III. UNE MARGE DE MANOEUVRE QUI REND DÉLICATE LA CONDUITE DE LA POLITIQUE CULTURELLE

En dépit de l'augmentation des crédits affectés au ministère de la culture, la marge de manoeuvre budgétaire de la politique culturelle demeure étroite.

L'action du ministère dans le domaine du patrimoine comme celle menée en faveur des musées en sont des exemples particulièrement significatifs . Malgré l'accroissement des dotations qui leur sont consacrées, l'Etat devra effectuer des choix afin que son intervention conserve sa cohérence et son efficacité.

A. UNE POLITIQUE DE PROTECTION DU PATRIMOINE CONFRONTÉE À L'EXTENSION DE SON CHAMP D'ACTION

1. La politique de protection du patrimoine doit dans un contexte de rigueur budgétaire faire face à l'extension de son champ d'action

a) L'extension du champ patrimonial

Il s'agit là d'une des évolutions majeures auxquelles a été confrontée la politique culturelle au cours des dernières années. Limitée à l'origine à quelques grands monuments prestigieux, le champ de l'action patrimoniale de l'Etat s'est considérablement élargie, la notion de patrimoine s'étant diversifiée. Elle s'étend désormais à des traces du passé plus variées dans leur nature comme dans leur importance.

Cette évolution, qui s'explique par une modification de la conception de l'Histoire et de l'Art, se reflète dans la politique de classement suivie au cours des dernières années.

En effet, le rythme des classements s'est considérablement accéléré au cours de la dernière décennie On classe, en effet, aujourd'hui comme jamais. Pour la période 1990-1996, le nombre de décisions de classement s'élève à 1.093 (soit à 1.800 par extrapolation pour la décennie 1990-1999). Ce chiffre est à mettre en perspective avec ceux enregistrés jusqu'ici.

Les premiers  classements intervenus dans la décennie 1840-1849 ont concerné 725 monuments, nombre qui n'a doublé qu'en 1879. Coïncidant avec l'entrée en vigueur de la loi de 1913, près de 2.500 classements ont été enregistrés de 1900 à 1919. L'accélération à laquelle on a assisté après la deuxième guerre mondiale a été suivie d'un fléchissement, le rythme s'accélérant à nouveau à partir de 1960 : 777 décisions de classement sont intervenues entre 1960 et 1969, 1.102 entre 1970 et 1979 et 1.420 entre 1980 et 1989. Au rythme des trois dernières années, on aura classé autant en 75 ans que pendant les 150 années précédentes.

En 1997, le nombre des immeubles protégés au titre des monuments historiques est de 39.600, soit 13.830 immeubles classés et 25.770 immeubles inscrits à l'inventaire supplémentaire.

Une répartition typologique de ces immeubles montre que :

- 50 % sont des édifices religieux ;

- 33 % des édifices civils dont la moitié sont des châteaux ;

- 17 % des édifices divers, dont 3,5 % des lieux militaires, 1,5 % des locaux industriels et 1 % des parcs et jardins.

Cette extension du champ patrimonial dont témoigne la politique de classement suivie au cours des dernières années ouvre à l'Etat de nouvelles perspectives qui lui permettent de compléter et de moderniser l'action qu'il conduit en faveur de la conservation et de la restauration du patrimoine. En effet, on ne protège pas de la même manière un château du XVIIIe siècle et un haut fourneau.

b) L'exemple du patrimoine industriel

Les XIVe journées du patrimoine organisées au mois de septembre dernier ont permis de constater que l'extension du champ de l'action patrimoniale de l'Etat correspondait à une attente des français.

En particulier, l'intérêt qu'il ont témoigné à l'égard du patrimoine industriel légitime les actions -encore peu nombreuses- entreprises en ce domaine. En effet, à cette occasion, il est apparu que les Français s'étaient appropriés un patrimoine qui, il y a une vingtaine d'années faisait seulement l'objet de travaux scientifiques.

Ce sont les architectes qui, les premiers, se sont intéressés dans le courant des années 70 à ce patrimoine. Des travaux scientifiques ont permis de prendre conscience de son importance historique. Les historiens des services et des techniques parmi lesquels figurent Bertrand Gilles et Maurice Daumas furent suivis, en ce domaine, par des spécialistes de l'histoire économique comme Louis Bergeron ou Denis Waranoff. Par ailleurs, des associations locales constituées la plupart du temps autour d'un site dont elles voulaient assurer la sauvegarde ou des entreprises ont également contribué à la prise de conscience de la nécessité qu'il y avait à assurer la protection de ce patrimoine.

L'Etat a entrepris une opération d'inventaire qui, entamée en 1983, ne concerne à ce jour que 12 régions sur 24 et n'est achevée que pour 9 d'entre elles. Les résultats sont saisis dans chaque région selon la méthode de l'inventaire typographique de façon à permettre leur intégration ultérieure dans la base de données Mérimée.

La qualité des connaissances accumulées varie selon les secteurs économiques concernés. Si le patrimoine des secteurs de la métallurgie, de la sidérurgie et des mines sont à peu près explorés, celui de l'industrie alimentaire ou de la construction navale restent mal connus. Aujourd'hui, entre 700 et 800 immeubles sont protégés ; certains l'ont été non sans mal comme l'usine Meunier à Noisiel ou la manufacture des Rames à Abbeville. En outre, 635 objets (bateaux, locomotives, matériel scientifique...) ont également été classés. Quelques musées à vocation scientifique et technique comme le musée des sciences et des techniques qui dépend du conservatoire des arts et métiers ou plus modestement le musée de la RATP à Saint-Mandé concourent à la présentation de cet héritage .

En revanche, le bilan de la protection et la mise en valeur de ce patrimoine fait apparaître de nombreuses destructions , en dépit de quelques opérations de réhabilitation très réussies à l'image de la Corderie royale de Rochefort classée en 1967. Depuis 1990, les destructions ont été nombreuses ; le dernier chevalement de mine de Montceau-les-Mines a été récemment abattu ; les silos des Grands Moulins de Paris étaient promis à la démolition, avant d'être dévastés par un incendie au mois d'août de cette année. Par ailleurs, de nombreux ouvrages ont été mis en caisse sans grand espoir de les voir un jour rendus au public : c'est le cas du pont métallique de Paris-Tolbiac qui a été démonté et déposé à Auneau (Eure-et-Loir) ou encore des maquettes du musée des travaux publics.

Le retard pris en ce domaine par la France est particulièrement net au regard de la situation qui prévaut en Grande-Bretagne ou en Allemagne. En Grande-Bretagne, ont été très rapidement menés des travaux d'inventaire, comme en témoignent le National Survey of Industrial monuments et le National record of Industrial monuments. Par ailleurs, de nombreux musées de sciences et techniques présentent ce patrimoine. En Allemagne, où existent également de nombreux musées de ce type, certains sites comme celui de Völklingen dans la Sarre, complexe sidérurgique datant de la fin du siècle dernier, sont désormais ouverts au public, tout en demeurant en fonctionnement.

Il semble, dans certains domaines, nécessaire de faire vite car un bâtiment industriel ou des machines qui ont cessé d'être utilisés ou de fonctionner soit sont ferraillés par le chef d'entreprise, soit se dégradent très rapidement. C'est le cas par exemple du patrimoine sidérurgique. Il apparaît aujourd'hui que très peu d'édifices postérieurs à 1850 subsistent, les opérations de sauvegarde ayant parfois échoué. C'est le cas notamment à Decazeville où un haut fourneau, d'abord installé au Creusot de 1929 à 1959, fut démoli en 1990. Au total, une vingtaine de hauts fourneaux construits entre le XVIIe siècle et le milieu du XIXe siècle sont protégés. Compte tenu de la rapidité à laquelle se dégradent les installations existantes, il est urgent de décider si, parmi les installations encore à feu en Lorraine ou venant d'être éteintes, l'unes d'elles doit être conservée, et ceci dans des conditions plus réalistes et plus cohérentes que celles qui ont conduit à la destruction des sites de Decazeville, Denain ou Longwy.

Souvent considéré comme la trace inesthétique d'un passé douloureux, longtemps négligé au nom de préoccupations faisant prévaloir les valeurs de la culture sur celles de la technique, le patrimoine industriel est désormais réhabilité. Comme le note en 1992 Louis Bergeron, chercheur du Centre de recherches des hautes études en sciences sociales (CRHESS), dans un des volumes des Lieux de mémoire : " au moment où notre société aborde une autre phase de croissance économique caractérisée sans doute par des structures industrielles radicalement différentes, il est nécessaire que notre communauté puisse comprendre qu'il est contre son propre intérêt de se couper de son passé industriel et technique, proche ou ancien . " Avec les mines, les industries sidérurgiques et les traces qu'elles ont imprimées à l'ensemble de la vie sociale dans de nombreuses régions, des pans entiers d'histoire risquent de disparaître.

En dépit de l'intérêt de ce patrimoine, des choix rigoureux qui devront être faits , notamment au vu des travaux d'inventaire dont il importera d'accélérer le rythme. Par ailleurs, votre rapporteur préconise une réflexion qui n'est pas sans lien avec la politique d'aménagement du territoire sur la nouvelle destination à donner à ces lieux qui ne peuvent être tous transformés en musée. En effet, les régions qui s'enorgueillissent d'un important héritage industriel ne disposent souvent guère d'équipements culturels ou de richesses touristiques.

Les premières opérations de conservation doivent souvent beaucoup à des initiatives individuelles organisées à l'échelon local autour de la volonté de conserver des savoir-faire ou des traditions économiques. Le mécénat semble être en l'espèce une source de financement particulièrement adaptée , les réalisations conduites en ce domaine par les entreprises pouvant être un élément non négligeable de leur politique de relations extérieures (comme le montre l'exemple de l'usine Meunier à Noisiel). Enfin, votre rapporteur émet le souhait que la Fondation du patrimoine puisse prendre en compte la nécessité de protéger ce patrimoine auquel les Français semblent de plus en plus sensibles.

2. Une marge de manoeuvre budgétaire étroite

a) La loi de programme

Face à l'accroissement du nombre de biens protégés qualifié par la commission Rigaud pour la refondation de la politique culturelle d'" irrésistible pression patrimoniale  ", il est opportun de s'interroger sur la possibilité pour l'Etat d'assumer l'ensemble de la responsabilité de la protection et de la mise en valeur du patrimoine.

La réponse semble devoir être négative. Un bilan sanitaire du parc immobilier classé dressé par la direction du patrimoine en juillet 1995 a souligné le caractère insuffisant des crédits prévus par la loi de programme de 1993 au regard des opérations considérées comme urgentes . Pour les monuments possédés par l'Etat, la moitié seraient concernés par des urgences ce qui représente un montant de travaux estimé à 8,5 milliards de francs. Les monuments n'appartenant pas à l'Etat seraient dans une situation similaire (47 % hors sites préhistoriques) mais compte tenu de leur nombre les opérations de conservation s'élèveraient à 23 milliards de francs. A supposer que les urgences soient satisfaites dans un délai de cinq ans (il semble que c'est au terme de ce délai que des dommages graves ou irréparables soient à redouter), il faudrait plus que doubler les dépenses prévues aux termes de la loi de programme.

Les crédits consacrés au patrimoine -même ramenés en 1998 au niveau prévu par la loi de programme de 1993- ne peuvent suffire à l'ampleur de la tâche.

b) Le recours à l'initiative privée

Face à l'accroissement du champ patrimonial et à un contexte de réduction des dépenses publiques, est apparue la possibilité de développer l'initiative privée afin de transformer l'intérêt nouveau des Français pour leur patrimoine en engagement actif.

A cette fin, la loi n° 96-590 du 2 juillet 1996 a créé la " Fondation du patrimoine ".

La " Fondation du patrimoine " est un organisme de droit privé dont la mission est de " promouvoir la connaissance, la conservation et la mise en valeur du patrimoine national " afin de combler les lacunes du dispositif étatique de protection du patrimoine. Elle s'attache en particulier à " l'identification, à la préservation et à la mise en valeur du patrimoine non protégé " et devait avoir pour principale mission de concourir à la sauvegarde du patrimoine de proximité non protégé.

Le capital de la Fondation composé des apports initiaux des fondateurs, qui sont de grandes entreprises dont certaines ont une expérience ancienne de mécénat culturel, s'élève à 32 millions de francs.

Le décret approuvant ses statuts et portant reconnaissance d'utilité publique de la Fondation est intervenu le 18 avril 1997. A cette occasion, les premières orientations de l'action de la Fondation ont pu être connues.

A la différence du schéma prévu à l'origine par le législateur, la Fondation ne financera pas ses actions sur les apports initiaux des entreprises donatrices mais par des appels à financement lancés au fur et à mesure que des projets seront retenus. Ceci apparaît justifié, d'une part, par la relative faiblesse du capital initial et des difficultés qui surgiraient inévitablement s'il devait être renouvelé chaque année et, d'autre part, par le souci d'assurer la transparence de l'action de la Fondation.

L'organisation qui se dessine est inspirée par les méthodes de gestion de l'entreprise privée. L'indépendance de la Fondation par rapport à l'administration -notamment par rapport à celle du ministère de la culture- semble garantie.

Ses capacités d'intervention sont pour l'heure très modestes. L'objectif final est de pouvoir en rythme de croisière dégager 2 millions de francs par an et par département qui permettraient de financer à hauteur de 20 % des projets qui feraient l'objet de cofinancement entre la Fondation et divers partenaires : propriétaires, industriels, collectivités locales.

La faible capacité d'intervention de la Fondation -au demeurant naturelle un an après l'adoption de la loi la créant- limite les possibilités de voir l'action patrimoniale de l'Etat soutenue de manière décisive par l'initiative privée.

A cet égard, il faut noter que la longue tradition d'intervention étatique en faveur du patrimoine explique notamment la relative faiblesse du mécénat culturel dans ce domaine.

La possibilité de voir se constituer en France le pendant du National Trust britannique ne peut donc être envisagée à court ou moyen terme.

3. Des choix indispensables

Ce constat impose à l'Etat l'obligation de faire des choix en matière de protection et de sauvegarde du patrimoine.

a) Vers une politique plus sélective de classement

La poursuite d'une politique de classement fondée sur des critères très larges semble compromise, sauf à dénier au classement sa valeur et à imposer aux propriétaires des contraintes qui ne seraient justifiées par aucun engagement de l'Etat. A contrario, une doctrine qui consisterait à classer trois ou quatre fois moins en ne retenant que les immeubles ou objets présentant un intérêt historique pour l'ensemble des Français serait de nature à aboutir à des destructions qui seraient autant de pertes irrémédiables pour la mémoire collective.

La politique de classement doit devenir plus sélective. Une évolution en ce sens commence à se dessiner.

La tendance à l'accroissement continu des classements a été inversée en 1995 mais cet effort est à poursuivre en agissant dès l'amont, sur les inscriptions dont le nombre annuel a doublé depuis leur déconcentration intervenue il y a dix ans. Un tel effort de rigueur est nécessaire pour éviter la dévaluation des protections ; il importe, en effet, de maintenir un haut niveau d'exigence quant à l'intérêt susceptible de les justifier. Il s'impose également du fait de la nécessité de mieux prendre en compte les effets induits par le développement des protections : charge financière accrue pour l'Etat ; extension des espaces soumis à des contraintes architecturales autour des monuments protégés...

Il serait souhaitable que la procédure du classement soit modifiée, notamment en prévoyant que la demande de classement soit prise sur un dossier contenant toutes les études préliminaires utiles non seulement au classement mais également aux travaux de conservation dont la nécessité apparaît à ce stade.

Par ailleurs, votre rapporteur juge indispensable que la direction du patrimoine se dote d'indicateurs fiables permettant une prévision raisonnée des décisions budgétaires . La connaissance des monuments et de leur état doit être améliorée. En effet, la première démarche faite en ce domaine, qui est le fichier sanitaire des monuments, est perfectible.

b) La nécessité de poursuivre les travaux d'inventaire

Une connaissance exhaustive du patrimoine est la condition nécessaire à l'élaboration de critères pertinents permettant de déterminer la nécessité d'une intervention de l'Etat .

L'Inventaire général lancé par André Malraux en 1964 a su moderniser ses méthodes mais il importe de poursuivre son adaptation aux exigences de la politique de protection du patrimoine.

Il importe notamment d'accélérer ses procédures afin d'assurer une meilleure couverture du territoire. La mise au point d'une nouvelle méthode est actuellement testée dans la région Alsace avec comme objectif l'achèvement de l'inventaire du patrimoine architectural et mobilier de l'ensemble de la région dans un délai de sept ans. A la suite de l'Alsace, la région Ile-de-France et le département de l'Ille-et-Vilaine ont entrepris une opération d'inventaire rapide.

c) Le développement de solutions alternatives au classement

Pour certains éléments du patrimoine -notamment ceux qui correspondent à des champs peu explorés de l'action étatique- il importe de recourir à des mesures de protection plus souples que le classement ou l'inscription à l'inventaire supplémentaire. C'est le cas notamment du patrimoine du XXe siècle, fragile et peu protégé.

Il apparaît à votre rapporteur que le recours à des instruments plus souples de protection comme les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager instituées par la loi du 7 janvier 1983 sont une réponse appropriée pour sauvegarder ce patrimoine menacé par les évolutions rapides de l'urbanisme.

Les crédits consacrés par le projet de loi de finances à ces mesures de protection semblent encore en - deçà du niveau nécessaire comme l'a indiqué plus haut votre rapporteur.

d) La nécessité de maintenir une capacité d'intervention substantielle de l'Etat

L'effort consenti en faveur du patrimoine pour l'exercice 1998 doit être poursuivi au cours des prochaines années sous peine de voir disparaître des pans entiers de notre histoire -et certains parmi les plus remarquables.

Le sort réservé par les lois de finances aux engagements contenus dans la loi de programme amène votre rapporteur à s'interroger sur la pertinence de l'intervention du législateur en ce domaine.

Rappelons qu'en 1996, 20 % des crédits inscrits avaient été annulés, et qu'en 1997, les dotations prévues par la loi de programme ont été réduites d'un tiers compte tenu de l'étalement sur une année supplémentaire des engagements pluriannuels de l'Etat .

La programmation pluriannuelle des dépenses consacrées au patrimoine monumental, même si elle doit trouver ses limites dans le principe de l'annualité budgétaire, n'est pas pour autant dénuée de sens.

Les lois de programme ne concernent que quelques secteurs de l'action gouvernementale. Pratiquée depuis 1988, dans le domaine du patrimoine monumental, elles traduisent la volonté du Gouvernement d'accorder une priorité particulière aux investissements sur les monuments historiques. Le principe d'annualité budgétaire affirmée à l'article 2 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances prive, certes, les lois de programme d'effet contraignant. Néanmoins, elles constituent un gage de la continuité de l'engagement de l'Etat en faveur du patrimoine , particulièrement aux yeux des entreprises du secteur de la restauration des monuments historiques. Par ailleurs, la loi de programme accentue l'effet multiplicateur de la dépense consacrée au patrimoine. Sûres de pouvoir compter sur un effort de l'Etat, les collectivités locales et les propriétaires privés peuvent plus aisément s'engager dans des opérations de restauration.

Cependant, si le principe de la loi de programme ne doit pas, en lui-même, être remis en cause, des modifications quant à son contenu peuvent être envisagées . Notamment, il semblerait opportun d'y inclure les crédits d'entretien. Leur niveau, certes réévalué en 1997 est insuffisant pour permettre de remédier à la dégradation de l'état du patrimoine ; seul le maintien à un niveau élevé de ces crédits permettrait d'assurer la conservation normale du patrimoine et de ce fait, de réserver les crédits de travaux à leur destination réelle. En outre, ils subissent chaque année des gels et des annulations : ainsi, en 1997, 11,5 millions de francs ont été annulés sur le chapitre 35-20 article 20 (entretien des monuments historiques appartenant à l'Etat) et 4,1 millions de francs sur le chapitre 43-50 (entretien des monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat). Pour 1998, les crédits d'entretien du patrimoine monumental et des bâtiments affectés à la direction du patrimoine s'élèvent à 63,179 millions de francs, soit une reconduction en francs courants. Quant à ceux consacrés à l'entretien des monuments historiques n'appartenant pas à l'Etat, ils s'établissent à 59,06 millions de francs pour 1998 (soit + 15,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997).

Une meilleure prise en compte de ce type de dépenses permettrait une intervention préventive moins coûteuse qu'une action de restauration. D'autre part, les procédures administratives les régissant sont infiniment moins lourdes que pour les opérations de restauration.

Il serait également souhaitable que la loi de programme soit l'occasion d'une réflexion sur les orientations de la politique de l'Etat en faveur du patrimoine qui pourraient ainsi faire l'objet d'un débat parlementaire approfondi.

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