérimentaux, ce qui est de nature à donner plus de visibilité aux associations ;

- une dissociation du marché de la logistique de celui de l'achat de denrées, dans une logique de simplification pour les associations commanditaires. FranceAgriMer a néanmoins souligné lors de son audition que cette réforme doit impliquer une évolution structurelle des pratiques pour les associations, impliquant un réel travail d'accompagnement de la part des pouvoirs publics, de façon à ce que la simplification voulue ne se traduise pas en pratique par un accroissement de la charge administrative des associations, dont les membres sont essentiellement bénévoles.

Dans ce contexte, la subvention pour charges de service public à FranceAgriMer au titre du programme 304 doit connaitre une progression de 200 000 euros en 2022, permettant deux recrutements destinés à professionnaliser l'achat de denrées et la gestion logistique. La professionnalisation de ces fonctions est indispensable au bon fonctionnement de l'opérateur, notamment pour remédier à la problématique des lots infructueux, fortement critiqués par les associations. Les rapporteurs saluent donc cet effort tout en considérant qu'il aurait dû intervenir il y a longtemps.

Enfin, FranceAgriMer a indiqué aux rapporteurs spéciaux que la demande formulée par les associations d'élargissement de la liste de denrées achetées n'est pas absorbable à moyens constants par l'opérateur et nécessiterait donc un nouvel accroissement de ses moyens.

V. LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES : UNE HAUSSE BIENVENUE DES CRÉDITS ET DES EFFORTS À POURSUIVRE

Les politiques de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les violences faites aux femmes sont retracées, pour ce qui relève de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », sur le programme 137. Ce programme intervient principalement par des subventions versées à des associations assurant des missions de service public ou d'intérêt collectif, qui interviennent tant en matière de lutte contre les violences sexistes que pour promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes.

Dans un rapport publié en juillet 2020 et intitulé : « Le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes : une priorité politique qui doit passer de la parole aux actes » 18 ( * ) , les rapporteurs spéciaux ont dressé deux principaux constats :

- d'abord celui d' une politique publique budgétairement contrainte, souffrant d'un morcellement des crédits, qui nuit à la lisibilité et à l'efficacité de mesures mises en oeuvre ;

- ensuite, celui d' une politique insuffisamment portée et inégalement appliquée sur le territoire . L'administration et les associations, véritables pivots de cette politique, ne sont pas assez outillées, ni dotées pour mener à bien une politique, dont les demandes et les enjeux sont grandissants et qui requiert une capacité d'action interministérielle.

Les principales recommandations du rapport des sénateurs A. Bazin et E. Bocquet sur le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes

Axe n° 1 : Rendre les financements plus lisibles et à la hauteur des enjeux

- Pour lutter contre le morcellement des crédits, créer un fonds interministériel et pluriannuel sur le modèle du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), la lutte contre les violences étant à la croisée de plusieurs politiques publiques ;

- octroyer aux associations un niveau de financement public leur permettant de répondre à leurs missions tout en encourageant les cofinancements multi-acteurs publics et privés. Cela pourrait se traduire notamment par une simplification des réponses aux appels à projet et la généralisation des conventions pluriannuelles ;

- développer les financements privés (mécénat et dons des particuliers). L'enjeu est de rendre attractive la donation en faveur de cette politique de lutte contre les violences, comme cela a déjà été amorcé. Les associations doivent rendre visibles leurs actions et les pouvoirs publics doivent les accompagner dans leur modernisation, pour encourager les partenariats avec des fondations. Les rapporteurs spéciaux sont néanmoins conscients des limites de ces financements qui ne peuvent se substituer aux subventions publiques ;

- développer le recours aux financements européens, en identifiant mieux les sources potentielles de financement.

Axe n° 2 : Sortir du conjoncturel pour du structurel : doter cette politique publique d'une « vraie » administration et renforcer le maillage territorial

- Revoir les moyens et le positionnement du service des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) et de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF), en dotant cette politique publique d'une vraie administration centrale et interministérielle ;

- renforcer le suivi de cette politique et du Grenelle, en particulier . Le suivi du Grenelle nécessiterait la mise en place d'un comité interministériel réunissant tous les ministres concernés, doublé d'un comité réunissant toutes les parties prenantes (y compris les associations et élus locaux), en pérennisant et institutionnalisant, par exemple, les groupes de travail du Grenelle. Le suivi de cette politique doit reposer sur des indicateurs de résultats et un tableau de bord régulièrement publié et communiqué, notamment au Parlement ;

- renforcer et homogénéiser le pilotage départemental, en veillant à la mise en oeuvre de la déclinaison locale de cette politique publique et notamment du Grenelle sur tout le territoire.

Source : « Le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes : une priorité politique qui doit passer de la parole aux actes », rapport d'information de MM. Arnaud Bazin et Éric Bocquet, fait au nom de la commission des finances, n° 602 (2019-2020), 8 juillet 2020.

Les rapporteurs spéciaux relèvent la significative augmentation des crédits constatée en LFI 2021 et en PLF 2022

Les crédits demandés se montent en effet à 47,4 millions d'euros en AE (soit une stabilité par rapport à la LFI 2021, qui s'était elle-même caractérisée par une hausse de 61,4 % des AE) et 50,6 millions d'euros en CP (soit une hausse de 22 % par rapport à 2021).

Le financement par le programme 137 des politiques de lutte contre les violences sexistes et sexuelles s'élève en PLF 2022 à 24,9 millions d'euros en AE et 28 millions d'euros en CP . Si la hausse des CP (+ 5,7 millions d'euros) découle de la forte augmentation des AE constatées en 2021, les autorisations d'engagement diminueront en 2022
(- 4,6 millions d'euros). Si ces derniers demeurent à un niveau élevé par rapport à celui constaté en début de quinquennat, les rapporteurs appellent, au vu de l'ampleur des besoins des associations, à ce que l'effort mené en faveur de cette politique demeure soutenu.

Évolution des crédits destinés spécifiquement à la lutte
contre les violences faites aux femmes

(en millions d'euros)

2019

2020

2021

2022

AE

AE

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Crédits ouverts en LFI

13,7

13,5

13,5

13,8

29,5

22,3

24,9

28

Crédits consommés

13,9

13,3

19,9

20,1

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Lors de l'examen du PLF 2021, les rapporteurs avaient notamment souligné que « la mobilisation exceptionnelle observée durant la crise sanitaire en faveur de la lutte contre les violences faites aux femmes doit devenir la norme » . Ils se félicitent ainsi que certains dispositifs lancés dans ce cadre aient pu être prolongés et renforcés en 2021, avec notamment le maintien de points d'accueil dans les centres commerciaux (700 000 euros mobilisés en 2021, permettant le financement de 11 points d'accueil).

Focus sur les mesures prises dans le contexte de la crise sanitaire

Les mesures de confinement et d'isolement à domicile prises en réponse à la crise sanitaire ont eu pour effet d'augmenter fortement les risques de violences conjugales.

Face à cette situation, les pouvoirs publics et singulièrement les forces de l'ordre ont fait preuve d'une réelle mobilisation, saluée par les associations et les acteurs de terrain. Une enveloppe de 5,2 millions d'euros a ainsi été mobilisée, financée par une ouverture de crédits en LFR 3 sur le programme 137 et par le dégel de 1,2 million d'euros :

- 3 millions d'euros ont permis de soutenir les associations locales, notamment pour la recherche de solutions d'hébergement des femmes victimes de violences, et le déploiement d'un dispositif d'information et d'accueil dans 99 centres commerciaux (dont 40 ont été pérennisés) ;

- 2,2 millions d'euros ont permis de financer des mesures liées à l'hébergement et à l'écoute des auteurs de violence.

Source : commission des finances du Sénat

Les rapporteurs spéciaux relèvent en outre qu'à nouveau en 2022 le financement de l'ouverture des centres de prise en charge psychologique et sociale des auteurs de violences conjugales (CPCA) capte une bonne partie de l'augmentation des crédits (+ 2 millions d'euros). Si le développement de ces structures constitue un volet important du Grenelle de lutte contre les violences conjugales du 25 novembre 2019, les associations entendues ont regretté que son financement soit assuré par le programme 137 et non par la mission « Justice », dans la mesure où le placement dans ces structures relèvera de décisions judiciaires.

Il convient également de noter la légère augmentation de l'enveloppe allouée à l'aide financière pour l'insertion sociale (AFIS) destinée aux personnes en parcours de sortie de prostitution (+ 0,3 million d'euros). Le dynamisme du dispositif, avec un quasi-triplement du nombre de bénéficiaires entre 2018 et 2020 (passage de 108 à 312) témoigne d'un meilleur accès aux droits et accompagnement des personnes en parcours de sortie de la prostitution. Le montant de l'AFIS (330 euros pour une personne seule) reste très faible, et insuffisamment incitatif à l'engagement dans un tel parcours.

Les rapporteurs spéciaux relèvent enfin avec satisfaction une réforme de la nomenclature du programme, avec la création d'une nouvelle action 24 dédiée aux crédits alloués à la prévention et la lutte contre les violences et la prostitution, suivant la recommandation d'amélioration de la lisibilité budgétaire de cette politique qu'ils avaient formulée dans leur rapport précité.

VI. LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS

Les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de pourvoir à leurs intérêts en raison d'une altération de leurs facultés mentales ou corporelles font l'objet de mesures de protections, prononcées par le juge des tutelles . Elles peuvent être confiées à un membre de leur famille, ou alors à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM) , c'est-à-dire à un service mandataire, un mandataire individuel ou un préposé d'établissement.

Les crédits prévus pour la protection juridique des majeurs (programme 304) en PLF 2022 (733,8 millions d'euros) augmentent de 2,8 % par rapport à 2021 , en raison de l'augmentation continue du nombre de mesures.

Sur cette enveloppe, 624,8 millions d'euros sont alloués aux services mandataires. Malgré cette hausse des crédits, les rapporteurs spéciaux tiennent à rappeler que le barème de participation financière des majeurs protégés a été révisé en 2018 19 ( * ) . Ils avaient regretté, dans leur rapport budgétaire des années précédentes, la mise en oeuvre de cette mesure « socialement injuste », puisque mettant à contribution une population déjà fragile, dont près de la moitié se situe en dessous du seuil de pauvreté 20 ( * ) . L'économie générée pour l'État par ce nouveau barème s'élève à 37 millions d'euros en 2022.

Entendus par les rapporteurs spéciaux, l'interfédération de la protection juridique des majeurs (IF-PJM) 21 ( * ) a également regretté le faible portage politique du sujet, et une forme de délaissement des mandataires par les pouvoirs publics comparativement au reste des professions du monde médico-social, qui se traduit par une exclusion du « Ségur de la santé » . Le secteur est pourtant confronté à une forte activité (60 mesures par mandataires en moyenne selon l'IF-PJM) qui a vocation à s'intensifier dans le contexte de vieillissement de la population, et à une faible attractivité de ses métiers, peu rémunérés. L'IF-PJM défend pourtant la forte utilité de l'action des mandataires, qui permettrait de générer un gain socio-économique pour la collectivité de l'ordre d'un milliard d'euros (réduction de la pauvreté, du sans-abrisme etc.) 22 ( * ) .

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tel que modifiés par un amendement n°II-607 déposé par le rapporteur spécial Patrice Anato au nom de la commission des finances adopté avec un avis favorable du Gouvernement.

Cet amendement majore de 2,5 millions d'euros les crédits demandés en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » au titre du financement d'une dotation aux Points conseil budget . Il est gagé à due concurrence sur les crédits du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales »

L'Assemblée nationale a également adopté en première lecture l'article 51 , modifié par deux amendements n° II-1890 et n° II-2183 du rapporteur spécial Patrice Anato , adopté avec un avis favorable du Gouvernement (voir commentaire infra ).

Elle a enfin adopté les amendements n° II-1649 de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales Christine Cloarec-Le Nabour et n°II-608 du rapporteur spécial Patrice Anato portant articles additionnels (voir commentaires infra ).

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 51

Abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint
d'un bénéficiaire de l'AAH

. Le présent article prévoit la mise en place d'un mécanisme d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint du bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Ce dispositif, qui constitue certes une mesure favorable aux bénéficiaires de l'AAH, ne permet pas de résoudre les difficultés posées par la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de la prestation, qui fait obstacle à ce que celle-ci participe pleinement de la politique d'autonomie des personnes en situation de handicap.

Le sujet de la « déconjugalisation » de l'AAH est par ailleurs l'objet d'une proposition de loi en cours de navette. Dans l'attente de l'aboutissement de ces travaux, la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'AAH, UNE PRESTATION « CONJUGALISÉE »

Régie par les articles L. 821-1 à L. 821-8 du code de la sécurité sociale, l'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées de plus de vingt ans 23 ( * ) . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse. L'AAH peut se cumuler avec des ressources personnelles, y compris des revenus d'activité 24 ( * ) , dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 10 843,2 euros pour une personne seule sans enfant depuis le 1 er avril 2020 25 ( * ) , soit une allocation mensuelle de 903,6 euros.

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable 26 ( * ) pour l'accès à l'emploi (RSDAE) ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail (« AAH 2 »).

Ces conditions sont appréciées par les commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) après instruction par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Comme les autres minima sociaux, l'AAH est « conjugalisé » au sens où les ressources prises en compte pour le calcul de l'allocation sont celles du ménage. Ainsi, en application de l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale , il est précisé que l'AAH « peut se cumuler avec les ressources personnelles de l'intéressé et, s'il y a lieu, de son conjoint, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité dans la limite d'un plafond fixé par décret, qui varie selon qu'il est marié, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à sa charge » .

Il est à noter que l'article R. 821-4 du même code prévoit, en application de cet article , un mécanisme d'abattement proportionnel de 20 % sur les revenus perçus par le conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité qui n'est pas allocataire de l'AAH.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN MÉCANISME D'ABATTEMENT FORFAITAIRE SUR LES REVENUS DU CONJOINT

Le dispositif proposé à l'article 51 du présent projet de loi de finances consiste à modifier l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale pour donner une base légale au remplacement de l'abattement proportionnel de 20 % actuellement appliqué aux revenus du conjoint, concubin ou partenaire prévu à l'article R. 821-4 du même code par un dispositif d'abattement forfaitaire .

D'après l'évaluation préalable du présent article, il est prévu que le montant de cet abattement soit fixé par décret à 5 000 euros, auquel s'ajouterait un abattement de 1 100 euros pour chaque enfant du foyer .

Le coût de la mesure pour l'État est chiffré à 185 millions d'euros .

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article tel que modifié par deux amendements rédactionnels et de coordination du rapporteur spécial de la commission des finances Patrice Anato, adoptés avec un avis favorable du Gouvernement.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : TOUJOURS PAS DE VÉRITABLE « DÉCONJUGALISATION » DE L'AAH

Le mécanisme d'abattement proportionnel de l'AAH en vigueur n'était pas satisfaisant en raison de son caractère anti-redistributif : par construction, plus les revenus sont importants, plus la partie des revenus du conjoint exclue de la prise en compte pour le calcul de l'AAH est importante.

À la différence d'un abattement proportionnel qui revient à soustraire du revenu pris en compte un montant par définition proportionnel à ce revenu, le montant de l'abattement forfaitaire est le même pour tous et revient à un abattement de 100 % pour les bénéficiaires de l'AAH dont le conjoint gagne moins de 5 000 euros par an, soit les foyers les plus précaires.

D'après l'évaluation préalable, la mesure permettrait un gain moyen de 110 euros par mois pour 120 000 bénéficiaires. Plus de 60 % des 150 000 couples dont le bénéficiaire de l'AAH est inactif percevraient ainsi leur AAH à taux plein, alors qu'ils ne sont que 45 % des couples aujourd'hui.

Pour autant, le dispositif ne saurait en aucun cas être assimilé à une réelle « déconjugalisation » de l'AAH , soit l'absence totale de prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'allocation. Une telle évolution est défendue par les associations représentant les personnes en situation de handicap - entendues sur ce point par les rapporteurs spéciaux. Celle-ci témoignerait de la pleine reconnaissance de la spécificité du public ciblé par l'AAH, qui, en raison de son montant et de ses conditions d'accès plus favorables, ne saurait être regardée comme un minimum social comme un autre. Elle permettrait de clarifier la nature du dispositif en faisant de l'AAH une véritable prestation de compensation de l'éloignement de l'emploi provoqué par le handicap, et d'accès à l'autonomie. En risquant d'accroître la dépendance de la personne handicapée aux revenus de son conjoint, la « conjugalisation » constitue en effet un frein à cette logique d'autonomie.

La proposition de « déconjugalisation » de l'AAH constitue même l'objet de la première pétition à recueillir plus de 100 000 signatures sur la plateforme dédiée du Sénat en février 2021 . L'atteinte de ce seuil a entraîné l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale 27 ( * ) . Le Sénat a adopté dans ce cadre une disposition tendant à la déconjugalisation de l'AAH en première lecture le 9 mars 2021 . En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a ensuite modifié le texte en adoptant un dispositif d'abattement forfaitaire identique à celui de l'article 51 du présent PLF, avant que le Sénat ne rétablisse sa version dans le texte adopté le 12 octobre 2021 .

Comme l'indiquait le sénateur Philippe Mouiller, rapporteur du texte :

« L'individualisation de l'AAH répond en outre à une aspiration diffuse à davantage d'autonomie financière au sein du couple , tendance que confirment un certain nombre de travaux sociologiques, les statistiques des régimes matrimoniaux et les témoignages recueillis par le rapporteur de la commission lors de ses auditions. Une telle aspiration s'entend, quand bien même elle porterait sur des ressources issues de la solidarité nationale, dès lors que celles-ci sont perçues comme une créance assise sur un droit subjectif à la compensation.

Une telle revendication s'entend d'autant plus de la part de femmes en situation de handicap, dont les revenus sont encore relativement plus faibles que ceux de leur conjoint et qui sont plus souvent victimes de violences conjugales . La déconjugalisation de l'AAH serait ainsi de nature à leur garantir le montant de prestation auquel leur donnent droit leurs ressources personnelles même en cas de changement imprévu de situation conjugale. » 28 ( * ) .

Le coût d'une telle mesure pour l'État est estimé à 560 millions d'euros par la DGCS . Il est cependant à noter que l'application automatique de la « déconjugalisation » est problématique . En effet, comme le souligne le rapport précité : « alors qu'environ 270 000 bénéficiaires de l'AAH sont aujourd'hui en couple, un grand nombre de ménages, de l'ordre de 196 000, gagneraient certes à la suppression de la prise en compte des revenus du conjoint, mais cette mesure ferait aussi un grand nombre de ménages perdants, environ 44 000 , dont 21 % perdraient totalement le bénéfice de la prestation. De plus, la déconjugalisation creuserait les inégalités de niveau de vie puisque les ménages perdants se trouvent dans tous les déciles de niveau de vie jusqu'au septième, tandis que les gains seraient plus concentrés entre les troisième et cinquième déciles. Les gagnants appartenant aux neuvième et dixième déciles de niveau de vie, quoique peu nombreux - 13 000 -, seraient même les plus grands bénéficiaires de la mesure, avec un gain moyen mensuel de 500 euros. ».

Pour cette raison, le texte adopté par le Sénat le 12 octobre 2021 prévoit la mise en place d'un mécanisme transitoire en faveur des actuels bénéficiaires de l'AAH qui pourraient pâtir d'une « déconjugalisation » de la prestation : pendant dix ans, ils pourront choisir de continuer à bénéficier de l'AAH, tant qu'ils en remplissent les conditions, selon les modalités de calcul applicables aujourd'hui.

Le coût global d'une mesure de « déconjugalisation » de l'AAH avec droit d'option est estimé par la DGCS à 700 millions d'euros 29 ( * ) .

Dans l'attente de l'aboutissement de ce texte en cours d'examen, les rapporteurs proposent d'adopter cet article, qui porte une mesure positive pour les bénéficiaires de l'AAH.

Décision de la commission : la commission propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52 (nouveau)

Demande de rapport au Parlement sur la publication de certaines données relatives à l'allocation aux adultes handicapés

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport portant sur l'opportunité de rendre publiques les données nécessaires à l'appréciation précise de l'application des critères de conjugalité de l'allocation aux adultes handicapés, afin, en particulier, de compléter l'information sur les bénéficiaires et d'étudier précisément le pilotage de l'allocation.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS, UN MINIMUM SOCIAL REPRÉSENTANT UNE DÉPENSE DE PRÈS DE 12 MILLIARDS D'EUROS

L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est un minimum social versé, sous conditions de ressources, aux personnes handicapées de plus de vingt ans 30 ( * ) . Elle est subsidiaire par rapport à d'autres prestations, comme les pensions d'invalidité, les rentes d'accident du travail ou les avantages vieillesse. Elle peut se cumuler avec des ressources personnelles, y compris des revenus d'activité 31 ( * ) , dans la limite d'un plafond annuel, fixé à 10 843,2 euros pour une personne seule sans enfant depuis le 1 er avril 2020 32 ( * ) .

Afin de bénéficier de l'AAH, la personne handicapée doit être atteinte :

- soit d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (« AAH 1 ») ;

- soit d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 80 %, et présenter une restriction substantielle et durable 33 ( * ) pour l'accès à l'emploi (RSDAE) ne pouvant être compensée par des mesures d'aménagement du poste du travail (« AAH 2 »).

Ces conditions sont appréciées par les commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) après instruction par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

En projet de loi de finances pour 2022, les crédits demandés au titre de ce dispositif s'élèvent à 11,8 milliards d'euros en autorisation d'engagements et en crédits de paiement.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE DEMANDE DE RAPPORT AU PARLEMENT SUR LA PUBLICATION DE CERTAINES DONNÉES RELATIVES À L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

Le présent article est issu d'un amendement de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales Christine Cloarec-Le Nabour adopté en première lecture par l'Assemblée nationale avec un avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement.

Il prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport portant sur l'opportunité de rendre publiques les données nécessaires à l'appréciation précise de l'application des critères de conjugalité de l'AAH, afin, en particulier, de compléter l'information sur les bénéficiaires et d'étudier précisément le pilotage de l'allocation .

Il est précisé que ce rapport devrait être remis dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi de finances initiale pour 2022.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA NÉCESSITÉ D'AMÉLIORER LA TRANSPARENCE DE L'ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

Les rapporteurs spéciaux sont favorables à la remise d'un tel rapport , qui est en ligne avec les observations qu'ils ont formulées sur l'insuffisante transparence de l'AAH eu égard à l'importance de cette prestation dans leur récent rapport relatif à la gestion de cette allocation 34 ( * ) .

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 53 (nouveau)

Demande de rapport au Parlement sur la publication de certaines données relatives à l'allocation aux adultes handicapés

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport dressant un état des lieux relatif aux travaux menés concernant la modernisation de la délivrance de la prime d'activité et le développement d'outils de récupération automatique des données déclaratoires des bénéficiaires.

La commission des finances propose de supprimer cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : LA PRIME D'ACTIVITÉ, UN DISPOSITIF DE SOUTIEN AU POUVOIR D'ACHAT DES ACTIFS REPRÉSENTANT UNE DÉPENSE D'ENVIRON 10 MILLIONS D'EUROS

La prime d'activité , créée par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, a remplacé au 1 er janvier 2016 la part « activité » du revenu de solidarité active (RSA) ainsi que la prime pour l'emploi (PPE). Cette prime est versée aux personnes en activité professionnelle dont les ressources sont inférieures à un certain montant garanti - pour une personne célibataire sans enfant, ce montant est égal à environ 1 787 euros net par mois.

Formule de calcul de la prime d'activité

Le montant de la prime d'activité est calculé sur la base d'un montant forfaitaire variable en fonction de la composition du foyer (dont le nombre d'enfants à charge), auquel s'ajoutent les revenus professionnels pris en compte à hauteur de 61 % afin de favoriser l'activité . Pour mémoire, le montant forfaitaire de la prime d'activité s'élève à 553,71 euros (depuis le 1 er avril 2021) pour un foyer composé d'une personne seule sans enfant.

Un bonus individuel est également ajouté pour chaque personne en activité, membre du foyer, dont les revenus d'activité sont compris entre 0,5 SMIC et 1 SMIC. Le montant du bonus est croissant entre 0,5 SMIC et 1 SMIC et atteint son maximum dès 1 SMIC (soit 161,14 euros par mois au 1 er avril 2021), plafond au-delà duquel son montant est fixe. De ce total est déduit l'ensemble des ressources du foyer (notamment les prestations sociales, les revenus de remplacement).

Source : commission des finances du Sénat

La prime d'activité est ouverte aux jeunes actifs dès 18 ans , ainsi qu'aux étudiants et aux apprentis ayant perçu, au cours des trois derniers mois, un salaire mensuel supérieur à 78 % du SMIC. Elle a également été ouverte à compter du 1 er juillet 2016 35 ( * ) aux bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) qui travaillent en établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou en milieu ordinaire.

En PLF 2022, 9,9 milliards d'euros en AE et en CP sont prévus au titre de ce dispositif.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE DEMANDE DE RAPPORT AU PARLEMENT SUR LA MODERNISATION DE LA DÉLIVRANCE DE LA PRIME D'ACTIVITÉ

Le présent article est issu d'un amendement du rapporteur spécial de la commission des finances Patrice Anato adopté en première lecture à l'Assemblée nationale avec un avis de sagesse du Gouvernement.

Il prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport dressant un état des lieux relatif aux travaux menés concernant la modernisation de la délivrance de la prime d'activité et le développement d'outils de récupération automatique des données déclaratoires des bénéficiaires.

Il est précisé que ce rapport devrait être remis avant le 1 er septembre 2022.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE DEMANDE DE RAPPORT PRÉMATURÉE

Les rapporteurs spéciaux seront attentifs à l'évolution des travaux en cours sur la modernisation de la délivrance de la prime d'activité, dans un souci de simplification et de lutte contre le non-recours.

Néanmoins, compte tenu d'une part, des explications données par le Gouvernement lors de l'examen de cet amendement en séance publique, indiquant qu'au vu de l'état d'avancement de ces travaux la remise d'un tel rapport était prématurée et, d'autre part, de la position constante de la commission des finances consistant à modérer les demandes de rapports en loi de finances, les rapporteurs spéciaux proposent d'adopter l'amendement n° II-12 de suppression de cet article.

Décision de la commission : la commission des finances propose de supprimer cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission a examiné le rapport de M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial, sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (et article 51).

M. Arnaud Bazin , rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » . - Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » demandés pour 2022 s'élèvent à environ 28 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Si nous faisons le bilan depuis le début du quinquennat, nous observons une nette progression des crédits, puisque ceux-ci s'élevaient à 20 milliards d'euros en 2018. Le taux de croissance annuel moyen de la dépense est, quant à lui, proche de 9 % sur la période.

Cette croissance procède de deux facteurs.

Premièrement, elle découle du dynamisme des deux principaux dispositifs financés par la mission - l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et la prime d'activité -, qui représentent à eux seuls plus des trois quarts des crédits.

Deuxièmement, elle tient à la mobilisation importante de la mission pour « éteindre les incendies » sociaux. L'augmentation de 90 euros du bonus individuel de la prime d'activité avait par exemple constitué l'un des principaux vecteurs de la réponse gouvernementale à l'urgence sociale exprimée par le mouvement des « gilets jaunes ». En termes budgétaires, celle-ci s'est traduite par une dépense pérenne de 4,4 milliards d'euros par an. En 2020, lors de la crise sanitaire, ce sont deux aides exceptionnelles de solidarité qui avaient été versées aux ménages modestes, représentant une dépense ponctuelle de 2 milliards d'euros.

Je souhaite dire un mot de l'aide alimentaire, qui ne représente, avec 57 millions d'euros, qu'une faible part des crédits de la mission, mais qui constitue une politique vitale, comme la crise l'a rappelé avec force. En 2020, 5,2 millions de nos concitoyens ont fait appel à une aide alimentaire.

Si l'on intègre les crédits européens, le soutien à cette politique devrait progresser de façon notable en 2022 et les années suivantes - il faut le saluer. Nous identifions néanmoins un point de vigilance sur le plan opérationnel. La refonte de l'ancien Fonds européen d'aide aux plus démunis au sein du nouveau FSE+ va impliquer certaines transformations des processus. Les associations que nous avons auditionnées déplorent un manque de visibilité en la matière et il est essentiel que l'État et FranceAgriMer, l'opérateur chargé de l'achat de denrées, les accompagnent de manière adéquate. Un renforcement des moyens humains de FranceAgriMer est également prévu dans ce cadre pour professionnaliser ses fonctions achats et logistique, ce qui était à vrai dire nécessaire de longue date.

Ce budget témoigne également du renforcement du partenariat avec les départements pour la mise en oeuvre des politiques de solidarité. Dans ce projet de loi de finances, ce sont ainsi près de 400 millions d'euros qui sont consacrés au financement de politiques contractualisées avec les départements dans les domaines de la protection de l'enfance et de la prévention de la pauvreté. Il aura fallu du temps à l'État pour se rendre compte, d'une part, qu'il est indispensable de s'appuyer sur l'expertise des départements pour la mise en oeuvre des politiques sociales, et d'autre part, que les départements ne pouvaient malheureusement pas valoriser convenablement ce savoir-faire faute de moyens financiers suffisants. Le message semble enfin commencer à passer !

Je suis loin de partager, comme vous le savez, l'ensemble des orientations du Gouvernement dans sa politique de cohésion sociale et de solidarité. Je pourrais par exemple évoquer la baisse d'année en année de son soutien aux départements pour l'accueil des mineurs non accompagnés ...

Néanmoins, en responsabilité et afin d'assurer le financement de la prime d'activité et de l'AAH, je vous propose d'adopter les crédits de cette mission.

M. Éric Bocquet , rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » . - Certains points positifs sont à souligner dans ce budget. Je pense par exemple au renforcement, pour la deuxième année consécutive, des crédits de la lutte contre les violences faites aux femmes - c'est le résultat d'âpres combats et de belles mobilisations, notamment de la part des associations, mais aussi d'une attitude un peu plus ouverte de la nouvelle ministre. Nous nous félicitons du fait que la lisibilité budgétaire de cette politique ait été améliorée dans ce projet de loi de finances, avec la création d'une action dédiée. Cela répond à une recommandation que nous avions formulée dans notre rapport sur le sujet publié l'an passé.

Le constat est bien plus mitigé concernant l'AAH. Nous avons voulu faire, dans notre rapport, un premier bilan du quinquennat qui s'achève pour ce qui concerne cette allocation. Nous notons en premier lieu le dynamisme de la prestation, avec une croissance forte du nombre de bénéficiaires, qui a augmenté de 28,5 % depuis 2018 pour s'établir à 1,3 million, et une augmentation importante de la dépense qui devrait progresser de 24 % depuis 2018 pour s'établir à 11,8 milliards d'euros selon le projet de loi de finances pour 2022.

Cette dynamique est également affectée par de nombreuses évolutions législatives et réglementaires, avec des conséquences budgétaires très différentes. Pour résumer, une part significative de ce que l'État a entendu donner d'une main a été discrètement reprise de l'autre.

Une revalorisation importante de l'AAH a eu lieu en 2018, puis en 2019, relevant le montant mensuel de l'allocation de près de 90 euros pour le porter à un peu plus de 900 euros en 2021, ce qui représente pendant le quinquennat un effort global de 3 milliards d'euros.

Mais en parallèle, de discrets coups de rabot ont été décidés pour modérer l'évolution de la dépense : réforme du plafond de ressources des personnes en couple, suppression du complément de ressources, sous-indexation de la revalorisation légale annuelle, etc. Au total, ces mesures d'économies viennent capter plus du tiers de la dynamique créée par la revalorisation de l'AAH, soit environ 1 milliard d'euros sur les cinq ans. Pour de nombreux bénéficiaires, cette revalorisation a donc été largement théorique.

En outre, en dépit de l'article 51 rattaché à la mission qu'Arnaud Bazin vous présentera ensuite, le Gouvernement persiste dans son refus de déconjugaliser les revenus pris en compte pour le calcul de l'AAH, à rebours de l'objectif d'autonomie qui est pourtant recherché.

La logique strictement budgétaire est parfois poussée à l'extrême.

L'État semble en effet déterminé à renforcer le pilotage de l'AAH afin d'harmoniser les pratiques des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) - il est vrai que les disparités sont encore fortes en matière de taux d'attribution de la prestation. Nous ne pouvons que nous en féliciter, puisque c'est exactement ce que nous recommandions, avec Arnaud Bazin, dans le rapport de contrôle consacré aux MDPH que nous avons publié cet été. Il ressort néanmoins de nos auditions qu'un objectif d'économies de 80 millions d'euros a été associé à cette démarche d'amélioration du pilotage, ce qui est difficilement compréhensible.

Tout d'abord, rien ne permet d'affirmer que l'harmonisation des pratiques permettra de réaliser des économies. Surtout, c'est de notre point de vue une façon bien étrange d'aborder le problème. L'objectif doit être ici de renforcer l'égalité territoriale entre les citoyens pour l'accès à un droit relevant de la solidarité nationale, et non de rationaliser la dépense.

Même si nos analyses convergent pour l'essentiel avec Arnaud Bazin, je propose, quant à moi, de rejeter les crédits de la mission, qui sont encore loin d'être à la hauteur des enjeux et qui reste en décalage avec la situation sociale du pays dans le contexte issu de la crise sanitaire .

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - La manière de comptabiliser les ressources en vue de l'attribution de l'AAH est un sujet éminemment complexe, dont le Sénat a déjà délibéré. Je ne suis pas certain qu'on puisse en rester à la proposition faite par le Gouvernement, en particulier quand on voit que celui-ci égrène les crédits au fil des semaines à destination de certains de nos concitoyens, parfois pour des montants très importants.

Mme Christine Lavarde . - J'ai deux questions relatives au revenu de solidarité active (RSA).

J'ai lu dans la presse que dix départements s'opposaient à la prise en charge par le RSA des personnes dont le contrat de travail avait été suspendu pour refus de vaccination. Quelle charge financière cela représente-t-il ?

En ce qui concerne l'expérimentation en Seine-Saint-Denis de la nationalisation du RSA, disposez-vous d'un retour d'expérience ? Cette mesure vous semble-t-elle pertinente, notamment en termes de gestion ?

M. Stéphane Sautarel . - Je m'interroge aussi sur le retour d'expérience dont nous disposons, le cas échéant, quant à cette expérimentation de recentralisation du RSA. Je suis par ailleurs surpris que le projet de loi de finances intègre cette expérimentation dans les comptes, alors que le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS) n'a pas été adopté définitivement par le Parlement ...

J'ajoute que cette mesure entraînera une « gestion à la carte » qui risque de rendre impossibles les comparaisons entre les départements en ce qui concerne leurs finances - je pense notamment à l'attribution des dotations, à la péréquation, etc. Il n'est donc pas sûr qu'elle améliore la lisibilité d'ensemble.

Enfin, je me réjouis évidemment de l'effort en faveur de la protection de l'enfance, même s'il faut savoir que 140 millions d'euros représentent le budget annuel qu'un département de taille moyenne consacre à ce sujet. L'effort reste donc limité ...

M. Marc Laménie . - Cette mission est importante en volume.

Je note moi aussi la revalorisation qui a bénéficié aux allocataires de l'AAH, mais je rappelle que nos rapporteurs spéciaux mettent souvent en avant le nombre insuffisant de places d'accompagnement, notamment dans les établissements et services d'aide par le travail (ESAT). C'est un point particulièrement important dans les départements frontaliers comme le mien.

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux ont évoqué la solidarité et le partenariat avec les conseils départementaux et les associations. Nous devons être attentifs aux problèmes de financement des grandes associations qui oeuvrent dans ce secteur : leurs actions sont essentielles.

Mme Isabelle Briquet . - Moi aussi, je voudrais savoir si nous disposons d'un retour d'expérience sur l'expérimentation liée au RSA.

Je partage les remarques d'Éric Bocquet sur l'AAH : des efforts ont été réalisés, mais la seule véritable équité est la déconjugalisation ! Nous restons donc sur notre faim.

Je souhaite enfin que nous restions vigilants sur l'aide alimentaire, parce que nous avons connu des difficultés durant les deux exercices précédents. La mise en place du FSE + semble nous engager sur la voie d'une aide plus importante, mais nous devons être attentifs. L'aide alimentaire est indispensable, nous ne pouvons pas nous en passer !

M. Jérôme Bascher . - Les rapporteurs spéciaux ont déjà mis en avant des disparités dans les pratiques des MDPH : une solution ne serait-elle pas de renationaliser le dispositif ?

Aujourd'hui, les évolutions de l'AAH et du minimum vieillesse sont corrélées. Ne faudrait-il pas modifier ce point afin d'améliorer l'efficacité de nos politiques ?

M. Sébastien Meurant . - Avez-vous des informations plus précises sur la croissance de l'AAH par département ? Cette croissance est-elle uniforme ou existe-t-il des différences selon les territoires ?

M. Arnaud Bazin , rapporteur spécial . - Au sujet de l'AAH, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à ne plus prendre en compte les revenus du conjoint dans l'attribution et le calcul de l'allocation. Le Gouvernement propose ici une mesure différente : un abattement de 5 000 euros sur les revenus du conjoint. Le compte n'y est pas ! La mesure proposée par le Gouvernement a une incidence de 185 millions d'euros ; il faudrait y ajouter environ 500 millions pour arriver à une déconjugalisation complète et un équilibre budgétaire doit être trouvé. Nous verrons si des amendements sont déposés sur ce point. Je rappelle que la seule pétition déposée au Sénat et ayant recueilli plus de 100 000 signatures concerne justement ce sujet.

En ce qui concerne l'expérimentation liée au RSA, je vais vous décevoir, puisqu'elle ne débutera qu'au 1 er janvier prochain ... Pour autant, l'article 12 du projet de loi de finances pour 2022 prévoit les conditions de son financement pour l'État, ce qui va en fait intéresser tous les départements. En effet, au-delà de la seule question de la lisibilité, évoquée par Stéphane Sautarel, l'État envisage de ponctionner, jusqu'à 20 %, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), ce qui aura un impact sur les calculs de la péréquation entre les départements. Nous devons donc être attentifs à toutes les conséquences de cette expérimentation sur l'ensemble des départements.

L'enveloppe prévue pour la protection de l'enfance - 140 millions d'euros - est en effet limitée budgétairement, mais la contractualisation est un point intéressant. Les départements sont d'ailleurs plutôt satisfaits de cette mesure, comme ils le sont de celle qui est relative à la lutte contre la pauvreté. Au début, l'État n'avait sûrement pas la bonne attitude en voulant imposer une certaine approche, mais les choses sont devenues plus fluides et plus raisonnables.

Des moyens supplémentaires seront apportés en 2022 à l'aide alimentaire, notamment avec la programmation sur sept ans des fonds européens. Ceux-ci représenteront 90 % de l'ensemble, contre 85 % auparavant. Il est vrai que les premières années ont été chaotiques, mais cela venait du fait que la France avait mis en place des procédures administratives extrêmement lourdes - il y avait, de mémoire, sept niveaux de contrôle ! -, si bien que la Commission européenne ne versait pas les crédits. Les choses se sont améliorées.

J'ajoute qu'il est important que FranceAgriMer, qui achète pour plus de 100 millions d'euros par an de denrées alimentaires avant de les redistribuer aux associations, soit enfin doté de moyens humains plus adaptés : devraient ainsi être créés un poste d'ingénieur logisticien et un poste de spécialiste en marchés alimentaires - c'est essentiel, car ce sont des métiers qui ne s'inventent pas ! C'est d'autant plus important que FranceAgriMer, qui doit s'occuper de 31 types de denrées à livrer en 300 endroits, devra gérer des marchés pluriannuels et qu'il faudra séparer les achats de denrées et la logistique. Il est vraiment essentiel que l'établissement recrute des spécialistes de ces questions. Je rappelle que plusieurs marchés ont été déclarés infructueux ces dernières années.

Nous devons être attentifs à la question de l'aide alimentaire, amortisseur des crises : plus de 5 millions de nos concitoyens y ont recours.

Jérôme Bascher s'est interrogé - de manière radicale ... - sur une éventuelle nationalisation des MDPH. Mon cher collègue, jamais je ne pourrai, en tant qu'ancien président de conseil départemental et départementaliste, bénir une telle horreur ! Pour autant, il est nécessaire d'harmoniser les pratiques.

Les taux d'attribution de l'AAH sont différents selon les départements, mais c'est surtout le cas pour l'AAH dite 2, celle qui est octroyée aux personnes ayant un taux d'invalidité compris entre 50 % et 80 % et une reconnaissance d'incapacité sévère et durable d'accéder à l'emploi. Il peut sembler normal que des différences existent en fonction des caractéristiques, ne serait-ce que géographiques, des départements. Nous devons garder de la proximité, tout en apportant davantage de cohérence, à condition que cela soit fait intelligemment.

Enfin, nous allons regarder la question de la corrélation entre l'évolution de l'AAH et celle du minimum vieillesse ...

M. Éric Bocquet , rapporteur spécial . - En ce qui concerne la déconjugalisation de l'AAH, je veux d'abord dire que la bataille n'est pas terminée ! Le Sénat a voté un texte et la navette est en cours. Les associations sont extrêmement attachées à cette question. Nous devons rester vigilants et montrer toute notre solidarité envers les personnes handicapées.

Sur le RSA, nous savons bien qu'il existe de grandes disparités selon les départements. Dans mon département, le Nord, la situation est particulièrement tendue. Je ne crois pas que les départements rechignent à gérer le RSA, mais ils ne peuvent le faire correctement que s'ils disposent des moyens financiers suffisants. En tout cas, le RSA doit être géré au plus près des allocataires et nous devons être vigilants sur les propositions de l'État en la matière.

Il existe des disparités en matière d'attribution de l'AAH : à titre d'exemple, la part des allocataires dans la population est relativement faible dans les départements d'Île-de-France et en Auvergne-Rhône-Alpes, plus élevées dans le Sud-Ouest, notamment dans des départements ruraux, et outre-mer.

Je rejoins Marc Laménie sur les phénomènes d'expatriation subie par les familles en raison du manque de places dans les ESAT ou dans les autres structures d'accueil. Nous connaissons bien le problème dans le Nord.

Pour conclure, je crois que nous devons absolument soutenir les associations. Elles sont militantes - ce n'est pas un gros mot - et il faut les encourager !

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 51

M. Arnaud Bazin , rapporteur spécial . - L'article 51 propose d'instaurer un mécanisme d'abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint pour le calcul de l'AAH.

Pour rappel, l'AAH est une prestation conjugalisée, comme le RSA et les autres minima sociaux, c'est-à-dire que les ressources prises en compte sont celles du ménage et non celles de l'individu bénéficiaire.

En l'état du droit, un abattement existe déjà sur les revenus du conjoint, mais il est calculé de façon proportionnelle (20 %). Ce système n'est pas satisfaisant, car il est antiredistributif : par construction, plus les ressources sont élevées, plus l'abattement est important...

Il est indiqué que le montant de l'abattement, qui devra être fixé par décret, serait de 5 000 euros. Sous cette hypothèse, le dispositif doit permettre de générer un gain moyen de 110 euros par mois pour 120 000 personnes, pour un coût total estimé à 185 millions d'euros par an. Il s'agit donc incontestablement d'une mesure positive. Cela dit, elle ne répond en rien au problème posé par la conjugalisation qui a pour effet d'aggraver la dépendance de la personne handicapée aux revenus de son conjoint - c'est une question de principe.

Il est temps de prendre acte du fait que l'AAH n'est pas un minimum social comme un autre, mais une prestation de compensation de difficultés particulières d'accès à l'emploi et d'insertion liées au handicap. Il s'agit d'une aspiration sociale profonde : en témoigne le fait que la première pétition à atteindre le seuil de 100 000 signatures sur la plateforme dédiée du Sénat porte sur ce sujet.

Une proposition de loi allant en ce sens a ainsi été inscrite à notre ordre du jour, donnant l'occasion au Sénat de voter la déconjugalisation totale de l'AAH. Pour les ménages qui seraient susceptibles d'y perdre financièrement, un droit d'option en faveur du système conjugalisé a été proposé pour dix ans - on pense intuitivement que la déconjugalisation ne fait que des gagnants, ce qui n'est en fait pas le cas.

L'Assemblée nationale est revenue sur ce texte, en lui substituant le dispositif qui figure aujourd'hui à l'article 51 du projet de loi de finances pour 2022. Le Sénat a ensuite rétabli sa version en deuxième lecture le 12 octobre dernier.

Dans l'attente des évolutions de ce texte en cours de navette, nous vous proposons d'adopter sans modification cet article, qui constitue tout de même une mesure positive en faveur des bénéficiaires de l'AAH.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 51.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission et l'article 51. Elle a proposé l'adoption sans modification de l'article 52 et la suppression de l'article 53.

Le compte rendu de la réunion peut être consulté sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/finances.html

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction des finances, des achats et des services (DFAS)

- M. Francis LE GALLOU, directeur ;

- M. Christophe TASSART, sous-directeur des affaires financières ;

- Mme Fanny VERMOREL, chef du bureau de la synthèse et des programmes soutien.

Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

- Mme Virginie LASSERRE, directrice générale.

Assemblée des départements de France

- M Jean-Michel RAPINAT, directeur des politiques sociales ;

- Mme Marylène JOUVIEN, chargée des relations avec le Parlement.

FranceAgriMer

- Mme Véronique BORZEIX, directrice générale adjointe ;

- M. Christophe DASSIÉ, chef du service Marchés, certificats et qualité.

Inter-fédération de la protection juridique des majeurs (IF-PJM)

- M. Ange FINISTROSA, président de la fédération nationale des associations tutélaires (FNAT) ;

- M. Luc GATEAU, président de l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales, et de leurs amis (Unapei) ;

- Mme Guillemette LENEVEU, directrice générale de l'union nationale des associations familiales (UNAF) ;

- M. Loïc ROGER, consultant chez Séance Publique.

Table ronde avec les associations d'aide alimentaire

Les Restos du Coeur

- M. Louis CANTUEL, responsable des relations institutionnelles ;

- M. Yves MÉRILLON, responsable des relations institutionnelles.

Fédération Française des Banques Alimentaires

- Mme Laurence CHAMPIER, directrice fédérale ;

- Mme Barbara MAUVILAIN, responsable du service des relations institutionnelles.

Croix-Rouge française

- M. Guillaume MEUGNIER, responsable du département Action sociale ;

- Mme Valérie BETTINGER, responsable du pôle Aides matérielles.

Association Nationale de Développement des Épiceries Solidaires (ANDES)

- M. Yann AUGER, directeur général.

Table ronde avec les associations de défense des droits des femmes et de lutte contre les violences faites aux femmes

Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV)

- Mme Françoise BELLOT, trésorière.

Une femme, un toit (FIT)

- Mme Séverine LEMIÈRE, présidente.

Table ronde avec les associations de défense des droits des personnes handicapées

APF France handicap

- Mme Pascale RIBES, présidente ;

- Mme Caroles SALERES, conseillère nationale Travail, emploi, formation et ressources.

Association Pour Adultes et Jeunes Handicapés (APAJH)

- M. Henri SOUPA, directeur de cabinet du président.

Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales, et de leurs amis (Unapei)

- M. Luc GATEAU, président.

Association des accidentés de la vie - Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH)

- M. Karim FELISSI, avocat conseil ;

- Mme Sophie CRABETTE, chargée de plaidoyer.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2022.html


* 1 Avec déduction des mesures de périmètre et de transferts constatés en PLF 2022 et en PLF 2021
(- 413,4 millions d'euros).

* 2 Source : réponse au questionnaire budgétaire.

* 3 Circulaire du 5 juin 2019 relative à la transformation des administrations centrales et aux nouvelles méthodes de travail ; circulaire du 12 juin 2019 relative à la mise en oeuvre de la réforme de l'OTE ; l'instruction du 2 août 2019 relative à la constitution de secrétariats généraux communs (SGC) aux préfectures et aux directions départementales interministérielles (DDI) et le décret n° 2020-99 du 7 février 2020 relatif à l'organisation et aux missions des SGC.

* 4 À compter rétroactivement du 1 er janvier 2016.

* 5 Rapport d'évaluation de la revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité, juillet 2019, DGCS, DREES, CNAF, CCMSA.

* 6 Crédoc, L'opinion des Français sur la prie d'activité et le revenu universel d'activité, janvier 2020.

* 7 Ou plus de 16 ans pour un jeune qui n'est plus considéré à la charge des parents pour le bénéfice des prestations familiales .

* 8 Les modalités de cumul de l'allocation avec des revenus d'activité sont précisées par le décret n° 2010-1403 du 12 novembre 2010, et visent à encourager l'accès durable à l'emploi : pendant six mois au maximum à compter de la reprise d'un emploi, puis partiel sans limite dans le temps.

* 9 Ce plafond est multiplié par 1,81 pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

* 10 Elle est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à partir du dépôt de la demande.

* 11 Proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale déposée par les députés Jeanine DUBIÉ, Charles de COURSON, Yannick FAVENNEC et plusieurs de leurs collègues le 30 décembre 2019.

* 12 Rapport d'information n° 706 (2019-2020) de Mme Cécile Cukierman , fait au nom de la mission d'information « Compétences des départementsz », déposé le 15 septembre 2020.

* 13 Expression du Mme Martine Long, professeur de droit public.

* 14 « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale »,

Rapport d'information de MM. Hussein BOURGI, Laurent BURGOA, Xavier IACOVELLI et Henri LEROY, fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales n° 854 (2020-2021), 29 septembre 2021.

* 15 Rapport d'information d'Arnaud Bazin et Éric Bocquet, fait au nom de la commission des finances du Sénat, « Un dispositif vital, un financement menacé ? Un modèle associatif fondé sur le bénévolat à préserver » (octobre 2018).

* 16 Source : réponse au questionnaire budgétaire.

* 17 La gratuité de la distribution des denrées est imposée par le règlement du FEAD, ce qui exclut les épiceries sociales, qui soutiennent les personnes en difficulté contre une participation financière symbolique.

* 18 Rapport d'information de MM. Arnaud Bazin et Éric Bocquet, fait au nom de la commission des finances, n° 602 (2019-2020) - 8 juillet 2020.

* 19 L'interfédération FNAT, UNAF et UNAPEI a engagé un recours contentieux devant le Conseil d'État, contre le décret n° 2018-767 du 31 août 2018 prévoyant cette augmentation, qui a ainsi été par une décision n° 425138 du Conseil d'État du 12 février 2020. Un nouveau décret a été pris en conséquence par le décret n° 2020-1684 du 23 décembre 2020, entraînant rendement budgétaire similaire à celui initialement prévu.

* 20 D'après une étude conjointe de la DGCS et l'Ancreai de mai 2016.

* 21 L'IF-PJM est composée de la fédération nationale des associations tutélaires (FNAT), l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales, et de leurs amis (Unapei) et l'union nationale des associations familiales (UNAF).

* 22 « Protection juridique des majeurs : et si ça n'existait pas ? Évaluation des impacts socio-économiques de la protection juridique des majeurs par les mandataires professionnels », étude réalisée par le cabinet Citizing à la demande de l'IF-PJM, septembre 2020.

* 23 Ou plus de 16 ans pour un jeune qui n'est plus considéré à la charge des parents pour le bénéfice des prestations familiales .

* 24 Les modalités de cumul de l'allocation avec des revenus d'activité sont précisées par le décret n° 2010-1403 du 12 novembre 2010, et visent à encourager l'accès durable à l'emploi : pendant six mois au maximum à compter de la reprise d'un emploi, puis partiel sans limite dans le temps.

* 25 Ce plafond est multiplié par 1,81 pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

* 26 Elle est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à partir du dépôt de la demande.

* 27 Proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale déposée par les députés Jeanine DUBIÉ, Charles de COURSON, Yannick FAVENNEC et plusieurs de leurs collègues le 30 décembre 2019.

* 28 Rapport n° 400 (2020-2021) de M. Philippe MOUILLER, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 3 mars 2021.

* 29 Source : réponses au questionnaire budgétaire.

* 30 Ou plus de 16 ans pour un jeune qui n'est plus considéré à la charge des parents pour le bénéfice des prestations familiales .

* 31 Les modalités de cumul de l'allocation avec des revenus d'activité sont précisées par le décret n° 2010-1403 du 12 novembre 2010, et visent à encourager l'accès durable à l'emploi : pendant six mois au maximum à compter de la reprise d'un emploi, puis partiel sans limite dans le temps.

* 32 Ce plafond est multiplié par 1,81 pour un couple et majoré de 50 % par enfant à charge.

* 33 Elle est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à partir du dépôt de la demande.

* 34 « Gestion de l'allocation aux adultes handicapés : propositions pour renforcer les moyens et le pilotage des MDPH », rapport d'information n° 748 (2020-2021) de MM. Arnaud Bazin et Éric Bocquet fait au nom de la commission des finances du Sénat, 7 juillet 2021.

* 35 À compter rétroactivement du 1 er janvier 2016.

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