B. LE PROJET DE LOI

Le projet de loi soumis à votre examen reprend globalement le texte de la directive dont la transposition est facilitée par la proximité des règles qu'elle instaure avec la législation nationale relative à la protection du consommateur. Aussi les dispositions nouvelles viennent-elles s'inscrire naturellement dans le code de la consommation. Elles sont regroupées sous l'article premier du projet qui comprend deux articles complémentaires, l'un procédant à une coordination à l'article L. 141-1 du code de la consommation, l'autre complétant la loi Hoguet du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce pour soumettre les intermédiaires se livrant à la commercialisation de droits de jouissance d'immeubles à temps partagé au régime des garanties qu'elle définit.

1. La transposition de la directive

Proposant une transcription fidèle de la directive, le projet de loi s'en éloigne toutefois sur certains points.

Considérant, d'une part, la nécessité de respecter la variété des montages juridiques correspondant à la diversité et au caractère évolutif de la demande afin de ne pas entraver le développement économique de l'immobilier destiné aux loisirs, et, d'autre part, qu'aucun contentieux significatif tenant à la nature juridique du contrat n'était intervenu, le projet de loi définit largement le contrat réglementé comme celui conclu à titre onéreux entre un professionnel et un consommateur pour conférer à ce dernier la jouissance d'un bien immobilier à usage d'habitation pour certaines périodes. Lorsqu'il s'agit d'un contrat à durée déterminée, cette durée ne peut être inférieure à trois ans.

Comme le souligne l'exposé des motifs, " les dispositions concernant la formation du contrat, le droit de rétractation, l'interdiction des avances, le lien entre le contrat principal et le crédit, le mode de calcul des délais, l'affirmation du caractère d'ordre public de ces dispositions et les sanctions répressives sont étroitement inspirées des textes sur le démarchage (art. L. 121-21 et suivants du code de consommation), le crédit à la consommation (art. L. 311-1 et suivants du même code) ou le crédit immobilier (art. L. 312-1 et suivants du même code). " .

La liste des mentions devant figurer dans l'offre est calquée sur celle annexée à la directive : ces mentions sont nombreuses et destinées à assurer une information complète du consommateur. Elles concernent par exemple l'identité et le domicile du professionnel, la désignation précise des locaux, la durée du contrat, la détermination des périodes de jouissance, l'énumération des équipements communs et des services accessoires, le prix initial et les modalités de paiement, le montant des charges, l'affiliation du professionnel à une bourse d'échanges et les conditions auxquelles le consommateur pourra y adhérer.

Excédant les exigences résultant de la directive, le projet de loi impose que soient reproduites dans l'offre, en caractères très apparents, les dispositions relatives au délai de maintien de l'offre, aux modalités d'acceptation de l'offre, au délai de rétractation et à l'interdiction faite au professionnel de percevoir un versement avant l'expiration de ce dernier délai.

Se détachant de la directive, le texte prévoit également la nécessité pour le consommateur de retourner au professionnel l'offre acceptée, assortie de sa signature et des mentions de la date et du lieu, par voie de lettre recommandée avec demande d'avis de réception . Cette précaution tend à prévenir les acceptations hâtives.

Le projet de loi ne retient pas le droit de résiliation ouvert par la directive au consommateur pendant un délai de trois mois, sanctionnant les manquements à l'obligation d'information incombant au professionnel.

En effet, la résiliation du contrat, à l'initiative du consommateur, ne peut s'analyser au regard du droit français que comme une résolution puisqu'elle fait suite à l'inexécution par le professionnel de son obligation contractuelle d'informer. Produisant les mêmes effets que la nullité, elle suppose une intervention du juge qui la constate après avoir vérifié la réalité du manquement. Un tel dispositif s'avère complexe et présente l'inconvénient de retarder considérablement la formation du contrat puisque, lorsque certaines informations restent manquantes, celle-ci n'intervient qu'à l'expiration du délai de trois mois précité, le consommateur bénéficiant alors d'un délai de dix jours pour, le cas échéant, exercer son droit de rétractation.

Le projet de loi a préféré à ce dispositif un mécanisme plus simple à mettre en oeuvre, plus en harmonie avec le droit français et assurant une meilleure protection du consommateur dans la mesure où :

- au moment où il s'engage, l'acquéreur est en possession de toutes les informations prévues par la directive, contenues dans l'offre elle-même, et ce à peine de nullité du contrat ;

- il est imposé au professionnel de maintenir son offre pendant un délai de sept jours permettant au consommateur de prendre connaissance des informations fournies ;

- le consommateur dispose, à compter de l'acceptation de l'offre, d'un délai de dix jours , durée équivalente à celle prévue par la directive, pour se rétracter .

Conformément aux prescriptions de la directive, tout versement ou engagement de versement est interdit avant l'expiration de ce délai de rétractation . En outre, l'exercice de cette faculté de renonciation emporte résiliation de plein droit du contrat de crédit qui a pu être conclu pour financer l'opération. Aucune pénalité ne peut alors être appliquée. Le contrat portant acquisition du droit de jouissance est d'ailleurs formé sous la condition suspensive de l'obtention dudit crédit, si toutefois le professionnel a été préalablement informé de cette modalité de financement. Contrairement à la directive qui n'envisage que le cas où le crédit est accordé directement par le professionnel ou par un tiers mais avec l'accord de ce dernier, le projet de loi vise tout type de crédit accordé par un organisme habilité à cet effet dès lors que le professionnel a été informé de son existence.

En application de la directive, le projet de loi prévoit que l'offre doit être rédigée en français lorsque le consommateur réside en France, celui-ci bénéficiant de la faculté d'exiger qu'elle soit également rédigée dans une langue de l'État dont il est ressortissant.

L'obligation de rédiger l'offre en français vaut également lorsque le bien est situé sur le territoire français, ce qui constitue un ajout par rapport à la directive.

Lorsque l'acquéreur réside dans un autre État membre de la Communauté européenne ou est ressortissant d'un de ces États sans résider en France, l'offre est rédigée, à son choix, parmi les langues officielles de la Communauté, dans une des langues de l'État dans lequel il réside ou dont il est ressortissant. Enfin, quand le bien est situé dans un autre État membre que la France et que l'offre n'est pas rédigée dans la langue de cet État, une traduction conforme dans cette langue est remise à l'acquéreur.

Conformément à la directive, le projet de loi prévoit que toute publicité doit indiquer la possibilité d'obtenir le texte des offres et l'indication du lieu où le consommateur peut se le procurer.

Pour assurer l'application de l'ensemble de ces dispositions est prévu un double système de sanctions . Le non respect des obligations liées à l'information du consommateur concernant l'offre et la publicité, ou de l'interdiction de recevoir ou d'exiger le versement d'une somme d'argent avant l'expiration du délai de rétractation est érigé en délit puni de 200.000 F d'amende. Par ailleurs, au plan civil, les dispositions transposant la directive sont déclarées d'ordre public : toute stipulation y dérogeant doit donc être considérée comme nulle et non avenue. Le non respect des dispositions relatives aux mentions devant figurer dans l'offre, aux modalités d'acceptation de l'offre et à la langue dans laquelle elle doit être rédigée emporte la nullité du contrat.

Le projet prend en considération le caractère souvent transnational des opérations considérées pour :

- dans le respect des conventions de Bruxelles et de Lugano [14] sur la détermination du tribunal compétent, limiter la possibilité d'insérer dans le contrat des clauses attributives de compétence . Ainsi, lorsque l'acquéreur réside en France ou que le bien est situé sur le territoire d'un État partie aux conventions précitées, toute clause attribuant compétence à une juridiction d'un État non partie à ces conventions est réputée non écrite ;

- assurer l'application de la directive quelle que soit la loi applicable en vertu du droit international privé. Ainsi, lorsque le bien est situé sur le territoire d'un État membre de la Communauté européenne, il est fait application des dispositions adoptées par cet État pour transposer la directive ou, à défaut, des dispositions du présent projet de loi, si la loi régissant le contrat ne répond pas aux exigences définies par la directive. Lorsque le bien est situé hors de la Communauté, l'acquéreur résidant dans un État membre ne peut être privé des garanties offertes par la directive, quelle que soit la loi applicable, si le contrat a été conclu dans cet État ou y a été précédé d'une démarche publicitaire.

Le projet de loi procède à une transposition fidèle de la directive, en renforçant parfois les exigences qui en résultent pour une meilleure protection du consommateur.

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