III. LA CONTRIBUTION DE L'ÉTAT AU FINANCEMENT DES SERVICES D'INCENDIE ET DE SECOURS

Il convient en premier lieu de souligner que le financement de la sécurité civile repose essentiellement sur les dépenses locales. Ainsi, le budget consolidé des services d'incendie et de secours (SIS) s'élève en 2022 à 5,6 milliards d'euros17(*), et il est donc près de 7,5 fois supérieur aux crédits de paiement inscrits sur le programme 161 dans le PLF pour 2024. Les SIS sont en effet financés en très grande partie par les collectivités territoriales, et pour une part prépondérante par les départements (58 %).

La DGSCGC a récemment engagé, en lien avec la direction générale des collectivités locales (DGCL), un travail de concertation avec Départements de France et l'Association des maires de France (AMF), sur le financement des SIS, et plus particulièrement, sur une éventuelle réforme de la part de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances (TSCA) qui leur est affectée en application de l'article 53 de la loi de finances initiale pour 200518(*). Le rapporteur spécial sera particulièrement attentif aux suites données à ces travaux, dont la traduction législative pourrait avoir un impact significatif sur l'équilibre financier des SIS.

A. LA POURSUITE DES « PACTES CAPACITAIRES » ENTRE L'ÉTAT, LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET LES SIS

L'année 2023 a été marquée par la mise en oeuvre de pactes capacitaires destinés à renforcer les moyens opérationnels des SIS par l'acquisition de matériels cofinancés par l'État.

Annoncés dans le cadre de la LOPMI, les pactes capacitaires devaient initialement être dotés d'une enveloppe totale de 30 millions d'euros sur cinq ans, par l'intermédiaire de la DSIS². La budgétisation initiale du programme 161 pour l'année 2023 prévoyait un montant de 8 millions d'euros en AE et d'1 million d'euros en CP au titre de ces pactes capacitaires. Une enveloppe de 150 millions d'euros en AE et 37,5 millions d'euros en CP a ensuite été ajoutée à cette ligne budgétaire en cours de discussion19(*), à l'initiative du Gouvernement, afin de traduire les annonces du président de la République du 28 octobre 2022 d'un renforcement des moyens de lutte contre les feux de forêt, au lendemain des incendies qui ont frappé le pays lors de l'été 2022.

D'après la DGSCGC, l'année 2023 a été marquée par la signature de 100 conventions avec les différents SIS. Cela a permis d'engager dès cette même année les 150 millions d'euros d'AE et de décaisser et verser 37,5 millions d'euros aux SIS au titre des avances, prévues dans le cadre de ce cofinancement.

Ces crédits devraient ainsi permettre de financer 1079 véhicules de lutte contre les incendies, pour porter le total de camions citernes feux de forêt (CCF) à 4 800. Au total, 40 millions d'euros supplémentaires devraient être décaissés dans le cadre de ces pactes capacitaires, dont 9,7 millions d'euros en AE et 7,4 millions d'euros en CP pour l'année 2024. L'amendement du Gouvernement adopté en première lecture à l'Assemblée nationale est en outre venu abonder ces crédits de 39 millions d'euros en CP, sans préciser le contexte dans lequel s'inscrit cette nouvelle enveloppe.

Ces achats massifs et mutualisés de véhicules, réalisés par l'intermédiaire de l'Union des groupements d'achats publics (UGAP), doivent notamment permettre aux SIS de bénéficier de prix avantageux. Il ressort toutefois des auditions du rapporteur spécial que la limitation du nombre de modèles de véhicules disponible dans le référentiel élaboré par la DGSCGC dans un but d'uniformisation des commandes, auraient conduit certains SIS à ne pas recourir aux pactes capacitaires. En effet, ces derniers ont estimé que les véhicules présentés dans ce référentiel excédaient leurs besoins, et leur revenaient plus chers que ceux qu'ils souhaitaient acquérir, malgré le bénéfice de la subvention20(*).

Il semble toutefois que cette situation n'ait concerné qu'un nombre très limité de SIS. Pour la plupart des acteurs consultés par les rapporteurs spéciaux, la mise en oeuvre de ces pactes apparait globalement satisfaisante, malgré des doutes sur les délais de livraison des camions citernes feux de forêt. En effet, si les premières livraisons de véhicules pourraient intervenir dans les prochains mois, d'autres livraisons pourraient être retardées en raison de tensions rencontrées par les industriels sur les chaînes internationales d'approvisionnement.

Le rapporteur spécial considère que le principe d'une commande massive d'appareils uniformisés représente en tout état de cause un intérêt opérationnel certain, compte tenu de l'extension géographique du risque incendie, et de la multiplication des besoins de colonnes de renfort qui en résulte. Cette uniformisation permettra en effet une appropriation beaucoup plus rapide des matériels par les sapeurs-pompiers lorsque ces-derniers seront amenés à prêter mains fortes à leurs voisins d'autres départements pour faire face à une crise d'ampleur.


* 17 Réponses au questionnaire budgétaire.

* 18 Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 19Ce qui a in fine porté les crédits consacrés aux pactes capacitaires en 2023 à un montant total de 158 millions d'euros en AE et 38,5 millions d'euros en CP.

* 20 Les Départements de France, ont présenté au rapporteur spécial l'exemple du Dacia Duster à 35 000 euros, absent du pacte capacitaire au profit du Ford Ranger à 95 000 euros, qui, même financé à 50 % par l'État, impliquait un coût de 42 000 euros à la charge du SIS.

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