EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue sous la présidence de M. Jean Huchon, vice-président, le mercredi 12 novembre 1997, la commisison a examiné les crédits consacrés à l'aménagement du territoire dans le projet de loi de finances pour 1998.

M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a tout d'abord rappelé que les crédits inscrits au budget de l'aménagement du territoire atteignaient 1,79 milliard de francs, en hausse de 6 % ; que les autorisations de programme s'élevaient à 1,62 milliard de francs, les moyens des services s'établissant à 88 millions de francs.

Il a précisé que les crédits de la section d'intervention du Fonds national d'aménagement du territoire (FNADT) diminuaient de 1 % et représentaient 291 millions de francs et que ceux de la section d'investissement du même fonds baissaient, tant en crédits de paiement qu'en autorisations de programme, respectivement de 1,1 et de 1,3 milliard de francs.

Il a estimé que la croissance du budget de l'aménagement du territoire s'expliquait essentiellement par la hausse des crédits de la Prime d'aménagement du territoire (PAT) tant en autorisations de programme qu'en crédits de paiement. Il a indiqué que cette augmentation constituait, dans une large mesure, un " effet d'annonce ", car ces crédits n'étaient jamais totalement consommés, notamment du fait des réticences des services du budget. Il a estimé que seule une volonté politique permettrait d'accroître le montant des crédits engagés au titre de la PAT. Il a d'autant plus regretté la réduction des crédits du FNADT que celle-ci ne se traduisait que par une économie très modeste.

Evoquant les problèmes techniques posés par la PAT, le rapporteur pour avis a déclaré que celle-ci n'était pas adaptée aux zones rurales et souhaité une réforme permettant l'attribution de cette prime dans toutes les zones de revitalisation rurale (ZRR). Il a mentionné les incohérences qui résultaient de l'attribution d'aides au tourisme sur la base des zonages PAT.

Il a évoqué la situation du réseau à l'étranger de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR) qui emploie des coopérants et des volontaires du service national en entreprise. Il a souhaité que le projet de loi relatif aux volontariats permette de pourvoir au remplacement et au financement des postes budgétaires antérieurement occupés par des appelés du contingent.

Abordant la question des fonds qui concourent au financement de l'aménagement du territoire, le rapporteur pour avis a estimé que le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) était probablement davantage utilisé comme un outil de débudgétisation que comme une aide au rééquilibrage du territoire. Puis, il a fait part des très vives inquiétudes qu'il nourrissait en ce qui concerne la réduction continue des crédits du Fonds de gestion de l'espace rural (FGER), dont la dotation ne s'éleve qu'à 140 millions de francs pour 1998. Il a jugé souhaitable de doter le FGER, en sus de la ligne existante rattachée au budget de l'agriculture, d'une ligne relevant du budget de l'aménagement du territoire, laquelle serait exclusivement consacrée au développement des activités industrielles et artisanales dans les zones de revitalisation rurale.

S'agissant du Fonds national de développement des entreprises (FNDE), M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a rappelé que le précédent Gouvernement avait décidé de le doter d'un milliard de francs sur deux ans, dès 1997, grâce aux recettes de privatisation, et il a constaté que le nouveau Gouvernement n'envisageait, semble-t-il, de doter le fonds qu'à partir de 1998.

Le rapporteur pour avis a ensuite évoqué les problèmes posés par les perspectives de réforme des fonds structurels européens, dont toutes les régions françaises bénéficient. Il a indiqué que le nouvel objectif 1 serait vraisemblablement réservé aux régions dont le produit intérieur brut par habitant était inférieur à 75 % de la moyenne communautaire, ce qui aurait pour effet d'exclure, par exemple, la Corse et le Hainaut. Il a rappelé que l'apport des fonds européens sur le territoire français représentait cinq à six fois le budget de la DATAR et déploré les lenteurs administratives limitant l'utilisation des crédits et donnant à Bruxelles le sentiment que la France n'en n'avait pas réellement besoin.

Puis M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a présenté l'état d'application de la loi d'orientation n° 95-115 pour l'aménagement et le développement du territoire. Il a souligné l'ampleur de la tâche accomplie par le précédent Gouvernement, qui s'était traduite par la publication de plus de 40 décrets et de près de 50 autres textes d'application.

Il a rappelé les décisions prises à l'occasion du Comité interministériel d'aménagement du territoire (CIADT) tenu à Auch le 10 avril 1997. Parmi celles-ci, il a mentionné la présentation du projet de Schéma national d'aménagement et de développement du territoire (SNADT) que le nouveau ministre avait décidé de modifier. Il a souligné que le SNADT constituait une pièce essentielle du dispositif d'aménagement du territoire, puisqu'il conditionnait l'élaboration des schémas sectoriels et des directives territoriales d'aménagement (DTA). Il a souhaité d'une part que le Parlement soit informé de l'état d'avancement de ces DTA et, d'autre part, qu'elles ne soient pas l'occasion d'une remise en cause des limites départementales existantes.

Parmi les autres décisions importantes du CIADT d'Auch, M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a mentionné l'annonce d'une modification des dispositions relatives aux aides des collectivités locales à l'immobilier d'entreprise. Il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles le décret correspondant n'était toujours pas paru. Il a également rappelé la décision prise alors de proroger le moratoire sur les services publics, et l'intention exprimée par l'actuel ministre d'élaborer des schémas de services. Le rapporteur pour avis a également évoqué le plan pour le monde rural qui devait être mis en oeuvre à l'automne et regretté que le Parlement ne dispose pas d'une analyse fine de l'effet des mesures d'exonération votées en 1995 en faveur des zones rurales, alors même que leur coût total était estimé à 1,3 milliard de francs. Il a souhaité qu'un bilan d'application de la loi d'orientation précède le dépôt du projet de loi tendant à la réformer.

Evoquant la politique de délocalisation des emplois publics, dont le CIADT d'Auch avait confirmé les orientations, M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a souligné que celle-ci avait permis de transférer, depuis 1991, 12.500 emplois de Paris vers la province. Il a préconisé que les délocalisations se poursuivent " en cascade " entre les métropoles régionales et les chefs-lieux de département et de canton.

Abordant la réforme de l'organisation territoriale, le rapporteur pour avis a souhaité que les pays ne se transforment pas en nouvelles structures institutionnelles, et il a souhaité connaître les modalités selon lesquelles le Gouvernement comptait renforcer les pouvoirs des agglomérations.

M. Josselin de Rohan, après avoir souligné son accord avec le rapporteur pour avis quant au flou et à l'ambiguïté de la politique de l'actuel Gouvernement en matière d'aménagement du territoire, a rappelé que l'élargissement de l'Union à des pays économiquement moins avancés -et qui auraient donc vocation à bénéficier des fonds structurels- rendait inéluctable une nouvelle réflexion sur les zonages. Il a souhaité, en conséquence, que ceux-ci soient délimités de façon plus pertinente et plus fine.

M. Jean Huchon, président, a souscrit à ces observations, estimant que les zonages n'étaient pas toujours appropriés à la réalité des besoins locaux.

Sans méconnaître la nécessité d'une réforme, M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a jugé qu'il importait aujourd'hui d'utiliser au mieux les fonds disponibles, notamment en rationalisant les procédures administratives internes, afin d'éviter l'allongement des délais dans l'engagement des crédits européens. Il a observé que les zonages actuellement en vigueur comportaient des anomalies qu'il conviendrait de supprimer en affinant leurs contours, notamment afin d'y inclure d'autres zones de revitalisation rurale.

M. Jean-Paul Emorine a indiqué que la loi de 1995 avait fixé un cadre et que tous les outils étaient en place pour agir, mais il a déploré que le budget de l'aménagement du territoire ne représente qu'un millième environ du budget de l'Etat. Il a suggéré que les crédits non utilisés de la PAT puissent venir augmenter ceux du FNADT. Il s'est dit préoccupé de l'évolution des crédits du FGER et a souhaité que les collectivités locales puissent en bénéficier, par exemple pour remettre en état les chemins d'exploitation agricole. Déclarant partager les préoccupations de la commission sur les fonds structurels et sur la nécessité de réformer les zonages, il a rappelé que l'Allemagne s'interrogeait sur le montant de sa contribution à la Communauté, trois fois supérieur aux fonds que ce pays recevait des instances européennes. Il a proposé de fusionner l'objectif 2 et l'objectif 5b et de distinguer, au sein des nouveaux zonages, les crédits destinés aux villes et les crédits destinés au monde rural.

M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a jugé que la proposition de transférer des crédits inutilisés de la PAT vers le FNADT méritait d'être étudiée. S'agissant de la réforme des objectifs 2 et 5b, il a souhaité que l'on fusionne ces crédits tout en maintenant des zonages distincts, afin de répartir les aides en fonction des besoins réels des territoires auxquels elles étaient destinées.

M. Hilaire Flandre a jugé que l'on considérait à tort l'urbanisation comme inéluctable et que l'on ne prenait pas assez en compte les problèmes de l'espace rural. Il a ajouté que la faiblesse des crédits de l'aménagement du territoire était préoccupante et a dit sa crainte que la création d'une seconde ligne du FGER n'en dénature la spécificité, avant de s'interroger sur l'efficacité des zonages actuellement en vigueur.

M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a souligné qu'il était lui aussi très soucieux de ne pas diminuer les moyens financiers du FGER dont les agriculteurs sont bénéficiaires.

M. Georges Gruillot a déploré la complexité des procédures administratives d'octroi des fonds européens avant de souligner que les zonages de la PAT étaient susceptibles d'entraîner des effets pervers en empêchant la création d'entreprises dans des secteurs non aidés situés à leur périphérie. Il a également émis des réserves sur la politique générale conduite par la DATAR.

Répondant à cette intervention, M. Jean Pépin, rapporteur pour avis, a estimé qu'il était plus que jamais souhaitable de simplifier les procédures requises pour l'octroi des aides européennes, la non-consommation de ces crédits tendant à entretenir l'idée que la France n'en avait pas besoin.

Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la commission a ensuite émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à l'aménagement du territoire dans le projet de loi de finances pour 1998, le groupe socialiste votant pour leur adoption.

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