II. LES CONDITIONS D'ACQUISITION DES DROITS DE RETRANSMISSION PAR CÂBLE DE PROGRAMMES TÉLÉDIFFUSÉS À PARTIR D'UN AUTRE ÉTAT DE LA COMMUNAUTÉ

Le volet « câble » de la directive n° 93/83 traite uniquement de la diffusion câblée secondaire, dans un État membre, d'une télédiffusion primaire effectuée dans un autre État membre. Il a pour objet de régler les problèmes pratiques d'acquisition des droits qui se posent au câblodistributeur responsable de cette « retransmission intégrale, simultanée et sans changement », afin « d'encourager la retransmission transfrontière par câble et de renforcer l'espace audiovisuel européen » ( ( * )9) .

Le système proposé, qui tend à concilier les intérêts des câblo-distributeurs avec la reconnaissance du principe de l'acquisition contractuelle des droits exclusifs, repose principalement sur la gestion collective obligatoire des droits exclusifs de rediffusion, dont seront toutefois exemptés les organismes de radiodiffusion pour les droits dont ils sont titulaires ou cessionnaires.

En droit français, depuis la loi du 3 janvier 1995 sur la gestion du droit de reproduction par reprographie, la gestion collective obligatoire de droits exclusifs a déjà fait son entrée dans le code de la propriété intellectuelle. Et, depuis que la loi de 1985 a défini les règles relatives à l'application du droit d'auteur et des droits voisins à la câblo-distribution, l'organisation de la gestion collective des droits de câblo-distribution a largement progressé. La transposition de la directive ne devrait donc pas poser de problèmes particuliers, ni au niveau des principes, ni au niveau de leur application.

A. LES DISPOSITIONS DE LA DIRECTIVE

Les dispositions de la directive n° 93/83 règlent le problème de l'acquisition des droits de diffusion secondaire câblée « à l'importation », c'est-à-dire en faisant obligation à l'État membre où cette diffusion aura lieu de prévoir les règles permettant aux câblo-distributeurs nationaux d'exploiter « paisiblement » les programmes originaires d'autres États membres.

A côté de la gestion collective obligatoire des droits, pièce maîtresse du dispositif, sont prévues des « mesures d'accompagnement » ( ( * )10) destinées à favoriser l'acquisition des droits : l'institution d'une procédure de médiation, mais aussi l'obligation faite aux États de contrôler les « comportements abusifs » qui pourraient être la conséquence de « la concentration des droits de retransmission simultanée, intégrale et inchangée dans le chef des sociétés de gestion collective et des radiodiffuseurs » ( ( * )11) .

1. L'obligation de gestion collective des droits exclusifs de diffusion secondaire câblée

Les propositions de la Commission qui sont à l'origine du dispositif de la directive partaient du constat qu'en dépit des efforts déployés par les parties en présence pour favoriser des modes d'acquisition collective des droits, par les diffuseurs primaires pour fournir aux câblo-distributeurs des programmes libres de droit, et même en dépit de l'existence dans certaines législations nationales de licences légales, la situation des câblo-distributeurs demeure précaire, en particulier parce qu'il leur est impossible de procéder en temps voulu à l'acquisition des droits -ou d'éclaircir les situations juridiquement douteuses- et surtout parce qu'ils restent exposés aux revendications de titulaires de droits qui n'ont pas été partie ou représentés aux accords collectifs.

Compte tenu de cette situation, et de l'impossibilité de passer outre au principe du droit exclusif, la directive propose une solution toute pragmatique : elle reconnaît le principe de la négociation contractuelle des droits, mais interdit l'exercice individuel des droits exclusifs.

a) La reconnaissance du droit exclusif

L'article 8 de la directive impose aux États membres de « veiller à ce que les retransmissions par câble d'émissions provenant d'autres États membres » se déroulent « dans le respect des droits d'auteur et des droits voisins en vigueur » et « sur la base de contrats individuels ou collectifs »

Il limite également au 31 décembre 1997 le maintien des régimes de licence légale en cours de validité « ou expressément prévus par la législation nationale » au 31 juillet 1991 (de telles licences étaient notamment prévues au Danemark et en Autriche).

Ce principe posé, l'article 9 définit un régime de gestion collective obligatoire des droits exclusifs, dont l'article 10 exempte les radiodiffuseurs.

b) Les modalités de la gestion collective obligatoire

L'article 9-1 de la directive fait obligation aux États membres de veiller à ce que le droit exclusif des titulaires de droits d'auteur et de droits voisins en matière de retransmission par câble « ne puisse être exercé que par une société de gestion collective »

Cette formule n'impose pas que les droits soient cédés à une société de gestion collective, ni même que les titulaires de droits adhèrent à l'une de ces sociétés : mais elle exclut formellement la possibilité qu'ils les exercent individuellement.

L'article 9-2 complète ce dispositif par un système de gestion collective élargie -dit aussi de « licence collective élargie » ou « d'accords collectifs élargis » : il prévoit que les droits des titulaires qui n'en ont pas confié la gestion à une société de gestion collective sont réputés être gérés par la société gérant les droits de la même catégorie. En cas de pluralité de sociétés, le titulaire pourra choisir celle qui sera « réputée être chargée de gérer ses droits » .

Dans le cadre de la gestion collective élargie, les titulaires de droits auront les mêmes droits et obligations que ceux qui auront expressément confié la gestion de leurs droits à une société, et pourront revendiquer un droit à rémunération dans un délai « à fixer par l'État membre concerné » , mais qui ne pourra être inférieur à trois ans à compter de la retransmission par câble.

Il est à noter que le document de réflexion de la Commission prévoyait la possibilité pour les États membres de choisir entre l'intervention obligatoire d'une société de gestion collective et le régime des accords collectifs étendus, en soulignant que les deux solutions aboutissaient au même résultat.

Enfin l'article 9-3 dispose que les États membres pourront prévoir que, dès lors que le titulaire de droit autorise une télédiffusion primaire sur son territoire, « il est réputé accepter de ne pas exercer ses droits pour la retransmission par câble sur une base individuelle » .

c) L'exception relative aux radiodiffuseurs

Elle est prévue par l'article 10 de la directive, et s'étend à leurs droits propres comme à ceux qui leur ont été cédés.

* (9) Document de réflexion « radiodiffusion et droit d'auteur dans le marché intérieur » point 1-5.

* (10) ainsi qualifiées par la Commission dans le document « Radiodiffusion et droit d'auteur dans le marché intérieur ».

* (11) doc. corn. « Radiodiffusion et droit d'auteur » précité, point 5.2.7.

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